La conscience et l’inconscient

15 novembre 2009 2 Par caroline-sarroul

LA CONSCIENCE (et l’inconscient)

INTRODUCTION : définitions
1. être conscient c’est être présent à soi et au monde ; être là, sentir, prendre acte, ( il y a le froid par exemple) être capable de réagir. C’est la conscience immédiate. Un système sensori-moteur et un système nerveux central en bon ordre suffisent pour être conscient en ce sens.
Ne pas être conscient en ce sens là, c’est être endormi, ivre mort ou atteint d’une pathologie de la perception. Etre conscient, c’est percevoir.
2. être conscient, c’est percevoir qu’on perçoit, se rendre vraiment compte de ce dont on a une conscience immédiate ; ce n’est pas seulement être là, c’est savoir qu’on est là. C’est ce qu’on appelle la conscience réfléchie, qui fait retour sur ce dont on a une conscience immédiate.
D’où un double mouvement :
– distanciation (mettre à distance la sensation de froid qui m’engourdit, me glace, me colle comme un objet pour la pensée, plus seulement comme un vécu , un état. C’est ce qui se passe quand je porte attention à quelque chose dont j’ai par ailleurs la sensation. Il y a pas seulement le froid, il y a désormais le froid pour moi.
– d’appropriation, de synthèse : il y a aussi moi dans le froid. Percevoir qu’on perçoit, c’est en même temps que l’on prend conscience de l’état de conscience ( distanciation ) , prendre conscience que cet état de conscience est le mien : c’est moi qui ait froid.
Ce qui signifie qu’en même temps que je perçois que je perçois, je m’entraperçois. Je me perçois comme sujet de cet objet ( état de conscience) même si je ne suis pas l’objet de ma conscience.
La conscience réfléchie est donc en même temps que la pleine conscience des choses, la conscience de soi.

En ce sens, ne pas être conscient, c’est être par exemple comme le somnambule : il perçoit mais ne se perçoit pas percevant et du coup n’a aucune mémoire de ces promenades nocturnes ( ni de compte à rendre) qu’il ne ramène pas à soi ; c’est aussi le cas du schizophrène qui ne ramène pas à lui ses actes, par distraction : il a eu une intention, mais c’est à un autre qu’il prête l’action ; c’est aussi le cas de la distraction pathologique : impossibilité de synthétiser tous les actes et états de conscience.

Cette conscience réfléchie fait :
1) qu’on est capable de faire retour sur ce dont on a une conscience immédiate : de s’interroger, d’analyser, de douter, donc de penser. C’est ce qui  permet la conscience morale ( je peux juger et me juger, attribuant à moi-même mes actes et états de conscience).
2) qu’on « possède le je dans sa propre représentation », on se pense comme UN et IDENTIQUE ( Même) sous les divers états de conscience. Sans cela, on se perdrait dans tous nos états de conscience, sentiment de dispersion, d’éclatement. C’est ce qui fait qu’on se représente comme « une seule et même personne »

Texte de Kant, texte 1 p. 190 : Kant considère que cette conscience réfléchie est un « privilège humain » donc une qualité essentielle et distinctive de l’homme, acquise ( ce n’est que vers 1 an que l’enfant prend conscience de lui-même en particulier grâce au langage, au mot “Je”. Les psychologues confirme cette idée que le soi doit émerger, que se sentir soi, ce n’est pas encore se savoir soi, se distinguer des autres, se penser à la première personne) . Et par là, il est une personne, « une fin en soi » et  a une dignité, une valeur absolue ; l’animal comme un objet n’est qu’un « moyen », a un prix, une valeur absolue

Mais Nietzsche souligne lui les limites de cette conscience de soi, via son origine. C’est parce que l’homme est un être inadapté, qu’il est un être qui a besoin des autres, qu’il doit leur dire ce dont il a besoin et qu’il doit se le dire et être conscient pour cela, mais pas plus : superficialité de la conscience. C’est donc un privilège bien fragile,  peut-être  usurpé ( certains animaux ont cette conscience de soi)
et lourd à assumer ( la conscience entraîne la responsabilité devant soi et les autres).

I. de la certitude d’être 

A. Descartes et le Cogito ergo sum ( “je pense donc je suis”).

On y retrouve  donc la différence entre le domaine des moeurs ( action, la morale provisoire parce qu’il faut agir et que l’irrésolution entraîne ou l’inéfficacité ou l’apathie) et celui du jugement, le principe du doute hyperbolique ( exagéré et feint) et ses conséquences ( les deux sources de nos connaissances ( sens et raisonnement) se tarissent et la réalité même de notre pensée est rejetée. Tout devient faux, mais si tout est faut, c’est parce qu’il y a doute; douter, c’est penser et si je pense, je sais que je pense et donc que je suis. C’est une intuition indubitable, que l’on peut prendre comme une vérité et même comme un modèle de vérité: tout ce qui se présentera avec la même évidence, la même clarté pourra être considéré vrai.

Mais Descartes ne s’arrête pas là, il va jusqu’à dire que: non seulement, je sais que je suis (1) , mais je sais aussi ce que je suis (2). Je suis une substance pensante, une âme.

Le passage de 1 à 2, c’est ce qu’on appelle le saut substantialiste et il s’appuie sur un DUALISME ( je suis esprit et j’ai un corps) et sur un SUBSTANTIALISME ( sub-stance, ce qui se tient dessous; il y aurait donc l’existence d’une substance pensante, sous mes pensées et états de consciences.

B.  Critiques du cogito

– le dualisme: si on distingue la pensée et l’étendue, l’âme et le corps, comment expliquer que l’âme immatérielle puisse commander au corps ou qu’il puisse l’affecter, d’où des monismes ( 1 seul principe, mono) qui semblent plus cohérents: tout est matériel (matérialisme) , tout est esprit ( immatérialisme de Berkeley) cf : le cours sur matière et esprit

– le substantialisme: pourquoi associer le Je à une substance pensante, parce qu’on a l’a priorui que ce qui est propre à l’homme, c’est la pensée; parce qu’on pense la prise de conscience sous la forme d’une appropriation, d’une digestion, on ramène à soi ce dont on prend conscience; alors qu’on pourrait la penser comme un mouvement vers, on va vers ce dont on prend conscience. La conscience est intentionalité, c’est ce que soutiennent Husserl et Sartre.  « connaître, c’est s’éclater vers »

De plus,

-ce n’est pas parce qu’il y a constat d’une activité que j’en suis forcément, ce n’est pas parce que ça pense, que c’est moi qui pense, que je suis pensée. Pour Nietzsche, Descartes est victime de la grammaire

– pour affirmer que je sais ce que je suis, il faut ajouter à l’idée d’un je qui peut en effet être intuitionné comme une évidence, une expérience de ce Je OR comme le souligne l’empiriste Hume, on ne peut pas faire l’expérience ( la rencontre de son Je), car pour cela il faudrait le saisir en dehors de tout état de consciencen ce qui revient à dire que nous sérions inconscient et dans ce cas le je disparaît avec la conscience
S’il y a un je , c’est un « je transcendantal » c’est-à-dire qui est  condition de toute expérience possible, mais qui ne peut être l’objet d’aucune expérience et donc Descartes a commis un paralogisme, un faux raisonnement. Il est allé trop loin.

