La technique et le travail

25 novembre 2009 0 Par caroline-sarroul

LA TECHNIQUE (et le travail)

Introduction: définition

Le mot technique vient de “technè” en grec (”ars” en latin”) est signifie selon Aristote dans L’éthique à Nicomaque, “la disposition, accompagnée de raison et tournée vers vers la création” ( non l’action qui est pour elle-même son propre but). La technique renvoie donc aux savoir-faire avec ou sans instruments ( technique de relaxation) orientée vers un but extérieur. La technique, c’est un moyen pour une fin. C’est la science (empirique) des moyens. Si on en donne une définition plus complète, c’est “une mise en oeuvre de moyens orientés intentionellement et méthodiquement en fonction d’expériences, de réflexions et parfois même de considération scientifiques en vue d’une finalité: une oeuvre, un résultat, avec ou sans usage d’instruments. “

  • intentionellement: le technicien est donc conscient de son but, qu’il s’est donné librement et volontairement, cela peut distinguer le plus mauvais architecte de l’abeille la plus experte, comme le disait Marx, l’abeille ne pensant pas l’alvéole de la ruche avant de se mettre en action pour la réaliser. La technique devient par là le propre de l’homme, qui se donne lui-même ses propres fins et à la faculté de se représenter ses fins.
  • méthodiquement: le technicien suit un chemin, ce qui exige un art, une maîtrise des moyens. Il n’agit ni au hasard, ni par instinct.
  • moyens: la technique est bien “la science” des moyens. En tant que telle, ses seuls impératifs sont des impératifs hypothètiques d’habileté comme le disait Kant par distinction avec les impératifs catégoriques de la raison pratiques qui, eux, concernent la forme et la fin de nos actes du point de vue de la morale. La technique, elle, se moque des fins. Elle ne pense que les moyens. Si bien que “les presciptions d’un médecin” et celles d’un “empoisonneur” sont d’égale valeur du point de vue technique si le premier soigne à coup sûr et si le second tue à coups sûr. La technique est neutre du point de vue moral, éthique. Elle est innocente des fins.
  • en fonction d’expériences, de réflexions et parfois même de considération scientifiques: ce “ou” permet de prendre en compte l’évolution de la technique. Au départ, la technique est un savoir-faire empirique, qui s’est perfectionné de manière empirique et qui est transmis de la même manière dans un etradition, une corporation. Mais avec le progrès technique, on est passé de cela , à la technologie, c’est-à-dire une technique mettant en oeuvre des considérations sacientifiques, un savoir théorique.

 C’est traditionnellement au  XVIIeme siècle qu’on fait naître la technologie ( même si le mot n’apparaît qu’au XIX avec Bigelow, persuadé que l’homme est appelé à rétablir la domination adamique sur la nature, pour nommer la première grande école d’ingénieurs du Massachusetts, Massachusetts Institute of Technology) . Etymologiquement, la technologie, c’est un discours ( logos) sur la technique, mais de fait c’est plutôt une technique appuyée sur un discours, celui de la science. On passe d’une “science spéculative” et d’une technique empirique et traditionnelle, à une “science pratique” et à la technologie, donc la technique en tant qu’ application concrète des découvertes et théories scientifiques. Cela change le visage de la science, qui ne peut plus être qu’une recherche désintéressée de vérité et de connaissances ( cela est désormais réservé aux sciences dites fondamentales, et la science devient une affaire de puissance) mais cela change aussi le visage de la technique, à qui semble ouverte à une progression accélerée et sans limites ( que celles de notre savoir). Si le technicien était un “homo faber”, c’était d’abord par nécessité ( être prométhéen), par soumission à la nature. Avec la technologie, il semble pouvoir comme le disait Descartes devenir comme maître et possesseur de la nature” ( comme, car comme nous l’avons vu, “on ne commande à la nature qu’en lui obéissant” selon Bacon). Le XVIIème est alors celui d’un millénarisme technologique, équivalent à celui promis par la religion. La technique est donc présentée comme ce qui va sauver l’humanité, la faire entrer dans une ère de paix et de Bien. Bacon proposera dans La nouvelle atlantide , une utopie d’une société techno-scientifique à l’abri de l’imprévu et maître de son destin.

Le progrès technique semble donc prometteur et libérateur ( “Là l’instinct se retire tout entier du travail. Il laisse la nature s’échiner à sa place.[…]C’est la ruse” selon Hegel. Ce progrès technique, c’est Prométhée désenchaîné, l’homme libéré du fardeau de la nécessité naturelle, mais est-ce que le rêve ne peut pas tourné au cauchemar, à un “prométhée déchaîné”.  Car le progrès technique est-il linéaire? La technique ne décide-t-elle vraiment que des moyens? Et le progrès de l’humanité se réduit-il au progrès technique?

