Auparavant considérée comme une voie de « garage », aujourd’hui la voie professionnelle s’enrichie et s’étoffe avec la réforme de la transformation de la voie professionnelle engagée en 2019 et la mise en place de projets variés qui sont désormais au cœur des enseignements professionnels (la réalisation d’un chef d’œuvre sur deux ans en classe de première et terminale) ainsi que la co-intervention (co-animation entre enseignements professionnels et enseignements généraux) afin de donner plus de sens aux enseignements.

Ces nouveaux éléments, ce sont les axes déterminés par le Ministère. Mais plus concrètement, la voie professionnelle est toute autre et c’est surtout une affaire d’humain.

En France, la voie professionnelle c’est 118 baccalauréats professionnels, 200 certificats d’aptitudes professionnels (CAP) et 50 brevets professionnels (BP). Ce système est spécifique à la France, il n’y a pas un tel équivalent à l’étranger.

S’inscrire en voie professionnelle ce n’est pas faire « un vieux métier » ou faire un « sous-métier » comme je l’entends bien trop souvent. Ces a priori ne sont absolument pas la réalité et sont infondés, car c’est avant tout apprendre les métiers dont nous aurons encore besoin demain, c’est-à-dire, des métiers d’avenir : les techniques de chaudronnerie industrielle, l’électrotechnique, les systèmes numériques, l’aide à la personne, le commerce, la coiffure, l’esthétique, la mécanique, la restauration et bien d’autres filières encore.

La clé de la réussite : une orientation préparée

La clé de voûte dans la voie professionnelle est l’orientation réussie des élèves. Au collège, une partie ont déjà un projet professionnel construit. Il est facile d’orienter ces élèves-là vers un baccalauréat professionnel, un CAP ou un BP dans le domaine souhaité après une immersion en entreprise. En revanche, pour ceux qui ont des idées, mais ne sont pas sûrs de leurs choix, il y a la possibilité de réaliser un « mini-stage » d’une semaine dans une classe en voie professionnelle. Le dispositif du « mini-stage » est à souligner puisque peu d’enseignants et d’élèves connaissent son existence. Il est très fréquent que j’accueille au sein de mes classes (que ce soit en baccalauréat professionnel ou en CAP) pendant une semaine des élèves de collège, de SEGPA (section d’enseignement générale et professionnelle adaptée) ou même des lycéens de seconde ou première qui souhaitent se réorienter.

D’autre part, la classe de 3e prépa-métier peut être un bon levier pour l’orientation des élèves qui se dirigent vers la voie professionnelle, mais n’ont pas d’idée précise, car des stages leurs permettront de découvrir différents mondes professionnels.

D’après les profils des jeunes auxquels j’enseigne, j’ai pu constater que la plupart des élèves qui sont satisfait de leur orientation, ce sont ceux qui ont pu déjà mettre un pied dans le monde professionnel par le biais de stages ou d’une immersion en entreprise. Ces élèves ont donc un objectif bien défini à long terme et ont un chemin « tout tracé » ce qui les rassure et les motive au quotidien. La preuve en est, lorsque je visite en entreprise mes élèves en période de formation en milieu professionnel (PFMP, c’est-à-dire en stage) tous se sentent « mieux », plus épanouis en stage qu’en classe.

Il faut savoir qu’en baccalauréat professionnel et en CAP les élèves ont deux PFMP par an. Ils peuvent également faire le choix de l’apprentissage, c’est-à-dire alterner les périodes en entreprise et en classe. J’ai eu ce cas, l’année dernière avec cinq élèves en logistique, cela était bien plus enrichissant pour eux, mais plus difficile pour moi de les intégrer à mes cours puisqu’ils étaient rattachés à une classe dont les élèves étaient en formation continue. Mais enseigner en voie professionnelle c’est savoir s’adapter en permanence à son public ou même à ses publics. Puisqu’au sein d’une même classe nous pouvons avoir des profils bien différents.

Les clichés doivent être dépoussiérés

Encore une fois, gare aux clichés ! Les élèves en voie professionnelle, ce ne sont pas les « cancres » qui ont échoué dans la filière générale ou technologique. J’ai pu constater de nombreuses fois que ce stéréotype est très largement véhiculé par les élèves, mais pire encore, par les enseignants eux-mêmes qui dénigrent la voie professionnelle alors que c’est une voie d’avenir. Le plus marquant, c’est que ce cliché touche aussi les professeurs des lycées professionnels (PLP) dans ma formation en Master MEEF (métiers de l’enseignement de l’éducation et de la formation) en INSPE (Institut supérieur du professorat de l’éducation) les formateurs eux-mêmes, souvent des agrégés en filière générale, nous considéraient comme des « sous-profs ».

Ne pas subir, mais vivre pleinement sa scolarité

L’orientation des élèves en voie professionnelle ne doit pas être basée sur un niveau scolaire fragile, comme c’est trop souvent le cas, mais sur un projet professionnel construit et réfléchi.

Si cette orientation est vécue comme un échec scolaire, les élèves souffriront de cette situation. En classe, cela se remarque très vite, lors des TP (travaux pratiques) certains élèves refusent de se mettre en tenue professionnelle, se cachent dans les plateaux techniques pour ne pas être aperçu par leurs camarades en train de pratiquer. Pour ma part, c’est souvent le cas lors de TP d’entretien des locaux où certains élèves ont honte de réaliser un bionettoyage d’équipements devant leurs camardes de filière générale lorsque ces derniers passent dans les couloirs. Or, c’est le quotidien des aides-soignantes et des infirmières en milieu hospitalier.

C’est pour cela, que l’orientation en voie professionnelle doit être préparée et réfléchie et non imposée. Une attention particulière et un suivi plus régulier doivent être apportés à ces élèves, car souvent ils se sentent stigmatisés et souffrent de cette orientation. Certains ne viennent pas d’un milieu social favorable à leur développement scolaire, rencontrent des difficultés familiales, etc. Mais la plupart de ces problématiques, nous les retrouvons dans les filières technologiques et générales sauf que nous y sommes très vigilants pour éviter tout décrochage scolaire. Le but est qu’après avoir acquis des compétences et techniques professionnelles, les élèves issus de la voie professionnelle puissent rapidement s’insérer dans le monde du travail et y soient préparés au mieux.

Il ne faut pas oublier que la voie professionnelle est une voie d’excellence ! Les Compagnons du Devoir, les Meilleurs Ouvriers de France, excellent dans leurs disciplines professionnelles et ont obtenus leurs CAP ou leurs baccalauréats professionnels avant d’être mondialement connu pour certains. C’est une voie où les élèves sont pleins d’ambitions et travaillent en menant des projets qui les valoriseront tout au long de leur scolarité, mais qui enrichiront également leurs CV tout comme leurs nombreux stages en entreprise.

 

Une chronique de Valentin de Angelis, professeurs des lycées professionnels en biotechnologies santé environnement

Une réponse

  1. Je retiens surtout de votre article le positif, la valorisation de nos élèves, leur évolution et la construction de leur avenir.
    Pour les profs qui ne savent pas voir le potentiel de nos jeunes, c’est dommage.
    Parfois il les abime alors qu’ils n’attendent qu’une chose, prendre plaisir dans le domaine qu’ils ont choisis. (pour les meilleurs en tout cas)
    Merci pour l’article

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