Guinness, Michelin: quand de grandes marques deviennent des annuaires

Le Guinness Book of Records a 60 ans

C’est l’un des livres les plus vendus au monde. Le Guinness Book répertorie toutes sortes de records, du plus scientifique au plus farfelu. Il fête ce mois-ci ses 60 ans : la première édition était parue le 27 août 1955; depuis, le livre s’est écoulé à plus de 130 millions d’exemplaires. L’édition 2016 (en vente le 10 septembre prochain) marquera le 60e anniversaire de ce livre qui recense plusieurs records reconnus au niveau international.

guinness book a 60 ansA la base, la Guinness est une bière noire, coiffée d’une épaisse mousse blanche, qu’au moins tous les Irlandais connaissent. Mais depuis 1951, ce breuvage a aussi à voir avec l’édition. En effet, Sir Hugh Beaver est alors directeur de la brasserie historique Guinness fondée en 1759 à Dublin. Alors qu’il débattait après une partie de chasse avec des amis pour savoir si le pluvier doré était plus rapide en vol que le tétras (!), ils se retrouvèrent dans l’incapacité d‘apporter une réponse, même après avoir consulté les ouvrages de référence sur la question.

Sir Hugh Beaver décida alors de lancer un ouvrage qui serait présent dans les 81 000 pubs (Public Houses) de Grande-Bretagne et d’Irlande. Le livre comporterait les réponses à une multitude de questions… Norris et Ross McWhirter, à la tête d’une agence de documentation à Londres, furent chargés de compiler les données qui figureraient dans ce qui allait devenir le premier Guinness Book of Records.

C’est ainsi que depuis 1951, la société Guinness World Records étudie, valide, invalide des milliers de records. Chaque année, plus de 40 000 records dans tous les domaines sont mis à jour par les équipes Guinness World Records; et 3 000 sont sélectionnés pour paraître dans le livre événement édité par Hachette Pratique. Pour savoir comment cela se passe, écoutez l’interview suivante (sur France info le 28 août 2015):

A noter que chaque 12 novembre est organisée la journée du Guinness World Records au cours de laquelle sont réalisées et recensées des tentatives de records du monde.

Ça roule toujours pour Michelin…

L’aventure du Guinness Book of Records n’est pas sans rappeler celle du guide Michelin. Après tout, dans les deux cas, une grande marque se lance dans l’édition avec le succès que l’on sait.

Surnommé « Guide rouge » en raison de la couleur de sa couverture, « le Michelin » est né en 1900. Les pneumatiques Michelin (la marque au bibendum) l’offraient aux premiers conducteurs pour leur donner des informations utiles autour des routes: garagistes, hôtels et bien sûr restaurants. A l’époque, ces guides avaient été édités pour dédramatiser les voyages en automobile qui étaient de vraies aventures. On y trouvait les lieux où les pneus étaient stockés, les dépôts d’essence, les hôtels et les garages qui étaient bien souvent les forgerons du coin.

Aventure Michelin - Clermont-Ferrand - 30/01/2012 - photos Bastien et François BAUDIN / Agence AUSTRALDepuis, le succès ne s’est jamais démenti, grâce au sérieux des inspecteurs, anonymes et qui paient leur addition. Le guide existe aujourd’hui dans 23 pays. Le français recense plus de 8 800 adresses, dont 10% d’étoilés. A consulter ou feuilleter sans modération !

A ce propos, on se souvient de l’interprétation mémorable de Louis de Funès dans L’aile ou la cuisse: il est Charles Duchemin, directeur d’un guide gastronomique mondialement connu (référence au célèbre guide Michelin) et qui a l’habitude de tester incognito (en se déguisant) les restaurants de France. A voir ou à revoir !

Pour info : un guide Michelin datant de 1900 a été vendu 22 000 euros (à un collectionneur français) le 18 juillet dernier lors d’une vente aux enchères dans le Puy-de-Dôme. Il s’agit d’un nouveau record mondial que le Guinness World Records ne manquera certainement pas de faire figurer dans sa prochaine édition…

La grippe espagnole était…étasunienne !

