Marion est prof en primaire depuis 2007. Elle a enseigné à Paris, jusqu’en 2013, avant de rejoindre l’École française André Malraux de Bobo Dioulasso au Burkina Faso. Elle raconte son parcours.

Le départ

Je cherchais à revenir dans la sous-région ouest africaine après un mi-temps annualisé passé entre le Mali et le Sénégal en 2012 qui m’avait permis de rencontrer un Malien qui deviendra, par la suite, mon mari. 

J’ai eu une réponse positive à Bobo Dioulasso mais pour le collège. On me proposait d’y enseigner les arts plastiques et la musique en contrat local. J’ai hésité puis j’ai finalement accepté, ravie de me confronter à un nouveau défi. J’ai donc demandé et obtenu une mise en disponibilité d’un an. Bobo Dioulasso était la ville idéale car vraiment proche du Mali. Je me suis rapidement formée auprès d’une amie professeure de musique et j’ai beaucoup potassé pour les arts plastiques. 

Dans l’école où je travaillais à Paris, beaucoup de parents originaires d’Afrique de l’Ouest sont venus me voir, ravis de la nouvelle et souhaitant me donner tour à tour des conseils et des mises en garde pour m’assurer une bonne arrivée. M. Diallo, un père d’élève malien, m’a même donné 25 fcfa en me disant que comme ça, je ne partirais pas sans rien. J’ai trouvé l’attention très touchante. 

Une fois sur place

L’école que je quittais étant assez « musclée », j’ai eu une petite appréhension le jour de la rentrée à Bobo en voyant la taille des troisièmes devant la porte, et ce malgré mes 1 mètre 80. Je n’étais pas habituée à ces hauteurs : entre le ce2 et la troisième, il y a quelques transformations chez l’être humain. Lors de ma première intervention pour demander le silence, j’ai anticipé une possible réaction négative mais l’élève a baissé la tête et m’a dit « Pardon madame ». Le Burkina est un pays paisible et cela se ressent jusque dans les classes. 

La première année, mes heures étaient complétées par de l’aide en primaire. Je prenais les non-lecteurs en CP et CE1. Étant sur un contrat collège, j’avais 18 h d’enseignement/semaine. Malgré mes heures de préparation, je découvrais les journées à horaires changeants, la possibilité de commencer plus tard ou de faire des heures supplémentaires… et j’avais alors du temps pour découvrir Bobo Dioulasso, bien aidée par tous ceux que je pouvais solliciter. 

Puis j’ai eu une classe primaire à ¾ temps pour pouvoir continuer aussi au collège. Cette alternance entre le primaire et le collège a été agréable. Le contact avec les « grands » et toute la création permise par l’enseignement des arts m’a vraiment plu durant ces trois années. 

Au bout de trois ans, j’ai fini par obtenir un contrat résident en primaire, car une collègue est repartie pour la France. Même si cela m’a permis de trouver une situation plus confortable (meilleur salaire, fin de la disponibilité, reprise des cotisations…), cette situation m’a obligée de laisser à regret l’enseignement au collège.

Être dans une école qui va jusqu’au lycée nous permet de voir les élèves grandir, voir leurs progrès et parfois malheureusement les difficultés durer (nous n’avons aucun accompagnement possible sur place : pas d’orthophoniste, d’assistante sociale, de psychologue…). 

Quelles différences avec la France ?

À l’école, l’emploi du temps est différent de celui en France : nous faisons du 8 h-12 h de lundi à vendredi et nous revenons deux après-midi de 15 h à 17 h, le mardi et le jeudi. Nous n’avons pas de cantine. Depuis que je suis ici, je conseille donc aux parents de CE1 de faire faire la sieste à leurs enfants. Avec la chaleur, cela aide à tenir. 

Notre école se démarque des autres écoles locales par l’effectif. Au Burkina, les enseignants ont souvent autour de 60 élèves, voire plus. Et nous avons la chance d’avoir beaucoup de matériel, comparé à nos collègues locaux qui doivent souvent faire avec peu. 

Nous avons une cour remplie de sable et pas de gymnase. Nous devons donc faire EPS tôt le matin ou l’après-midi dans la cour car passé 10 h, le soleil cogne. Nous profitons de la saison chaude en mars pour faire le cycle piscine, avant l’arrivée de pluies car toutes les piscines sont en extérieur. 

Malheureusement, le contexte sécuritaire a limité les possibilités de sorties avec les élèves. Nous faisons donc venir des intervenants et correspondons parfois avec des écoles de la zone ou d’un autre pays pour prendre un peu l’air. Nos élèves sont pour la plupart burkinabè mais nous avons beaucoup d’autres nationalités : Corée, Allemagne, Maghreb, Liban, France, Inde…

J’ai donc retrouvé une classe primaire à temps plein. Enfin, pas totalement, puisque j’ai eu deux grossesses rapprochées et j’ai quitté ma classe par deux fois pour mes congés maternité. C’est à l’occasion de mon premier arrêt que j’ai écrit mon premier album pour enfant : Paratou, un parapluie en brousse, publié aux éditions Cépages en septembre 2018. L’Afrique de l’Ouest y a été ma source d’inspiration, ainsi que pour mon 2e album Konoba, sorti en mai 2021.

Bobo nous permet d’avoir une vie de famille simple et avec du temps. L’ambiance générale y est douce et conviviale. C’est la question sécuritaire qui rend les découvertes et l’inattendu en dehors de la ville presque impossibles. Alors nous nous rattrapons lors des grandes vacances, en allant en France.  

 

Et pour la suite ? Toutes les questions reviennent à chaque fin de détachement. Le mien finit l’an prochain…

 

Une chronique de Marion Traoré

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