Est-ce vraiment fichu ? Il y a quelques jours, notre rédacteur en chef nous a écrit : « Bon courage pour les premiers cours (on dit que si on se rate c’est mort pour toute l’année) ».
Vrai ou non ? Légende ou fait inéluctable ?

quel chahut
Ça peut nous arriver à tous. Souvent au début de notre carrière, ou alors en plein milieu parce qu’on était fatigué dès les premiers jours. D’autres fois, c’est une classe particulièrement pénible qu’on n’avait pas vu venir. Quelle que soit la raison, parfois il faut bien le constater, au bout de trois semaines la situation semble établie : les élèves font du bruit, sont chahuteurs, répondent volontiers. Notre classe est devenue un vrai bazar et on passe plus de temps à faire de la discipline qu’à enseigner. L’épuisement peu à peu nous gagne, on a peur de rentrer dans notre salle, le stress nous saisit rien qu’en regardant nos élèves et, l’angoisse sourde dans nos têtes, on se demande à chaque début de cours ce qu’il va bien nous arriver…

La situation nous a échappé, on est mi-septembre, y’a-t-il encore quelque chose à sauver ?

La première décision à prendre, c’est déjà d’essayer. Dans tous les cas, sans réaction, la situation ne fera qu’empirer. Reprendre les choses à la base. Pour cela il faut être en pleine forme. Agir sans préparation, lors d’un cours de fin de journée ou quand on a déjà 4 heures dans les pattes, c’est prendre le risque d’un nouvel échec. On choisit donc un début de journée, si possible un lundi. Et on décide de tout remettre à plat. Il faut créer un changement dans la classe, que les élèves aient l’impression de redémarrer à zéro. Il faut donc casser le rituel habituel.

Quelques exemples possibles selon ce que vous faisiez jusque-là :

– Les mettre en rang dans le couloir et en silence avant de rentrer. Ce n’est pas facile, ils vont bavarder, bouger, faire du bruit mais insistez jusqu’à ce que le silence se fasse (prévenez vos collègues voisins en amont de votre décision, sinon l’un d’entre eux risque de sortir en râlant pour faire cesser ce cirque et cela ruinera votre autorité !).

– Les faire défiler en rentrant dans la classe devant vous : se mettre contre la chambranle de la porte en les gênant un peu afin de les obliger à rentrer les uns derrière les autres (les conversations cessent alors souvent d’elles-mêmes, faute de combattants).

– Exiger qu’ils restent debout et ne s’assoient que quand vous leur demandez, une fois le silence établi. S’ils avaient un placement libre, poser au préalable sur les bureaux un petit papier avec leur nom et, avant de les laisser entrer, faire circuler dans le rang un plan de la classe afin qu’ils visualisent à quel endroit ils devront s’installer. Bien sûr, vous aurez longuement réfléchi à leur disposition. Parfois, le secret de la tranquillité peut être juste dans un placement judicieux. On essaie, autant que faire se peut, de ne pas séparer des élèves dont le comportement était exemplaire… Une façon de les récompenser. Une solution est souvent de mixer garçons et filles. Le plan de classe, ça marche à tous les niveaux. Même en terminale !

– Ensuite, il est important de leur montrer que vous avez établi de nouvelles règles. Les afficher au préalable au tableau par exemple ou leur distribuer une feuille, sorte de contrat qu’ils signent, afin qu’ils ne puissent pas vous opposer « mais m’dame, vous l’aviez pas dit ».

– Et ensuite faire respecter scrupuleusement ces nouvelles règles. Ne surtout pas hésiter à relever le premier élève fautif, même dans la minute qui suit, en préparant une réponse très graduelle : une simple remise en ordre, puis des punitions. Certains collègues vous diront « il faut immédiatement mettre une retenue » (si votre établissement le prévoit). Je ne suis pas d’accord, il me semble qu’aller tout de suite aux punitions les plus fortes qu’on puisse dégainer, c’est se priver de tout le reste ! D’ailleurs les retenues, j’en mets vraiment rarement, et alors je les gère souvent moi-même, sur une pause, en corrigeant…

Quand vous allez commencer le cours ou donner une consigne, les premiers élèves essayeront très vite de désobéir. Ça doit être, comme dans Star Wars, le côté obscur de la force qui les attire. Soyez donc éclairé ! Soyez aussi vigilant qu’un Jedi, repérez-les immédiatement pour les arrêter en sortant l’artillerie (vous ne devez pas y réfléchir à ce moment là ! Toute bonne guerre se prépare !). Si vous en laissez, ne serait-ce qu’un, commencez à bavarder sans réagir, le bazar se réinstallera très vite.

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– Tenter à tout prix d’éviter la confrontation dans la classe. Tout élève qui commence à répondre doit être immédiatement isolé. Soit en l’excluant de cours avec un travail à faire (surtout pas sans, sinon il serait trop content !) si votre administration vous l’autorise, soit en le déplaçant sur une table près de vous (parfois je l’envoie se calmer dans le couloir, porte ouverte, à portée de ma vue mais pas de ses camarades). Dans tous les cas, reportez la discussion en tête-à-tête à la fin du cours. Il est important de ne jamais rentrer dans l’escalade des mots en classe. L’élève se sent dans l’obligation de remporter la lutte. Vous, ça va vous stresse et après vous serez beaucoup moins à même de reprendre votre enseignement.