Transition: ceci dit, cette conscience de soi fait qu’on se sait être un je, une personne, mais elle ne me dit pas qui je suis, avoir un je, ce n’est pas encore avoir un moi ( un moi empirique)

II. la conscience est-elle connaissance?

A. Du je au moi: la connaissance de soi

 – x = je : être un je, posséder le je dans sa propre représentation : avoir la conscience d’être, d’être une seule et même personne, un sujet par opposition aux objets, mais un sujet parmi les sujets, qui sait qu’il est, ce qu’il est, se distingue des autres, mais sans pour autant savoir ce qui le distingue des autres. Un “je” impersonnel, un “je” transcendantal, dira Kant, sur lequel va pouvoir être construit le moi.-

– je = moi: avoir un moi et être moi : moi, c’est je vu par je. Avoir un moi, ce n’est pas seulement, ce n’est pas seulement savoir que l’on est une seule et même personne, c’est savoir QUI on est, quelle est notre personnalité, quel individu nous sommes. C’est le moi psychologique ou empirique, qui fait que je ne suis pas toi mais aussi que je reste moi sous les changements. Avoir un moi, c’est avoir une identité. Cette identité existe de manière objective ( et en ce sens je ne peux pas ne pas être moi): je suis en tant qu’être vivant numériquement un , donc distinct des autres qui peuvent me ressembler, être mes égaux, mais ne peuvent pas à cause de cette séparation spatiale être identique à moi ( c’est le principe des indiscernables de Leibniz); j’ai un état civil; je suis identifié par les autres; j’ai un corps, un code génétique, etc… Mais ce n’est pas parce que je suis moi objectivement que je suis moi pour moi; mon identité est aussi et surtout subjective ( ce que je pense être moi n’est pas forcèment ce que je suis objectivement): je suis ce à quoi je m’attache, mais aussi mon vécu , ma mémoire ( exemple de l’inversion des corps et âmes du prince et du savetier à la résurrection imaginé par Locke). L’identité objective fait de moi un homme différent des autres ( je ne peux pas ne pas être moi) , mais l’identité subjective fait de moi, moi égal à moi-même ( je suis moi pour moi).

– moi= moi: être soi-même: cela renvoie à un accord entre moi et moi: être moi-même, c’est d’abord être en accord externe entre ce que je suis et ce que je parais, ce que je pense et fais ( pas de masque ou s’il y a masque, je sais que ce n’est que le je de la comédie humaine), … mais c’est surtout être en accord interne: être soi-même présuppose que l’on sait qui on est, on a alors le sentiment d’être en accord avec cela, mais il se peut que tout à coup on se révèle étranger à soi: impression d’être devenu quelqu’un d’autre, d’avoir été dépersonnalisé, d’être possédé dans la passion, comme il  se peut qu’on se rende compte que l’on est pas encore pleinement soi: en construction, en recherche de ce que l’on est. Etre soi-même, ce serait alors être en accord avec ce qu’on doit être, ou se doit d’être.

Transition: être soi-même présuppose donc qu’on se connaisse!

B. la connaissance de soi
 
1. les obstacles
Cette connaissance semble:
 – gênée parles autres qui nous emprisonnent dans des jugements, dans des rôles, qui nous habitent, conditionnant nos pensées, nos valeurs, nos désirs MAIS aussi par nous-mêmes:

– notre constitution , le fait que nous sommes en permanente construction et refonte, cherchant toujours à coïncider avec ce que nous pensons, souhaitons être. Or la connaissance présuppose un objet défini et fini. 

– notre place, le fait que nous  manquons de distance par rapport à soi : si la conscience est « dévoilante », elle fait de nous des « détecteurs de l’être » à défaut d’en être les créateurs ; exemple du paysage, ( Sartre, p 30) , elle est en quelque sorte aveugle sur elle-même comme l’œil qui voit tout mais ne peut se voir lui-même. D’où une absence de distance critique.

 – le fait que la conscience fasse en même temps que la grandeur de l’homme sa misère : idée de la conscience malheureuse, qui fait qu’on n’a pas vraiment ou souvent le désir de se connaître, car à la fois on en sait déjà TROP et PAS ASSEZ . D’où fuite de soi dans le divertissement au sens de Pascal ( “di-vertir”= regarder ailleurs; être affairé, au milieu des autres pour ne pas être face à soi…)

 – la superficialité de notre conscience qui n’ est née que tardivement par besoin d’assistance, de communiquer pour survivre selon Nietzsche et que la nature nous a donné plus pour la survie de l’espèce que pour la réalisation de soi individuelle. On est juste assez conscient pour se sentir responsable et avoir l’illusion d’être libre. Ce qui permet à certains de nous tenir, de nous dominer, de faire en sorte qu’on ne sorte pas du troupeau. D’où absence de transparence, de translucidité de la conscience que renforce la théorie psychanalytique freudienne de l’inconscient.

2. les médiations

Cette connaissance est  favorisée par :

  •  autrui qui est garant de mon identité : l’identité du sujet dans le temps se fonde sur « le témoignage des autres » selon Leibniz dans Nouveaux essais sur l’entendement humain. Ma conscience fonctionne par intermittence, elle est soumise au temps ( j’oublie) mais autrui me rappelle que c’est moi hier qui ait fait cela, même si aujourd’hui je ne l’assume pas ou ne m’en rappelle pas d’où identité morale de la personne.

Les autres sont aussi des alter ego, alter donc à distance pour me juger, mais aussi des ego semblables à moi qui me permettent  de mieux me comprendre ou me donnent l’occasion de me réaliser.Et enfin par leur simple présence, il m’oblige à me voir comme un objet et à me juger ( et à éprouver par exemple de la honte), alors que seul je me vois comme un sujet ( qui ne se réduit pas à ce qu’il est là), ou je ne me vois même pas ( absorbé dans mes actes ou sensations). D’où le fameux “l’enfer, c’est les autres” dans Huis clos, non pas parce qu’ils me jugent, mais parce qu’ils m’obligent à me juger, à prendre conscience de ce que je suis et de ce qui est mon devoir selon Lévinas. Et même s’ils ne sont pas là, ils m’accompagnent. Il suffit que je les imagine là!

Et enfin par leur simple présence, il m’oblige à me voir comme un objet et à me juger ( et à éprouver par exemple de la honte), alors que seul je me vois comme un sujet ( qui ne se réduit pas à ce qu’il est là), ou je ne me vois même pas ( absorbé dans mes actes ou sensations). D’où le fameux “l’enfer, c’est les autres” dans Huis clos, non pas parce qu’ils me jugent, mais parce qu’ils m’obligent à me juger, à prendre conscience de ce que je suis et de ce qui est mon devoir selon Lévinas. Et même s’ils ne sont pas là, ils m’accompagnent. Il suffit que je les imagine là!

  • mon expérience, le vécu,  on se découvre en s’éprouvant
  • le langage: l’usage du Je selon Kant qui fait que nd’un vague sentiment de soi, on pense à une idée claire de son identité, par les mots, on se pense , on se raconte . ce que je suis , c’est le récit que je fais de moi-même: identité narrative.
  • mes oeuvres: c’est ce que souligne Hegel avec” son cogito pratique”. Nier le donné naturel est proprement humain, nos oeuvres portent notre cachet personnel et sont là devant nous la matérialisation de notre existence, d’autant plus solide que l’oeuvre n’est pas consommée, usée par usage, comme l’oeuvre d’art vouée à être contemplée.

Complément . De la connaissance de soi à la reconnaissance de soi.

exposé de la dialectique du maître et de l’esclave dans la phénoménologie de l’esprit de Hegel : 

Pour Hegel, en tant qu’homme conscient, nous menons une double existence : en tant qu’être vivant, l’homme a une existence en soi, nous sommes là, « enfoncés dans l’être de la vie », chose parmi les choses, objet parmi les objets mais en tant qu’être conscient, il a aussi une existence  pour soi. Il est donc d’un côté une chose parmi les choses et de l’autre, un sujet, au-dessus des choses, capable de les penser, de les nier ( les consommer et les transforner par l’éducation et le travail), de les dépasser, c’est toute la différence entre le besoin (vital) et le désir d’ailleurs. Bien que dans le monde (la matière, la nature), l’homme se sent dés lors appartenir à un autre monde (le monde humain), à un autre ordre des choses (celui de l’esprit).

