Sujets du bac 2022

Les sujets de philosophie concernant la session avancée de Tunisie.

 


Le candidat traitera, au choix, l’un des trois sujets suivants.

Sujet 1

Travailler, estce seulement se rendre utile ?

Sujet 2

La science peutelle tout expliquer ?

Sujet 3

Expliquer le texte suivant :

A partir d’un certain seuil, variable selon les individus, l’homme âgé prend
conscience de son destin biologique : le nombre des années qui lui restent à vivre
est limité. Si à 65 ans une année lui semblait aussi longue que dans son enfance, le
laps de temps sur lequel il peut raisonnablement compter dépasserait encore son
imagination ; mais il n’en est pas ainsi. Ce délai lui paraît tragiquement court parce
que le temps ne coule pas de la même manière aux divers moments de notre
existence : il se précipite à mesure qu’on vieillit.

Pour l’enfant, les heures semblent longues. Le temps dans lequel il se meut lui
est imposé, c’est celui des adultes ; il ne sait ni le mesurer ni le prévoir, il est perdu
au sein d’un devenir sans commencement ni fin. J’ai maîtrisé le temps quand je l’ai
animé de mes projets, découpé selon mes programmes : mes semaines se sont
organisées autour des aprèsmidi où j’allais au cours : alors chaque journée avait un
passé, un avenir. Mes souvenirs datés et cohérents remontent à cette époque.
D’autre part, les moments se traînent quand nous les vivons dans la tension ou la
lassitude. Or, l’enfant à cause de sa faiblesse, de son émotivité, de la fragilité de son
système nerveux se fatigue vite. Soixante minutes de lecture, c’est un effort plus
soutenu à 5 ans qu’à 10 ans, à 10 qu’à 20. Les distances sont longues à parcourir,
l’attention difficile à fixer : les journées ne se laissent pas franchir sans peine. Enfin,
surtout, le monde est alors si neuf, les impressions qu’il produit en nous si fraîches et
si vives que, évaluant la durée par la richesse de son contenu, elle nous paraît
beaucoup plus étendue qu’aux époques où l’accoutumance nous appauvrit.

Simone de Beauvoir, La Vieillesse (1970)

Plaisir

Sujet 1 : En quoi consiste le plaisir que procure une œuvre d’art ?

L’art, souvent confondu (d’après son étymologie grecque technè) avec la technique, regroupe un ensemble d’objets très divers relevant d’un savoir-faire, d’une production humaine (artifice). Il faut attendre le XVIII° siècle pour comprendre l’œuvre dans sa spécificité , distincte à la fois de l’objet fabriqué et de l’objet naturel. Au sens esthétique, on définit généralement l’œuvre d’art comme une création destinée à plaire. Mais cela ne va pas de soi si l’on considère l’histoire des beaux-arts, qui témoignent de chefs d’œuvres ayant  fait l’objet d’appréciations très diverses. Avant de se demander en quoi consiste le plaisir que procure une œuvre d’art, il faut s’interroger sur la finalité de toute œuvre relativement au jugement de goût , jugement de celui qui la contemple. En effet, on sous-entend que l’œuvre, qui est avant tout une réalité matérielle, a pour but une sensation toute particulière que l’on nomme plaisir. Qu’est-ce que le plaisir ? Le mot latin placere, plaire, être agréable désigne une sensation ou une émotion qui vient satisfaire un besoin ou un désir. Faut-il en conclure que l’art est pathologique, c’est-à- dire que celui qui éprouve l’agréable est soumis à une satisfaction subjective ? N’est-ce pas réduire l’œuvre d’art et son universalité supposée, que d’en faire l’objet de nos inclinations ? L’intérêt de cette question est de nous introduire au cœur même de la contemplation, en démêlant les nœuds du jugement esthétique, pour enfin se demander si l’expression « ça me plaît » peut être équivalente du fameux « c’est beau, universellement, sans concept » tel que Kant définit ce jugement de goût.

Désir de s’enrichir

Sujet 2 : Est-il raisonnable de désirer s’enrichir ?