I. De l’outil à la machine

Des mathématiciens et des mécaniciens, dont l’opinion est reproduite par quelques économistes anglais, définissent l’outil une machine simple, et la machine un outil composé. Pour eux, il n’y a pas de différence essentielle et ils donnent même le nom de machines aux puissances mécaniques élémentaires telles que le levier, le plan incliné, la vis, le coin, etc. En fait, toute machine se compose de ces puissances simples, de quelque manière qu’on les déguise et combine. Mais cette définition ne vaut rien au point de vue social parce que l’élément historique y fait défaut […] Tout mécanisme développé se compose de trois parties essentiellement différentes : moteur, transmission et machine d’opération. Le moteur donne l’impulsion à tout le mécanisme. Il enfante sa propre force de mouvement comme la machine à vapeur, la machine électro-magnétique, la machine calorique, etc., ou bien il reçoit l’impulsion d’une force naturelle externe, comme la roue hydraulique d’une chute d’eau, l’aile d’un moulin à vent des courants d’air.La transmission, composée de balanciers, de roues circulaires, de roues d’engrenages, de volants, d’arbres moteurs, d’une variété infinie de cordes, de courroies, de poulies, de leviers, de plans inclinés, de vis, etc., règle le mouvement, le distribue, en change la forme s’il le faut, de rectangulaire en rotatoire et vice-versa, et le transmet à la machine-outil. Les deux premières parties du mécanisme n’existent, en effet, que pour communiquer à cette dernière le mouvement qui lui fait attaquer l’objet de travail et en modifier la forme. C’est la machine-outil qui inaugure au XVIIIe siècle la révolution industrielle; elle sert encore de point de départ toutes les fois qu’il s’agit de transformer le métier ou la manufacture en exploitation mécanique. […] La machine-outil est donc un mécanisme qui, ayant reçu le mouvement convenable, exécute avec ses instruments les mêmes opérations que le travailleur exécutait auparavant avec des instruments pareils. Dès que l’instrument, sorti de la main de l’homme, est manié par un mécanisme, la machine-outil a pris la place du simple outil. Une révolution s’est accomplie alors même que l’homme reste le moteur. Le nombre d’outils avec lesquels l’homme peut opérer en même temps est limité par le nombre de ses propres organes. […] La machine, point de départ de la révolution industrielle, remplace donc le travailleur qui manie un outil par un mécanisme qui opère à la fois avec plusieurs outils semblables, et reçoit son impulsion d’une force unique, quelle qu’en soit la forme. ” MARX, Le Capital, Livre I, chap. XV

On pourrait penser que la machine est un perfectionnement de l’outil dans la logique du progrès technique. Mais ce qui caractérise l’outil, c’est qu’il est le prolongement de la main, son serviteur. C’est elle qui détermine le mouvement, le rythme du travail. C’est pourquoi selon Hannah ARENDT, “on ne s’est jamais demandé si l’homme était adapté à ses outils” autant se demander s’il était adapté à ses mains. Mais la machine est, elle, un outil autonome par son indépendance énergétique, puis opératoire, puis régulatrice et enfin organisatrice. Du coup, la machine n’est plus un outil et il y a rupture plutôt que continuité et cela a des conséquences négatives ( et non positives comme attendu du progrès technique):

  1.  l’homme en tant qu’utilisateur doit s’adapter à la machine.
  2. il peut  y avoir une perversion des fins et des moyens dans le sens où la machine peut en partie décider des fins, alors que l’outil était au service des fins pensées par l’homme. 
  3. cela accroît la rupture entre le savoir technique et l’utilisation de la technique. L’ouvrier se trouve face à une machine dont il ignore le fonctionnement. C’est la théorie de SIMONDON et de SIMMEL avec la tragédie de la culture.
  4. il y a aliénation du travail avec le machinisme.

Aliénation signifie dépossession, or l’ouvrier travaille alors de quoi est-il dépossédé? Pour le comprendre, il faut revenir à la notion de travail et à sa double dimension.

  • Soit on considère le travail comme un labeur, c’est à dire comme le fait de dépenser de l’énergie pour se maintenir en vie pour répondre à ses besoins vitaux. En ce sens, le travailleur est soumis au processus vital au temps au devenir de la nature. Il est « animal laborans » selon Hannah ARENDT. D’où une vision négative du travail dès l’antiquité grecque où être libre, c’est d’abord ne pas être asservi à la nécessité naturelle, aux besoins animaux en nous. Vison renforcée par la religion chrétienne où le travail est la punition infligée à l’homme concernant le péché originel. Du coup, en contrepartie, le loisir, les activités contemplatives sont ,elles, seules dignes de l’homme libre. C’est pourquoi le travail est laissé aux esclaves et que les artisans ne sont pas citoyens.
  • Mais il y a aussi dans le travail la dimension de transformation de la nature, de production d’un ouvrage, d’une oeuvre. Dans ce cas, le travailleur est “homo faber” : homme fabricateur. Et cet aspect qu’on souligne quand on valorise le travail. Et ce qui est fait depuis le XVIIème XVIIIème siècle jusqu’à nos jours, où conjointement le loisir et l’oisiveté sont devenus synonymes de  paresse et même de vice. Les arguments de cette glorification du travail sont que le travail est donc  un antidote efficace contre les dérives de l’oisiveté, qu’il est  la juste source de la propriété mais aussi un instrument de socialisation et d’humanisation. Comme le souligne MARX qui fait de la transformation consciente, libre, programmée de la nature, le propre de l’homme.

