Le son grésillant et les cliquetis du néon qui s’allume me réveillent brusquement. Il clignote anarchiquement et sa lumière chancelante m’agresse les yeux. Me voilà de retour au lycée, sur le pas de la porte. Un mois de confinement et je retrouve enfin ma salle de classe. Mais ce n’est pas fini… En demi-jauge, me voilà comme ce néon dont la lumière vacille : tantôt en classe, tantôt derrière l’écran. Tantôt ici, tantôt là-bas. 

Vais-je aussi finir par « griller » ?

Si peu de séquences prévues en présentiel, tant encore à réaliser en distanciel… Comment conserver la motivation de mes élèves ? Jamais une fin d’année ne m’aura semblé aussi courte et aussi longue à la fois. Comme le reflet du néon sur mon tableau, les semaines s’éclaircissent puis s’assombrissent tour à tour. 

Enfin, comme si cela ne suffisait pas, je dois aussi avancer, cahin-caha, dans la préparation du Grand Oral. Je m’occupe également des 1ère spécialité SVT de ma collègue. Déjà en arrêt depuis plus d’un mois, elle ne sera pas remplacée en dépit des soit-disant moyens débloqués cette année.

Dans de telles conditions, comment faire de cette période un trimestre efficace, qui permette tout de même de faire progresser nos élèves tout en préparant les épreuves du brevet, du bac, des BTS… ?

Terminer le programme… quoi qu’il en coûte ?

La tentation est forte d’exploiter les périodes de distanciel pour rattraper le temps perdu. Envoyer son cours par mail puis en faire un rapide commentaire en classe virtuelle est un gain de temps certain. Tous les élèves sont bien présents et ils n’ont jamais été aussi calmes : on peut avancer à toute vitesse !

Enfin, « présents », c’est peut-être vite dit : je vois bien leur nom écrit en blanc sur le fond noir de ma classe virtuelle, mais je ne sais pas s’ils suivent réellement le cours. Que font-ils ? Sont-ils en train de lire une très bonne chronique publiée sur le Webpédagogique (ou d’autres choses moins excitantes) ?

Et puis, il arrive que la classe virtuelle bugue…

C’est rare… mais ça arrive.

La faute aux tuyaux vous dira notre plombier de service, aux vilains hackers (c’est son côté geek) ou aux hébergeurs de sites qui brûlent (là c’est quand il se laisse rattraper par des tendances pyromanes). 

Du coup, que faire ?

Le lien virtuel est difficile à entretenir, mais incontournable pour avancer. Avancer ne veut pas dire tenir le programme absolument ! Il s’agit de progresser deux fois moins vite, certes, mais avec tout le monde (ou presque…) et sans se décourager, de garder la dynamique. L’objectif est plus clair alors.

Réduire et choisir de garder ce qui est vraiment nécessaire, là est vraiment notre valeur ajoutée de prof. 

Le distanciel, finalement, correspond mieux au travail des compétences qu’à la transmission des connaissances, même si une petite vidéo trouvée sur la toile peut parfois permettre de revoir certains acquis. Remobiliser des connaissances, les aborder d’une autre manière, par d’autres activités, c’est peut-être ce qui reste le plus efficace pour garder son auditoire attentif.

Le plus difficile, c’est certainement trouver le bon moyen de faire des retours sur le travail des élèves. Renvoyer une correction toute faite ça rassure, mais honnêtement, quels élèves les liront ? 

Pour ma part, je corrige toutes leurs productions et je prends le temps de leur en faire part. Mais nous pouvons imaginer quelque chose d’intermédiaire, avec un travail en groupe, qui diminuerait alors le travail de correction ou une correction menée par un autre groupe d’élèves.

Et les examens… On les prépare ? On attend ? On commence sans conviction ?

Ma stratégie : on explique qu’il y a de l’incertitude et que les choses peuvent évoluer en fonction du contexte… Rien de bien nouveau pour les profs de ma discipline qui enseignent ce qu’est le vivant.  

D’ailleurs, s’arrête-t-on de vivre parce que l’on ne sait comment va évoluer notre environnement? Non, nous nous préparons à ce qu’il est probable de rencontrer et nous nous s’adaptons quand cela change.

On rassure aussi : rien de pire que le stress. 

Bien sûr, je sais bien que vous n’avez pas la chance comme moi d’avoir deux chapitres complets consacrés au stress pour en parler avec les élèves. Mais je leur rappelle que ceux qui les évalueront ne viennent pas d’une autre planète (il ne faut pas s’attendre à ce que Thomas Pesquet débarque, fraîchement revenu de l’ISS). Ce seront des collègues qui ont connu les mêmes conditions de travail et qui sauront faire preuve d’une réelle bienveillance.

En résumé

On garde le cap : on se fixe des objectifs et on tente de garder la dynamique pour que la motivation perdure. Le but est de faire le tri et de transmettre les savoirs propre à nos enseignements et des connaissances parmi celles qui nous semblent les plus judicieuses.

Et pour mon néon ? Celui qui était au bord de la rupture ?

On a changé le starter, et le voilà reparti pour des années encore.

Et pour vous : le starter pédagogique est-il reparti ?

 

Une chronique de Damien Thomas (sous tension mais reboosté)

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