L: La recherche de la vérité peut-elle être désintéressée?

19 juillet 2010 0 Par Caroline Sarroul

Le corrigé :

Ce sujet interroge sur le rapport que l’homme entretient avec la vérité, la connaissance mais aussi son évolution. Dans l’Antiquité, la vie théorique contemplative étant présentée comme la vie la meilleure, la plus adéquate à notre nature d’homme.  Mais déjà à l’époque Epicure revendiquait que la vérité  ne valait pas pour elle-même mais « pour ses suites ».  On peut rechercher la vérité pour elle-même mais le fait-on ? L’intérêt se réduit-il à l’utilitaire ? Et ce qui nous intéresse à l’utile ? Et finalement cela pose-t-il vraiment problème que l’on cherche la vérité par intérêt ?

Un plan possible :

I. Il est possible qu’elle le soit
II . La recherche de la vérité est rarement désintéressée
III. L’utile ne se réduit pas à l’utilitaire

I. Il est possible qu’elle le soit

1. On peut rechercher la vérité pour la vérité. C’est l’idéal de la connaissance dans l’Antiquité : contempler les idées (theoria). Le savoir vaut pour lui-même et est préférable en soi à l’ignorance et l’illusion pour l’homme en tant qu’être de raison. C’est le cas du philosophe. Il désire la sagesse, le savoir, la vérité : aspiration à ce qui lui manque.

2. La vérité est une valeur comme le bon et le beau, valant pour elle même et donc désirable en soi.

3. La recherche de la vérité doit être désintéressée sans quoi on compromet de la trouver (condition d’objectivité et de rigueur).

Transition : mais de fait n’est-elle pas que  rarement désintéressée?

II. La recherche de la vérité est rarement désintéressée

Bien souvent la recherche de la vérité est utilitaire. S’il n’y a pas d’intérêt, comment se déterminer à vouloir accéder à la vérité? La volonté présuppose un choix et par là un jugement et une détermination.

1. L’homme ne peut pas agir sans intérêt( c’est par ailleurs ce qui compromet selon Kant l’existence d’un acte purement moral, la présence de ce « cher moi » que seuls des motifs pathologiques animent.)

2. La recherche de la vérité est utilitaire dans plusieurs domaines :

  • démarche scientifique « science d’où prévoyance ; prévoyance d’où action » (Auguste Comte). La science a cessé d’être une aventure de la connaissance pour devenir une aventure de puissance : « instrument à manipuler la matière » (Russell, Science et Religion).
  • démarche psychanalytique : mieux se connaître, c’est mieux être. Epicure se préoccupe moins de la vérité que de ses suites »
  • démarche historique : connaître le passé pour s’en libérer ou espérer mieux comprendre le présent, en peut-être même tirer des « leçons » de l’histoire, même si ce projet semble inadéquat au regard de la « primultimité » des évènements ou faits historiques.

3. Selon Nietzsche, « l’instinct de vérité » est partout le même. C’est le même « instinct de mort », contraire à la vie : religion, philosophie, science, sont dans la même logique : donner des points de repère, rassurer, poser un monde transcendant dévaluant confortablement le monde immanent. « La vérité » permet de nous cacher ce qui est : c’est une illusion nécessaire.

4. La recherche de la vérité est donc intéressée, d’où, d’ailleurs, la possibilité de se contenter du critère de vérité pragmatique de W. James : « est vrai ce qui permet de prévoir, d’agir efficacement », ou de la vérité technique selon Russell.

III. L’utile ne se réduit pas à l’utilitaire

1. Mais la recherche de la vérité peut aussi être inutilitaire et pourtant utile.

  • La vérité, bien que parfois difficile à entendre, est quelque chose de positif : confronter au réel…elle permet d’agir en conséquence ; satisfaction en tant qu’être de raison, même si en tant qu’être de désir, cela relève de la souffrance.
  • On ne peut vivre les yeux fermés, ou se laisser conduire par d’autres. L’homme se doit de développer conscience et connaissance.
  • La connaissance comme facteur de liberté et de Joie (Spinoza).

2. Le fait que la recherche de la vérité soit intéressée n’est pas nécessairement un obstacle pour l’atteindre. « L’objectivité est collégiale plutôt qu’individuelle, en science » (Popper). Si réellement il y a intérêt pour la vérité, souci du vrai, il y aurait aussi des exigences :

  • ne pas se contenter de ce qui avantage
  • se méfier de la crédulité
  • analyser en profondeur
  • analyse de Popper sur la vérification
  • vouloir que la théorie s’accorde pleinement avec le réel (Einstein et la montre fermée)