Hegel avec son “cogito pratique” abonde dans ce sens, soulignant que la négativité de l’homme, sa capacité à nier le donné naturel est ce qui le sépare de l’anaimal et de sa posivité qui fait qu’il accepte ce qui est et se répète sans cesse. Dans le travail comme oeuvre, ouvrage, l’homme s’affirme comme homme et c’est par cette négation qu’il entre dans l’histoire et a une histoire, alors que l’animal se contente d’être dans le temps:

[youtube]http://www.youtube.com/watch?v=JippG-Fi0Sc[/youtube] 

 

Logiquement, le droit au travail sera inscrit dans la déclaration des droits de l’homme de 1948 à l’article 23 comme étant donc un droit naturel, inaliénable.

Le travail devient la valeur centrale de nos sociétés,

  1. pourtant on découvre aussi que sa place centrale dans la société est plutôt une affaire de culture qu’un invariant de la nature humaine. De même qu’il existe des peuples sans États, sans histoire, il existe des sociétés sans travail, des peuples de chasseurs, cueilleurs, pêcheurs qui se contentent de ce que la nature leur donne et cela car ils n’ont que des besoins, pas ou très peu d’échanges de type économique et pas la notion d’individualisme, donc aucune raison de produire, de thésauriser.
  2. NIETZSCHE se méfie de cette glorification du travail car il y voit un moyen pour la société d’écraser l’individuel pour faire triompher le collectif et donc maintenir l’ordre. Le travail quand il est labeur permet d’obtenir ce résultat. C’est en épuisant l’individu en l’occupant, en l’habituant à l’hétéronomie qu’on arrive à le réduire à un objet qui n’a même plus idée qu’il peut être un sujet autonome. Du coup l’individu n’est pas capable de porter un jugement sur cette société ni de se révolter et comme il n’a plus d’être mais seulement de l’avoir, sa seule exigence sera la sécurité même au prix de la liberté. NIETZSCHE rejoint ici les analyses de TOCQUEVILLE (1835) qui décrivait le peuple américain et sa démocratie comme « un troupeau d’animaux timides et industrieux » avec au dessus un pouvoir absolu qui a les mains libres parce que le peuple ne s’intéresse pas à la chose politique, veut qu’on protège son avoir et ses petits plaisirs, que l’État se charge de tout : c’est le totalitarisme gentil sur un peuple d’individualites qui ont la passion de l’égalité, du bien-être matériel et donc de la sécurité même au prix de leur liberté.

Pourtant au moment même où on glorifie le travail, il est dans la réalité dévalorisé, aliéné avec la révolution industrielle, et cette aliénation va consister à déposséder l’ouvrier de la dimension d’oeuvre en ne lui laissant que le labeur

  • l’alienation du travail avec la mécanisation et l’organisation scientifique du travail:
  1.  Il y a toujours eu une division du travail. Par exemple PLATON souligne que la nature a donné à chacun soit un talent, soit une prédisposition à acquérir tel ou tel savoir-faire. Et si les hommes se sont associés en société, c’est pour conjuguer ses talents pour qu’il y ait une spécialisation de l’oeuvre qui profite à tous. Mais l’organisation moderne du travail avec la mécanisation part d’un tout autre principe : une équivalence qualitative de toutes les activités par absence de qualité. Cette division du travail n’est pas une coordination de talent mais une simple addition de force de travail. L’objectif est purement quantitatif.
  2. C’est pourquoi selon MARX, cette organisation du travail entraîne une triple aliénation (dépossession): a) L’ouvrier est d’abord dépossédé de son savoir-faire puisque son « travail » se réduit à un geste minimal si facile que cela est une véritable torture infantilisante. 2) De plus, il est dépossédé de sa production donc de la dimension d’oeuvre du travail. Il ne lui reste plus que le labeur. 3) Et même la production collective de la chaîne est retirée aux ouvriers. C’est ce que MARX appelle l’exploitation qui est augmentée par l’introduction de machines qui augmentent l’écart entre la valeur produite et la compensation reçue par l’ouvrier pour son travail : la plus-value.

