Alexis Pire consentement à l’impôt

Pas encore lu mais le dernier livre d’alexis Spire semble important en ces temps troublés

http://ref.lamartinieregroupe.com/media/9782021367683/136768_extrait_Extrait_0.pdf

Extraits de l’intro

L’impôt est au fondement d’un pacte social qui est le produit des relations nouées au cours de l’histoire entre les gouvernés et la puissance publique. Au XIXè siècle, sa justification était principalement de financer des missions régaliennes : l’armée, la police et la justice. En France, il est devenu après la Seconde Guerre mondiale un élément clé des politiques redistributives et d’une protection sociale financée également par les cotisations ; le taux de prélèvement obligatoire est passé de 15 % de la richesse produite en 1945 à 45 % en 2017. Un tel système de solidarité collective ne peut perdurer que s’il repose sur un accord relativement large de celles et ceux qui y participent. (…) Le terme de résistance renvoie à des pratiques qui peuvent aller des tactiques discrètes aux mobilisations les plus bruyantes (…) Mais ces différentes modalités se nourrissent mutuellement et prospèrent sur un sentiment d’injustice fiscale qui semble d’autant plus répandu qu’il renvoie à des considérations très variables et parfois éloignées des intérêts de celles et ceux qui les énoncent. Ainsi, il n’est pas rare que les bénéficiaires de prestations versées par l’État s’associent aux plaintes contre l’impôt ou que des ménages ayant de petits patrimoines fustigent les droits de succession dont ils sont pourtant exonérés.

(…) Ainsi, la fragilisation de l’acceptation de l’impôt ne s’explique pas seulement par un déficit de solidarité mais aussi et surtout par la conviction de ne pas recevoir une juste part des richesses nationales. Ce sentiment d’injustice n’implique en aucune façon une remise en cause de l’État ou de l’impôt ; il peut en revanche se conjuguer avec la revendication d’une intervention publique plus équitable. (…) On se propose tout d’abord de revenir sur la place de la question fiscale dans le débat public, en montrant qu’elle fonctionne comme un trompe-l’œil : les impôts qui apparaissent le plus, dans les controverses accompagnant les réformes, ne sont pas nécessairement les mieux connus par les différentes catégories de contribuables. Cette méconnaissance du système fiscal tend à accentuer la défiance envers l’impôt, avec toutefois des variations importantes. Au bas de la hiérarchie sociale, les membres des classes populaires sont encore nombreux à se rendre au guichet du fisc et sont aussi les plus enclins à se plaindre du niveau des prélèvements. Par comparaison, les classes moyennes s’en accommodent davantage, en usant des différentes possibilités de réduction et de dérogations. Curieusement, ce sont les classes supérieures qui affichent un rapport relativement apaisé à l’impôt : celles et ceux qui disposent de hauts revenus et de patrimoines élevés s’arrangent avec les règles fiscales de façon plus discrète que ne le font d’autres groupes sociaux.

(Alexis Spire : « Résistances à l’impôt, attachement à l’Etat – Enquête sur les contribuables français » – Seuil – 2018

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Sur les GJ

UN TRÈS BON ARTICLE. …. enfin.

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En EA LE VIEILLISSEMENT DU JAPON

sous ce lien une géniale émission….. tout est dit sur les causes et les effets du vieillissement. Prendre des notes.

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fiche de conseil de classe

Questionnaire de premier trimestre

Nom – Prénom :…………………………………………………………………………….

1. Quel bilan dressez-vous de ce premier trimestre? L’avez-vous trouvé difficile/facile ?

Vous estimez que vos relations avec les autres élèves de la classe sont :

très bonnes / satisfaisantes / mauvaises / inexistantes

Observations éventuelles
Vous jugez l’attitude de la classe :

active et intéressée / attentive / correcte / passive / indisciplinée

Observations éventuelles
La quantité de travail demandée est :

trop importante / adaptée / insuffisante

Y a-t-il un jour qui pose problème pour le travail du lendemain ? 