Si les mots ont un sens…

Durant l’hiver 1918-1919, la grippe espagnole (ainsi baptisée parce que l’Espagne fut la première à la mentionner publiquement) a tué entre 20 et 50 millions de personnes dans le monde, dont 165 000 en France. Soit bien plus de décès que durant toute la Première Guerre mondiale (entre 18 et 19 millions). La plupart des victimes sont mortes de surinfection bactérienne, qui se déclarait au bout de 4-5 jours et conduisait au décès une dizaine de jours après les premiers symptômes grippaux ; rappelons que les antibiotiques sont encore inexistants à l’époque.

grippe 1918Contrairement à la grippe saisonnière classique qui met surtout en danger les jeunes enfants et les personnes âgées, la plupart des victimes de la grippe espagnole étaient âgées de 20 à 40 ans.

En avril 2014, une étude scientifique parue dans les Comptes rendus de l’Académie américaine des sciences (PNAS) avait levé le voile sur l’apparition du virus de la grippe espagnole : il s’agirait d’un ancêtre du virus H1N1 qui a sévi en 2009.

Selon les travaux de ces chercheurs étasuniens, la maladie serait née de la combinaison d’une souche humaine (H1), provenant de la grippe saisonnière H1N8 (en circulation entre 1900 et 1917) et de gènes aviaires de type N1. De ce croisement aurait émergé une souche H1N1 entre 1917 et 1918, variante lointaine de celle qui fit trembler le monde en 2009.

grippe_aviaireLa vulnérabilité inattendue des jeunes adultes s’expliquerait non pas par les caractéristiques du virus, mais par les antécédents des victimes. Les individus qui avaient entre 20 et 40 ans à la fin de la Première Guerre mondiale sont nés dans les années 1880 et 1890. Or, à cette époque, la grippe saisonnière en circulation était de type H3N8. Cette génération n’a donc pas été immunisée contre les virus de type «H1».

Mais rendons à César ce qui appartient à César. Les Espagnols ne sont pour rien dans la pandémie qui ravagea le monde vers la fin de la Grande Guerre. En vérité, le virus est « apparu d’abord au Kansasil a contaminé de jeunes soldats américains, qui étaient réunis trois mois dans des camps de formation militaire, à raison de 50 000 à 70 000 individus, avant de traverser le pays et de prendre la mer pour l’Europe ». Débarqués à Brest et conduits sur le front, les soldats ont « semé » le virus partout où ils passaient, contaminant également les civils.

Rappelons que la grippe (ou influenza) est une maladie causée par un virus qui s’attaque au système respiratoire; et qu’elle se répercute sur tout l’organisme. Ce type de virus change de forme constamment. C’est pourquoi on peut attraper une nouvelle grippe chaque année.

Pour information, l’épidémie de grippe a été particulièrement virulente en 2015, causant une surmortalité de presque 18 000 personnes en France. Si cette forte mortalité est en partie liée à la mutation du virus de la grippe, le manque de vaccination des Français a également sa part de responsabilité…

« Tout est bon dans le cochon »… sauf le prix !

Le marché du porc breton à Plérin (Côtes-d’Armor), reflet de la crise porcine

C’est l’un des premiers « marchés au cadran » à avoir été créé en France en 1972 pour réguler les transactions entre vendeurs (les éleveurs ou les groupements d’éleveurs) et acheteurs (les abattoirs). Le cadran est l’écran électronique sur lequel s’affichent les prix et autres informations nécessaires aux transactions. Aucun cochon n’est présent physiquement. Les lots de porcs sont présentés sur catalogue aux acheteurs, avec des fiches techniques spécifiant l’âge, le poids, l’éleveur, l’origine géographique, etc.

Constitué sous forme d’association loi 1901, le marché au cadran de Plérin a lieu deux fois par semaine: le lundi (10 000 à 15 000 porcs vendus en moyenne) et le jeudi (50 000 voire 60 000 porcs vendus). Au total, ce volume représente 22 % de la production bretonne, une région qui fournit 60 % de la production nationale.