     Dans le premier extrait, on retrouve l’idée d’une rupture entre l’outil et la machine, et dans le second, l’idée d’un déterminisme technique dans le cadre d’un matérialisme historique. L’évolution des techniques ne change pas que superficiellement notre manière de vivre dans les tâches ménagères, les transports ou les moyens de communication, cela change radicalement la société, nos idées et nos rapports entre hommes et avec la nature. C’est la thèse du MATERIALISME HISTORIQUE s’opposant à l’IDEALISME HISTORIQUE ( de Hegel). Pour Hegel, c’est l’évolution des idées, le progrès de la Raison dans l’histoire qui est à l’origine du mouvement de l’histoire. Pour Marx, cette évolution des idées est en grande partie le reflet de l’évolution de l’économie, des forces productives et rapports de production. Dès lors un changement dans la manière de produire entraîne un changement dans la manière de penser, de gouverner, de croire. L’infrastructure économique détermine la société civile et la superstruture, c’est-à-dire l’ensemble des productions non économiques de l’homme: la religion, l’Etat, l’idéologie, la conscience, l’art…

“En achetant la force de travail de l’ouvrier et en la payant à sa valeur, le capitaliste, comme tout autre acheteur, a acquis le droit de consommer la marchandise qu’il a achetée ou d’en user. On consomme la force de travail d’un homme ou on l’utilise en le faisant travailler, tout comme on consomme une machine ou on l’utilise en la faisant fonctionner. Par l’achat de la valeur journalière ou hebdomadaire de la force de travail de l’ouvrier, le capitaliste a donc acquis le droit de se servir de cette force, de la faire travailler pendant toute la journée ou toute la semaine. [… ]
La valeur de la force de travail est déterminée par la quantité de travail nécessaire à son entretien ou à sa production, mais l’usage de cette force de travail n’est limité que par l’énergie agissante et la force physique de l’ouvrier. La valeur journalière ou hebdomadaire de la force de travail est tout à fait différente de l’exercice journalier ou hebdomadaire de cette force, tout comme la nourriture dont un cheval a besoin et le temps qu’il peut porter son cavalier sont deux choses tout à fait distinctes. La quantité de travail qui limite la valeur de la force de travail de l’ouvrier ne constitue en aucun cas la limite de la quantité de travail que peut exécuter sa force travail […] En payant la valeur journalière ou hebdomadaire de la force de travail de l’ouvrier fileur, le capitaliste s’est acquis le droit de se servir de celle-ci pendant toute la journée ou toute la semaine. Il le fera donc travailler, mettons, 12 heures par jour. Au-dessus des 6 heures qui lui sont nécessaires pour produire l’équivalent de son salaire, c’est-à-dire de la valeur de sa force de travail, le fileur devra donc travailler 6 autres heures que j’appellerai les heures de surtravail, lequel surtravail se réalisera. en une pIus-value et un surproduit. […] C’est sur cette sorte d’échange entre le capital et le travail qu’est fondée la production capitaliste, c’est-à-dire le salariat, que l’ouvrier en tant qu’ouvrier et le capitaliste en tant que capitaliste sont obligés de reproduire constamment.”                      

Karl MARX, Salaire, prix et profit. Editions sociales,1966 (1865).

         Du coup face à cette aliénation, « l’ouvrier n’a le sentiment d’être soi qu’en dehors du travail » car « dans le travail il se sent extérieur à soi-même » selon MARX

  • avec l’automatisation, cette aliénation de l’ouvrier spécialisé n’est plus, l’ouvrier de fabrication l’ayant remplacé. Il est  qualifié pour pouvoir contrôler, réparer, agencer les machines, en un sens oeuvre ou du moins met en oeuvre savoir-faire et savoir. Mais cette automatisation exige moins de travailleur et même si on se projette dans un tout-automatisé n’en exigera plus du tout. On pourrait voir là le rêve d’Aristote dans les Politiques (I4) réalisé: “si les navette tissaient d’elles-mêmes et les plectres jouaient tout seuls de la cithare, alors les ingénieurs n’auraient plus besoin d’exécutants, ni les maîtres d’esclaves”. Liberté et skolè pour tous! Mais selon Hannah Arendt, il se pourrait que ce rêve tourne au cauchemar:

“ C’est l’avènement de l’automatisation qui, en quelques décennies, probablement videra les usines et libérera l’humanité de son fardeau le plus ancien et le plus naturel, le fardeau du travail, l’asservissement à la nécessité. (…) C’est une société de travailleurs que l’on va délivrer des chaînes du travail, et cette société ne sait plus rien des activités plus hautes et plus enrichissantes pour lesquelles il vaudrait la peine de gagner cette liberté. Dans cette société qui est égalitaire, car c’est ainsi que le travail fait vivre ensemble les hommes, il ne reste plus de classe, plus d’aristocratie politique ou spirituelle, qui puisse provoquer une restauration des autres facultés de l’homme. Même les présidents, les rois, les premiers ministres voient dans leurs fonctions des emplois nécessaires à la vie de la société, et parmi les intellectuels il ne reste que quelques solitaires pour considérer ce qu’ils font comme des oeuvres et non comme des moyens de gagner leur vie. Ce que nous avons devant nous, c’est la perspective d’une société de travailleurs sans travail, c’est-à-dire privés de la seule activité qui leur reste. On ne peut rien imaginer de pire.”             Hannah Arendt, La condition de l’homme moderne

