L’oral est une composante majeure de nos sociétés. Dans notre métier d’enseignant nous le savons de façon indubitable tant parler est au cœur de notre quotidien. L’importance de l’oral est telle que son évaluation, avec l’écrit, est devenue fondamentale. Au lycée, les élèves de terminale planchent d’ailleurs sur une épreuve dite du « Grand Oral ». Maîtriser cette compétence requiert une pratique et un travail sur toute la scolarité d’un élève.

L’oral, une compétence essentielle

Savoir communiquer oralement est une compétence essentielle tant elle est indispensable dans de nombreuses situations de la vie. Elle est essentielle aux élèves pour réussir des exposés, pour savoir rendre compte d’un bilan en classe, pour avancer collectivement dans la collaboration d’un travail de groupe, pour se faire comprendre, pour réussir des épreuves…

Mais s’exprimer devant la classe est parfois difficile, que ce soit pour les élèves stressés, les élèves timides, les élèves expansifs… S’exprimer s’apprend et tous les élèves doivent être impliqués à cet apprentissage. Long mais non insurmontable, la progressivité de l’acquisition de cette compétence est complexe : savoir gérer son temps, savoir gérer sa posture, savoir gérer sa tonalité, savoir gérer son sujet… L’oral est en réalité ainsi composé de plusieurs variables à maitriser. C’est un tout.

Pourtant, l’oral, à entendre certains élèves, ne s’apprend pas. Ils le voient soit comme quelque chose qu’ils pensent maîtriser puisqu’au final « il n’y a qu’à parler » ou au contraire, comme une compétence qu’ils n’atteindront jamais, pour cause de panique monstre à l’idée de parler en public. Pas de fatalité pourtant car l’oral s’apprend.

Maîtriser l’oral est une condition de réussite dans le système scolaire mais c’est évidement une clé pour s’insérer dans la vie post-école que ce soit pour les études du supérieur, les entretiens d’embauche, les interactions du quotidien… L’oral est indispensable. La question demeure : comment travailler l’oral ?

Travailler l’oral, une difficulté à dépasser

Travailler l’oral est plus difficile qu’il n’y paraît. L’oral nécessite une double réflexion sur le fond et sur la forme. Si le fond est propre à chaque matière, la forme peut être travaillée de façon transdisciplinaire.

Il est possible de travailler ces deux volets en simultané ou bien de façon séparée. Il est notable que nos grilles d’évaluation sur l’oral possèdent ces deux aspects avec des points dédiés au fond et des points dédiés à la forme.

Dans tous les cas, travailler l’oral requiert du temps. C’est un problème récurrent dans nos contraintes d’emploi du temps ou dans les moyens alloués dans nos établissements. En effet si rédiger un écrit peut être effectué par tous les élèves en 50 min, tous les élèves n’auront pas le temps de passer à l’oral en 50 min. Certains établissements ont l’opportunité d’organiser des ateliers pour travailler la compétence orale : atelier d’expression, atelier débat, atelier théâtre… Ces ateliers permettent efficacement d’entraîner les élèves à l’oral.

Au-delà de ces dispositifs particuliers, il s’agit de travailler l’oral dans nos classes. Les méthodes sont diverses et variées. Elles peuvent être spécifiques à certaines disciplines ou bien être transdisciplinaires. Il s’agit ici de proposer quelques pistes de travail :

C’est une idée toute bête mais faire lire à voix haute un texte à un élève possède des avantages. Je suis honnête, j’ai eu à réfléchir à cela cette semaine lors d’une discussion sur l’épreuve oral du baccalauréat en littérature : j’ai appris que les élèves doivent lire le texte à l’examinateur. N’étant pas enseignant de littérature, j’ai été surpris car je suis adepte de la lecture silencieuse en classe par tous les élèves. Plusieurs arguments dans la discussion m’ont converti à rompre avec ma pratique classique pour m’essayer à la lecture d’un texte par un élève (une fois une première lecture silencieuse effectuée afin que l’élève connaisse l’ampleur du sujet) : lire à voix haute c’est vérifier de la compréhension du texte par le respect de la ponctuation, par le fait de savoir faire des pauses dans la lecture, par le jeu de l’intonation selon le contexte des propos… Ce travail de lecture peut être quotidien et non explicitement révélé aux élèves comme étant un travail sur l’oral. L’idée est qu’inconsciemment ils prennent conscience de l’importance de faits langagiers tels que l’intonation, la ponctuation… car cela fait partie de la force d’un oral (conviction, assurance…).