Mais il a besoin d’y être accueilli et reconnu par les autres membres pour s’en sentir membre à part entière. D’où le désir d’être reconnu comme sujet par les autres sujets tout en étant tenté de les n,ier en tant d’objet. En effet , le problème, c’est qu’on voit d’abord l’autre comme une chose parmi les choses en quelque sorte, puisqu’il est d’abord un objet de et pour ma conscience (et même soi finalement, on se voit d’abord comme un être vivant attaché à la vie). Et réciproquement, l’autre me voit d’abord comme objet.

Mais comme chacun veut être reconnu comme sujet, il va y avoir conflit, lutte. Le but de cette lutte est de montrer à l’autre que, bien qu’enfoncé dans l’être de la vie, je suis capable de dépasser cela pour m’affirmer comme esprit, sujet, liberté. Et, c’est pourquoi Hegel présente cette lutte comme une lutte à mort. Car c’est face à la mort qu’on peut évaluer son attachement à la vie du corps comme à celle de l’esprit. Jusqu’où sommes-nous prêt à aller pour s’affirmer esprit, jusqu’au risque de sa vie et éventuellement à  la mort du corps?

Hegel va imaginer que dans cette lutte l’un va céder, c’est-à-dire va préférer plutôt que de rsiquer sa vie, de mourir au monde matérielle, perdre sa liberté, en gardant sa vie sauve au prix du sacrifice de sa liberté ; parce qu’il est trop attaché à son existence en soi, parce qu’il est encore pour lui objet (esclave de l’en soi en quelque sorte), il sera esclave et l’autre, qui, lui, était prêt à mourir pour être reconnu comme sujet, sera le maître.

Mais à ce stade là, ni l’un ni l’autre n’est finalement satisfait dans son désir de reconnaissance : l’esclave n’est pas reconnu comme sujet, mais le maître n’est pas reconnu comme sujet par un sujet pour soi, par un égal. Frustration des deux côtés.

Mais ensuite l’esclave, selon Hegel, va prendre conscience qu’il est sujet dans son travail forcé au travers de ses productions (une part de lui face à lui) et de sa capacité à maîtriser, à transformer le monde de l’en soi (il est donc au-dessus et homme !), de le faire sien. Il devient par là pour lui même un sujet.

C’est ce que confirme ce texte de Kojève commentant Hegel: « Le Maître force l’Esclave à travailler. Et en travaillant, l’Esclave devient maître de la Nature. Or, il n’est devenu l’Esclave du Maître que parce que— au prime abord — il était esclave de la Nature, en se solidarisant avec elle et en se subordonnant à ses lois par l’acceptation de l’instinct de conservation. En devenant par le travail maître de la Nature l’Esclave se libère donc de sa propre nature, de son propre instinct qui le liait à la Nature et qui faisait de lui l’Esclave du Maître. En libérant l’Esclave de la Nature, le travail le libère donc aussi de lui-même, de sa nature d’Esclave : il le libère du Maître. Dans le Monde naturel, donné, brut, l’Esclave est esclave du Maître. Dans le Monde technique, transformé par son travail, il règne- ou, du moins, règnera un jour — en Maître absolu. Et cette Maîtrise qui naît du travail, de la transformation progressive du Monde donné et de l’homme donné dans ce Monde, sera tout autre chose que la Maîtrise « immédiate » du Maître. L’avenir et l’Histoire appartiennent donc non pas au Maître guerrier, qui ou bien meurt ou bien se maintient indéfiniment dans l’identité avec soi-même, mais à l’Esclave travailleur. Celui-ci, en transformant le Monde donné par son travail, transcende le donné et ce qui est déterminé en lui-même par ce donné ; il se dépasse donc, en dépassant aussi le Maître qui est lié au donné qu’il laisse — ne travaillant pas —intact. Si l’angoisse de la mort incarnée pour l’Esclave dans la personne du Maître guerrier est la condition sine qua non du progrès historique, c’est uniquement le travail de l’Esclave qui le réalise et le parfait. »

D’où à nouveau l’idée d’un « cogito pratique » face au « cogito théorique » de Descartes. Mais ayant pris conscience qu’il est un sujet en devenant maître de la nature, sujet au-dessu des objets, il va devoir à nouveau lutter pour être reconnu, on peut penser que cette lutte est sans fin (toujours à recommencer en soi et avec les autres) et que la reconnaissance obtenue est rarement celle qu’on attend et toujours à conquérir.

Si les animaux luttent pour survivre, les hommes luttent pour être reconnus.

3.  L’inconscient: l’hypothèse de Freud

Attention de ne pas confondre: Etre inconscient et avoir un inconscient
L’inconscient est au départ un adjectif qualifiant des états, des perceptions, des motifs, des connaissances. Bien avant freud, on parle de cela :
– au quotidien pour qualifier le somnambule, l’irresponsable ( moral)
– en philosophie : théorie de la réminiscence de Platon, Leibniz (1646-1716) et les perceptions inconscientes car perçues mais trop petites ou trop nombreuses, pour qu’on perçoive qu’on perçoit  p38), Schopenhauer qui suggère l’idée que la cause de nos volontés nous échappe : nous croyons vouloir mais en réalité ça veut en nous, c’est le vouloir vivre qui est à l’origine tout, qui est une force irrationnnelle et insatiable de vie, qui explique la volonté de vivre des végétaux et animaux, mais aussi nos désirs que nous croyons choisir et être les nôtres.
– en neurologie : Charcot ( 1825-1893) et Janet (1859-1947), la distraction pathologique chez les hystériques ( faculté de synthèse altérée par une lésion, les phénomènes post-hypnotiques

D’où l’idée de subconscient= conscience affaiblie, obscure= absence de conscience réfléchie.

MAIS ici ON PENSE LE PSYCHISME= CONSCIENCE, or FREUD (1856-1939) pense le psychisme comme composé de 2 parties : une consciente et une inconsciente, échappant radicalement à la conscience. C’est le cas Anna.O (1859.1936)qui va inspirer à Freud et au DR BREUER, cette hypothèse d’un inconscient.

  • le cas Anna. O: une jeune fille, à 21 ans, de 1880 à 1882, alors que son père est gravement malade, développe une hystérie, c’est-à-dire qu’elle présente un ensemble de troubles physiques ( contracture du cou, du côté droit, strabisme, hydrophobie, toux…) et psychologiques ( hallucinations, troubles du langage, début de schizophrénie…) sans cause organique. Le Dr Breuer profite des états seconds (hypnotique) dans lesquels plonge Anna.O tous les soirs pour la faire parler. C’est ce que précise  Breuer dans Etudes sur l’hystérie en 1896 contrairement à ce qu’insinue Freud dans Cin lecçons de psychanalyse en 1909, où il laisse penser que Breuer utilisait l’hypnose. Pour confirmer cela, lisez ici le texte de Breuer http://lewebpedagogique.com/terminale-philo/jai-tout-lu-freud/. D cet état second, elle raconte des souvenirs traumatisants ou plutôt  revit ses évènements en exprimant l’émotion réprimée ( théorie de « l’affect coincé »), ces évènements sont tous en lien à la maladie et mort de son père.ansAu sortir de l’hypnose le trouble correspondant disparaît ou s’estompe. En réalité quand Breuer cesse de traiter Anna. o, elle n’est pas guérie, elle fera jusqu’en 1888 des séjours réguliers en maison de soins et ce n’est que par la publication de contes pour enfants ( reprenant ses rêves et hallucinations) et en s’engageant auprès des orphelins, des mères en détresse qu’elle se libèrera de ses troubles par un autre mécanisme de défense du Moi qui est la sublimation et que Freud étudiera ensuite.