Descartes, qui définit la raison comme « le bon sens », nous invite à « changer nos désirs plutôt que l’ordre du monde » dans sa morale provisoire. Je peux désirer la richesse et acheter un billet de loterie, mais seul le sort décidera qu’il soit gagnant ; je peux aussi me lancer dans les affaires et l’économie, dont on connait les aléas. ne dépendant pas même des meilleures volontés. En désirant m’enrichir, je tends vers quelque chose qui ne dépend pas de ma volonté ni de mon pouvoir, mais de l’ordre général du monde. On peut donc se demander s’il est conforme au bon sens de vouloir s’enrichir ou bien si ce n’est pas pure folie dans la mesure où j’ai de fortes chances de ne pas obtenir la richesse espérée et, même en étant favorisé par le sort, d’en être épuisé et malheureux. La raison, faculté qui me permet de juger, de distinguer le bien du mal, peut-elle m’empêcher de désirer ce qui ne dépend pas de moi, de limiter mes désirs à ce que je suis certain de posséder ? Une action est raisonnable lorsqu’elle est conforme à la morale universelle, ne serait-ce que caprice et folie que de désirer ce qui subjectivement me procure du plaisir ?  Car telle est la richesse, objet sans limite de nos désirs et de ceux d’autrui. Un désir raisonnable est contradictoire car justement le sage fait taire ses désirs pour privilégier sa raison. Mais il faut alors se demander quel est le rôle de la raison dans cette lutte contre le désir de s’enrichir. Le désir de s’enrichir est-il à ce point contraire à la raison qu’elle pourrait « crier » sans « pouvoir mettre le prix au choses » (Pascal) ?

Corrigé du bac blanc 3° sujet

  1. Les choses de la nature n’existent qu’immédiatement et d’une seule façon, tandis que l’homme, parce qu’il est esprit, a une double existence ; il existe d’une part au même titre que les choses de la nature, mais d’autre part il existe aussi pour soi, il se contemple, se représente à lui-même, se pense et n’est esprit que par cette activité qui constitue un être pour soi./
  2. Cette conscience de soi, l’homme l’acquiert de deux manières : Primo, théoriquement, parce qu’il doit se pencher sur lui-même pour prendre conscience de tous les mouvements, replis et penchants du cœur humain et d’une façon générale se contempler, se représenter ce que la pensée peut lui assigner comme essence, enfin se reconnaître exclusivement aussi bien dans ce qu’il tire de son propre fond que dans les données qu’il reçoit de l’extérieur.\
  3. Deuxièmement, l’homme se constitue pour soi par son activité pratique parce qu’il est poussé à se trouver lui-même, à se reconnaître lui-même dans ce qui lui est donné immédiatement, dans ce qui s’offre à lui extérieurement.
  4. Il y parvient en changeant les choses extérieures, qu’il marque du sceau de son intériorité et dans lesquels il ne retrouve que ses propres déterminations.
  5. L’homme agit ainsi, de par sa liberté de sujet, pour ôter au monde son caractère farouchement étranger et pour ne jouir des choses que parce qu’il y trouve une forme extérieure de sa propre réalité./
  6. Ce besoin de modifier les choses extérieures est déjà inscrit dans les premiers penchants de l’enfant ; le petit garçon qui jette des pierres dans le torrent et admire les ronds qui se forment dans l’ eau, admire en fait une œuvre où il bénéficie du spectacle de sa propre activité.

HEGEL

l'enfant à la toupie

Lecture et Compréhension du texte :

On souligne le vocabulaire qui constitue le champ sémantique de deux thèmes :

Le thème de la conscience de soi

Le thème de tout ce qui est extérieur à l’homme

Explication détaillée des phrases :