II. De la technique à la technocratie et technophilie

“Les machines proprement dites datent de la fin du XVIII° siècle. Rien de plus absurde que de voir dans les machines l’antithèse de la division du travail, la synthèse rétablissant l’unité dans le travail morcelé. La machine est une réunion des instruments de travail, et pas du tout une combinaison des travaux pour l’ouvrier lui-même.Quand, par la division du travail, chaque opération particulière a été réduite à l’emploi d’un instrument simple, la réunion de tous ces instruments, mis en action par un seul moteur, constitue – une machine .Outils simples, accumulation des outils, outils composés, mise en mouvement d’un outil composé par un seul moteur manuel, par l’homme, mise en mouvement de ces instruments par les forces naturelles, machine, système des machines ayant un automate pour moteur, – voilà la marche des machines.”

Les rapports sociaux sont intimement liés aux forces productives. En acquérant de nouvelles forces productives, les hommes changent leur mode de production, et en changeant le mode de production, la manière de gagner leur vie, ils changent tous leurs rapports sociaux. Le moulin il bras vous donnera la société avec le suzerain; le moulin il vapeur, la société avec le capitaliste industriel. Les mêmes hommes qui établissent les rapports sociaux conformément à leur productivité matérielle produisent aussi les principes, les idées, les catégories, conformément il leurs rapports sociaux.
Ainsi, ces idées, ces catégories sont aussi peu éternelles que les relations qu’elles expriment. Elles sont des produits historiques et transitoires. Il y a un mouvement continuel d’accroissement da ns les forces productives, de destruction dans les rapports sociaux, de formation dans les idées, il n’y a d’immuable que l’abstraction du mouvement […].Les conditions économiques avaient d’abord transformé la masse du pays en travailleurs. La domination du capital a créé il cette masse une situation commune, des intérêts communs. Ainsi cette masse est déjà une classe vis-à-vis du capital, mais pas encore pour elle-même. Dans la lutte, dont nous n’avons signalé que quelques phases, cette masse se réunit, elle se constitue en classe pour elle-même. Les intérêts qu’elle défend deviennent des intérêts de classe. Mais la lutte de classe à classe est une lutte politique.”

K. Marx, Misère de la philosophie, 1847 ; dans Œuvres, t. l, Gallimard, coll. « Bibliothèque de la Pléiade »,1965.

• Le mode de production tribal  (période néolithique). Ce mode de production se caractérise par la propriété de la famille. La tribu se présente comme un regroupement de quelques familles. La structure politique et juridique est très simple et directement connectée à la base économique car elle consiste uniquement en un conseil de chefs (patriaches). Les individus se nourrissent de la chasse, de la pêche, de la cueillette, peut être aussi de l’élevage et de l’agriculture. Les rapports de productions sont peu élaborés, étant donné que les forces productives sont très peu développées.   • Le mode de production esclavagiste (antiquité). Ce mode, conditionné par un progrès technique permettant l’utilisation rentable des esclaves, se caractérise par la formation d’une classe de maîtres et la transmission héréditaire, dans une société déjà complexe, de la propriété des moyens de production, des fonctions de commandement militaire et politique, des fonctions intellectuelles, etc.  L’économie est essentiellement centrée sur la ville ou la cité.• Le mode de production féodal (moyen-âge). Dans ce mode de production, l’économie est centrée sur la campagne. Ce déplacement de l’activité économique de la ville vers la campagne  découle des conquêtes barbares contre l’Empire Romain d’Occident, conquêtes qui eurent pour effet un important déclin de la population et la destruction de beaucoup de forces productives.  C’est sous l’influence de l’organisation militaire des Germains que se développe alors le mode de production féodal, caractérisé par la formation d’une classe guerrière (les seigneurs), associée à l’église chrétienne (anciennement persécutée par Rome), exploitant une masse de producteurs fermiers isolés et attachés au sol (les serfs). Dans ce mode de production, la propriété s’acquiert par la guerre ou la succession hériditaire. D’autre part, la situation du serf est ambiguë : théoriquement libre, il est pratiquement condamné à demeurer sur sa terre.  •  Le mode de production capitaliste  (ère moderne).  Né de la victoire des petits producteurs et commerçants des villes du bas moyen-âge (les bourgeois) contre la noblesse seigneuriale des campagnes, le mode de production capitaliste se caractérise essentiellement par la formation d’une classe dominante de financiers, d’investisseurs, de propriétaires fonciers, de producteurs et de commercants, exploitant une classe de travailleurs libres : les prolétaires – on dit aujourd’hui les ouvriers ou les employés. L’appropriation des moyens de production se fait essentiellement par l’achat, l’investissement ou le financement. L’économie capitaliste est la forme la plus complexe d’économie n’ayant jamais existé. Elle est aussi l’économie la plus intriguante. ( Schéma et légende de Serge Lapierre, trouvés sur http://www.colvir.net/prof/serge.lapierre/MaterialismeHistorique.html)

Donc le progrès technique change aussi la société et la domination de la technique, couplée aux sciences, dans le cader d’une société industrielle va entraîner plutôt que les émancipations attendues au XVIIème siècles, des aliénations et de nouvelles servitudes. C’est que nous allons voir à plusieurs niveaux.