Ils notent donc que l’hystérie est une maladie psychosomatique et l’effet cathartique de la parole ( c’est Anna O. qui parlera de “talking cure”). Le traitement de Anna O. est donc la première cure analytique, psychanalytique.

Pour Freud , l’hystérique souffre de réminiscence, c’est-à-dire d’un retour du passé sans conscience de son caractère passé, ses troubles sont  des symptômes commémoratifs ( que la “rémémoration “sous hypnose rend inutiles). La trace de ces évènements n’est pas gardée dans la conscience, la mémoire ( puisqu’impossibilité de s’en rappeler volontairement) mais ailleurs, d’où l’hypthèse de l’inconscient. Et la résistance de l’hystérique à se rappeler ces souvenirs laisse penser à Freud que l’inconscient est le résultat d’un mécanisme de défense conscient : le refoulement par le moi, d’où sa première TOPIQUE ( représentation spatiale, “topos”: lieu)

a. les Topiques

freud-Topiques–PPTminimizer-   ( Powerpoint trouvé sur http://www.archipope.net/ )

  • 1ère Topique (1900 au Chap. 7 de L’interprétation des rêves)

Le psychisme est constitué de 3 parties: 1. l’ inconscient associé au refoulé , 2. Le pré-conscient et le conscient associés au moi. 1 et 2 sont séparés par la barrière de la censure du moi, à l’origine du refoulement.

Le refoulemnt consiste à renvoyer dans l’insconscient ce qui pourrait être source de souffrance, d’angoisse ou de culpabilité à cause d’une contradiction entre le principe régissant l’inconscient ( le principe de plaisir) et celui régissant la conscience (le principe de réalité).

Dans Introduction à la psychanalyse (1916), Freud explique de manière dynamique le fonctionnement du psychisme:

“Nous avons tout avantage à dire que chaque processus fait d’abord partie du système psychique de l’inconscient et peut, dans certaines circonstances, passer dans le système du conscient.
La représentation la plus simple de ce système est pour nous la plus commode : c’est la représentation spatiale. “Nous assimilons donc le système de l’inconscient à une grande antichambre, dans laquelle les tendances psychiques se pressent, tels des êtres vivants. À cette antichambre est attenante une autre pièce, plus étroite, une sorte de salon, dans lequel séjourne la conscience. Mais à l’entrée de l’antichambre, dans le salon veille un gardien qui inspecte chaque tendance psychique, lui impose la censure et l’empêche d’entrer au salon si elle lui déplaît. Que le gardien renvoie une tendance donnée dès le seuil ou qu’il lui fasse repasser le seuil après qu’elle a pénétré dans le salon, la différence n’est pas bien grande et le résultat est à peu près le même. Tout dépend du degré de sa vigilance et de sa perspicacité. Cette image a pour nous cet avantage qu’elle nous permet de développer notre nomenclature. Les tendances qui se trouvent dans l’antichambre réservée à l’inconscient échappent au regard du conscient qui séjourne dans la pièce voisine. Elles sont donc tout d’abord inconscientes. Lorsque, après avoir pénétré jusqu’au seuil, elles sont renvoyées par le gardien, c’est qu’elles sont incapables de devenir conscientes : nous disons alors qu’elles sont refoulées. Mais les tendances auxquelles le gardien a permis de franchir le seuil ne sont pas devenues pour cela nécessairement conscientes ; elles peuvent le devenir si elles réussissent à attirer sur elles le regard de la conscience. Nous appellerons donc cette deuxième pièce système de la préconscience (le préconscient). Le fait pour un processus de devenir conscient garde ainsi son sens purement descriptif. L’essence du refoulement consiste en ce qu’une tendance donnée est empêchée par le gardien de pénétrer de l’inconscient dans le préconscient. Et c’est ce gardien qui nous apparaît sous la forme d’une résistance, lorsque nous essayons, par le traitement analytique, de mettre fin au refoulement.”


  • 2ème Topique entre 1916 et 1920

    Ceci est la représentation faite par Freud., avec le moi assimilé à “une pauvre créature devant servir 3 maîtres” ( le ça, le surmoi et le monde extérieur)

  en voilà une autre:

le ça, c’est le fond du psychisme, il est constitué d’une partie héréditaire et innée (pulsions naturelles) et d’une partie acquise (pulsions refoulées). Dans sa partie innée, c’est « le réservoir de la libido », l’énergie sexuelle de vie et dans l’autre, c’est le résultat du refoulement. Le refoulement, c’est l’opération par laquelle « je »  cherche inconsciemment (refoulement primaire) ou consciemment (refoulement secondaire), à maintenir inconscientes certaines pulsions qui si elles passaient à la conscience seraient sources de déplaisir et de souffrance. Donc le refoulement a lieu pour éviter le déplaisir. Ce déplaisir s’oppose à la logique de l’inconscient  qui est que toute pulsion doit parvenir à satisfaction et qu’il faut absolument éviter le déplaisir. C’est le principe de plaisir. Mais à ce principe s’oppose le principe de réalité qui apparaît avec la conscience. La réalité, c’est qu’il y a des limites à la satisfaction de nos pulsions : limites naturelles, sociales, morales. Lorsqu’il y a conflit entre ces 2 principes, il y a déplaisir et si ce déplaisir est plus grand que le plaisir que pourrait apporter la satisfaction de la pulsion, cette pulsion est renvoyée dans l’inconscient, refoulée par la censure. Donc Freud distingue désormais un refoulement primaire inconscient, oeuvre du Surmoi et un refoulement secondaire conscient, oeuvre du Moi. ce qui explique ensuite les résistances conscientes et inconscientes du patient.

– le surmoi, c’est une partie inconsciente qui représente la culture, c’est un héritage.  La culture et ses valeurs sont intériorisées par l’enfant via le surmoi de ses parents sous la forme d’un système d’obligations et d’interdits (les deux premiers interdits fondateurs intégrés au moment du conflit d’Œdipe étant l’interdit de l’inceste et celui du parricide, le meurtre du père). Le surmoi est donc une sorte de conscience morale inconsciente ! Il contient aussi l’idéal du moi, image de soi en parfaite adéquation avec ses interdits et devoirs auquel le moi se doit de correspondre inconsciemment pour qu’il y ait satisfaction personnelle, amour de soi. C’est le surmoi qui est à l’origine du refoulement primaire, qui empêche certaines pulsions du ça de passer la barrière de la conscience en les renvoyant d’où elles viennent, sans que le Moi ne les ait vues ni sues.