– Toujours prévoir dans votre cartable un travail écrit. S’il y a quelques débordements, tracez un trait dans l’angle du tableau sans un mot. Quand vous êtes à trois traits par exemple (n’oubliez pas que les règles doivent être explicites), ils savent qu’il se passera quelque chose : soit vous les retiendrez quelques minutes à la récréation (je fais alors sortir les élèves nominativement, en débutant par les plus calmes. Cela me permet de finir avec les turbulents et éventuellement, d’en remettre une couche juste pour eux, et cela évite le côté « punition » pour les élèves tranquilles qui se sentent reconnus). Soit vous arrêtez immédiatement le cours et vous leur donnez le devoir écrit. Certes cela vous demandera plus de travail à la maison, mais il est plus facile de limiter le chahut en surveillant qu’en faisant cours. Ce qui est important, c’est qu’ils réapprennent à entendre le silence dans votre classe. À vous ensuite de voir s’ils se sont bien comportés. Il faudra alors que le travail puisse favoriser par une note ceux qui ont été calmes.

– Il y a des tas de choses à essayer, mais dans tous les cas, il faut y réfléchir avant. Être très clair avec ce que l’on veut changer dans son cours. Puis avoir l’énergie nécessaire pour s’y tenir. Et surtout, surtout… opposer au désordre ou à la désobéissance le calme et l’ordre que l’on doit représenter. Plus le prof s’énerve, plus les élèves en profitent. On est un acteur, on joue une pièce de théâtre, on est sur scène. On n’est plus soi-même (ça, c’est pour les classes modèles !), on est ce que l’on doit représenter. L’élève bouillonne ? On l’apaise par notre impassibilité, on ralentit notre débit. Il s’agite ? On le regarde droit dans les yeux… Le bruit monte dans la classe ? Chut ! Les regarder sans rien dire. Parfois il faut quelques minutes pour qu’ils remarquent qu’il se passe quelque chose. Mais dans tous les cas, à un moment donné, les élèves commencent à se regarder, puis un silence interrogatif arrive, et là on peut décider de ré-intervenir.

– Et pour finir, discuter, toujours et encore. La plupart des situations les plus tendues, je les ai résolues en prenant l’élève en tête-à-tête à la fin du cours. C’est archi-connu : ces élèves difficiles ont souvent besoin d’attention. Parfois ils nous énervent tellement qu’on voudrait les passer par la fenêtre, on n’en a pas le droit, tout le monde le sait ! Alors rappelons-nous que ce sont avant tout des enfants qui, sans doute, sont malheureux ! Leur parler, les écouter, parfois ça suffit à les faire changer…

Mais pour envisager tout ceci, le maître mot de notre métier c’est l’énergie. Alors un peu de vitamine C, car il faut tenir !

Bon, tout bien réfléchi, si on se rate à la rentrée, ce n’est peut-être pas perdu pour l’année !!!
Bon courage et bonne année scolaire à tous !

PS : Pour réfléchir au lien petits chahuteurs/élèves en souffrance et si vous ne craignez pas la psycho : Les réactions psychiques à l’échec scolaire

Rachelle

5 réponses

  1. Expérience en classe ce mardi 17, un élève très gênant ne tient pas en place, lance des petits élastiques sur les autres, puisqu’il n’est pas à sa place je prends son manteau et le met à la mienne, ce n’est pas conseillé de prendre les affaires d’un élève mais cette fois ça a marché. Evidemment il a essayé de le récupérer, je lui ai dt en anglais (j’ai peu de vocabulaire mais un très bon accent ça impressionne les collégiens qui pensent qu’une professeur d’Arts plastiques ne connait pas de langues étrangères) qu’il devait retourner à sa place, se tenir calme, puis je lui demande en français de m’écrire 10 fois « si je quitte ma place je perds mes affaires », s’il ne le fait pas je lui rendrai son manteau à la fin du cours chez la CPE. Il a beaucoup résisté mais a finalement fait les 10 lignes et a récupéré son manteau à la fin de l’heure sans passer par la case CPE.
    Et moi je ne me suis pas énervée et j’ai apprécié de parler en anglais. Try it, you’ll ike it !, en allemand ou en espagnol ça va aussi.

  2. bonjour,
    jeune prof, je n’en suis pas vraiment au chahut mais la situation n’est pas toujours facile dans certaines classes. merci donc de ces quelques pistes que je vais chercher à mettre en oeuvre

  3. Des idées à expérimenter effectivement, enfin surtout dans le secondaire, car en primaire on peut parfois attendre indéfiniment sans que le chahut ne dérange personne et qu’aucun n’ait conscience qu’on attend le silence…
    Cependant, je ne comprends pas bien l’idée de récompenser un bon comportement par une note…

    1. Bonjour!
      dans mon esprit, ce n’est pas récompenser un bon comportement par une note mais plutôt : des élèves ont été pénibles et, A CAUSE d’eux, la classe a dû travailler par écrit au leiu du travail de classe normal. Il me semble donc judicieux, SI ce travail écrit est noté de ne pas pénaliser les élèves qui n’ont rien à se reprocher dans leur comportement, sinon, je trouve cela injuste et ça risque ensuite d’amener des animosités entre élèves… le système reste à trouver sans tricher sur la note, par exemple ne pas la compter… c’est à voir en fonction effectivement en fonction de la classe…En tous cas, en aucun cas, je ne note un comportement! En revanche, souvent, je mets une note de participation en fin de trimestre dans laquelle, bien sûr, l’attention de l’élève est comptée par un système de « points » perdus ou gagnés. dans certaines classes à « petit » chahut, ça marche très bien!

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