  1. technique et temps libre: si l’homme ne se réalise pas dans son  travail ( car aliéné dans le cadre du machinisme et de la division du travail), on pense qu’il peut le faire pendant son temps libre. Un temps libre qui a été augmenté grâce à la mécanisation, à l’organisation moderne du travail. Les trois fonctions du temps libre sont le délassement, le divertissement, le développement de soi-même. On présente souvent ce temps libre comme étant coupé du temps de travail. Or deux-tiers du temps libre sont consacrés soit à récupérer du travail et à reconstituer sa force de travail, soit à se divertir par rapport au travail. Et on peut constater que bien souvent le temps libre reste soumis à la logique du travail dans le sens où ce doit être un temps productif, interdiction de dépenser en pure perte son temps. Donc il y a un lien entre le temps de travail et le temps libre. Si bien que si on ne se réalise pas dans le travail, on pourrait aussi ne pas se réaliser dans le temps libre. C’est ce que soulignent BERGSON. Pour BERGSON on accuse le machinisme de réduire l’ouvrier à l’état de machine, d’entraîner un production uniforme. Mais BERGSON rappelle que ce type de production a libéré du temps, mais malheureusement ce temps ne permet pas de récupérer ce qui est perdu au travail car au lieu de se développer individuellement, on consomme de l’uniforme (produit par l’industrie). Et de la même manière, il y a une standardisation du divertissement, des loisirs à cause d’un “industrialisme mal dirigé”. Pour BERGSON on en est arrivé à un point où par la technique on a développé notre corps mais en oubliant de prendre souci de notre âme et du coup cette petite âme ballote dans un corps trop grand pour elle. “le corps agrandit attend un supplément d’âme” D’où un vide qui est celui de notre société ( qualifiée d’ère du vide par Lipovetsky) et aussi en nous, cette société ne parvenant pas à nous combler et à nous satisfaire. C’est pourquoi BERGSON attend après la révolution technique, qui avait sans doute au départ une origine mystique ( on ne peut se tourner vers le Ciel que si on s’est d’abord libéré de la Terre, “la mystique exige la mécanique”), une révolution spirituelle ( “la mécanique exigerait une mystique”), à laquelle il veut croire parce qu’il croit en un mouvement pendulaire de l’histoire: après la frénésie de la consommation, on devrait revenir à un ascétisme et un développement de l’âme. 
  2. technique et rapports humains:    

 http://www.arte.tv/fr/Comprendre-le-monde/philosophie/2939770.html    

Une émission  sur la séparation comme constitutive de l’individu ( qui se coupe de la mère et se distingue des autres pour pouvoir être ensuite en relation avec eux), de l’homme qui sépare de la nature par sa nature prométhéenne, qui se sépare de Dieu d’où un écart entre le fini et l’infini, d’où le désir; mais aussi une émission sur la relation à l’autre, sur l’espoir  vain de l’amour de fusionner avec l’autre, qui se clôt par une réflexion sur la difficulté de relationner avec autrui, de l’aimer sans le nier et se nier, difficulté augmentée par notre société de consommation, où on veut aussi consommer l’autre ( et par là de la nier).

Le progrès de technique a donc changé

  1. notre rapport au temps libre
  2. nos rapports aux autres
  3. mais aussi l’ordre des choses d’où une “barbarie technologique” , pourrait-on dire. On peut pour préciser cela s’inspirer des analyses de Comte-Sponville dans le capitalisme est-il moral?, où il reprend l’idée de Pascal d’une distinction des ordres, même si Pascal en distingue 3 et Comte-Sponville, 4. Pour en savoir plus, cliquez :

                   

     4.      notre rapport à la nature d’où “un saccage de la terre” comme le dit Heideggerl’évolution de la technique ne donne pas simplement à l’homme de plus en plus de moyens, mais de nouveaux pouvoirs, celui de détruire la nature, celui de modifier les structures génératives ou de s’y substituer, mais aussi celui de quitter notre Terre ( cf. Analyse de Hannah Arendt sur la réaction des hommes à l’envoi de Spoutnik en 4/10/1957« ce fut le soulagement de voir accompli le premier pas vers l’évasion des hommes hors de la prison terrestre. » (p.33, La condition de l’homme moderne). Elle a aussi en s’appuyant sur la science et sa représentation désenchanté la nature.