Le surmoi se forme au 4ème stade du développement sexuel de l’enfant, au moment du complexe d’Oedipe. Après un auto-érotisme ( stade oral, plaisir de la succion; le stade sadique-anal plaisir de la défécation et d’uriner; le stade phallique, plaisir de toucher l’organe sexuel), après s’être séparé de la mère et avoir découvert par elle et son éducation le principe de réalité, l’enfant va tourner ses pulsions vers l’extérieur: le garçon  vers sa mère qui s’occupe de lui et dont il est matériellement dépendant et la fille vers le père, voulant compenser par un enfant, le sentiment de manque de pénis dont elle tient pour responsable sa mère. Les deux rencontrent un obstacle ( père ou mère) et devront accepter les deux interdits de base: interdit de l’inceste et interdit du parricide et seront contraints de sortir de la famille pour assumer leur pulsions sexuelles. Le complexe d’Oedipe est le moment le plus délicat de ce développpement sexuel et  c’est pourquoi il est le “noyau des névroses”

  Freud-Oedipe–PPTminimizer-  ( Powerpoint trouvé sur http://www.archipope.net/)

– le moi, c’est ce dont j’ai conscience de moi-même, ce n’est qu’un compromis entre les pulsions du ça et les exigences du surmoi, donc une infime partie de ce que nous sommes, le surmoi et le ça étant donc des parties inconscientes de notre psychisme. Le moi dépend de notre nature et de notre culture.

Précisions  de Freud: «Le contenu de la notion de “sexuel” ne se laisse pas définir facilement. On pourrait dire que tout ce qui se rattache aux différences séparant les sexes est sexuel, mais ce serait là une définition aussi vague que vaste. En tenant principalement compte de l’acte sexuel lui-même, vous pourriez dire qu’est sexuel tout ce qui se rapporte à l’intention de se procurer une jouissance à l’aide du corps, et plus particulièrement des organes génitaux, du sexe opposé, bref tout ce qui se rapporte au désir de l’accouplement et de l’accomplissement de l’acte sexuel. Mais en faisant de la procréation le noyau de la sexualité, vous courez le risque d’exclure de votre définition une foule d’actes qui, tels que la masturbation ou même le baiser, sans avoir la procréation pour but, n’en sont pas moins de nature sexuelle»
«Cette extension du concept de sexualité est d’une double nature. En premier lieu, la sexualité est détachée de sa relation bien trop étroite avec les organes génitaux et posée comme une fonction corporelle embrassant l’ensemble de l’être et aspirant au plaisir, fonction qui n’entre que secondairement au service de la reproduction ; en second lieu, sont comptés parmi les émois sexuels tous les émois simplement tendres et amicaux, pour lesquels notre langage courant emploie le mot « aimer » dans ses multiples acceptions. Je prétends seulement que ces élargissements du concept de sexualité ne sont pas des innovations, mais des restaurations, qui signifient la levée de rétrécissements injustifiés du concept, rétrécissements auxquels nous nous étions laissé induire.» D’où l’usage du mot pansexualisme pour désigner la doctrine freudienne.”

 b) la démarche psychanalytique
La psychanalyse pose donc un fonctionnement inconscient qui nous échappe et que nous subissons, elle pose aussi une nécessité dans le fonctionnement du psychisme ( c’est d’ailleurs le principe de la “libre” association d’idée, au cours des séances). Le psychanalyste invite le patient soit à raconter rêves et symptômes, soit à parler librement, de ce dont il a envie, puis d’associer des idées sur ce thème.Cette liberté n’est qu’apparente et illusoire, car ce n’est pas par hasard que nous associons telle idée à telle idée, c’est par un lien inconscient. Un lien que le psychanalyste entrevoit et dont le patient prend conscience peu à peu en le disant et en le “revivant” par le phénomène du Transfert.

Le psychanalyste va devenir l’objet de la pulsion ( ce qui va permettre aux troubles de s’attenuer, puisque la pulsion n’a plus besoin de ce moyen pour s’exprimer: la névrose fait alors place à une névrose de transfert). Dans sa relation au psychanalyste le patient va revivre la situation à l’origine de ses toubles, du refoulement et en prendre peu à peu conscience.

Une psychanalyse dure longtemps car il y a des résistances conscientes et inconscientes.

Le but de la psychanalyse est de faire passer à la conscience ce qui est inconscient, de récupérer une mémoire ( se remémorer pour cesser de commémorer! ) et par cette conscience du passé, gagner une maîtrise dans le présent (actions) et vis-à-vis de l’avenir ( projets), de recouvrer liberté et responsabilité!

Ce dont on a pris conscience  peut alors être accepté, condamné ou sublimé, c’est-à-dire que l’on va donner à l’énergie de la pulsion  un objet de plus haute valeur sociale.

 (Précisions sur la sublimation: ce terme, introduit par Freud en psychanalyse, évoque à la fois le terme de sublime, employé notamment dans le domaine des beaux-arts pour désigner une production suggérant la grandeur, l’élévation, et le terme de sublimation utlisé en chimie pour désigner le procédé qui fait passer un corps directement de l’état solide à l’état gazeux. C’est avec leur satisfaction,  leur refoulement, la 3ème issue de nos pulsions. Elle est “la seule satisfaction permise par la promesse analytique”, selon Lacan et elle est à l’origine de l’art, de la religion, de la recherche intellectuelle, de la science.

Sur l’art: “L’artiste, comme le névropathe, s’était retiré loin de la réalité insatisfaisante dans ce monde imaginaire, mais à l’inverse du névropathe il s’entendait à trouver le chemin du retour et à reprendre pied dans la réalité. Ses créations, les oeuvres d’art, étaient les satisfactions imaginaires de désirs inconscients, tout comme les rêves, avec lesquels elles avaient d’ailleurs en commun le caractère d’être un compromis, car elles aussi devaient éviter le conflit à découvert avec les puissances de refoulement. Mais à l’inverse des productions asociales narcissiques du rêve, elles pouvaient compter sur la sympathie des autres hommes, étant capables d’éveiller et de satisfaire chez eux les mêmes inconscientes aspirations du désir. De plus elles se servaient, comme « prime de séduction », du plaisir attaché à la perception de la beauté de la forme.” Freud

Sur la culture: « Beaucoup d’entre nous se résigneront difficilement à renoncer à la croyance qu’il existe, inhérente à l’homme même, une tendance à la perfection à laquelle il serait redevable du niveau actuel de ses facultés intellectuelles et de sa sublimation morale et dont on serait en droit d’attendre la transformation progressive de l’homme actuel en surhomme. Je dois avouer que je ne crois pas à l’existence d’une pareille tendance interne et que je ne vois aucune raison de ménager cette illusion bienfaisante. A mon avis, l’évolution de l’homme, telle qu’elle s’est effectuée jusqu’à présent, ne requiert pas d’autre explication que celle des animaux et, s’il existe une minorité d’êtres humains qu’une tendance irrésistible semble pousser vers des niveaux de perfection de plus en plus élevés, ce fait s’explique tout naturellement en tant que conséquence de cette répression d’instincts sur laquelle repose ce qu’il y a de plus précieux dans la culture humaine. » FREUD, Essais de psychanalyse)

c. Critiques de cette hypothèse

Freud savait que son hypothèse serait difficile à admettre : 3ème blessure narcissique infligé à l’homme par la science ( après Galilée et l’héliocentrisme qui décentre l’homme, Darwin qui le ramène dans le règne animal , en en faisant qu’un “singe” évolué, Freud vient de montrer que la conscience de soin, réservée à l’homme est un privilège usurpé, puisque “le moi n’est pas maître dans sa propre maison” et est soumis à 3 maîtres: le ça , le surmoi et le principe de réalité. Il savait aussi que sa théorie de la sexualité serait refusée, car la sexualité reste un  sujet tabou. Malgré son efficacité thérapeutique et sa fécondité herméneutique ( elle permet d’éclairer beaucoup de choses : le malaise dans la civilisation, les interdits fondamentaux, la religion, …), sa théorie serait donc nécessairement critiquée selon lui.

¬  2 exemples de critique:
1. du point de vue épistémologique : POPPER  p.47.