L‘importance du marché de Plérin n’est pas lié au volume des échanges mais au fait que le prix qui y est fixé sert de référence nationale pour le porc standard et est utilisé pour les comparaisons internationales. Toutefois, ce prix n’est pas contraignant : rien n’oblige un acheteur se fournissant ailleurs qu’à Plérin à l’utiliser. D’autres marchés au cadran existent d’ailleurs pour le porc dans des régions où la qualité de l’animal n’est pas la même, comme dans le Sud Ouest.

La viande achetée, les abattoirs la revendent ensuite à la grande distribution, en fixant les prix de gré à gré. Enfin, la viande est vendue dans les super et hypermarchés, à un prix que fixe l’enseigne.

crise du porcDepuis septembre 2014, le prix du porc n’a cessé de baisser, atteignant 1,20 euro le kilo alors que le coût de production est environ de 1,55 euro en moyenne. Au nombre des causes: une baisse de la consommation, une augmentation de la production européenne (notamment en Espagne et en Allemagne), l’embargo sanitaire russe sur la viande de porc européenne décrété en février 2014…

Grâce à des négociations, encadrées par le ministère de l’agriculture et rassemblant tous les acteurs de la filière (éleveurs, abatteurs, grande distribution), le prix du porc avait pu être relevé pour atteindre 1,404 euro le kg le 6 août dernier.

C’est alors que les deux gros transformateurs que sont la Cooperl et Bigard-Socopa, représentant à eux deux 30 % des achats de porc à Plérin, ont décidé de boycotter les ventes, estimant que les prix étaient désormais trop élevés au regard du prix du marché européen. Les deux industriels trouvant le prix au kilo (1,40 euro) trop cher, ils n’achètent donc plus de cochon sur le marché breton.

Problème pour les éleveurs : plus le temps passe, plus les porcs grossissent et moins ils valent. Au delà de 120 kilos, les cochons sont jugés trop mâtures et ne correspondent plus aux calibres de l’agroalimentaire. L’éleveur doit alors les vendre à perte…

Nul doute que le modèle breton de l’agriculture intensive est en crise et même à bout de souffle. Il y a donc urgence à sortir de cette spirale infernale ; il faut inventer un autre modèle agricole la valeur ajoutée, la qualité et l’innovation aient toute leur place. Pas si simple cependant (en témoigne ce reportage du 12 juin 2015)

La petite histoire d’un pseudo Robinson sur une île éphémère

Fin janvier 2015 est apparue une nouvelle île dans l’archipel des Tonga (entre la Nouvelle-Calédonie et la Polynésie, sur la ceinture de feu du Pacifique, où l’activité sismique et volcanique est intense). Née à la suite de l’éruption du volcan sous-marin baptisé Hunga Tonga, elle mesurerait 2 km de long pour 1 km de large; et son point culminant atteindrait 120 m. L‘image satellite révèle une forme assez proche de celle d’un poisson.

image satellite île volcanique Tonga 2015Ce sont les grosses quantités de roches et de cendres retombées et accumulées au niveau de la surface de l’océan qui ont engendré la naissance de la nouvelle île. Les spécialistes lui accordent néanmoins peu de temps avant de disparaître sous l’effet de l’érosion; ce qui explique que l’îlot n’ait toujours pas reçu de nom.

C’est peut-être cette espérance de vie limitée qui a conduit un millionnaire britannique de 65 ans à venir jouer les Robinson Crusoé en juin dernier. L’homme (Ian Argus Stuart) a séjourné seul une dizaine de jours sur l’îlot et filmé son quotidien. Pour lui tenir compagnie, une multitude d’oiseaux. Explorant l’île, il a pu ainsi constater que le sol, qui a l’apparence de la roche, était plutôt mou (de la poussière de lave comprimée et du sable, donc ça s’effrite très facilement); mais que la vie s’y développait déjà (sous l’apparence d’une petite plante verte) alors même que l’îlot s’enfonce bel et bien chaque jour un peu plus dans l’océan.

Si cet « aventurier » a dormi dans une grotte et s’est essentiellement nourri de poissons et d’œufs de goélands, il n’avait pour autant rien d’un naufragé : l’expérience qu’il a vécue était organisée par une société de voyage (Docastaway) avec laquelle il était en contact permanent (par téléphone satellite), au cas où…Eh oui, n’est finalement pas Robinson Crusoé qui veut !