Autres observations :

2. Dans quelle(s) matières vous sentez-vous à l’aise ?

3. Dans quelle(s) matières vous sentez-vous en difficultés ?

4. Comment pouvez-vous expliquer ce bilan ?

5. Quelles difficultés rencontrez-vous (dans la prise de notes, dans l’organisation du travail à la maison, dans la gestion du matériel, dans l’expression orale, etc.) ? Quels sont vos besoins en termes d’aide ?

6. Comment pouvez-vous améliorer vos résultats ?

7. Quelle aide méthodologique aimeriez-vous en AP ?

8. Pensez-vous avoir été bien préparé à votre entrée en première ES ? Que suggérez-vous d’organiser pour vos camarades de l’année prochaine pour les aider ?

9. Quel est votre projet d’orientation pour l’année prochaine ? Quelles études envisagez-vous après le bac, quel métier ?

10. Votre projet actuel est-il différent de celui que vous aviez en entrant au lycée, ou après la classe de seconde ?

Si oui, exposez les raisons de ce changement.

11. Rencontrez-vous actuellement un problème (situation familiale, santé personnelle, autre ) qui risque de perturber votre année scolaire ?

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la fléxibilité du marché du travail suite de dissertation

Vous trouverez dans cet article ce que je n’ai pas pu mettre dans le cours et dans les liens proposés sur l’ENT LEIA au sujet de la dissertation:

Les politiques visant à renforcer la flexibilité du marché du travail sont-elles suffisantes pour lutter contre le chômage ?

quelques éléments de cours …

Lutter contre le chômage structurel par des politiques de formation et de flexibilisation

La persistance d’un chômage massif peut s’expliquer par l’inadéquation entre l’offre et la demande de travail (chômage structurel).

Les politiques de l’emploi peuvent donc chercher à agir soit sur l’offre, soit sur la demande de travail.

->D’une manière générale, les politiques de flexibilité du marché du travail sont des politiques d’inspiration libérale car la flexibilité du marché du travail doit permettre une meilleure rencontre de l’offre et de la demande de travail. Ce sont aussi des politiques de l’offre de biens et services (« politique de l’offre »), c’est à dire en faveur des entreprises qui cherche à agir sur la demande de travail.

-les différentes formes de flexibilité

Pour s’adapter aux fluctuations de la demande, les entreprises doivent avoir un système de production flexible. La flexibilité du marché du travail représente l’ensemble des mesures qui permettent aux entreprises d’adapter leur volume de travail aux évolutions de la demande. On distingue :

  • -la flexibilité externe : recours aux CDD, à la sous-traitance
  • -la flexibilité interne : variation du volume d’heures de travail
  • -la flexibilité fonctionnelle : variation des postes de travail auxquels sont affectés les salariés
  • -la flexibilité salariale : individualisation des rémunérations

->formation initiale, formation continue

Les politiques d’aide au retour à l’emploi, qui agissent sur la formation des chômeurs (comme celle qui soutiennent les revenus) sont plutôt des politiques de la demande (de biens et services), car elles sont en faveur des ménages. Elles cherchent à agir plutôt sur l’offre de travail

Le chômage structurel peut aussi provenir d’une inadéquation des qualifications des individus  (diplômes + expériences professionnelles) avec celles requises pour les emplois (capacités techniques requises par le poste), donc les politiques de formation initiées par l’Etat vont viser à améliorer la formation, afin de rendre les chômeurs (et même tous les actifs) employables.

 

CONCLUSION : Les politiques de l’emploi, ce sont toutes les interventions des pouvoirs publics sur le marché du travail. Les politiques actives sont les politiques de l’emploi qui ont pour objectif de soutenir l’emploi (créer des emplois ou empêcher leur destruction) ; les politiques passives sont les politiques de l’emploi qui ont pour objectif de limiter les effets néfastes du chômage (par le versement d’allocations, par exemple).

Avantages et inconvénients de la flexibilité…

a) La flexibilité peut être avantageuse pour les entreprises et les salariés

-La flexibilité sous ses différentes formes permet d’accroitre la productivité du travail car elle évite que certains salariés soient sous-employés (polyvalence et annualisation)

-La baisse des coûts de production et donc des prix peuvent être obtenues par une meilleure adaptation des besoins de main d’œuvre à la production.

