Bon, à cette heure-ci, les progressions sont au point, les problématiques affûtées, les blogs dépoussiérés, la disposition de vos salles revues, quelques bonnes résolutions de rentrée tiennent encore, les premiers paquets de copies s’entassent déjà sur le coin du bureau… Si oui, la rentrée est donc bien derrière nous. Ah, s’ajoute à cette liste la planification d’éventuelles sorties scolaires pour cette année qui s’amorce. Budget oblige, le Conseil d’Administration doit trancher prochainement. Je m’étais pourtant promis de ne pas en faire cette année. Trop lourd à organiser dans ce quotidien déjà bien rempli, marre de négocier des devis et d’aller parlementer avec les services d’Intendance.

Ras-le-bol de la tonne de paperasse à gérer, et de se casser la tête pour essayer de faire baisser les prix dans l’optique d’emmener toute la classe et de ne laisser aucun élève de côté pour des raisons financières, un tantinet découragée par la perspective de courir après les autorisations de sorties (dont les dernières arriveront le jour J, 5 minutes avant le départ), un peu lassée des sous à compter, d’un budget à équilibrer. Mais bon. D’un autre côté, la tentation est forte. C’est quand même bien de faire de l’Histoire-Géo ailleurs que dans un manuel, les fesses sur une chaise, dans une salle de classe, non ? Elle avait été chouette la sortie au tribunal l’an dernier avec les quatrièmes…

objection

Souvenirs, souvenirs…

Février dernier, mardi, 13h. Tout le monde répond présent à l’appel. Une demi-classe de quatrième. L’autre moitié ira en cours et fera la sortie la semaine suivante. En route pour le tribunal, au centre ville. Une certaine fébrilité se fait sentir dans les rangs. Petit rappel : pas d’objets métalliques sur soi afin d’éviter de faire sonner tous les portiques à l’entrée. Ciseaux, cutters, crans d’arrêt restent dans l’établissement donc… Quelques consignes sur le protocole à respecter dans ce lieu (on se lève à l’entrée de la cour, on ne prend pas part aux débats, on coupe son téléphone, etc. etc.). Un magistrat nous attend à l’entrée. Il nous sert de guide dans le dédale des couloirs de l’imposant bâtiment où siège le tribunal correctionnel. Il nous explique le déroulement d’une audience, précise le rôle de chaque acteur présent, répond aux premières questions de chacun préparées au préalable.

Nous nous installons sur les bancs réservés au public, côté geôle. Elle est vide pour le moment : une porte d’ascenseur close, un banc, des parois de verre. Elle intrigue. Dans la salle, avant le début de l’audience, une certaine effervescence se fait sentir. Des allers-retours, les portes grincent et claquent. Les rangs se remplissent. Les robes des magistrats se mêlent aux uniformes des agents de sécurité. Qui sont les prévenus, y’a-t-il des victimes ? Tous essayent de deviner le statut de chacun. Quelques minutes encore avant l’heure fatidique du lancement de l’audience. Les boutons de l’ascenseur se mettent au rouge. La porte s’ouvre. Deux comparutions immédiates sont au programme en ce début d’après-midi. Un homme menotté sort, encadré par deux forces de l’ordre. Les plus proches de la vitre ne sont pas très rassurés. M’dame, il m’a regardé. Et s’il me reconnaissait dans la rue ? Elles sont plus grosses que dans les séries les menottes hein ! S’il arrive par là, c’est que c’est grave ? M’dame, mais c’est un vrai ?? ». La pression monte, mi-amusés, mi-inquiets. La cour entre. Le public se lève. L’audience est lancée.

Au retour…

Quelques heures plus tard. De retour au collège, petit débriefing. Les questions fusent, chacun s’exprime : « Ça fait bizarre de voir en vrai comment ça se passe ; je trouve que le juge a été trop gentil et que la peine n’a pas été assez sévère pour le voleur du magasin ; les mots étaient compliqués et c’était difficile de tout comprendre, pourquoi ils ne parlent pas dans le micro les juges ? Moi, j’aimerais vraiment pas devoir être un jour dans une affaire… »

Comment exploiter cette sortie ? Si elle intervient en amont du cours, les affaires traitées peuvent être reprises pour aborder de façon concrète les principes de la justice et ses missions, les droits et devoirs de chacun, les métiers liés au droit. Cette séquence sur la justice, plutôt ardue, passe nettement mieux du coup. Mais il faudra tout de même donner aux élèves quelques clés et un minimum de vocabulaire pour qu’ils puissent suivre l’audience et comprendre qui est qui et qui fait quoi. Mais elle peut aussi conclure la séquence et venir l’enrichir, en guise de conclusion.

Un bémol. Le fait qu’on ne connaisse pas les affaires à l’avance. Elles sont parfois longues et complexes et des élèves trop jeunes ou inattentifs peuvent se perdre dans les rouages du jargon juridique et décrocher assez vite. Autre inconvénient : on ne peut s’y rendre qu’avec une demi-classe, ce qui complique un peu.

Côté organisation, c’est plutôt simple à mettre en place et pas trop chronophage. Il suffit de trouver la personne à contacter au tribunal qui s’occupe de l’accueil des groupes ; il est nécessaire d’anticiper car les demandes sont nombreuses. Les audiences étant gratuites, il n’y a pas de frais, si ce n’est le déplacement de l’établissement au tribunal. Souvent, les collègues se bousculent pour accompagner et trouver des volontaires ne présente donc pas de difficultés.

Voilà. Bon, allez, en rédigeant cette bafouille, j’ai réussi à me persuader : j’y retournerai cette année. Elle est sympa cette sortie, je file écrire le projet. Pas d’objection votre Honneur ?

Agnès

2 réponses

  1. Très intéressant, effectivement ! Si on peut encore impressionner les élèves « c’est un vrai ? », il ne faut pas hésiter. Peut sans doute aussi très bien s’intégrer dans la découverte des métiers en DP3 ou au lycée, en seconde en AP…

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