Je suis un cliché : enseigner c’était mon rêve de (toute) petite fille. Un rêve de petite fille devenu un projet de grande fille.

Mais avant de passer du rêve au projet, j’ai eu une première carrière professionnelle, complètement différente.

Le changement, c’est quand ?

Cette première partie de ma vie d’adulte a duré 12 ans en tout, pendant lesquels j’ai connu plusieurs changements de postes, de métiers et d’entreprises.

Cette première carrière a été intense à tous points de vue et je me dis que j’ai eu une sacrée chance de la vivre avant de plonger dans le monde de l’Éducation nationale : c’est probablement grâce à ça que – pour l’instant au moins – je ne m’y sens pas enfermée ad vitam aeternam et prise au piège par le pathétique manque de perspectives d’évolution qu’offre la maison.

Devenir enseignante était un choix réfléchi autant qu’un choix du cœur : une décision évidente que j’avais eu le temps de décanter en vivant et en en expérimentant autre chose d’abord.

Et je me sens toujours libre de me dire que si un jour je ne m’y retrouve plus, je passerai à une autre étape de ma vie, épissétou.  Je me dis que si je dois quitter l’enseignement, je chercherai la passerelle qui me permettra de partir vers autre chose et elle s’imposera avec autant d’évidence que celle qui m’a amenée vers le CRPE.

Un choc

Avant d’écrire cette chronique, j’ai relu cet article de blog que j’avais écrit à l’époque dans le flow de la découverte de la réalité du métier de professeur des écoles. Curieusement d’ailleurs, c’est toujours l’article le plus lu de ce blog, comme quoi la question de la reconversion est une question qui nous remue tous. À l’époque d’ailleurs, enfiévrée par ce que je vivais, je tenais ce blog comme une ligne de vie dans le chambardement général de mon changement de métier. En fait, un changement de vie.

En le relisant, 4 ans plus tard, je retrouve sans souci les changements impliqués par le fait de me reconvertir professionnellement : l’impact sur mes revenus, sur mon rythme de vie, sur ma vie personnelle, les dysfonctionnements organisationnels, le manque de moyens, la dévalorisation et la dépréciation de mon métier par certains, le manque de reconnaissance…

Mais ce qui est plus difficilement palpable, c’est le changement total de culture de travail. Ce n’est pas qu’une question de métier ou de statut de salarié vs fonctionnaire.

C’est bien plus insidieux que cela : le manque de pilotage, cette culture descendante exacerbée, l’absence de communication… en fait l’absence totale de management et de véritables ressources humaines m’ont perturbée bien plus que je ne le pensas.

Charybde et Scylla

Je n’idéalisais pas spécialement le monde de l’Éducation nationale mais, en y entrant, j’ai ressenti très vite une forme de malaise environnant comme si nous y étions tous coincés entre Charybde et Scylla.

Dur à avaler après avoir eu des postes où l’on attendait justement de moi que je prenne des initiatives, que je dise les choses, que je pilote les dossiers qui m’étaient confiés.

Un peu comme si nous étions des cadres dirigeants, formés, accompagnés et rémunérés en conséquence. Ce qui n’est pas tout à fait le cas…

Sans idéaliser le monde de l’entreprise, la définition des responsabilités de chacun y est souvent plus claire et permet de savoir à qui demander du soutien si besoin.

Malgré tout cela, et c’est assez fou quand j’y pense, je me sens toujours un peu attendrie en repensant à cette époque où je me sentais appartenir à mon nouveau métier. Où j’étais heureuse de m’y laisser dissoudre, contaminée par l’enthousiasme de transmettre et partager avec des jeunes enfants.

Le sens du métier est la raison profonde de ma reconversion professionnelle et ce qui me permet de trouver toujours le même plaisir à enseigner à des enfants, à construire des projets et essayer de faire un peu autrement et un peu mieux d’un jour sur l’autre.

…jusqu’au jour de l’étape d’après ? Qui sait ?

 

Une chronique de Sophie Pouille

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