-La flexibilité permet une meilleure circulation des travailleurs d’un secteur à l’autre ce qui favorise le redéploiement des capacités productives pour l’innovation (théorie du déversement)

-La flexibilité quantitative peut éventuellement inciter les entreprises à créer des emplois (même s’il s’agit souvent d’emplois précaires.

-La flexibilité quantitative permet éventuellement aux salariés de mieux  gérer temps de travail et temps de loisirs.

-La flexibilité qualitative en donnant plus de polyvalence aux salariés peut répondre aux exigences accrues de la main d’œuvre (cf toyotisme)

b) La flexibilité peut avoir des effets néfastes

-la flexibilité peut remettre en cause le droit du travail :

Par exemple, les entreprises peuvent utiliser les CDD ou les interims, non pas pour adapter la quantité de main d’œuvre aux besoins mais pour réduire les protections accordées aux travailleurs. Les NFE (les nouvelles formes d’embauche) peuvent alors apparaître comme un nouveau mode de gestion de la main d’œuvre voir comme une nouvelle organisation du travail.

-La flexibilité peut aussi avoir des effets négatifs sur la productivité du travail. Quand le travail est précaire, le salarié peut être moins impliqué, il a moins le temps de développer ses capacités ; la formation permanente aux transformations technologiques peut se révéler sélectives (et exclure par exemple les intérims), l’embauche de jeunes surqualifiés peut être contreproductive.

-la flexibilisation de l’organisation et des rapports de travail génére une précarisation croissante du travail, créant un marché du travail à plusieurs vitesses. Selon les économistes américains M.J.Piore et P.D.Doeringer, il n’existe pas un marché unique du travail, mais un marché segmenté en deux compartiments (on parle alors de dualisme du marché du travail ou de segmentation du marché du travail) avec au centre un marché interne où les grandes institutions et les grandes entreprises recrutent des salariés stables bénéficiant d’un statut négocié avec les syndicats et un marché externe où des emplois précaires sont offerts.

-La précarisation du travail peut avoir des effets néfastes sur la croissance car elles incitent les individus à épargner par précaution et à peu consommer et investir (immobilier).

La précarité des situations entraîne une précarité des ressources ce qui peut entraîner une instabilité de la demande donc de tout le système économique (et social).

Si la flexibilité de l’emploi peut apparaître comme une solution partielle au problème du chômage, elle n’est pas nécessairement la panacée. De plus, il existe des pays où le taux de chômage est équivalent à celui des Etats-Unis et où pourtant le marché du travail est rigide (Europe du Nord)

  • les Formes Particulières d’Emplois sont une catégorie de l’INSEE, qui correspond aux emplois interims, aux CDD et aux emplois aidés.

……………

La flexibilité et le marché du travail un article de 2007

 

 

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une emission de radio pour comprendre les mécanismes de la concurrence

voila une très bonne emission de radio à podcaster

Pour ceux qui suivent l’enseignement d’économie approfondie,

Ce lien vous permettra d’accéder à l’émission de France Culture portant sur le contrôle de la concurrence et la régulation des marchés.

 

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une infographie et un rapport pour le prochain cours de EA

sous ce lien une belle infographie pour comprendre les lien entre  financement de la retraite et vieillissement en a la fin un lien pour le rapport qui lui fait 164 pages

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PAE GRECE un premier pas la carte de la Grèce antique et des images des Cariatides

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un vrai test pour l’orientation

vous trouverez sous ce lien un test certes un peu long à faire mais si efficace pour mieux vous orienter de façon plus fine

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Tes les prix Nobel

Le prix en sciences économiques de cette année récompense la conception de méthodes qui contribuent à répondre à certains enjeux les plus fondamentaux et pressants de notre époque : la croissance soutenable à long terme de l’économie mondiale et du bien-être de la population mondiale.

L’étude de la façon par laquelle l’humanité gère des ressources limitées est au cœur de la science économique et, depuis sa constitution comme science, l’économie a reconnu que les plus importantes contraintes sur les ressources concernent la Nature et le savoir. La Nature dicte les conditions dans lesquelles nous vivons et le savoir définit notre capacité à gérer ces conditions. Cependant, malgré leur rôle central, les économistes n’ont généralement pas étudié comment la Nature et le savoir sont affectés par les marchés et les comportements économiques. Les lauréats de cette année, Paul M. Romer et William D. Nordhaus, ont élargi le champ de l’analyse économique en concevant des outils qui nous permettent d’examiner comment l’économie de marché influence à long terme la Nature et le savoir.