Popper est un philosophe des sciences , mort en 1994. Si au XIXème siècle, on est dans un positivisme ( à la Auguste Comte) et donc on pense que seule la science peut détenir la vérité au travers de la méthode expérimentale, au XXème siècle, il y a une remise en question de cette prétention. D’où sa théorie du Falsicationnisme. Pour lui, on ne peut rendre vérifié une loi, car on ne peut faire toute l’expérience possible, on ne peut donc pas parler de vérité, mais simplement de CORROBOREES. Par contre, on peut affirmer qu’une théorie est fausse, il suffit de trouver un cas où la loi ne s’appplique pas, alors que ce cas était en théorie sous le coup de cette loi. Mais pour cela, encore faut-il que la loi précise ses conditions d’applications, son domaine d’application et ses termes. Et c’est précisèment ce que la théorie de Freud ne fait pas, puisqu’il semble tout expliquer. Dès lors on ne peut la vérifier et on ne peut la falsifier. Donc elle ne répond pas aux exigences d’une théorie scientifique. Donc elle n’est pas scientifique , ce que revendiquait pourtant Freud qui était un médecin, un neurologue et qui soutenait avoir eu une démarche expérimentale.

 

2. du point de vue moral : ALAIN ( P.46)
Pour lui cette hypothèse peut amener à une erreur théorique et à une faute morale:

Freud laisse penser qu’il y a cohabitation entre moi et un autre moi qui aurait sa logique, son mode de pensée. Ce qui soulève un problème théorique, comme peut-il y avoir activité de pensée en moi, sans que cette pensée soit consciente. Dès lors, ou je sais qu’il y a cette activité en moi mais je ne l’assume pas, par mauvaise foi (l’inconscient est une excuse, mais n’est  plus qu’une réalité psychique, l’inconscient n’est inconscient), ou je ne le sais pas mais comment peut-il y avoir une activité consciente d’elle-même en moi sans que je le sache, c’est contradictoire et ce n’est donc pas de la pensée ! Ce que Freud appelle à tort une “pensée de l’inconscient” n’est qu’un “mouvement du corps”. On a donc remplacé la dualité esprit/corps par conscience/inconscient au prix d’une erreur théorique et cela a des conséquences morale désastreuses.

Je ne peux qu’être responsable de mon corps, par contre comment pourrais-je l’être de mon inconscient et de ses débordements?

 L’inconscient me donne donc un droit à l’irresponsabilité. On peut faire de l’inconscient l’ excuse royale: ce n’est pas moi qui voulais le tuer, c’est lui, c’est cet autre moi à la logique qui m’échappe, mon inconscient.

Ceci dit Freud en appelle plutôt à une responsabilisation, puisque le but d’une psychanalyse, c’est de retrouver conscience, liberté et donc responsabilité! “là où est le ça, le moi doit advenir”.

( 2 petits plus!

. On pourrait y ajouter celle de Sartre: il voit dans cette hypothèse un exemple de mauvaise foi : il est seelon lui impossible théoriquement de se mentir à soi-même, on ne peut être à la fois trompeur et trompé; l’inconscient semble introduire une duplicité de l’esprit, mais c’est oublier que la censure est une activité de jugement, donc une activité de pensée or je ne peux penser sans le savoir ( Descartes; Alain) donc je sais ce que je censure ou qu’il y a censur, donc l’ inconscient n’est pas inconscient, donc on est de mauvaise foi quand on prétend ne pas savoir ce qui est réfoulé ou la censure est de mauvaise foi. On n’a pas résolu le problème, on l’a déplacé!

. A celle-ci s’ajoute celle de Paul Ricoeur qui souligne les vertus de la psychanalyse et le rôle du psychanalyste, mais en “bon” philosophe préfère à la théorie de Freud, malgré tout très ruineuse pour la conscience et ses pouvoirs ( car bien des choses lui échappe radicalement !), une autre perception de ce que Freud range sous ce terme d’inconscient. Il étudie dans Philosophie de la volonté les relations entre volontaire et involontaire. Il affirme l’échec de la doctrine de la transparence de la conscience. Pour lui, la thérapeutique psychanalytique a un sens. On retrouve dans les textes suivants les thèmes propres à la psychanalyse :transfert, significations inconscientes, travail libérateur de la conscience mais pas la notion d’UN inconscient, comme partie permanente du psychisme aux côtés de la conscience.  (Pathogène : générateur de troubles pathologiques ; mnémonique : qui intéresse la mémoire ; cathartique : qui consiste à purger, à libérer, à extérioriser..)

TEXTE 1
« Si la conscience ne peut faire sa propre exégèse et ne peut restaurer son propre empire, il est légitime de penser qu’un autre puisse l’expliquer à elle-même et l’aider à se reconquérir ; c’est le principe de la cure psychanalytique. Là où l’effort ne fait qu’exalter l’impulsion morbide, un patient désenveloppement des thèmes morbides par l’analyste doit faire la relève de l’effort stérile. La maladie n’est point la faute, la cure n’est point la morale. Le sens profond de la cure n’est pas une explication de la conscience par l’inconscient , mais un triomphe de la conscience sur ses propres interdits par le détour d’une autre conscience déchiffreuse. L’analyste est l’accoucheur de la liberté, en aidant le malade à former la pensée qui convient à son mal ; il dénoue sa conscience et lui rend sa fluidité ; la psychanalyse est une guérison par l’esprit ; le véritable analyste n’est pas le despote de la conscience malade, mais le serviteur d’une liberté à restaurer. En quoi la cure, pour n’être pas une éthique n’en est pas moins la condition d’une éthique retrouvée, là où la volonté succombe au terrible. L’éthique en effet n’est jamais qu’une réconciliation du moi avec son propre corps et avec toutes les puissances involontaires ; quand l’irruption des forces interdites marque le triomphe d’un involontaire absolu, la psychanalyse replace le patient dans des conditions normales où il peut à nouveau tenter avec sa libre volonté une telle réconciliation. » (1949)

TEXTE 2
« Si la thérapeutique analytique agit « en transformant l’inconscient en conscient », c’est que la conscience est beaucoup plus qu’une qualité ajoutée qui ne change pas l’essence du psychisme. Il est faux que la cure fasse passer le « souvenir » pathogène* de l’inconscient dans le conscient, elle conduit à former un souvenir là où il y avait « quelque chose » qui opprimait la conscience, « quelque chose » qui était issu du passé mais qui était un infra-souvenir et qui , sans doute, opprimait la conscience parce qu’elle ne pouvait plus former un souvenir sur cette matière mnémonique* et affective de nature psychique. Quand on dit que la cure cathartique* élargit le champ de régulation de la conscience, le mot conscience ne signifie plus seulement cette maigre connaissance surajoutée à des souvenirs intrinsèquement inconscients ; il désigne l’émergence même du souvenir qui me joint à mon passé et ainsi collabore à la synthèse du moi qui ne saurait exister sans au moins une conscience irréfléchie grâce à laquelle il s’apparaît confusément ; le « conscient » consiste à former la représentation libératrice de l’événement passé dont la « trace psychique » troublait la conscience sans pouvoir accéder à la dignité du souvenir. Rien donc dans la psychanalyse ne nous contraint à faire penser l’inconscient ; mais il reste que la conscience a un envers, un dessous, impensable hors d’elle et sans elle, qui n’est point une pensée mais qui n’est pas le corps non plus. » (1963)

B. Moi et le monde: la connaissance du monde

Si la conscience est « dévoilante », si en tant qu’êtres conscients nous sommes , selon Sartre, « les détecteurs de l’être », sortant ce qui est de sa « léthargie » , de sa confuse épaisseur en donnant sens et unité aux choses, à leur co-existence (ex. du paysage : Texte p.26), en créant de la présence  sur fond d’absence par notre attention et nos intérêts , donc si par d’objet sans sujet ( si aussi pas de sujet sans objet, toute conscience est conscience de…,intentionalité vue en I), toute conscience n’est aussi qu’ un point de vue dépendant de :

  • de nos sens, leur structure et leur sensibilité. Ce serait une erreur de croire que ce qu’ils ne perçoivent pas n’est pas ou que ce qu’ils perçoivent est en soi; les qualités sensibles ne sont pas en soi, mais pour so
  • de la nature qui a voilé la réalité pour nous permettre de survivre , en trouvant au plus vite une réponse appropriée, d’où une vision utilitaire et simplificatrice de la réalité, où on groassit les acractéristiques communes et on gomme les particularités individuelles, représentation de la réalité que le découpage de la langue va reprendre à son compte. Et nous pensons avec les mots, nous nous représentons le monde à travers eux !

