Fiche de révision sur le légal et l’égal

8 juin 2010 0 Par Caroline Sarroul

Le juste, c’est d’abord le légal ( sens 1), ce qui est conforme au droit positif ( les lois de l’Etat) et normalement ce qui est légal est juste au sens de légitime ( reconnu comme juste, sens 2) car

1: le droit positif est légitime et vient corriger un fait insatisfaisant ou insuffisant.

2: il est censé incarner la volonté générale du peuple et donc pour s’instaurer, il oblige les hommes à se hisser au plan de la raison. Et on considère que ce qui est conforme à la raison est juste.

3: on peut considérer qu’avant le droit, il n’y avait ni juste, ni injuste mais simplement du bon et du mauvais pour chacun ou la loi de la nature ni juste ni injuste. C’est ce que soutient Spinoza

4: la loi vaut pour tous donc elle instaure une égalité et on considère spontanément que l’inégalité est injuste.

 

MAIS

  1.  le droit ne peut pas être ce qu’il devrait et n’être que la légitimation de la force et ne pas être l’expression de la volonté générale (Marx).
  2. le légal peut ne pas être légitime au sens d’accord avec la morale ou le droit naturel
  •  même si le droit est juste, s’en tenir à la loi peut amener à commettre des injustices parce qu’on peut être dans la légalité mais insuffisant d’un point de vue moral : on peut estimer qu’être juste, ce n’est pas simplement ne pas nuire à autrui mais faire quelque chose de positif pour l’autre.
  • Le principe des lois de l’Etat, c’est que “tes droits définissent mes devoirs”. C’est parce que tu as droit à la propriété que je me dois de la respecter, et réciproquement. Mais on peut penser que la morale, elle, fait qu’on peut se donner des devoirs sans qu’il y ait pour autant chez l’autre un droit correspondant. C’est ce que souligne Hegel avec le devoir de bienfaisannce: le mendiant n’a pas droit à ma pièce
  • Les lois sont par principe générales, or dans certains cas les appliquer à la lettre ce serait aller à l’encontre de leur esprit. Donc on peut dans certains cas pour être juste transgresser la lettre de la loi pour rester fidèle à son esprit et par là être juste.
  • On peut estimer qu’il est dangereux de réduire le juste au légal car cela pourrait justifier qu’on contracte la trés mauvaise habitude de l’hétéronomie ou qu’on pense être dispensé de toute réflexion sur ce qui est juste à partir du moment où on a la loi pour soi, où la loi seule définit le juste.

3. Réduire le juste au légal, c’est présupposer qu’il n’y a rien au-dessus du droit positif. Et c’est ce qu’essaient de défendre certains États au nom du principe de souveraineté, de non-ingérence. D’où une remise en question de l’universalité des droits de l’homme, non pas par rapport à ce qu’ils sont de fait, mais par rapport à ce qu’ils prétendent être en droit. Cela est dangereux parce que cela revient à accepter une culturisation du droit et une absolutisation de la culture, d’où un relativisme et une tolérance sans limites et une remise en question de l’unité du genre humain sous la diversité des cultures. D’où la nécessité d’affirmer la nécessité d’un droit naturel. (Léo Strauss).

       4. Réduire le juste au légal, c’est réduire le juste à la conformité de l’acte avec la loi mais on peut aussi considérer que la justice regarde aussi les intentions. (Il y a un débat entre les morales utilitaristes et les morales de l’intention)

Le juste, c’est l’égalité (car c’est une valeur centrale de nos sociétés, hommes égaux par nature et il y a même une passion de l’égalité), mais

1. on peut distinguer 2 formes d’égalité : Selon Aristote dans le domaine politique et dans les échanges économiques, ce qu’il appelle la justice directive: ce qui est juste c’est l’égalité arithmétique : un citoyen = un citoyen ou un acheteur = un acheteur, il faut que l’équilibre soit rétabli par la peine égale au dommage subi, que tout criminel tombe sous le coup de la loi. Par contre, dans le domaine de la justice distributive, lorsqu’il s’agit de décider des charges, des récompenses, des avantages ( et aujourd’hui des aides sociales) : ce qui est juste, c’est l’égalité géométrique. Et c’est alors par rapport à un troisième terme qu’on va évaluer chacun et répartir ou distribuer à proportion selon le mérite, les besoins, le travail ce qui est du à chacun ou ce qu’il doit…

2. on peut penser que l’idéal égalitaire n’est ni réalisable, ni souhaitable

 3. on peut penser que toutes les inégalités ne sont pas injustes : c’est ce à quoi en arrive John Rawls avec sa procédure du voile d’ignorance : les hommes vont s’accorder sur deux principes :

– Une égalité stricte dans l’attribution des droits et des devoirs et cela pour préserver les libertés de base, partant du principe que « les libertés de base ne peuvent être limités qu’au nom de la liberté »

– On peut accepter les inégalités socio-économiques sous différentes conditions :

1) si il y a au départ un principe d’égalité des chances ce qui implique que l’État doit intervenir pour atténuer les inégalité sociales ou naturelles ;

2) il faut que ces inégalités soient au profit des plus désavantagés. RAWLS voit la société comme une grande entreprise de coopération où l’enrichissement des uns n’est acceptable que si ça profite à tous. RAWLS ne croit pas à la théorie de la main invisible d’Adam SMITH pour qui il est inutile d’intervenir dans l’économie, de la réguler, elle profite naturellement à tous. Les plus riches croient travailler à leur intérêt privé mais en réalité ils travaillent pour l’intérêt général. RAWLS préfère un État interventionniste qui redistribue, qui évite l’accumulation de la propriété ou de l’épargne par exemple.

D’où la conclusion de RAWLS « l’injustice n’est pas l’inégalité, elle est simplement constituée par des inégalités qui ne bénéficient pas à tous ».

Le juste, c’est l’équité : “Car ce qui fait que tout n’est pas compris dans la loi, c’est qu’il y a des cas particuliers pour lesquels il est impossible d’établir une loi : en sorte qu’il faut avoir recours au décret. » Aristote. L’équité, c’est en quelque sorte la justice et son souci d’égalité pondérés par la compassion, par la prise en considération du cas particulier.