Le savoir. Pendant plus d’un siècle, l’économie mondiale a crû à un rythme remarquable et assez régulier. Quand quelques pourcents de croissance économique par an s’accumulent sur plusieurs décennies, voire plusieurs siècles, cela bouleverse vraiment la vie des gens. Cependant, la croissance a progressé bien plus lentement durant l’essentiel de l’histoire humaine. Elle varie aussi d’un pays à l’autre. Donc, qu’est-ce qui explique pourquoi la croissance survient à un tel moment et à tel endroit ? La réponse qu’avancent habituellement les économistes est le progrès technique, à travers lequel des volumes croissants de savoirs sont incarnés dans les technologies créées par des inventeurs, des ingénieurs et des scientifiques. Au début des années quatre-vingt, quand il était un étudiant en doctorat à l’Université de Chicago, Paul Romer a commencé à développer la théorie de la croissance endogène, où les avancées technologiques ne proviennent pas simplement de sources externes – exogènes -, comme le supposaient jusqu’alors les modèles économiques. En fait, elles sont créées par des activités marchandes. Les constats de Romer nous permettent de mieux comprendre quelles sont les conditions de marché qui favorisent la création de nouvelles idées pour des technologies rentables. Ses travaux nous aident à concevoir des institutions et des politiques qui peuvent améliorer la prospérité humaine en instaurant les bonnes conditions pour le développement technologique.

La Nature. William Nordhaus a commencé ses travaux dans les années soixante-dix, après que les scientifiques aient commencé à se préoccuper à l’idée que la combustion des énergies fossiles puisse entraîner un réchauffement climatique et des effets pernicieux d’un tel changement climatique. Nordhaus s’est donné la tâche immense d’examiner les liens de causalité bidirectionnels entre l’activité humaine et le climat, en combinant théories fondamentales et résultats empiriques tirés de la physique, de la chimie et de l’économie. Il n’a donc pas simplement considéré la Nature comme une contrainte sur l’activité humaine, mais il a également pris en compte le fait que la première soit en retour grandement influencée par cette dernière. Nordhaus est la première personne à concevoir des modèles simples, mais dynamiques et quantitatifs, du système économique-climatique mondial, désormais appelés « modèles intégrés d’évaluation » (integrated assessment models, IAM). Ses outils nous permettent de simuler comment l’économie et le climat évolueront dans le futur selon des hypothèses alternatives à propos des fonctionnements de la Nature et de l’économie de marché, notamment à propos des politiques mises en œuvre. Ses modèles apportent des réponses à des questions à propos de la désirabilité de différents scénarii mondiaux et différentes interventions politiques.

Les imperfections dans le marché mondial. Les deux lauréats ont mis en lumière les effets de débordement (spillover effects) dans la société, c’est-à-dire les conséquences sur autrui qui ne sont pas prises en compte par les individus, notamment les innovateurs et les pollueurs. Toute idée de nouvelle technologie, qu’importe là où elle apparaît, peut être utilisée pour la production de nouveaux biens et de nouvelles idées ailleurs, aujourd’hui ou dans le futur. De même, l’émission d’une unité supplémentaire de carbone se diffuse rapidement dans l’atmosphère et contribue au changement climatique, affectant toute l’humanité aujourd’hui et dans le futur. Les économistes parlent d’ »externalités » pour qualifier ces effets de débordement. Les externalités étudiées par Romer et Nordhaus ont une portée mondiale et des conséquences à long terme. Comme les marchés non régulés vont générer des conséquences inefficaces en présence de telles externalités, le travail de Romer et de Nordhaus fournit des arguments convaincants pour l’intervention publique.

L’innovation technologique

Motivation. Les différences de long terme dans les taux de croissance ont d’énormes conséquences. Si deux économies commencent avec le même PIB par tête, mais que l’une d’entre elles croît à un rythme annuel supérieur de 4 points de pourcentage à la seconde, alors elle sera presque cinq fois plus riche que la seconde au bout de 40 ans. Un modeste écart de croissance de 2 points de pourcentage permet à la première économie d’être deux fois plus riche que la seconde au bout de 40 ans.

