Certifiés VS contractuels

L’autre jour, sur une page Facebook, je lis le commentaire d’une collègue contractuelle bien remontée. Et pour cause, cette dernière relatait qu’une titulaire, devrais-je dire, une certifiée conforme estampillée EN made in France, comme moi, venait de s’en prendre à elle en salle des profs. Mots peu sympathiques à l’égard de cette demoiselle, qui a fait le choix, ou non, d’être contractuelle.

coup-de-griffe

Nombreux commentaires suivaient, de titulaires écœurés et peinés par les mots prononcés. Entre tous ces posts, je m’arrête, particulièrement, sur l’un : un collègue lui expliquait que, finalement, elle n’était pas « certifiée ». Que si elle n’avait pas le sésame, c’était bien pour quelque chose. Que nous, titulaires, représentions l’institution, et il ajoutera « les savants ». Mon sang n’a fait qu’un tour (p’t’être deux d’ailleurs !), je n’ai pas pu retenir mes paluches !

Comment peut-on penser cela ou comment ne puis-je pas aller dans son sens ? Je reste avec ces deux interrogations.

Questionnements

D’un côté, j’arrive à me dire que le CAPES valide un niveau, des compétences, des savoirs, mais valide-t-il notre capacité à enseigner ? Sommes-nous tous de bons enseignants ?

Je me questionne… Je m’essaye à la comparaison : un interne en médecine qui validerait l’ensemble de ses stages mais qui n’arriverait pas à soutenir sa thèse, cela fait-il de lui un mauvais médecin ?  Est-ce que, dans la nuit du dimanche au lundi, après l’obtention de son diplôme, il devient un bon docteur ? Je sais que la comparaison est osée mais j’essaye de comprendre…

Un contractuel qui a « bourlingué » durant dix, quinze ans de collège en collège, qui a été inspecté, qui a un dossier impeccable, n’a-t-il pas les compétences requises ? Lorsqu’il obtient le CAPES, devient-il dans la nuit du dimanche au lundi un bon enseignant ?

Pendant dix ans en tant que contractuelle, ai-je sacrifié des élèves ? Ai-je trompé mes chefs ? Ai-je lu mes rapports en ayant pris une pilule hallucinogène ?

Est-ce qu’en ayant le CAPES, j’ai été subitement meilleure ? Est-ce que grâce à l’année de formation (rien que d’y penser, j’en ai des frissons !) j’ai pu découvrir mon métier, être formée ? Même sous la torture, je ne parlerai pas de cette année, de cette si looooonnnguuuue année.

Je risque de me faire des ennemis en écrivant cela. Mais je ne peux plus entendre que les contractuels « sont de la ….. (mot censuré pour ne pas heurter votre sensibilité) ».

Le jeune loup, qui écrivait cela, défendait l’institution, et je ne peux pas lui en vouloir. Mais, il a repris de plus belle, en expliquant qu’il avait dû reprendre tout le travail qui avait été fait par son remplaçant contractuel, parce que c’était une catastrophe. Qu’aurait-il dit, s’il avait su que les cours donnés avaient été dispensés par un TZR ? Sa vision aurait-elle changé ? Je le pense.

Je ne remets pas en cause le concours mais la capacité que certains ont de juger, de décrédibiliser celui ou celle qui n’a pas le CAPES ou le suprême GRAAL, l’AGREG.

N’avons-nous pas un rôle à jouer ? Ne sommes-nous pas contents lorsqu’ils viennent nous remplacer ?

Chacun fait ce qu’il peut

Oui, ils font comme ils peuvent, avec les moyens qu’on veut bien leur donner, avec le salaire qu’on leur donne (et quand il n’y a pas de retard !). Très souvent, c’est grâce à ces expériences sur le terrain qu’ils trouvent la rage de passer le concours, qu’ils prennent confiance. Et ne venez pas me dire qu’ils n’ont pas un assez bon niveau : souvent, ils ont un Master en poche, là où certains « certifiés » n’ont qu’une licence.

Alors, oui, certains arrivent du premier coup à rafler le trophée… d’autres, pour diverses raisons, mettent du temps. Je reste écœurée lorsque j’entends un jeune se vanter d’avoir obtenu le CAPES et d’être un « savant » parce qu’il a l’AGREG. Cela n’en fait ni un bon ni un mauvais prof. Il a le niveau. Oui, cela est indéniable.

Cela me fait penser à ce qu’on peut entendre sur les profs (lorsqu’on s’abstient de dire qu’on en est un !) au hasard d’une discussion avec des connaissances : « Ces profs qui n’ont pas d’enfant et qui te disent comment faire… ils ne doutent de rien… ». A contrario : avoir un enfant est-il gage d’être un bon parent ? Un bon éducateur ? Après plus de dix ans… je peux affirmer l’inverse…

Alors, au lieu d’enfoncer les contractuels, c’est à nous de les motiver pour passer le concours. On peut donner des coups de main, des cours, les faire venir dans nos classes, prendre le temps de boire un café et discuter pédagogie…

Joie à celui qui ne doute pas de lui, qui a eu une scolarité sans anicroche, qui a enchaîné les concours avec brio. Bravo même ! Nous n’avons pas tous les mêmes capacités face aux examens.

Donner confiance plutôt que d’enfoncer, relever plutôt que rabaisser, non ? Oui, certains n’ont rien à faire là. N’en est-il pas de même pour « nous autres » ? Ne suis-je pas une mauvaise prof pour ma délicieuse collègue qui ne peut pas me voir en peinture ? Oui mais j’ai le CAPES me direz-vous, non ?

Jeune demoiselle, battez-vous, armez-vous, prenez confiance en vous, en vos capacités, si vous aimez ce que vous faites. Les vilaines réflexions vous porteront là où vous devez être : devant un jury puis devant vos élèves !

Une chronique de Tara Tata

Une réponse

  1. J’ai connu (dans le Var, je ne donnerai pas plus de précisions…) un professeur agrégé d’espagnol, dont tous les collègues s’accordaient à dire qu’il était un puits de science dans son domaine.
    Le seul problème, c’est que ses élèves (de lycée, même en terminale) jouaient… au foot en classe !
    Nous avions cours de philo dans la salle contigüe et profitions allègrement du tohu-bohu qui régnait dans sa classe tandis que l’on entendait presque le vol des mouches de notre côté.
    Ce pauvre homme s’est ainsi fait chahuter jusqu’à la retraite, dans un lieu où il n’était pas du tout à sa place. Ses compétences étaient livresques mais il étaient incapable de gérer quelque groupe que ce soit.

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