 

III– Technique et éthique

 L’éthique est une réflexion sur les fins et sur les limites d’une pratique. Elle est en quelque sorte une moralité de l’agir (de l’action). La technique devenue technologie, c’est à dire application du savoir scientifique, a besoin qu’on lui pose des limites parce qu’on considère qu’elle est neutre dans le sens où la technique n’est qu’une simple science des moyens qui ne s’interroge pas sur les fins. Comme le disait KANT « que la fin soit bonne ou pas, ce n’est pas du tout de cela qu’il s’agit mais seulement de ce qu’il faut faire pour l’atteindre ». Du coup, du point de vue purement technique, un médecin et un empoisonneur sont d’égale valeur. Soit parce que la technique a une fin qui lui est propre : l’efficacité, le pouvoir. Depuis le départ l’objectif de la technique est de dominer la nature, de l’arraisonner. De plus l’évolution de la technique ne donne pas simplement à l’homme de plus en plus de moyens, mais de nouveaux pouvoirs, celui de détruire la nature, celui de modifier les structures génératives ou celui de s’y substituer. Et comme la technique détermine l’évolution des sociétés, que le possible techniquement finit par s’imposer comme à réaliser (loi de GABOR “tout ce qui est techniquement possible se réalisera”). (Dennis Gabor 1900.1979, prix nobel de physique 1971) Comme les valeurs techniques dominent notre société, profitant du retrait de la religion, de la tradition, de la morale, il apparaît comme nécessaire de penser les limites, de réfléchir sur les nouvelles fins que nous donnent nos nouveaux moyens.

 

Concernant le rapport entre la technique et la nature, il y a 2 grandes conceptions qui s’opposent:

1. on peut considérer que la limite est la préservation de la nature. C’est ce que souligne Hans JONAS avec son principe de responsabilité « agi de telle sorte que les effets de ton action soient compatibles avec la permanence d’une vie authentiquement humaine sur Terre » ; cette éthique est inclusive et anthropocentrée, c’est à dire qu’elle rappelle à l’homme qu’il est inclus dans la nature et qu’il se doit de la préserver donc la nature est réduite à un moyen à préserver qui n’a qu’une valeur relative à nous.

2. À l’inverse de cette conception il y a une éthique extensive qui, elle,  prône un véritable respect de la nature.

 L’éthique extensive (respect étendu à tout le vivant après l’avoir réservé depuis les XVII et XVIII siècles à l’homme, cf. Kant et le privèle de “posséder le Je” dans la représentation de soi-même) remet en question l’opposition sujet/objet et l’idée que le respect ne serait du qu’à l’homme, qui seul est sujet.

Elle revient d’abord sur la réduction du vivant à un objet, une chose, une machine. Cette réduction est due à Descartes et à sa théorie des « animaux-machines » texte 1 p444. Cette réduction part d’un constat, il y a dans le vivant certains fonctionnements mécaniques. On peut penser aux métabolismes, qui se font de manière automatique. Cela est renforcé par la pertinence des analogies mécanistes, par exemple comparer le cœur à une pompe permet de rendre compte de son fonctionnement (cerveau = ordi ; colonne vertébrale = charnière). Certains échanges standard d’organes par des pièces mécaniques renforcent cette vision. Cette conception mécanique a également une raison épistémologique (épistémée = science). À partir du XVIIème siècle, on veut faire de la biologie une véritable physique du vivant et donc on doit rompre avec le vitalisme qui consiste à penser le vivant comme ce qui est animé, c’est à dire doté d’une âme qu’on associe à un souffle, à une énergie, à un esprit ; d’où une approche qualitative du vivant. Alors que la physique pense du quantitatif. Et à cela s’ajoute une raison métaphysique, séparer l’esprit de la matière c’est autoriser la domination de la matière par l’esprit, donc la science et la technique. (homme = matière + esprit => individu).

