mention légale : « Ce produit courbe l’espace et le temps dans son voisinage »

Et si les fabricants prenait en compte les résultats de la physique moderne ? Depuis le début du XXème siècle, la physique a connu de grandes révolutions qui modifient profondément la façon dont les physiciens envisagent notre monde. Bien que très répandus dans l’univers de la vulgarisation scientifique, ces théories sont peu abordées dans l’enseignement des sciences au lycée. Il y a quelques années, des physiciens se sont amusés à inventer des mentions légales « universelles » qui pourraient être apposé sur tout produit (d’une boîte de gateau de grand-mère au dernier gadget technologique de votre neveu). L’original est en anglais. Histoire de commencer l’année avec humour j’ai décidé de les traduire et de les commenter dans les jours à venir. Commençons par deux fondamentaux :

Avertissement :
Ce produit attire tout autre matière de l’univers, même les produits d’autres fabricants, selon une force proportionnelle au produit des masses et inversement proportionnelle à la distance entre eux.

sir Isaac NewtonSelon le modèle de l’interaction gravitationnelle, proposé par Isaac Newton (dans son ouvrage majeur : « Philosophiae Naturalis Principia Mathematica« ) 2 objets massiques interagissent selon une force présentant les caractéristiques énoncées ci-dessus. Cette loi est dite universelle car elle s’applique pour tout objet quelque soit leur distance, en tout point de l’univers. Ce qui est remarquable c’est que Newton ait énoncé cette loi pour expliquer la nature de la relation entre la terre et la lune. Précurseur des grandes unifications de la science moderne (comme le challenge du XXème siècle d’unifier relativité et mécanique quantique), Newton a su trouver dans les phénomènes de la vie quotidienne (tout objet subit une attraction vers la terre, de sorte que livré à lui-même il tombe vers le bas) l’explication à un phénomène astronomique (la lune est elle aussi attiré par la terre mais elle la rate sans cesse : elle est en orbite).

Ainsi, vous êtes, selon cette loi, présentement en interaction avec tous les objets de votre environnement (l’ordinateur, la table, la chaise, etc.). Cela veut dire que vous les attirez et que eux-même vous attire. Cela est vrai pour les objets proches comme pour les objets plus éloignés (un fer à repasser à l’autre bout de la planète) voire très éloigné (Io un satellite de Jupiter, les sondes voyager qui sont maintenant au-delà des limites du système solaire, l’hypothétique trou noir situé au centre de notre galaxie et même les galaxies les plus éloignées).

Pourquoi n’avons-nous pas conscience de cela dans notre quotidien ? Tout simplement parce que nous sommes proches d’un objet aux dimensions astronomiques : la terre. L’attraction terrestre est bien supérieure à tout autre attraction. Pour fixer les esprits, une masse de 50 kg subit de la part de la terre une attraction 5 millions de fois supérieure à celle exercée par un camion de 33 tonnes situé à 1 m. Ainsi, au quotidien, nous expérimentons simplement l’interaction gravitationnelle exercée par la terre que nous appelons le poids. Tout autre interaction gravitationnelle étant négligeable devant celle exercée par la terre. Nous ne le ressentons donc pas au quotidien mais tous les objets s’attirent donc les uns les autres, comme ce paquet de lessive A qui attire ce paquet de lessive B d’un concurrent…

Avertissement :
Ce produit courbe l’espace et le temps dans son voisinage.

Dans les modèles de la physique classique (comme le modèle de Newton ci-dessus), un objet évolue dans un espace à 3 dimensions en interaction avec d’autres objets. Selon le modèle de la relativité proposé par Einstein, espace et temps ne sont pas distinguable. La relativité restreinte décrit la manière dont il convient d’envisager les changements de référentiel : la façon dont il faut décrire les changements de l’espace et du temps lorsqu’on envisage de décrire un mouvement par rapport à un objet ou par rapport à un autre. Les équations et les paradoxes qui découlent de la relativité restreinte sont trop complexes pour être expliquées ici et feront, peut-être l’objet d’un prochain article.

Dans le modèle de la relativité restreinte, la gravitation n’est pas envisagée. Historiquement, les bases de la relativité restreinte ont été décrites par Albert Einstein en 1905. Dans cette théorie, il est dit qu’aucune information ne peut être transmise plus vite que la vitesse de la lumière. La description de l’interaction gravitationnelle pose problème dans ce cadre, puisqu’elle apparait instantanée : deux corps massiques (qui ont une masse) sont en interaction quelque soit leur distance. Qu’un objet voit sa masse modifiée (et c’est le cas dans les réactions nucléaires où les variations de masse sont la cause de libération d’énergie selon la célèbre formule E=mc²) et l’autre objet en est immédiatement informé puisque l’interaction gravitationnelle est modifié, même si les deux objets sont situé à plusieurs année-lumière l’un de l’autre ! Cela est en contradiction avec les principes de la relativité restreinte et amena Einstein à proposé le modèle de la relativité générale en 1915.