Pour les nostalgiques, les amoureux des grands romans d’aventure ou les aventuriers en herbe, je renvoie à deux fameux ouvrages: Robinson Crusoé de Daniel Defoe et L’île mystérieuse de Jules Verne.

Pompéi renaît (une nouvelle fois) de ses cendres

Alors que l’enseignement des langues anciennes (latin et grec) dans le secondaire est peut-être sur le point de disparaître en France, la cité antique de Pompéi, un temps malmenée, semble avoir retrouvé un nouveau souffle.

L’ancienne ville romaine, située au sud est de Naples (en Italie), a été fondée au -VIe siècle. Elle fut ensevelie et figée dans le temps par les cendres et lapilli (fragments de lave) du Vésuve en août 79, lors d’une éruption volcanique qui détruisit également Herculanum.

pompei-eruptionOubliée pendant plus de 1 600 ans, la ville fut redécouverte au XVIIe siècle dans un état de conservation étonnant (les 7 m de couches de cendres ont préservé le site des pillages); les fouilles révélèrent une cité prospère. Le site archéologique, qui s’étend sur pas moins de 44 hectares, est aujourd’hui le deuxième site touristique du pays derrière le Colisée de Rome, avec 2,7 millions de visiteurs en 2014.

vue de pompéi

Depuis 2012-2013, le site de la cité antique est en pleine effervescence : la rénovation de Pompéi est en cours, avec l’aide financière de l’Union européenne (des subventions avoisinant les 50 millions d’euros). Victime de glissements de terrain, d’effondrements multiples (dus à la pluie et aux ruissellements) et de vols à répétition depuis plusieurs années, le site était sérieusement délabré; au point d’être menacé en 2013 de se voir retirer de la liste du Patrimoine mondial de l’humanité par l’UNESCO où il est inscrit depuis 1997.

pompéi en 2013Un Grand Projet Pompéi a donc été lancé en 2011-2012 pour permettre la conservation de lancienne ville romaine et lui rendre tout son lustre (aussi mis à mal par des années de disette budgétaire). Car, comme dans une maison moderne, il y a en permanence des travaux à faire pour garder l’ensemble en état. Les chantiers se multiplient donc : restauration de fresques (comme celle du triclinium ou antichambre de la villa des Mystères, la plus célèbre des demeures de Pompéi), de mosaïques. Mais également des travaux pour supprimer le risque lié au ruissellement des eaux de pluie sur plusieurs centaines de bâtiments (ex: la maison du Centenaire, la nécropole de Porta di Nocera ou encore la maison de Severus) ; il est bon de rappeler que le site compte pas moins de 1 500 bâtiments. Entretenir pareil lieu n’est donc pas une mince affaire.

Revers de la médaille : le visiteur trouve souvent porte close ou doit se contenter du dos d’un ouvrier au premier plan de ses clichés, quand ce ne sont pas des bâches disgracieuses qu occultent la vue. Des maisons et des chemins sont en effet fermés aux visiteurs car les chantiers prennent du temps : aujourd’hui, moins de dix chantiers ont été achevés sur la trentaine existante. A titre d’exemples : le « grand gymnase », où les jeunes citoyens de la ville venaient faire du sport avant l’éruption volcanique, a été inauguré cette semaine (par le ministre italien de la Culture) après 7 ans de travaux ; quant à la villa des Mystères, il en a fallu deux (elle a rouvert ses portes en mars 2015).

Ceux qui travaillent à la restauration du site sont toutefois engagés dans une véritable course contre la montre. Car l’UE veut l’achèvement de tous les travaux pour fin 2015; sous peine de reprendre l’argent alloué qui n’aura pas été dépensé. Or il est matériellement impossible de respecter l’échéance. Quel avenir donc pour le site au soir du 31 décembre 2015 ? Seule certitude avancée par le surintendant du site: il n’est pas question d’abandonner le travail ; il en va quand même de l’image de l’Italie. Affaire à suivre donc… Cliquer sur l’image pour voir la vidéo (qui présente la situation au 23 juillet 2015)

travaux à pompéi

Informations pratiques ou complémentaires

Le site digitalhumanities.umass.edu propose un outil tre?s pratique pour toute personne désireuse de se rendre sur le site de Pompe?i ou de l’étudier : une carte dynamique du site antique (en anglais).