 L’éthique extensive va montrer les limites de cette réduction mécanique en soulignant qu’il y a dans le vivant, en plus de la force motrice, une force formatrice et organisatrice ( Texte 2 p.444, Kant) qui fait qu’un être vivant et capable de se reproduire, de l’autoréparer (dans une certaine limite), de s’autoréguler, de l’organiser, de s’adapter. Cette force (formatrice, organisatrice) souligne qu’entre le vivant et la machine, il n’y a pas simplement une différence de degré dans la complexité, dans la miniaturisation, mais un « écart ontologique », c’est à dire une différence au plan de l’essence.  Une machine n’est qu’une somme de pièces agencées de manière à réaliser une fin et elle n’est pas plus que cette somme qui peut être pensée analytiquement. (analyse = décomposer) Alors que un organisme vivant est plus qu’une somme qui ne peut être saisie que synthétiquement parce que il est une totalité où modifier une partie, c’est modifier l’ensemble. CANGUILHEM (1904-1955) disait en ce sens « il n’est pas certain qu’un organisme après ablation d’un organe soit le même organisme diminué d’un organe ». De plus, un organisme vivant est une totalité spécifique et individuelle, ce qui pose le problème de l’expérimentation en biologie qui présuppose des organismes témoins ou qui travaille sur des êtres de laboratoire. Cela soulève aussi la question de l’expérimentation sur l’homme. Et enfin cette totalité est irréversible, c’est à dire qu’elle tend vers une évolution comme vers une destruction. En ce sens BICHAT en 1800 définissait la vie comme « l’ensemble des fonctions qui résistent à la mort » alors que dans la matière il n’y que déterminisme, causalité, il y a aussi dans le vivant finalité externe et interne. Cela fait de l’être vivant un être téléonomique (ayant une fin, un but). Cette expression vient de Jacques MONOD (1910-19976) qui assimile cette téléonomie au « projet » de transmettre d’une génération à l’autre une certaine quantité d’informations. Pour lui, ce projet n’est pas une intention consciente ni le signe d’un esprit de la nature. MONOD n’est pas animiste ou vitaliste, pour lui c’est une loi chimique, mécanique, propre au vivant. Ceci dit il met dans la matière une fin. Donc ce qui caractériserait le vivant, c’est une finalité interne, une certaine autonomie, une forme de liberté. C’est ce que souligne BERGSON : pour lui la vie est une tendance à agir sur la matière, une poussée à l’intérieur de la matière et il s’agit d’une poussée de liberté qui donne à la matière des formes variées, qui la fait évoluer, qui est créatrice. BERGSON n’est ni vitaliste ni mécaniste parce que pour lui, ce mouvement de la vie est libre et par là imprévisible donc opposé aux réductions des deux conceptions. Tout ceci oblige à considérer le vivant comme n’étant pas un simple objet mais ayant des caractéristiques d’un sujet. On peut aller plus loin pour abolir la frontière entre l’homme et l’animal. En plus d’être un être vivant, on peut souligner comme Jérémie BENTHAM que l’animal est comme nous un être sensible, c’est à dire susceptible de souffrir ou d’éprouver du plaisir. Dans ce cas, le maltraiter ou le faire souffrir pour notre propre bien, c’est faire du spécisme, c’est à dire traiter de manière inégale notre égal.

On peut également souligner avec Regan qu’ « un cheval ou un chien adulte est un animal plus raisonnable mais aussi plus susceptible de relations sociales qu’un nourrisson d’un jour ou d’une semaine ou même d’un mois. En effet, l’éthologie (étude du comportement) souligne que certains animaux on une vie psychologique riche mais aussi la conscience, une certaine forme de moralité, la capacité de manipuler des outils et parfois d’en faire l’élément d’une culture. Donc on est forcé de constater que certains animaux supérieurs ont toutes les caractéristiques d’un sujet. C’est pourquoi Peter SINGER veut les faire entrer à nos côtés dans une communauté des égaux.

Donc les êtres vivants ont une valeur en eux-mêmes qui implique un respect au sens kantien du terme. En tant qu’être sensible, il pose des valeurs ( le bon et le mauvais pour eux) en tant qu’être finalisé, ils poursuivent des fins, ne serait-ce que celle de se maintenir en vie, en tant qu’être ayant une vie psychologique, ils sont les sujets-d’une-vie. Tout cela en fait des sujets, des sujets de droits face auxquels nous avons des devoirs.

 

Mais certains voient dans cette écologie, dans cette Deep-ecology des dangers et des excès: sacralisation de la Nature et  anti humanisme

– Selon Luc Ferry dans Le nouvel ordre écologique, cette éthique extensive peut dériver vers une sorte de sacralisation de la nature au détriment de l’homme (Texte 2 P.262) dans le sens où le respect strict de la nature pourrait lui interdire de développer ses propres facultés. C’est pourquoi il voit dans cette éthique plus une régression qu’un progrès de la conscience faisant référence aux procès d’animaux au moyen âge s’appuyant sur l’idée que toute créature de la nature est une créature de Dieu. En ce sens, Marcel GAUCHET disait « l’amour de la nature dissimule parfois mal la haine des hommes ».

De même si on peut considérer les êtres vivants comme dignes de considération, en faire des sujets de droits pose problème car des droits présupposent des devoirs et on peut penser que la plupart des êtres vivants n’ont pas les facultés requises pour être tenus de les remplir. Dans ce cas, on peut considérer que nous avons des devoirs envers eux qui sont aussi des devoirs par rapport à nous bien qu’ils n’aient pas de droits.

 

Pour prolonger cette réflexion, quelques analyses complémentaires:

 

Gilles Lipovetsky ou un documentaire sur les nanotechnologies:

http://video.cityvox.fr/video/iLyROoafIKNr.html