A la fin des années quatre-vingt, Romer a constaté que les taux de croissance du revenu dans les données observées variaient grandement d’une économie à l’autre. Le graphique 1, basé sur l’un des articles de Romer, représente le revenu par tête en 1960 et la croissance moyenne pour les 25 années suivantes pour plus de 100 pays ; un graphique avec des données actualisées lui ressemblerait fortement. Chaque carré représente un pays. Comme le graphique le montre, les écarts de taux de croissance typiques entre des pays s’élevaient à plusieurs points de pourcentage et il y a un grand écart (autour de 10 points de pourcentage) entre les pays ayant la plus forte croissance et les pays ayant la plus faible croissance. De plus, le graphique ne montre pas de relation systématique entre le revenu initial et la croissance : certains pays pauvres croissent rapidement, tandis que d’autres décroissent. Romer en conclut qu’il était crucial de comprendre les causes de tels écarts persistants et significatifs entre les taux de croissance et il commença à rechercher une explication.

GRAPHIQUE Revenu par tête (relativement à celui des Etats-Unis) et croissance annuelle subséquente du revenu par tête

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source : Romer (1987)

Des zones d’ombre empiriques et théoriques. Comme Romer l’a noté, la théorie de la croissance qui dominait à l’époque (le modèle de croissance de Solow, qui fut couronnée par le prix Nobel de sciences économiques en 1987) pouvait expliquer plusieurs aspects de la croissance économique, mais pas des écarts amples et durables dans les taux de croissance entre les pays. Le modèle de Solow prédit que les pays les plus pauvres devraient croître plus rapidement les pays riches et rattraper ces derniers assez rapidement, ce qui n’est pas ce que suggère le graphique 1. Dans ce modèle, une économie peut croître en accumulant du capital physique, par exemple des machines ou des infrastructures, mais la croissance tirée par le capital peut s’essouffler à long terme ; pour toute technologie donnée, tout supplément de capital accroît de moins en moins la production. Pour qu’il y ait une croissance durable à long terme (et des écarts de croissance) dans le modèle, l’hypothèse était que les travailleurs deviennent de plus en plus productifs grâce aux avancées technologiques, bien qu’à des rythmes différents d’un pays à l’autre. Par conséquent, le modèle de Solow n’explique pas ces tendances, parce que les changements technologiques n’y arrivent que de façon exogène, depuis une « boîte noire ».

L’une des percées majeures de Romer est d’avoir ouvert cette boîte noire et d’avoir montré comment les idées pour les nouveaux biens et services (produits par de nouvelles technologies) peuvent être créées dans l’économie de marché. Il a aussi montré comment un tel changement technologique endogène peut influencer la croissance économique et quelles politiques sont nécessaires pour que ce processus fonctionne bien. Les contributions de Romer ont eu un énorme impact dans le champ de la science économique. Ses explications théoriques ont posé les fondations pour la recherche sur la croissance endogène et les débats suscités par ses comparaisons internationales de croissance ont ouvert la voie à de nouvelles et prometteuses recherches empiriques.

Qu’y a-t-il de spécial à propos de la croissance tirée par les idées ? Pour répondre à cette question, nous devons comprendre comment les idées diffèrent des biens comme le capital physique ou du capital humain. Romer nous apprend à considérer les biens en utilisant deux dimensions (…). Dans la première dimension, le capital physique et le capital humain sont des biens rivaux. Si une machine ou un ingénieur formé sont utilisés dans une usine, cette machine ou cet ingénieur ne peuvent être utilisés simultanément dans une autre usine. Par contre, les idées sont des biens non rivaux : une personne ou une entreprise utilisant une idée n’empêchent pas les autres de l’utiliser également.

Dans la seconde dimension, ces biens peuvent être excluables (ou exclusifs) si les institutions ou régulations permettent d’empêcher quelqu’un de les utiliser. Pour certaines idées, telles que les résultats tirés de la recherche fondamentale, c’est difficile, voire impossible : pensez à des outils mathématiques comme le théorème de Pythagore. Pour d’autres idées, cependant, les utilisateurs peuvent être exclus via des mesures techniques (telles que le cryptage) ou la réglementation des brevets. L’un des articles de Romer a montré comment la rivalité et l’excluabilité des idées déterminaient la croissance économique.

