L'Origine de la violence (Fabrice Humbert)

Dans son autofiction intitulée L’Origine de la violence (Le Livre de Poche, 2009), le professeur de lettres Fabrice Humbert rapporte un épisode qu’il aurait vécu en début de carrière, venant révéler la difficulté d’agir et de réagir quand le cercle victime / bourreau se met en place :

« C’est à l’occasion d’une de mes premières affectations que l’épisode se déroula, à l’intérieur d’un lycée de ZEP pourtant assez paisible (…). A la fin du trimestre, le professeur principal, demandant pour le conseil s’il y avait des problèmes, reçut de la part d’un(e) élève dont l’identité nous resta toujours inconnue un mot plié en quatre : « il y a une victime dans la classe. » Après enquête, on se rendit compte que deux élèves s’étaient attaqués à un autre, par jeuAffirmant qu’ils voulaient seulement l’éduquer et l’endurcir pour cette lutte qu’était la vie, ils l’avaient frappé pendant plusieurs mois. Le pire, est qu’ils ne lui voulaient sans doute pas vraiment de mal, en effet. Ils s’amusaient. Ils s’amusaient à le lancer du haut des escaliers, ou bien ils le plaçaient derrière une porte sur laquelle ils se précipitaient. (…)

Je n’avais rien vu. J’avais le pouvoir d’agir et j’avais été aveugle. Pas un instant, je n’ai soupçonné quoi que ce soit. Les deux coupables étaient des élèves agréables, plutôt bons à l’oral, toujours souriants, qui plaisantaient parfois avec moi à la fin des cours – avant d’aller martyriser leur camarade. (…) Ses amis, c’étaient ses bourreaux, les deux seuls êtres qu’il fréquentait dans la classe. Personne ne lui parlait. Dès le début, il était à part, promis par sa solitude à l’abandon de tous. (…) Il n’osait même pas en parler à ses parents, à son père, surtout, un capitaine de pompiers fort et autoritaire qui, au même âge, se serait débarrassé des deux garçons d’un revers de main. Ou plutôt qui n’aurait même pas eu à le faire puisqu’il était bien entendu aimé et respecté.

Lorsque j’interrogeai les deux adolescents, ils me dirent :

– Franchement, ce n’est pas si grave, juste un jeu.

Juste un jeu. (…) Mon aveuglement me sidère encore. Des élèves comme les bustes d’un jeu de cartes aligné devant moi, sur les chaises. Je crois les connaître, je ne sais rien. je pense deviner leurs caractère, je ne sais rien. Un jeu de cartes dont l’épaisseur me manque.

Un jeu de cartes à double face. Car le rapport à la violence, et c’est ce qui fait sa perversité, est presque toujours double : la violence subie, la violence exercée. »

Violence à deux faces, celle de l’agresseur et de la victime, à laquelle il convient fort souvent d’ajouter celle des témoins passifs de ces actes, qu’il s’agisse d’élèves, comme dans le cadre de ce récit, ou encore d’éducateurs, considérant parfois cette violence comme un simple « chahut » ou pensant qu’il est « normal » que les adolescents « se défoulent »…

Or, s’il n’est pas toujours aisé pour les adultes de reconnaître les relations d’emprise et d’agir de manière adéquate pour y mettre un terme, on peut imaginer combien cela se révèle difficile pour des enfants et des adolescents, bien plus fragiles car en pleine construction. La communauté éducative doit donc être informée, vigilante et réactive vis à vis des relations mortifères qui s’instaurent à tout âge, et se montrer capable d’assurer un soutien effectif aux élèves en difficulté, même (et surtout ?) si cette difficulté dépasse très largement les seuls résultats scolaires.

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Comment mesurer la violence scolaire ?

La violence scolaire fait souvent la une de la presse, à travers des faits divers souvent spectaculaires tels que les agressions de personnels qui ont judicieusement conduit le ministre Vincent Peillon à mettre en place le 16 septembre dernier un observatoire de la violence scolaire à l’intérieur de l’Education nationale, présidé par Eric Debarbieux.

Or cette violence reste difficile à mesurer pour diverses raisons :

– D’abord, parce que sa perception s’avère subjective : en fonction des contextes d’enseignement et des individus exposés, une provocation verbale ou une bousculade physique seront plus ou moins ressenties comme des agressions effectives.

– Ensuite, parce qu’elle repose sur du déclaratif, et donc sur la volonté ou la capacité des victimes ou de l’administration d’en faire part.

Les chiffres permettant d’évaluer la violence scolaire reposent d’un côté sur les remontées faites par les chefs d’établissement à l’Inspection académique, et de l’autre par les plaintes déposées par les victimes auprès des services de police.

Dans le premier cas, certains chefs d’établissement peuvent répugner à signaler à leur hiérarchie un trop grand nombre d’incidents, ou craindre que leur établissement soit frappé d’une mauvaise réputation si ces chiffres étaient publiés (on se souvient à cet égard du classement des collèges et lycées les plus violents établi en 2006 par l’hebdomadaire Le Point…). A l’inverse, des chefs d’établissement peuvent prendre le parti de n’omettre aucun incident, de manière à donner une vision très fine de leur climat de sécurité et obtenir ainsi les moyens adaptés.

Dans le deuxième cas, certaines victimes hésitent à aller déposer plainte, non seulement par peur des représailles éventuelles, mais aussi par crainte des conséquences judiciaires trop sévères pour les auteurs : beaucoup d’enseignants considèrent ainsi comme contraire à leur idéal humaniste d’interpeller la police à propos d’un jeune qu’ils ont en classe, méconnaissant souvent les mesures éducatives dont font l’objet les mineurs signalés et leurs familles.

Deux enquêtes menées de manière anonyme tentent de neutraliser cette subjectivité : l’enquête SIVIS (Système d’information et de vigilance sur la sécurité scolaire) menée depuis 2007 et l’Enquête nationale de victimation et de climat scolaire, mise en place au printemps 2011.

  • L’enquête SIVIS est réalisée auprès d’un échantillon de 6 315 collèges et lycées et ne porte que sur les incidents les plus graves survenus dans les établissements et signalés par la direction.
  • L’enquête de victimation et de climat scolaire, menée depuis depuis 1993 au local par l’observatoire international de la violence à l’école sous la direction d’Eric Debarbieux, a porté sur un échantillon représentatif de 300 collèges, soient 18 000 élèves qui ont répondu de manière anonyme à un questionnaire portant sur la qualité de vie de leur établissement et notamment sur les violences qu’ils y auraient subies au cours de l’année.

Alors sans entrer ici dans un relevé exhaustif des chiffres établis par ces deux enquêtes, voici ceux que j’aimerais rappeler aujourd’hui dans un élan d’optimisme factuel :

Du côté de SIVIS, nous apprenons que la part des violences physiques a diminué entre 2007-2008 et 2010-2011, passant respectivement de 4,2 pour 1000 élèves à 3,9‰.

Du côté de l’Enquête nationale de victimation et de climat scolaire, nous nous félicitons de constater que 93 % des collégiens déclarent se sentir bien dans leur établissement, tandis que 86 % affirment que les relations avec les enseignants sont bonnes ou très bonnes !

Pourvu que cela continue de s’améliorer !

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Quand la réalité du harcèlement dépasse la fiction

Certains ont affirmé que le film de Michel Franco consacré au harcèlement en milieu scolaire, Despues de Lucia, grossissait la réalité et qu’une telle tragédie ne pouvait pas survenir sous les yeux des éducateurs… Voici un triste fait divers qui ressemble par bien des aspects à la fiction précédemment citée, mais qui la dépasse malheureusement dans l’horreur.

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