  1. Tandis que permet d’opposer les choses de la nature à l’homme, parce qu’il a une double existence : l’homme est en même temps chose de la nature est esprit. D’une part, d’autre part explicite cette double existence. La simplicité  des choses naturelles s’opposent à l’esprit, la conscience est liée à la seule activité de penser ; en effet exister pour soi c’est pouvoir se représenter à soi-même que l’on est quelque chose.
  2. La conscience s’acquiert par deux moyens Primo explique le premier par la suite des deux points : une énumération dans le temps comme l’indique l’adverbe enfin . Ce premier mode d’acquisition de la conscience est théorique : c’est un acte d’introspection qui plonge le sujet dans la complexité de la vie intérieure, accède à l’idée de soi-même, et enfin à la compréhension de ce qu’il est lui-même.
  3. Deuxièmement, c’est la seconde manière d’acquérir la conscience de soi par un mouvement externe d’action dans le monde. Ce mouvement à l’origine de la construction de l’identité du sujet est opposé au premier, se reconnaître / se reconnaître lui-même . Ce second mode d’acquisition est pratique, le sujet peut se connaitre dans les données extérieures à lui-même.
  4. Explication de ce deuxième mouvement de la connaissance de soi. Le sens du mouvement du sujet vers le monde s’explique par « en changeant les choses extérieures », c’est-à-dire une activité par laquelle l’homme transforme les données qu’il reçoit de l’extérieur. L’homme impose en effet ses propres déterminations , aux choses elles-mêmes, c’est-à-dire son image, ce qu’il est. C’est par là qu’il parvient à cette reconnaissance de soi.
  5. L’homme agit ainsi : La manifestation de la liberté s’explique parce que l’homme domine les choses naturelles et nie leur étrangeté. L’action sur le monde s’explique et éclaire le rapport de la conscience de soi avec l’extérieur: l’homme transforme le monde naturel, le rend humain et miroir de lui même parce que ce monde reflète ses propres capacités.
  6. L’exemple illustre le rapport de la reconnaissance de soi par l’enfant à ce « spectacle » extérieur de sa transformation du milieu.Le mouvement de modification du monde naturel est nécessaire, il est un besoin dont l’exemple relève l’intérêt en fait derrière l’inutilité apparente du jeu qui consiste à faire des ronds dans l’eau. La réflexion à lieu grâce au miroir qu’est le résultat de l’action.

Plan du texte :

« Les choses de la nature…être pour soi » phrase 1 : Comme toute chose, l’homme à une origine naturelle mais en même temps il est aussi esprit, c’est-à-dire pensée de soi-même.

« Cette conscience de soi…reçoit de l’extérieur » phrase 2 à 5 : Il y a deux mouvements liés mais distincts pour acquérir cette conscience de soi.

– l’homme doit se représenter lui-même par un acte d’identification interne

– l’homme doit se reconnaitre dans le résultat de son travail sur les choses de la nature phrase

« Ce besoin de modifier…de sa propre activité » phrase 6 : L’exemple du jeu enfantin explique comment se construit la propre conscience de soi.

Idée générale et problématique du texte :

L’homme ne peut pas être défini comme un être de la nature ni exclusivement par l’esprit. Il faut penser le rapport de l’homme à lui-même dans la reconnaissance à l’intérieur de lui comme dans les choses extérieures. Mais l’homme n’est pas une identité spontanée. Il doit conquérir dans le temps sa propre identité. La connaissance de soi ne suffit pas.  Il  doit transformer la nature pour être conscience de soi comme le montre l’exemple de l’enfant. Cette transformation de la nature c’est le jeu, le travail, l’art, c’est-à-dire ce qui est réalisé à l’extérieur des œuvres. Cette transformation effectuée permet à l’homme de se mirer lui-même et de se construire comme sujet libre, c’est- à-dire capable d’imposer sa marque aux choses extérieures. Le problème est celui de la liberté de la conscience : comment devient-on conscient de soi ? Est-ce seulement par l’intériorisation de soi-même telle que l’avait décrite Descartes  ou en comprenant notre puissance sur la nature ?


Corrigé dissertation du bac blanc

justiceCorrigé de la dissertation :

Peut-on être heureux sans être juste?

Le bonheur est une quête que chacun reconnaît comme étant personnelle, même si nous avouons difficilement une intention égoïste pour notre propre satisfaction ; nous reconnaissons tous vouloir le bonheur des autres, du moins de nos proches, amis ou parents. En ce sens nous nous attribuons un sentiment de justice et même de vertu qui consiste à partager une recherche individuelle. Personne ne m’interdit d’être heureux sans être juste, et l’on peut songer à la satisfaction de certains, indépendamment des autres et des préoccupations morales.

Être juste, c’est à la fois pratiquer la justice mais aussi être mesuré. On pratique la justice à chaque fois que l’on donne à chacun selon son dû et qu’on refuse les inégalités qui ne sont pas légitimes et qui sont contraires à la raison. En ce sens, la justice renvoie à l’observation d’un principe qui dépasse l’individu particulier : être juste c’est accomplir son devoir au sens moral du terme.

Que dois-je faire ? voilà la question qui résume pour Kant nos interrogations morales. La réponse est accomplir son devoir, en ayant le courage de se servir de son propre entendement. Quelque soit les effets que cela implique, tu dois parce que tu dois, inconditionnellement nous dit Kant. Or, le devoir trouve dans cet accomplissement un certain bien être, parce qu’il demande un effort, un certain travail, il est satisfait une fois accompli. Si être juste c’est accomplir son devoir, cela exige aussi le labeur et l’effort d’une pratique peu naturelle à l’homme. La justice est-elle alors contraire au bonheur ?