Il est possible de diviser la classe entre celui/ceux qui fait/font l’oral (ou un débat) et ceux qui écoutent/observent. Ceux qui observent énoncent à celui/ceux qui a/ont fait l’oral les points forts et faiblesses de la/leurs prestation(s) orale(s) : force de conviction, qualité de la prononciation, débit de parole, intonation plus ou moins convaincante, posture adéquate, parole accompagnée d’une gestuelle, compréhension des arguments, progressivité de la démonstration… Cette critique par les pairs peut être précédée par une auto-critique de celui ou ceux ayant réalisé(s) la prestation orale. Il est enfin aussi possible que ce soit l’enseignant qui fasse ce retour sur l’oral (qualités et pistes d’amélioration).

L’idée est de faire en sorte d’instaurer une sorte de rituel en classe où les élèves savent que de temps en temps ils vont devoir jouer le rôle du professeur devant la classe. Je prends un exemple : sur un chapitre sur la Première Guerre mondiale, j’annonce en première séance que durant la séance n°3 il me faut un élève qui fasse un oral de 10 min sur « les munitionnettes », puis pour la séance n°4 un élève présentant en 10 min « l’armement de la guerre » puis pour la séance n°5 un élève présentant en 10 min « le rôle des monuments aux morts ». Ce sont des sujets qui viennent en appui du cours. Cela force les élèves à faire des recherches et il s’agit souvent de volontaires qui s’inscrivent. Les élèves viennent au tableau afin de présenter le sujet (avec fiche ou sans fiche, avec diaporama ou sans diaporama : cela dépend des défis annoncés pour ces oraux selon les moments de l’année). Je trouve ces exercices très formateurs. C’est un bon entraînement à l’oral car peu coûteux en temps en classe, avec une rotation des élèves durant l’année, avec un retour sur la prestation orale… Les élèves observateurs ne restent d’ailleurs pas passifs car ils doivent prendre des notes et un compte rendu est réalisé. Ces oraux sont ainsi des plus-values et sont pleinement intégrés au cours à apprendre.

Travailler l’oral, une quête d’épanouissement

Les méthodologies pour travailler l’oral forment un large spectre de possibilités. Quoi qu’il en soit, il est toujours satisfaisant d’observer combien sur une année scolaire les élèves s’améliorent dans cet exercice au fur et à mesure de nos entraînements. C’est ainsi que durant cette année, une élève d’une de mes classes s’est révélée par la pratique de l’oral : timide ne serait-ce que pour poser une question en septembre, elle sait désormais vaincre sa peur de la prise de parole en devenant quasi volontaire pour chaque exposé de 10 min précédemment évoqués. Prenant plaisir et confiance en elle, je suis confiant pour ses futures oraux. Elle est d’ailleurs pleinement consciente que l’oral est désormais un atout pour compenser ses difficultés à l’écrit ! Quelle satisfaction de voir aussi que ce travail mené sur l’oral à été mis à profit de façon généralisée car son bulletin du second trimestre voit fleurir des « a pris confiance en elle », « la participation en classe s’est nettement développée »…

Il y a un lien entre pratique de l’oral et confiance en soi. Pour certains élèves, il est possible pour vaincre leur peur de l’oral de travailler d’abord en demi-groupe avant de le travailler en classe entière. C’est cet angle d’approche que j’ai favorisé cette année.

Travailler l’oral est une tâche de nos métiers, une compétence de nos référentiels à faire acquérir aux élèves. Cette chronique écrite a souhaité rendre hommage à cet exercice du quotidien plus ou moins conscient, plus ou moins facile. C’est la régularité de son apprentissage qui permet sa maîtrise sur le long terme. Il permet une forme d’épanouissement chez nos élèves même s’il est parfois, au début, vecteur d’angoisse.

 

Une chronique de Sylvain Gérard

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