Autre initiative intéressante: Pompéi en 3D numérique. Un projet appelé Digital Pompéi, présenté fin avril 2015 à la conférence Build de Microsoft à San Francisco, a mis au point une animation 3D (réalisée par la start-up Iconem) : le survol des ruines de Pompéi, avec la possibilité de naviguer au-dessus du site archéologique. Ce projet n’est pour l’heure qu’une démonstration. L’usage définitif de ce prototype n’est pas encore clair mais une application grand public, permettant d’explorer le site dans un navigateur Web, est envisagée.

A l’occasion d’une exposition organisée au museum de Melbourne en Australie, la société Zero One Animation a reconstitué les dernières 24 heures de la ville de Pompéi, du déclenchement de l’éruption à la destruction totale du paysage, comme les spécialistes pensent que cela s’est passé. A découvrir ici.

Enfin, je renvoie au superbe docu-fiction produit par la BBC en 2003 : « Le dernier jour de Pompéi ».

La face cachée d’Hiroshima

Retour sur un cataclysme, 70 ans après

Arte diffusait hier soir à 20h55 un documentaire inédit (« Hiroshima, la véritable histoire ») sur la ville japonaise martyre, détruite au matin du 6 août 1945 après la terrible déflagration nucléaire. Des témoignages bouleversants de rescapés de la première bombe atomique (appelés « hibakusha ») nous révèlent ce qu’ils ont vécu et vu : le bombardier Enola Gay survolant la ville au petit matin, l’incroyable explosion (comme « cent coups de tonnerre ») et sa lumière aveuglante, le souffle (une onde de choc à 1 600 km/h) et puis l’enfer qui s’ensuivit (des corps atomisés ou fondus, d’autres brûlés, mutilés, des chairs à vif, des peaux qui se désintègrent). Les effets immédiats sont terrifiants. La bombe a tué environ 80 000 personnes d’un coup.

Atomic_cloud_over_HiroshimaAussitôt un nuage en forme de champignon recouvre la ville (un mélange de gaz chauds, de particules radioactives et de débris de la ville), comme un cercle de feu. La ville a complètement disparu. C’est une vision d’apocalypse. Au brouillard de gaz radioactifs s’ajoutent des incendies qui embrasent la ville (car beaucoup de constructions sont en bois) puis arrive la pluie noire radioactive (qui tuera ceux qui la boiront). Les rues sont jonchées de cadavres ou d’agonisants. Très vite les morts sont brûlés sur des bûchers par l’armée (cela durera 4 jours) ; des milliers d’orphelins sont livrés à eux-mêmes, devant se battre et voler pour survivre. C’est le chaos total.

Mais l’explosion nucléaire a également des effets à retardement que les Etats-Unis vont chercher à passer sous silence : perte des cheveux, fièvres et nausées, saignements et vomissements de sang, développement des cancers liés aux radiations…

Devant l’ampleur des « dégâts », le secret militaire américain est immédiatement imposé sur les souffrances des populations. La « peste atomique » fait peur. En 1946, un journaliste étasunien venu sur place, John Hersey, publie Hiroshima (à l’origine un article paru dans The New Yorker), dans lequel il raconte comment 6 personnes ont vécu la journée du 6 août 1945. Dès lors, tout le monde sait ce qu’a été le bombardement atomique sur la ville ; et quels ont été les effets des radiations sur la population

hiroshima herseyLe gouvernement américain devra alors s’expliquer sur l’utilisation de l’arme nucléaire; et avancera l’argument du « mal nécessaire » : mettre fin à la guerre contre le Japon (c’était la bombe ou la mort de dizaines de milliers de soldats américains dans un débarquement sur les côtes japonaises).

Le documentaire dit aussi comment les Etats-Unis ont utilisé à leur profit cette véritable catastrophe humanitaire : étude des vivants, dissection des morts pour en savoir plus sur les effets des radiations sur les corps. Les Japonais (notamment des enfants) deviennent des cobayes que l’on examine mais ne soigne pas.

