Aspects du baroque: vanités

Le terme de vanité est emprunté à la Bible et plus précisemment au livre de L’écclésiaste. En voici le début:

1. Paroles de l’Écclésiaste, fils de David, roi de Jérusalem.2. Vanité des vanités, dit l’Écclésiaste, vanité des vanités, tout est vanité. 3. Quel avantage revient-il à l’homme de toute la peine qu’il se donne sous le soleil ? 4. Une génération s’en va, une autre vient, et la terre subsiste toujours. 5. Le soleil se lève, le soleil se couche ; il soupire après le lieu d’où il se lève de nouveau. 6. Le vent se dirige vers le midi, tourne vers le nord ; puis il tourne  encore, et reprend les mêmes circuits. 7. Tous les fleuves vont à la mer, et la mer n’est point remplie ; ils continuent à aller vers le lieu où ils se dirigent. 8. Toutes choses sont en travail au delà de ce qu’on peut dire ; l’oeil ne se rassasie pas de voir, et l’oreille ne se lasse pas d’entendre.9. Ce qui a été, c’est ce qui sera, et ce qui s’est fait, c’est ce qui se fera, il n’y a rien de nouveau sous le soleil.

10. S’il est une chose dont on dise : Vois ceci, c’est nouveau ! cette chose existait déjà dans les siècles qui nous ont précédés. 11. On ne se souvient pas de ce qui est ancien ; et ce qui arrivera dans la suite ne laissera pas de souvenir chez ceux qui vivront plus tard. 12. Moi, l’Écclésiaste, j’ai été roi d’Israël à Jérusalem. 13. J’ai appliqué mon cœur à rechercher et à sonder par la sagesse tout ce qui se fait sous les cieux : c’est là une occupation pénible, à laquelle Dieu soumet les fils de l’homme. 14. J’ai vu tout ce qui se fait sous le soleil ; et voici, tout est vanité et poursuite du vent. 15. Ce qui est courbé ne peut se redresser, et ce qui manque ne peut être compté. 16. J’ai dit en mon cœur : Voici, j’ai grandi et surpassé en sagesse tous ceux qui ont dominé avant moi sur Jérusalem, et mon cœur a vu beaucoup de sagesse et de science. 17. J’ai appliqué mon cœur à connaître la sagesse, et à connaître la sottise et la folie ; j’ai compris que cela aussi c’est la poursuite du vent. 18. Car avec beaucoup de sagesse on a beaucoup de chagrin, et celui qui augmente sa science augmente sa douleur.

Les peintures que l’on va donc intituler « Vanités » ont ainsi une fonction morale: rappeler à l’homme sa condition mortelle, l’inanité de ses occupations terrestres, et la nécessité de penser à son salut.

Les Ambassadeurs du peintre Holbein.

Il s’agit d’une anamorphose.

La forme allongée est en fait un crâne, ce qui se révèle dès lors que le spectateur change de place pour regarder le tableau de côté:

Pour un commentaire plus détaillé de ce tableau, voir  holbein.html

Les vanités sont souvent des natures mortes dont la portée est allégorique, chaque élément du tableau se révélant symbolique. A l’évocation du temps, de la brièveté de la vie, de la mort et de la résurrection (sablier, crâne, fleur) s’associent différents objets qui renvoient aux activités humaines:

*livres, instruments scientifiques, art: vanité du savoir

*argent, bijoux, armes, couronnes ou sceptres: vanité des richesses et du pouvoir.

*vins, instruments de musique, pipes, jeux: vanité des plaisirs.

D’autres objets appuient l’idée de la fuite du temps et du caractère éphémère de la vie: bougies, lampes à huile, bulles de savon. A l’inverse la résurrection ou la vie éternelle sont suggérées par des épis de blés ou des couronnes de laurier.

Philippe de Champaigne (1602-1674)

La Vanité, ou allégorie de la vie humaine (1642)

Ainsi la tulipe marque le caractère éphémère de la beauté, le crâne évoque la mort et le sablier le temps. La simplicité de la composition rend le message plus implacable. Les objets sont placés sur une petite tablette de pierre, comme s’il s’agissait d’un « lieu d’offrande ou de dévotion » (les Vanités dans la peinture au XVII ème siècle, catalogue de l’exposition, Paris 1991).

Simon Renard de Saint André (1613-1677)

Vanité

Le crâne se trouve au centre de la composition, placé sur une tablette et entouré d’objets. La tablette elle-même est comme suspendue. Les bulles de savon renvoient à la devise: « homo est bulla », tandis que la bouteille et le verre cassé marquent la fragilité des plaisirs. La partition de musique, les flûtes, les textes qui célèbrent le bonheur de vivre vont dans le même sens. Si le laurier pourrait suggérer une quelconque immortalité accordée aux artistes (le texte de la partition de musique est en fait un poème de Ronsard), le sceau en revanche représente un squelette.

Les pays du Nord ont la plupart du temps choisi d’exprimer la vanité par le biais des objets. Les pays sous influence latine ont, quant à eux, eu recours à la figure du saint. La vanité s’associe alors souvent à des personnages comme Marie Madeleine ou Saint Jérôme.

Nicolas Régnier (1588- 1667)

Saint Jérôme

Georges de La Tour (1593-1652)

Marie- Madeleine

(Musée du Louvre)

Marie-Madeleine, la pécheresse repentie est dans une attitude de méditation (le visage appuyé sur la main). Elle est habillée de vêtements simples, et elle tient sur ses genoux un crâne qui est tourné vers le spectateur. Sur la table, des livres (livres saints) et une discipline. Toute la lumière du tableau provient de la bougie allumée.

Et si vous souhaitez voir des vanités contemporaines, reportez vous au magazine Connaissance des Arts (il est au CDI):

qui a consacré un numéro complet à une exposition qui a eu lieu au musée Maillol, et qui regroupait de nombreuses vanités contemporaines:

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