Dans le cadre de la relativité générale, la gravitation n’est pas perçue comme une interaction entre deux corps massique mais comme une modification de l’espace-temps lui-même ! Ainsi, tout corps massique modifie l’espace-temps dans son environnement un peu de la même façon qu’une bille sur une toile tendue courbe la toile dans son environnement (voir la représentation ci-contre). Cela est vrai pour les objets astronomiques, mais aussi pour tous les objets de l’environnement, même celui que vous avez reçu du père noël.

D’autres avertissements à venir…

Pourquoi le ciel est noir la nuit ?

Dans son blog (la soupe primitive), Fabien nous a expliqué pourquoi le ciel est bleu le jour. Le fait qu’il soit noir la nuit semble être une évidence : « le ciel est noir la nuit car le soleil n’éclaire pas le ciel », pourtant…

galaxie

Réfléchissons un peu. Le soleil est une étoile comme une autre, ce qui le particularise est sa proximité. On pourrait donc penser que le ciel est noir car les autres étoiles sont trop loin pour éclairer chaque point du ciel.

Mais

Si l’on considère que l’univers est infini et que les étoiles sont réparties uniformément, alors en tout point du ciel on voit un nombre infini d’étoile. Chaque point devrait donc être illuminé tel « un rempart dôré » pour reprendre l’expression d’Edgar Allan Poe (1809-1849). On peut même démontrer plus rigoureusement que le ciel devrait être aussi lumineux qu’un point du soleil. Dans ces conditions, le ciel ne serait pas noir la nuit mais jaune et lumineux comme le soleil !
Et pourtant, le ciel est bel et bien noir la nuit. Ce paradoxe est appelé « paradoxe de Chéseaux-Olbers ». Il occupe les esprits depuis les philosophes grecs !

Il y aurait donc quelque chose qui nous aurait échappé dans le raisonnement ?

galaxies - NasaSerait-ce que l’univers n’est pas infini ? Cette question est très délicate mais si l’on suppose que l’univers n’est pas fini dans quoi est-il ? S’il est dans quelque chose alors cela est également l’univers puisque tout ce qui est est l’univers (par définition).

Serait-ce alors que les étoiles ne sont pas réparties uniformément dans l’univers ? Cette hypothèse est après tout largement discutable étant donné que nous ne sommes pas allé plus loin que les confins du système solaire (et encore on n’y a juste envoyé quelques sondes : pionneer 10 & 11 et voyager 1 & 2). Cependant, c’est l’une des hypothèses fondamentales de la physique : « ce que nous observons sur terre ou depuis la terre n’a rien de particulier dans l’univers » et c’est bien la dernière hypothèse que nous allons rejeter.

Pour résoudre ce paradoxe il faut prendre en considération les faits que la vitesse de la lumière n’est pas infinie (Cela a été découvert par l’astronome danois Romer (1644 – 1710) en observant le mouvement des satellites de Jupiter) et que l’univers est né un jour (selon le modèle du big bang) de sorte que la lumière des étoiles les plus éloignées ne nous est pas encore parvenue.

Ainsi, le noir que nous observons sur le fond cosmique est rempli d’étoiles dont la lumière n’a pas atteind la Terre…

Mais le fond du ciel nocturne est-il réellement noir ? Oui pour nos yeux seulement capable de détecter la lumière dans une gamme de longueur d’onde bien précise mais non pour le récepteur de micro-onde d’Arno Penzias et Robert Wilson (des laboratoires bell) qui en 1964 furent bien surpris de détecter un rayonnement uniforme dans toute les directions. Il s’agit en fait du fond diffus cosmologique dont les hétérogénéités sont représentés ci-contre. Ce rayonnement s’interprète, dans le cadre du modèle du « big bang », comme étant l’écho du big bang. Son existence avait été prévue avant-guerre par Georges Gamow (1904-1968 ) et sa découverte fournie une preuve observationnelle de ce modèle.

Pour aller plus loin sur le paradoxe de Chéseaux-Olbers, cet article fournit de nombreux repère historiques.

La présentation ci-dessous est celle que je présente à mes élèves pour introduire la vitesse de la lumière :

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La forme de la terre ?

Que sait-on de la forme de la terre ?

Nous vivons sur une terre plate et nous croyons qu’elle est ronde. A moins que ce ne soit l’inverse. Pour les expériences de la vie de tous les jours, il est évident que la terre est plate sauf si bien sûr nous observons un bateau disparaître à l’horizon. Pour remettre en question la platitude de notre planète, il est nécessaire de l’observer sur une échelle bien plus grande que celle à laquelle on l’observe à taille humaine.

Quand est-ce qu’on s’est aperçu que la terre n’était pas plate ?