Des scientifiques (comme Benjamin Bedersen et Roy Glauber) ayant participé au projet Manhattan (programme de recherche top secret sur l’arme atomique engagé dès 1942 par le président Roosevelt sans l’aval du Congrès américain) prennent également la parole; et s’interrogent sur le largage de la seconde bombe atomique au-dessus de Nagasaki le 9 août 1945.

Des historiens s’expriment comme l’Américain Sean Malloy (qui met en avant d’autres motivations sur l’usage de la bombe que mettre fin à la guerre) et le Japonais Tomoyuki Yamamoto (qui révèle notamment l’inertie des autorités japonaises, laissant venir les B-29 sur Hiroshima d’abord puis Nagasaki, sans se soucier des habitants).

Des membres de l’équipe de pilotes d’élite ayant largué Little Boy sur Hiroshima, considérés comme des héros à leur retour aux Etats-Unis, se rappellent les préparatifs de leur mission et son succès. Ils sont partis de l’île de Tinian, dans l’archipel des Mariannes en plein océan Pacifique; c’est alors un site militaire américain top secret. Le B-29 Enola Gay qui largue la bombe sur Hiroshima est accompagné de deux autres avions (l’un pour faire des photos, l’autre équipé d’instruments pour mesurer les effets de l’explosion).

Enfin, des images d’archives inédites accompagnent ce documentaire qui nous apprend notamment que, quelques semaines après la capitulation allemande, l’empereur japonais Hirohito avait envoyé des émissaires aux Etats-Unis pour négocier les termes d’une reddition; et qu’il avait compté sur la médiation de Staline, lors de la conférence de Potsdam (à l’ouest de Berlin), pour négocier un accord de paix en faveur du Japon (l’URSS n’était pas en guerre contre ce pays). Le président Truman (qui a succédé à Roosevelt mort en avril 1945) savait donc que le Japon voulait capituler (mais la condition était le maintien de l’empereur à la tête du pays). Pourtant, au terme des accords conclus à Potsdam le 26 juillet 1945 par les Alliés, la capitulation sans condition est exigée du Japon, sous peine de terribles représailles (« un anéantissement rapide et total »).

Comment ne pas s’interroger alors sur les véritables motivations de l’utilisation de l’arme nucléaire par les Etats-Unis? Non seulement le Japon mourait de faim (un blocus très efficace asphyxiait le pays) et allait capituler; mais au final la capitulation signée par le Japon le 2 septembre 1945 garantit le maintien au pouvoir de l’empereur Hirohito (la condition exigée dès le départ par ce dernier pour arrêter la guerre!). De là à affirmer que Truman ne voulait en fait utiliser la bombe atomique que pour montrer à ses ennemis, et à Staline, la puissance de feu des Etats-Unis, il n’y a qu’un pas…

Un peu de hauteur et de distance avec Pluton

« Une nouvelle ère de l’exploration du système solaire s’ouvre devant nous » (John Grunsfeld)

Le 19 janvier 2006, la NASA envoyait une sonde (baptisée New Horizons) à la découverte de Pluton, grâce à une fusée lancée depuis la base de Cap Canaveral en Floride (États-Unis). Rappelons que la « planète naine » est située aux confins de notre système solaire et qu’elle met 248 ans à faire le tour du Soleil. La seule source de lumière sur Pluton vient d’ailleurs de son plus gros satellite : Charon.

Envoyer une sonde dans une région très éloignée de la Terre a donc nécessité de prendre certaines précautions : pas plus grande qu’un piano et pesant 500 kg, New Horizons peut résister à des conditions particulièrement hostiles (ex : peu d’ensoleillement, communication difficile). Pour les besoins de sa mission (un projet de 700 millions de dollars), la sonde dispose de 7 instruments de mesure très performants dont 2 caméras. Ci-dessous le voyage de la sonde spatiale vers Pluton publié par Futura-Sciences:

Le 28 février 2007, New Horizons est d’abord passé tout près de Jupiter. La sonde a donc pu collecter des données et des images inédites de la plus grosse planète de notre système solaire. Ce passage par Jupiter était toutefois calculé: il a ainsi permis à la sonde de gagner en vitesse (pas moins de 4 km/s supplémentaires) en se laissant porter par le champ gravitationnel de la planète.