Texte:

« Si la réalité venait frapper directement nos sens et notre conscience, si nous pouvions entrer en communication immédiate avec les choses et avec nous-mêmes, je crois bien que l’art serait inutile, ou plutôt que nous serions tous artistes, car notre âme vibrerait alors continuellement à l’unisson de la nature.[..]Tout cela est autour de nous, tout cela est en nous, et pourtant rien de tout cela n’est perçu par nous distinctement. Entre la nature et nous, que dis-je ? Entre nous et notre propre conscience, un voile s’interpose, voile épais pour le commun des hommes, voile léger, presque transparent, pour l’artiste et le poète. Quelle fée a tissé ce voile ? Fut-ce par malice ou par amitié ? Il fallait vivre, et la vie exige que nous appréhendions les choses dans le rapport qu’elles ont à nos besoins. Vivre consiste à agir. Vivre, c’est n’accepter des objets que l’impression utile pour y répondre par des réactions appropriées : les autres impressions doivent s’obscurcir ou ne nous arriver que confusément. Je regarde et je crois voir, j’écoute et je crois entendre, je m’étudie et je crois lire dans le fond de mon cœur. Mais ce que je vois et ce que j’entends du monde extérieur, c’est simplement ce que mes sens en extraient pour éclairer ma conduite ; ce que je connais de moi-même, c’est ce qui affleure à la surface, ce qui prend part à l’action. Mes sens et ma conscience ne me livrent donc de la réalité qu’une simplification pratique. Dans la vision qu’ils me donnent des choses et de moi-même, les différences inutiles à l’homme sont effacées, les ressemblances utiles à l’homme sont accentuées, des routes me sont tracées à l’avance où mon action s’engagera. Ces routes sont celles où l’humanité entière a passé avant moi. Les choses ont été classées en vue du parti que j’en pourrai tirer. Et c’est cette classification que j’aperçois, beaucoup plus que la couleur et la forme des choses. Sans doute l’homme est déjà très supérieur à l’animal sur ce point. Il est peu probable que l’œil du loup fasse une différence entre le chevreau et l’agneau ; ce sont là, pour le loup, deux proies identiques, étant également faciles à saisir, également bonnes à dévorer. Nous faisons, nous, une différence entre la chèvre et le mouton ; mais distinguons-nous une chèvre d’une chèvre, un mouton d’un mouton ? L’individualité des choses et des êtres nous échappe toutes les fois qu’il ne nous est pas matériellement utile de l’apercevoir. Et là même où nous la remarquons (comme lorsque nous distinguons un homme d’un autre homme), ce n’est pas l’individualité même que notre œil saisit, c’est-à-dire une certaine harmonie tout à fait originale de formes et de couleurs, mais seulement un ou deux traits qui faciliteront la reconnaissance pratique.Enfin, pour tout dire, nous ne voyons pas les choses mêmes ; nous nous bornons, le plus souvent, à lire des étiquettes collées sur elles. Cette tendance, issue du besoin, s’est encore accentuée sous l’influence du langage. » ( Suite p. 98, texte 1) Bergson, Le rire, 1900

  • heureusement selon Bergson la nature a laissé à certains d’entre nous un coin du voile levé, ce sont les artistes qui peuvent s’arracher à une representation utilitaire ( et quantitative du monde) pour le contempler et en saisir des qualités ( les couleurs pour le peintre, les formes pour le sculpteur et la vie de l’esprit pour le poéte, celle de la nature pour le musicien) et à travers leurs oeuvres d’art, ils nous oblie à voir autrement le monde, à distance, sans le rapport utilitaire ( on ne mange pas un mouton peint, sculpté…).
  • L’art éduque notre regard, nous ouvre les yeux et nous permet de saisir la beauté de la nature, en elle-même an-esthétique

« Qu’est-ce donc que la Nature? Elle n’est pas la Mère qui nous enfanta. Elle est notre création. C’est dans notre cerveau qu’elle s’éveille à la vie. Les choses sont parce que nous les voyons, et ce que nous voyons, et comment nous le voyons, dépend des arts qui nous ont influencés. Regarder une chose et la voir sont deux actes très différents. On ne voit quelque chose que si l’on en voit la beauté. Alors, et alors seulement, elle vient à l’existence. A présent, les gens voient des brouillards, non parce qu’il y en a, mais parce que des poètes et des peintres leur ont enseigné la mystérieuse beauté de ces effets. Des brouillards ont pu exister pendant des siècles à Londres. J’ose même dire qu’il y en eut. Mais personne ne les a vus et, ainsi, nous ne savons rien d’eux. Ils n’existèrent qu’au jour où l’art les inventa. Maintenant, il faut l’avouer, nous en avons à l’excès. Ils sont devenus le pur maniérisme d’une clique, et le réalisme exagéré de leur méthode d onne la bronchite aux gens stupides. Là où l’homme cultivé saisit un effet, l’homme d’esprit inculte attrape un rhume.
Soyons donc humains et prions l’Art de tourner ailleurs ses admirables yeux. Il l’a déjà fait, du reste. Cette blanche et frissonnante lumière que l’on voit maintenant en France, avec ses étranges granulations mauves et ses mouvantes ombres violettes, est sa dernière fantaisie et la Nature, en somme, la produit d’admirable façon. Là où elle nous donnait des Corot ou des Daubigny, elle nous donne maintenant des Monet exquis et des Pissarro enchanteurs. En vérité, il y a des moments, rares il est vrai,qu’on peut cependant observer de temps à autre, où la Nature devient absolument moderne. Il ne faut pas évidemment s’y fier toujours. Le fait est qu’elle se trouve dans une malheureuse position. L’Art crée un effet incomparable et unique et puis il passe à autre chose. La Nature, elle, oubliant que l’imitation peut devenir la forme la plus sincère de l’inculte,
se met à répéter cet effet jusqu’à ce que nous en devenions absolument las. Il n’est personne, aujourd’hui, de vraiment cultivé, pour parler de la beauté d’un coucher de soleil. Les couchers de soleil sont tout à fait passés de mode. Ils appartiennent au temps où Turner était le dernier mot de
l’art. Les admirer est un signe marquant de provincialisme ».
Oscar Wilde, « Le déclin du mensonge », Intentions (1928),

  • Là aussi dans notre rapport au monde les autres sont préceiux: « autrui est la pièce maîtresse de mon univers « dira magnifiquement  Michel Tournier dans Vendredi ou les limbes du pacifique donnant par sa présence l’échelle,assurant de la permanence du monde et de la réalité de ce qui est perçu en ajoutant à ma perspective la sienne, les siennes…

 « La solitude n’est pas une situation immuable ou je me trouverais plongé depuis le naufrage de la Virginie. C’est un milieu corrosif qui agit sur moi lentement, mais sans relâche et dans un sens purement destructif. Le premier jour, je transitais en eux sociétés humaines également imaginaires : l’équipage disparu et les habitants de l’île, car je la croyais peuplée. J’étais encore tout chaud de mes contacts avec mes compagnons de bord. Je poursuivais imaginairement le dialogue interrompu par la catastrophe. Et puis l’île s’est révélée déserte. J’avançai dans un paysage sans âme qui vive. Derrière moi, le groupe de mes malheureux compagnons s’enfonçait dans la nuit. Leurs voix s’étaient tues depuis longtemps, quand la mienne commençait seulement à se fatiguer de son soliloque. Dès lors je suis avec une horrible fascination le processus de déshumanisation dont je sens en moi l’inexorable travail.