On croit parfois -à tort- que c’est Christophe Colomb (1451-1506) qui a démontré que la terre était ronde. Pourtant, il faut remonter plusieurs siècles en arrière pour trouver l’une des premières estimation du rayon de la terre par Ératosthène (276-194 avt JC).

Comment a-t-il fait ? Son raisonnement est purement géométrique : il s’est aperçu que le fond d’un puit est éclairé à midi à Siène -aujourd’hui Assouan- alors que le même jour, un obelisque situé à Alexandrie projette une ombre. Comment les rayons du soleil peuvent-ils arriver verticalement à un endroit et de manière oblique à un autre ?

2 solutions sont possibles :

  • soit le soleil est suffisamment proche pour éclairer de différentes façons différents points de la terre plate,
  • soit le soleil est tellement éloigné que tous les rayons arrivent parallèle et c’est la terre qui a un rayon de courbure (voir le schéma).

Bien entendu, c’et la deuxième solution que l’on considère comme juste. Ce qui est intéressant dans ce grand classique des cours de seconde de physique, c’est le fait qu’il soit nécessaire de changer d’échelle pour remettre en cause la platitude de la terre. Dans la vie de tous les jours à échelle humaine, il n’est pas nécessaire de s’imaginer vivre sur une terre sphérique. L’interprétation classique en philosophie est de dire « nos sens nous trompent » et c’est la pensée rationnelle, cartésienne qui permet de se rapprocher de la réalité. Ici, nos sens nous montrent une terre plate mais la réalité est que la terre est ronde.

Pourtant, il me semble que la réalité n’est pas aussi absolue que ce que l’affirmation « nos sens nous trompent » semble le laisser croire. « La terre est ronde » ou « la terre est une sphère » sonne comme une évidence. Mais à bien y regarder, cette affirmation perd de sa substantialité :

Une sphère est un objet mathématique définie de manière rigoureuse : « surface à 3 dimensions dont tous les points sont situés à une même distance d’un point appelé centre ». Peut-on affirmer que la terre est une sphère à 3D dont tous les points sont situés à une même distance de son centre ? Nous savons que :

  1. la terre est aplatie au niveau des pôles, il serait certainement plus judicieux de dire que la terre est une ellipsoïde,
  2. tous les points de la surface de la terre ne sont pas situés à la même distance de son centre. C’est ce que nous expérimentons lorsque nous gravissons une pente ou dévalons une colline : s’il est difficile de gravir une pente c’est que nous nous éloignons du centre de la terre.

Bref, définir la forme de la terre n’est pas aisée et il apparaît clairement que la forme que nous allons donner à la terre dépendra de notre définition de ce que l’on appelle la surface de la terre.

geoide terrestre Au reste, l’une des meilleures définitions de la forme de la terre est celle du géoïde terrestre : la forme qu’aurait la terre si elle était complétement recouverte d’eau (voir ci-contre).

Finalement, « la terre est plate », « la terre est ronde », « la terre est sphérique », « la terre a la forme du géoïde ci-contre » toutes ces affirmations sont fausses tant qu’on n’a pas défini le cadre dans lequel on fait cette affirmation, c’est à dire le cadre dans lequel on peut affirmer qu’elles sont vrai. Elles ont toutes pour but d’infirmer l’affirmation précédente mais aucune n’a le statut de réalité absolue.

Toute affirmation sur ce qu’est réellement « la forme de la terre » implique que nous nous mettions d’accord sur ce qu’on appelle « la forme de la terre » et dépendra de cette définition.

N’en déplaise aux partisans d’une réalité vraie et absolue qui se dévoilerait par la science, toute affirmation scientifique est toujours inscrite dans le temps, empreinte des croyances et des exigences socio-culturelles de son époque.

Voyage ?  l'intérieur de la terre Références :

L’ISS, Atlantis et le soleil

Le 17 Septembre 2006, la navette atlantis se détache de la station spatiale internationale (ISS). Sur terre, Thierry Legault observe le transit de l’ISS devant le soleil.

Cela ressemble à une poussière à la surface du soleil pourtant cette photo spectaculaire montre le passage de la navette Atlantis et de la station orbitale internationale (ISS) devant le soleil.

Cette seconde image montre l’ISS vue depuis la navette Atlantis. Elle a vraissemblement été prise au même moment que la photo précédente.

Sachant que le soleil est situé à 150 millions de kilomètres et que l’ISS orbite à 400 km, cela donne une idée des dimensions gigantesques du soleil !

Petit exercice de géométrie de niveau 2de (cours sur les méthodes de mesure) : La taille des panneaux solaires de l’ISS est de 73 mètres, en estimant son altitude à 400 km et la distance terre-soleil à 150 millions de kilomètres, arriverez-vous à retrouver le diamètre du soleil à l’aide de la première photo ?

Références :