Qui a tué Socrate ?

Semaine consacrée au procès de Socrate cette semaine sur France Culture

« La déclaration sous serment, constitutive de l’action intentée, était libellée ainsi […] : « Voici la plainte déposée sous serment par Mélétos, fils de Mélétos, du dème de Pithée, contre Socrate, fils de Sophronisque, du dème d’Alopekè : Socrate enfreint la loi, parce qu’il ne reconnaît pas les dieux que reconnaît la cité, et qu’il introduit d’autres divinités nouvelles ; et il enfreint la loi aussi parce qu’il corrompt la jeunesse. Peine requise : la mort ».

Quant au philosophe, Lysias ayant écrit pour lui un plaidoyer, il le lut d’un bout à l’autre et dit : « C’est un beau discours, Lysias, pourtant il ne me va pas ». Car il relevait évidemment pour la plus grande part du genre judiciaire, plus que de la philosophie. Et, comme Lysias lui répondait : « Si le discours est beau, comment ne t’irait-il pas ? », il dit : « Parce que de beaux habits ou de belles chaussures ne m’iraient pas non plus ».

Et alors qu’on le jugeait, Platon monta à la tribune et dit : « Moi qui suis le plus jeune, Athéniens, de ceux qui, à cette tribune, sont montés…. » ; mais les juges s’écrièrent : « …descendus ! », ce qui voulait dire : « Descends ! ». Quant à lui, il y eut en faveur de sa condamnation 281 voix de plus qu’en faveur de son acquittement. Et pendant que les juges fixaient quelle peine il devait subir ou quelle amende payer, il dit qu’il paierait une amende de vingt-cinq drachmes. Eubulide, il est vrai, dit qu’il concéda cent drachmes ; mais après que les juges se furent bruyamment récriés : « Eu égard, dit-il, à ce que j’ai accompli, je propose comme peine d’être entretenu au Prytanée » Et eux le condamnèrent à mort 80 autres voix s’étant ajoutées aux précédentes. Et, ayant été emprisonné, peu de jours plus tard il but la ciguë, après avoir tenu beaucoup de beaux propos que Platon rapporte dans le Phédon. »

Diogène Laërce, Vies et doctrines des philosophes illustres, II 38-41 (ed. M.-O. Goulet-Cazé).