Surdoué, élève intellectuellement précoce (EIP), élève à Haut Potentiel (EHP)…

Pour beaucoup de parents, ça serait le Graal que leur auguste progéniture se voit décerner l’un de ces labels, comme si cela allait propulser leur enfant dans une dimension magique où tout ne serait qu’épanouissement et succès.

Par contrecoup, pour beaucoup d’enseignants, ces mots évoquent une quasi-légende urbaine destinée par les parents à justifier d’injustifiables comportements z’apprenantaux et à exiger un traitement forcément sur-mesure.

Mon expérience, aussi riquiqui soit-elle, m’a appris que tous ces parents et tous ces z’enseignants se trompent autant que les personnes qui parlent de « pain au chocolat » alors que des études scientifiques très sérieuses ont pourtant démontré de façon irréfutable qu’il faut bien parler de  « chocolatine ».

Haut potentiel… d’incompréhension

D’après l’écrivain Martin PAGE : « Ceux qui pensent que l’intelligence a quelque noblesse n’en ont certainement pas assez pour se rendre compte que ce n’est qu’une malédiction. »

Vous trouvez que c’est sombre comme propos ?

Certes.

Mais à mon sens, cette phrase raconte mieux qu’aucune autre l’ampleur de ce que peut ressentir une personne à « haut potentiel », enfant ou adulte. Il se sent souvent enfermé dans cette forme particulière d’intelligence qui le sépare des autres. Il ressent intuitivement qu’il ne « fonctionne » pas comme les autres.

Son intelligence n’est pas supérieure mais elle est différente, mélange détonnant entre une pensée en arborescence, un fonctionnement intuitif et une sensibilité exacerbée qui est le moteur principal d’une activité cérébrale permanente.

En fait, le cerveau d’une personne surdouée, c’est la machine infernale des Temps Modernes de Chaplin. Impossible de l’arrêter, de la ralentir, d’avoir prise sur elle.

Chacun de nous est unique et nous sommes tous « différents » les uns des autres.

Mais pour une personne « à haut potentiel », la difficulté quasi insupérable vient de ce qu’il ressent au plus profond de lui cette fameuse « différence » comme la cause d’une solitude aussi irrémédiable que douloureuse.

Solitude constitutionnelle donc, même au milieu des autres, même lorsqu’il est entouré par des gens qu’il aime et qui l’aiment.

Quand on sait par ailleurs qu’être une personne « à haut potentiel intellectuel » peut être une cause d’échec scolaire et/ou peut complexifier la socialisation dès l’enfance ou l’adolescence, on comprend que c’est loin mais alors trèèèèèèès loin d’être un « cadeau ».

Alors il y a quelques années, quand une maman m’a dit l’œil humide d’excitation que « c’était dommage » parce que son fils (qui avait alors tout juste 5 ans) « n’avait pas réussi le bilan psy pour être surdoué contrairement à sa sœur » je n’ai pas pu m’empêcher de lui dire que c’était tout le mal que je lui souhaitais : être un enfant « pas surdoué ». Autant dire qu’il a fallu que je lui explique mon propos pour qu’elle renonce à lui faire « repasser les tests parce que c’est peut être juste qu’il était fatigué la première fois »…

Haut potentiel… de déni

Quand j’ai demandé à cette maman ce qui l’avait amenée à faire passer un bilan à son enfant aussi jeune (alors qu’entre nous, de ce que je voyais en classe rien dans son travail ni dans son comportement n’évoquait une éventuelle précocité intellectuelle…), elle m’avait fait cette réponse dont je me souviens encore presque mot pour mot : « je ne sais pas, mais je me dis que comme ça, si c’est écrit qu’il est surdoué, au moins les maîtresses comprendront s’il s’agite et elles seront plus gentilles. »

Je repense souvent à cette maman. En fait je repense à elle à chaque fois que je vois sur les réseaux sociaux professoraux des collègues se gausser à la perspective que tel ou tel zapprenant intellectuellement précoce en souffrance alors que hein, on sait bien nous autres qu’il est juste pénibles et pis que faut pas pousser mémé dans les orties quoi !

Avec autant d’incompréhension de part et d’autre… Comment avancer ?

Oui, tant que nous tous, enseignants, parents, nous resterons dans une méconnaissance de ce qu’est la précocité intellectuelle et de la façon dont elle peut être décelée mais surtout accompagnée (sachant qu’il y a autant de besoins d’accompagnements que d’enfants précoces), tant que nous n’aurons pas les moyens de cet accompagnement, tant que les RASED seront submergés de demandes d’aide, tant que nous ne serons pas formés, tant que nous ne remettrons pas en question nos idées préconçues alors nous risquons rien de moins que de continuer à être violent avec nos zapprenants, ceux à haut potentiel comme les autres.

C’est ce que j’ai pu vivre moi-même en tant que zapprenante et je ne l’ai jamais oublié. JAMAIS.

Pour approfondir…

Et sinon, si vous voulez des infos, des vraies, des précises, n’hésitez pas  :

Une chronique de Sophie Pouille

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