Une question existentielle

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L’école, à quoi ça sert ?

De toute façon on apprend des trucs qui serviront jamais.

Je me rappelle même plus du cours d’hier alors…

Moi, je viens pour voir mes amis.

Vous, je vous aime bien, c’est le français que j’aime pas.

Moi, je veux faire apprenti.

Je m’ennuie. Quelle heure il est ?

J’aime pas l’école.

A force de se l’entendre répéter on y croirait presque. Que faire face à ces questions qui reviennent tels des refrains entêtants dans nos cerveaux de bons élèves qui ont toujours pensé le contraire ?

La question est vieille comme Mathusalem – C’est qui ce type ? – mais la réponse n’est pas si évidente.

On peut évidemment, en bon pédagogue, essayer de répondre, lorsqu’on est face à un, ou plusieurs élèves, qui sont persuadés d’avoir « coincé » leur prof sur une question existentielle.

C’est l’occasion d’être éloquent, persuasif, et de mettre en pratique ce que nos années d’études nous ont appris, ou pas. Parler, c’est agir – C’est à qui ?

Réponse #1 : L’ambitieuse

Tu sais, tu as de la CHANCE d’avoir accès à l’école dans ces conditions. Ce n’est pas le cas de tous les enfants sur la planète…

Bref, rappeler l’élève à sa responsabilité d’être humain qui vit dans un pays aisé et qui du coup est devenu un peu capricieux. On va dire qu’il s’est adapté à son environnement….

– J’ai l’impression d’entendre ma mère, « Mange tes choux de Bruxelles, tu sais certains enfants… »

Pas très convaincant.

Réponse #2 : La réaliste

Un jour tu vas devoir t’orienter, choisir une VOIE, un métier et pour savoir ce qui te plait vraiment, tu dois étudier beaucoup de domaines différents : les arts, les sciences, la littérature…

– Je sais déjà : je suis doué pour le foot. Je veux faire footballeur pro.

Variante : Je suis retenu pour les auditions de THE VOICE.

D’accord, mais…

Réponse #3 : L’humaniste

A l’école, tu n’apprends pas seulement des notions qui te paraissent inutiles, tu deviens petit à petit un ADULTE, tu apprends la vie en société, à prendre des responsabilités, à assumer tes erreurs, tu vis des expériences.

– Oui, mais ça c’est surtout en dehors des cours.

Bon…

Réponse #4 : L’idéaliste

Ta CULTURE personnelle s’enrichit au contact de tes professeurs et des autres élèves. Tu peux partager tes savoirs et recevoir des informations des autres. Tu forges ainsi ta personnalité et tu apprends à mieux te connaître. Tu étends tes compétences. Tu partages tes connaissances.

– Attendez, on est bien dans le même collège ? Ou vous vivez dans le monde des BISOUNOURS?

Où se trouve-t-il ce monde ?

Réponse #5 : L’encore-plus-réaliste

Il faut bien passer le TEMPS, s’occuper en attendant la fin. Et l’école ça fait passer 15-20 ans de la vie facile. Va lire Heidegger.

– Vous êtes pas un peu déprimée madame ?

Non, non.

Réponse #6 : La désespérée

De toute façon tu n’as pas le choix. L’école est OBLIGATOIRE jusqu’à 16 ans. Il va bien falloir que tu suives mes cours toute l’année, et même peut-être aussi l’année prochaine.

– J’ai l’seum.

Oui !

Liste de réponses/justifications non exhaustive bien sûr.

Deuxième solution, plus sage, plus pratique, celle que des milliers de collègues ont déjà adoptée : faire agir les élèves pour les rendre acteurs de l’école, et pas uniquement réceptacles d’un savoir qu’ils considèrent de toute façon inutile, dans 90 % des cas.

Au collège, certaines matières s’y prêtent aisément, certaines notions plus que d’autres. Les langues étrangères en particulier, mais aussi les maths, la S.V.T, la physique-chimie : rien de plus simple de faire le lien avec la « réalité palpable » des élèves.

Mais lorsqu’il s’agit de faire le lien entre un texte poétique du XVIe et le quotidien, cela peut paraître plus compliqué. En fait, pas tant que ça !

Il suffit de choisir des supports qui les touchent ou les surprennent. Les textes littéraires « parlent » de la vie de tout un chacun, après tout.

On peut les faire produire à partir de leur vécu ou d’après le vécu d’un personnage, qui pourrait être le leur… Dans le but de leur faire comprendre que les textes parlent d’EUX, les rendre conscients de l’universalité de la littérature.

C’est ainsi que je propose à mes élèves, par exemple, d’écrire leur autobiographie, de partir de leur propre arbre généalogique pour écrire un récit d’enfance, de composer un rap engagé, de s’imaginer en pirate, de rédiger un dictionnaire de leurs néologismes…

Bref, faut essayer de leur montrer que l’école, c’est du concret !

– Qui vous appelez « du con » ?

M.D.R.

Une chronique de Marine Vendrisse

2 réponses

  1. Dans la liste des arguments spécieux que j’utilise également, il y a celui des enfants au travail dans bien des pays; et quel genre de travail: mines (!), usines de vêtements ou chaussures ( contact avec les teintures « empoisonnées » ), travail du métal … Vous choisissez l’ école ou la mine ?
    Et puis, dans mon ancienne école, on leur passait de temps en temps un « épisode » de ce magnifique documentaire sur  » l’école de tous les dangers », ces enfants qui, pour se rendre dans leur chère école affrontent: des précipices ( suspendus à des câbles ), la traversée de la savane ( infestée de fauves et autres bestioles sympathique ), le froid ( en franchissant des montagnes et des gorges….) … bref, des heures de marche, de fatigue, de souffrance pour étancher leur soif de savoir. Parfois, leur école est si loin qu’ils ne rentrent à la maison qu’au bout de quelques mois.
    Alors, cessez de glapir, bande de petits veinards hyper-protégés… Argh, argh…

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