Le 13 juillet 2015, New Horizons s’est positionné au plus près de Pluton environ 768 000 km); ce qui nous vaut une image historique diffusée par la NASA. Pour analyser chaque détail des images prises par la sonde, il faudra cependant des semaines de travail. Mais à la surface, on remarque déjà cet espace plus clair, baptisé officieusement «le cœur», qui s’étend sur 1 600 km. Après analyse, il s’agirait de deux structures géologiques de compositions différentes.

New Horizons a aussi pris des clichés de Charon (satellite de Pluton) : on y observe des canyons profonds et des falaises ; mais très peu de cratères, à la surprise des scientifiques, ce qui suggère une surface relativement jeune. Autant d’images superbes à découvrir dans le diaporama ci-dessous.

La mission a enfin permis de prendre des mesures précises de Pluton. Son diamètre était débattu depuis sa découverte en 1930. On le pensait alors aussi important que celui de la Terre. Le résultat officiel est maintenant connu: le diamètre de la planète naine est de 2 370 km, soit 18,5% de celui de notre planète bleue.

« Aux grands hommes la patrie reconnaissante », une inscription dépassée ?

Alors que deux femmes anciennes résistantes (Germaine Tillion et Geneviève de Gaulle-Anthonioz) ont fait leur entrée au Panthéon à Paris le 27 mai dernier, il n’est pas inutile de s’interroger sur la faible présence de la gent féminine dans ce haut lieu de la mémoire collective nationale (3 femmes contre 72 hommes aujourd’hui). Ayant vocation à honorer de grands personnages ayant marqué l’histoire de France, ce monument (invention de la Révolution française comme le rappelle la vidéo ci-dessous) n’abrite pourtant que 5,5 % de femmes, comme si celles-ci n’avaient joué aucun rôle dans l’Histoire.

Le parcours des deux femmes d’exception « panthéonisées » en mai 2015 est ainsi l’occasion de rappeler que d’autres femmes auraient toute leur place dans ce « temple » destiné à recevoir « les cendres des grands hommes de l’époque de la liberté française » (la Constituante en 1791); et que l’inscription « aux grands hommes la patrie reconnaissante », figurant au fronton de l’édifice, doit sans doute être revue et corrigée..

Où sont les femmes ?

Un tumblr qui rend justice aux femmes dans l’Histoire

Le collectif féministe Georgette Sand a fondé en juin 2015 un tumblr nommé Invisibilisées. Le but est clairement affiché : (re)donner de la visibilité à toutes ces femmes plus ou moins connues ou oubliées qui, chacune dans leur domaine, ont joué un rôle important dans la société et fait l’Histoire. Certaines ont même pu avoir un destin hors du commun mais restent toujours ignorées des livres d’Histoire comme du grand public. Un exemple parmi bien d’autres : Milunka Savic (1890-1973). Cette combattante serbe des guerres balkaniques (1912-1913) et de la Première Guerre mondiale (1914-1918) est la femme la plus décorée de la Grande Guerre : 6 médailles au total !  Pour porter les armes, elle a d’abord du se déguiser en homme (car les femmes n’étaient pas autorisées à combattre dans l’armée serbe): cheveux coupés court, poitrine aplatie, port de l’uniforme masculin et changement de prénom pour devenir Milun Savic. C’est lorsqu’elle est blessée au combat en 1913 que son appartenance au sexe féminin est finalement révélée.

milunka savic en uniformeInvisibilisées veut donc réparer une injustice et rétablir un certain équilibre entre les hommes et les femmes qui ont, par exemple, œuvré pour le progrès de nos sociétés ou accompli de « grandes choses ».

Régulièrement mis à jour et enrichi de nouvelles figures féminines (pas forcément connues parce que les media n’en parlent pas), le tumblr promet de réelles découvertes. Chaque personnalité est présentée par une biographie (plus ou moins longue) qui rappelle ce que l’intéressée a accompli; certaines de ces biographies renvoient à des sites qui permettent d’en savoir plus encore. Je vous invite donc à explorer au plus vite ce tumblr consacré à cette moitié de l’humanité trop souvent dédaignée par les historiens.