Romer croyait qu’un modèle de marché pour la création d’idées devait prendre en compte le fait que la production de nouveaux biens (qui se base sur les idées) puisse avoir des coûts déclinant rapidement : la première ébauche a un énorme coût fixe, mais la réplication a de faibles coûts marginaux. Une telle structure des coûts implique que les entreprises doivent avoir une marge, c’est-à-dire fixer le prix au-dessus du coût marginal, de façon à ce qu’elles puissent récupérer le coût fixe initial. Les entreprises doivent donc avoir un certain pouvoir de monopole, ce qui n’est possible que pour des idées suffisamment excluables. Romer a aussi montré que la croissance tirée par l’accumulation d’idées, à la différence de la croissance tirée par l’accumulation de capital physique, ne présente pas forcément de rendements décroissants. En d’autres termes, la croissance tirée par les idées peut rester soutenue à long terme.

Les imperfections de marché et la politique économique. En principe, le nouveau savoir créé par une recherche-développement fructueuse peut profiter aux entrepreneurs et aux innovateurs partout dans le monde, maintenant et dans le futur. Cependant, les marchés ne récompensent en général pas totalement les créateurs de nouveaux savoirs pour tous les bénéfices de leurs innovations, ce qui signifie que (aussi longtemps que le nouveau savoir est socialement bénéfique), il y aura trop peu de recherche-développement. De plus, comme les incitations de marché pour la recherche-développement prennent la forme de profits de monopole, il n’y aura typiquement pas de provision adéquate de nouvelles idées une fois qu’elles auront été inventées. La recherche subséquente a montré comment les résultats de marché peuvent aussi entraîner trop de recherche-développement : soit lorsque les nouvelles idées conduisent à l’éviction de trop nombreuses entreprises existantes lors du processus de destruction créatrice, soit lorsque les nouvelles idées augmentent les technologies socialement néfastes, par exemple en permettant une extraction ou un usage excessifs de carburants fossiles, ce qui nuit au climat.

Pour résumer, Romer a montré que des marchés non régulés vont générer un changement technologique, mais qu’ils tendent à ne pas fournir assez de recherche-développement, donc pas assez de nouveaux biens. Pour répondre à cette insuffisance, il faut des interventions publiques bien conçues, comme les subventions à la recherche-développement et la réglementation des brevets. Son analyse dit que de telles politiques sont vitales pour la croissance à long terme, pas simplement dans un pays, mais au niveau mondial. Elle fournit aussi un guide pour la conception des politiques : le système de brevets doit parvenir à établir un bon équilibre entre les incitations à créer de nouvelles idées (en accordant à leurs concepteurs certains droits au monopole) et la capacité des autres à les utiliser (en limitant ces droits au monopole dans le temps et dans l’espace).

Le changement climatique

L’activité humaine a contribué à une hausse rapide des températures mondiales moyennes au cours du dernier siècle. Même s’il y a une certaine ’incertitude autour de l’ampleur à laquelle cela va affecter le climat dans le futur, le consensus en sciences naturelles est que ce sera « selon toute probabilité un impact significatif ».

Motivation. Dans les années soixante-dix, quand il était un jeune étudiant à l’Université de Yale, William Nordhaus a étudié en profondeur les données naissantes sur le réchauffement climatique et ses causes probables et il en conclut qu’il devait faire quelque chose. Sa crainte l’a amené à développer de nouveaux outils pour nous aider à comprendre comment l’économie peut générer un changement climatique, ainsi que les conséquences sociétales du changement climatique. Il voulait développer un cadre qui permette d’analyser le changement climatique en termes de coûts et bénéfices.

Un défi de taille. Comme Romer, Nordhaus étendit le modèle de croissance de Solow avec un important ensemble d’effets de débordement en incluant le réchauffement climatique provoqué par les émissions de carbone. Dans ce cas, les externalités en question étaient essentiellement négatives. Surtout, les mécanismes et causes du changement climatique anthropique impliquent des processus étudiés dans les sciences naturelles. Une analyse globale du changement climatique requiert donc une approche vraiment intégrée, dans laquelle la société et la Nature interagissent.