Le bonheur est une aspiration universelle, un désir partagé par tous les hommes même si on ne distingue pas véritablement ce que l’on met sous ce terme. Il est difficile de le définir parce qu’il est aussi lié au hasard (étymologie heur), à la chance et arrive sans s’y attendre. Le bonheur s’oppose au plaisir, à la joie en ce qu’il est durable et absolu. Si être juste c’est à la fois faire son devoir, c’est -à-dire exécuter une contrainte, et prendre en compte les intérêts d’autrui, être juste, est-ce renoncer au bonheur ? En effet, si la morale pose les fondements d’une vie bonne, il n’est pas sûr que ce soit une vie heureuse.

La justice règle la vie d’une personne au sein d’un groupe sans dire ce qui est mais ce qui devrait être au sein des relations humaines. Sans aller jusqu’à faire le bonheur des autres, la justice consisterait à leur accorder respect et considération, à trouver ce juste milieu qui prend en compte nos propres intérêts comme ceux d’autrui… Est-ce cela qui nous rend heureux ?

Corrigé du bac blanc séries technologiques

« Une tête bien faite plutôt que bien pleine« 

Pour bien penser faut-il être cultivé ?

montaigne

Analyse du sujet :

« Etre cultivé » suppose deux sens, il faudra derterminer lequel.

Primo, il s’agit de lérudition livresque, un corpus de connaissances portant sur la science, la litterature, l’art, la philosophie, l’histoire,etc.

Secundo, il faut entendre par cultivé le sens ethnologique c’est-à-dire appartenir à une culture donnée, un groupe et à une époque précise, culture transmise par l’éducation et les traditions.

Le sens du mot culture dans la question est plutôt le premier dans la mesure où l’on suppose que quelques uns possèdent une culture suffisante pour bien penser, on sous

entend que certains n’ont pas cette culture. Or le second sens est ce qui est universellement partagé : Tous les hommes ont une culture, mais tous ne sont pas cultivés au sens de  » lettrés. »

« Faut-il » : verbe important : la question suppose la nécessité de disposer d’une culture bien penser. Une réponse affirmative sous-entendrait qu’un ignorant, un illettré ou un individu n’ayant jamais eu la chance de fréquenter les grandes écoles qui donnent accés au savoir ne pourrait pas bien penser.

« Bien penser » : C’est la pensée logique c’est-à-dire la rationalité. Penser selon les règles de la logique c’est penser de manière universelle.

Relations entre les termes

La culture au premier sens du terme fait appel à plusieurs facultés intellectuelles et sensibles comme par exemple un homme qui possède une culture artistique fait davanttage appel à ses sentiments pour juger et goûter les oeuvres d’art. Bien penser fait référence au travail de la raison, à la démonstration logique (logos), aux » longues chaînes de raison » dont parlent le savant et philosophe Descartes.

Problématique :

Les deux réponses sont paradoxales, car soit on affirme que la culture livresque est nécessaire pour bien penser, c’est-à-dire qu’un minimum de connaissances est exigé pour penser de manière logique, soit on dit que certains hommes pensent mal, que leur culture n’est pas assez « distinguée » pour accéder au raisonnement de la logique scientifique et philosophique.

Ce qui est paradoxal, c’est le fait de jouer sur les deux sens du mot culture comme  » distinction » d’une part, comme « propre de l’homme » d’autre part pour trouver un critère de la pensée juste.

  1. L’homme cultivé pense-t-il juste ?
  • La culture provient d’un apprentissage qui ne consiste pas seulement à être ému par des oeuvres mais à les juger. le rôle de la réflexion intervient.
  • La culture touche aussi bien l’ignorant que l’ésthète, mais ce dernier est capable de justifier ses préférences.
  • La culture comporte des codes sociaux qui permettent de s’appropier des connaissances et de les faire progresser.
  1. Il n’y a pas d’homme sans culture.
  • Tout homme est cultivé malgré lui, il a reçu une éducation est des valeurs propres à son époque et son pays
  • La culture transcende tous les savoirs : elle est l’harmonie des facultés de l’esprit (sensibilité et raison)
  • Bien penser relève de l’usage de la raison, des règles de la logique universelle et non de la diversité des cultures