Je sais maintenant que chaque homme porte en lui – et comme au-dessus de lui – un fragile et complexe échafaudage d’habitudes, réponses, réflexes, mécanismes, préoccupations, rêves et implications qui s’est formé et continue à se transformer par les attouchements perpétuels de ses semblables, Privée de sève, cette délicate efflorescence s’étiole et se désagrège. Autrui, pièce maîtresse de mon univers… Je mesure chaque jour ce que je lui devais en enregistrant de nouvelles fissures dans mon édifice personnel. Je sais ce que je risquerais en perdant l’usage de la parole, et je combats de toute l’ardeur de mon angoisse cette suprême déchéance. Mais mes relations avec les choses se trouvent ellesmêmes dénaturées par ma solitude. Lorsqu’un peintre ou un graveur introduit des personnages dans un paysage ou à proximité d’un monument, ce n’est pas par goût de l’accessoire. Les personnages donnent l’échelle et, ce qui importe davantage encore, ils constituent des points de vue possibles qui ajoutent au point de vue réel de l’observateur d’indispensables virtualités.

A Speranza, il n’y a qu’un point de vue, le mien, dépouillé de toute virtualité. Et ce dépouillement ne s’est pas fait en un jour. Au début, par un automatisme inconscient, je projetais des observateurs possibles – des paramètres au sommet des collines, derrière tel rocher ou dans les branches de tel arbre. L’île se trouvait ainsi quadrillée par un réseau d’interpolations et d’extrapolations qui la différenciait et la douait d’intelligibilité. Ainsi fait tout homme normal dans une situation normale. Je n’ai pris conscience de cette fonction – comme de bien d’autres – qu’à mesure qu’elle se dégradait en moi. Aujourd’hui, c’est chose faite. Ma vision de l’île est réduite à elle-même. Ce que je n’en vois pas est un inconnu absolu. Partout où je ne suis as actuellement règne une nuit insondable. Je constate d’ailleurs en écrivant ces lignes que l’expérience qu’elles tentent de restituer non seulement est sans précédent, mais contrarie dans leur essence même les mots que j’emploie. Le langage relève en effet d’une façon fondamentale de cet univers peupléoù les autres sont comme autant de phares créant autour d’eux un îlot lumineux à l’intérieur duquel tout est – sinon connu – du moins connaissable. Les phares ont disparu de mon champ. Nourrie par ma fantaisie, leur lumière est encore longtemps parvenue jusqu’à moi. Maintenant, c’en est fait, les ténèbres m’environnent.

Et ma solitude n’attaque pas que l’intelligibilité des choses. Elle mine jusqu’au fondement même de leur existence. De plus en plus, je suis assailli de doutes sur la véracité du témoignage de mes sens. Je sais maintenant que la terre sur laquelle mes deux pieds appuient aurait besoin pour ne pas vaciller que d’autres que moi la foulent. Contre l’illusion d’optique, le mirage, l’hallucination, le rêve éveillé, le fantasme, le délire, le trouble de l’audition… le rempart le plus sûr, c’est notre frère, notre voisin, notre ami ou notre ennemi, mais quelqu’un, grands dieux, quelqu’un. »

 

Conclusion: être conscient, est-ce vraiment un privilège? ( comme nous l’affirmions avec Kant en introduction)

En un sens oui, parce que c’est ce qui fait notre grandeur ( c’est être grand que de se savoir misérable, Pascal 1 p 26 ) , notre dignité qui donne le droit peut-être de disposer de ce qui nous entoure et est plongé dans l’inconscience, mais certainement au RESPECT.

Mais en un autre sens non,

  1. la conscience est conscience malheureuse. Être conscient, c’est se savoir être un « être-pour-la -mort », comme le dit Heidegger ( d’où existence inauthentique possible, refus de voir en face ce que dont nous avons conscience) ou prendre conscience de notre finitude, de notre situation misérable ( Pascal d’où divertissement) ou prendre conscience de la difficile coïncidence avec soi et avec le monde ( condamné à l’écart)

  2. la conscience est conscience potentiellement coupable et culpabilisante : « toute conscience est conscience morale » selon Alain, je ne peux pas ne pas juger moralement mes actes et ne pas avoir le sentiment de ne pas avoir assez fait, mal fait, etc…

  3. si la conscience fait de moi un être ayant droit au respect ; elle impose en retour des DEVOIRS :

– la conscience fait la liberté qui implique responsabilité: 1) juridique : le mot “personne” est au départ un terme juridique qui fait de l’être conscient, celui qui doit répondre devant les autres et devant la loi de ses actes et qui peut comprendre, anticiper et vouloir fuir le châtiment. 2)existentielle : Je me dois d’assumer mes propres actes devant moi-même: étant conscient, je suis juge de mes choix, de mes valeurs; je ne peux pas me cacher derrière les circonstances, les déterminismes , la pression sociale;  étant un sujet , je suis un être chez qui ” l’existence précède l’essence” comme le dit Sartre, donc je suis responsable de la manière dont je me définis, de ce que je suis. Et comme en me définissant, je définis aussi l’homme, j’ai une responsabilité infinie, d’où angoisse et mauvaise foi.

j’ai une dignité, une noblesse en tant que sujet pensant, mais dès lors “noblesse oblige”:

« L’âme c’est ce qui refuse le corps. […] On ne prend conscience que par opposition de soi à soi. Alexandre à la traversée d’un désert reçoit un casque plein d’eau ; il remercie le verse par terre devant toute l’armée. Magnanimité ; âme, c’est-à-dire grande âme. Ce beau mot ne désigne nullement un être, mais toujours une action. »  Alain

Je me dois de me comporter en esprit plutôt que corps, en humain plutôt qu’en animal; je me dois de me tenir, de me respecter moi-même

Agis de telle sorte que tu traites l’humanité aussi bien dans ta personne que dans la personne de tout autre jamais simplement comme un moyen mais toujours en même temps comme une fin” Kant

= cela revient à dire que si la conscience fait que je suis libre ( écart, non coïncidence) je ne peux pas disposer de moi-même librement : je n’aurais pas le droit de me faire esclave, de vendre mon corps, de me réduire à un simple projectile comme le montre le cas de Wackenheim en 1992

– étant un sujet, je suis au-dessus des objetset du reste de la nature, mais je suis aussi par là responsable de cette nature, d’autant que je sais désormais les conséquences de mes actes sur elle.

  1. si la conscience est ce qui permet de parvenir à une connaissance de soi, elle peut être partielle et superficielle ( Freud, Bergson et le voile du langage) , si la conscience est ce qui permet de prendre conscience de l’illusion et de se désillusionner ( travail philosophique) , elle peut aussi être à l’origine d’illusions à cause de cette superficialité, de cette partialité.

Peut-être nous illusionnons-nous en nous pensant libres, en pensant que nos désirs sont nôtres et nous distinguent des autres ?