Prenant conscience de la nécessité d’une telle approche, Nordhaus est à l’origine du développement des modèles intégrés d’évaluation (integrated assessment models). (…)

Des recommandations en matière de politique.Selon les travaux de Nordhaus, le remède le plus efficace pour les problèmes provoqués par les émissions de gaz à effet de serre serait un dispositif mondial de taxes carbone qui soient imposées uniformément dans tous les pays. Cette recommandation s’appuie sur un résultat formulé dans les années soixante par un économiste britannique, Arthur Cecil Pigou, à savoir que chaque émetteur paye le coût social du dommage provoqué par ses émissions via un prix approprié. Un système mondial de droits d’émission peut parvenir au même résultat, à condition que les quotas soient fixés à un niveau suffisamment faible pour entraîner un prix du carbone suffisamment élevé.

Cependant, les modèles IAM ne fournissent pas seulement des résultats qualitatifs. Ils nous permettent de calculer des trajectoires quantitatives pour la meilleure taxe carbone et montrent comment ces trajectoires dépendent crucialement d’hypothèses à propos des paramètres : par exemple, la sensibilité de la température mondiale à la concentration de carbone dans l’atmosphère, la durée pendant laquelle celui-ci reste dans l’atmosphère et l’ampleur des dommages provoqués par le changement climatique. Une récente étude de Nordhaus offre une bonne illustration de la façon par laquelle les modèles IAM peuvent être utilisés pour analyser la politique. Il simule quatre politiques dans la dernière version de son modèle DICE en utilisant les meilleures estimations pour les paramètres du changement climatique :

GRAPHIQUE Emissions de CO2 (en gigatonnes par an) selon différents scénarii

William_Nordhaus__differents_scenarios_emissions_CO2_taxe_carbone_Stern.png

Dans le scénario n° 1, il n’y a pas de mesures de politique climatique de plus que celles déjà en place en 2015. Dans le scénario n° 2, les taxes carbone maximisent le bien-être mondial, selon des hypothèses économiques conventionnelles à propos de l’importance du bien-être des générations futures. Dans le scénario n° 3, les taxes carbone maximisent le bien-être mondial en donnant un plus grand poids au bien-être des générations futures que dans le scénario n° 2, comme le suggère The Economics of Climate Change: The Stern Review de 2007. Dans le scénario n° 4, les taxes carbone sont suffisamment élevées pour maintenir le réchauffement climatique en-deçà des 2,5°C tout en réduisant le coût en bien-être mondial.

Le graphique montre l’évolution des émissions de CO2 au cours du temps dans chacun de ces quatre scénarii. Les différentes trajectoires pour les taxes carbone signifient que les émissions (et donc l’ampleur du changement climatique) sont très différentes d’un scénario à l’autre. Dans le scénario n° 2, les taxes débutent à environ 30 dollars la tonne de CO2 et augmentent au cours du temps à peu près au même rythme que le PIB mondial. Dans les scénarii n° 3 et 4, qui simulent des réductions d’émissions plus fortes, les taxes sont six à huit fois plus importantes.

De grandes incertitudes. Dans les sciences naturelles et dans les sciences sociales, il y a des incertitudes à propos de plusieurs aspects du changement climatique. Par exemple, nous ne savons pas exactement à quel point le climat est sensible aux émissions de gaz à effet de serre ou quel est la probabilité que l’on atteigne un point tournant mondial au-delà duquel le climat échappe à tout contrôle. De même, nous ne savons pas tout à propos des dommages économiques et humains provoqués par le changement climatique et du coût de la décarbonisation.

Naturellement, les IAM développés par Nordhaus ne peuvent éliminer cette incertitude. Cependant, ses modèles peuvent analyser comment le prix approprié du carbone est affecté par différentes possibilités, par exemple une plus forte sensibilité du climat ou une plus forte probabilité d’un point tournant mondial dangereux à 2° C de réchauffement. (…Smilie: ;) »

Académie royale des sciences de Suède, « Integrating nature and knowledge into economics », 8 octobre 2018. Traduit par Martin Anota

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