Les manifestations lycéennes et étudiantes de 1986

Il y a 30 ans, dans la nuit du 5 au 6 décembre 1986, l’étudiant Malik Oussekine (1964-1986) est mort rue Monsieur-le-Prince à Paris, à la suite des coups assénés par des « voltigeurs », une unité policière à moto, employée lors de manifestations. Étudiants et lycéens étaient en grève et manifestaient pacifiquement depuis la mi-novembre dans toute la France, pour obtenir le retrait du projet de la loi de réformes des universités dite « Devaquet », du nom du ministre délégué auprès du ministre de l’Éducation nationale. La veille, une délégation d’étudiants avait rencontré les ministres, qui leur avaient signifié le refus de retirer le projet de loi. Les étudiants avaient maintenu leur mobilisation. Après le décès de Malik, Alain Devaquet démissionna immédiatement et son projet de loi fut entièrement retiré par le gouvernement.

Paris quartier latin, 11.11.1986
Photo extraite du documentaire Devaquet si tu savais
de Franck Schneider et Francis Kandel

En décembre 2006, Régis Présent-Griot, dans un éditorial de La Gazette de Berlin intitulé « Basse voltige », mettait des mots précis et émouvants sur le choc qu’a représenté, pour une grande partie d’une classe d’âge, la mort de l’un de ses membres, victime d’un acte d’une violence injustifiable, d’autant plus que la mobilisation avait été caractérisée par un esprit joyeux et l’espoir d’agir tous ensemble. C’est bien cet esprit que soulignaient les médias, comme on le voit dans le reportage de Rachid Arhab, diffusé dans le journal télévisé de France 2 du 4 décembre 1986, présenté par Claude Sérillon (archive INA « Jalons », avec la transcription et des données sur le contexte) :

« Une marche colorée, un peu folle, avec des slogans et des pancartes toujours très originaux, bref de l’imagination et toujours, toujours la même détermination. » RA

http://fresques.ina.fr/jalons/fiche-media/InaEdu01074/manifestation-lyceenne-et-etudiante-contre-le-projet-de-loi-devaquet.html

 

En janvier 1987, Ignacio Ramonet dressait dans le Monde diplomatique un portrait plutôt juste de cette génération, confrontée à la généralisation de la précarisation des emplois, des « petits boulots ». Il y évoquait aussi les attentats de 1986, dont celui de la rue de Rennes, le 17 septembre, devant le magasin populaire Tati, et un certain climat de suspicion à l’égard de l’ensemble de la communauté musulmane qui commençait à se faire sentir. Son analyse des bienfaits de SOS-Racisme et de l’intégration des jeunes issus de l’immigration, dénommés « beurs » (double verlan, de « rebeu », issu du mot « arabe ») peut paraître aujourd’hui bien dépassée, mais elle traduit très bien un certain état d’esprit et les espoirs de cette époque, où les jeunes qui portaient le badge en forme de main « Touche pas à mon pote » voulaient affirmer leur désir d’une société tolérante, accueillante, solidaire et ouverte au monde.

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