Ça lui est venu sur un coup de tête, je l’ai appris par un coup de fil. Ça m’a surpris parce que je ne le voyais pas, lui, dans la grande maison des petites écoles. Et puis en discutant j’ai pris conscience qu’on ne s’était pas vus depuis dix ans et qu’en dix ans, on change. Pour preuve : il est papa de trois enfants. Et moi, il y a dix ans, je ne l’aurais pas imaginé papa et je n’étais pas prof, moi-même.

C’est l’humain qui lui manque dans son métier, l’humain ! Alors il m’interroge sur mon métier, sur les élèves, sur les contenus, sur le quotidien d’une classe de CM1. Je lui dis que si c’est de l’humain qu’il veut, il en aura dans le métier, jusqu’à satiété : de l’humain de 7 à 77 ans et en tout genre. Il ne peut plus rester assis derrière son bureau ? Qu’il se rassure, il sera debout ou accroupi devant ceux des élèves. Marre de son ordinateur ? Il ne le verra plus de la journée. Besoin d’être utile ? Il sera comblé, les enfants n’ont jamais eu autant besoin d’intelligence et je le sais plutôt bien pourvu en la matière (grise).

humain

Mais je nuance aussi car je ne peux pas faire peu de cas des cas, hein, ces élèves pénibles qui font la pénibilité de la tâche, deux ou trois par classe. Et il sera obligé de les garder toute la journée et même continuer à croire en leur éducabilité. Il lui faudra aussi accepter une des plus grandes difficultés du métier : les élèves en difficulté. Il devra prendre du recul, ne pas se couvrir de lauriers car les réussites sont parfois éphémères. Il faudra admettre que la difficulté de certains élèves revient, comme ça, le mardi, quand telle ou telle compétence semblait acquise le lundi. Il faut aussi d’ores et déjà prendre en considération que la grande majorité des élèves sont lambda et que l’humain compte une trentaine de petites âmes par classe : les étincelles et l’attachement ne viendront que de quelques-uns.

Je lui parle aussi d’un salaire proche du SMIC et de la pression sociale, je lui parle d’un métier décoté, je lui parle du sentiment d’échec qu’on lui renverra à la tronche dès que la France aura mal à son instruction.

Avant de raccrocher, je lui suggère de contacter un IUFM et de faire une visite d’observation dans une classe. Une vraie classe, dans un quartier difficile, puisque c’est là qu’il travaillera s’il passe et réussit son concours.

Il est plutôt partant.

Vincent, professeur des écoles, auteur et blogueur.

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