Qu’est-ce qu’on entend par « tutorat par les pairs » ?
Il s’agit de former des élèves de Sixième brillants (ou non) et volontaires pour aider leurs camarades qui ont moins de facilités qu’eux -à ce moment-là- pour effectuer certains travaux, comme la rédaction par exemple.
Ces élèves prennent des responsabilités pour le bien commun de leur classe. Ils relaient la parole du professeur et interviennent là où ce dernier ne le peut pas ou plus (voir le premier article de ce blog à ce sujet).
Ce tutorat part de mon cours de français dans ma salle mais il rayonne également en salle d’étude (avec l’accord des surveillants et de la CPE), ainsi que dans d’autres disciplines (de certains collègues intéressés).
C’est un outil au service des élèves et de tous les membres de l’équipe éducative qui veulent bien l’utiliser.
Je précise que les élèves tuteurs comme les tutorés sont volontaires et ne sauraient en aucun cas être forcés.
Quels sont les objectifs de ce dispositif ?
Ils sont multiples ! Il s’agit de créer et d’entretenir un esprit d’équipe, de solidarité chez les élèves de Sixième. Plus d’intellos individualistes, ni de nuls… Je parle évidemment des représentations, des clichés qui ont la peau dure. Il s’agit donc d’agir sur les représentations des élèves de manière à ce que tout le monde puisse trouver sa place – et son rôle- au sein de la classe.
Pour les tutorés, cette aide est précieuse. En effet, le professeur ne peut être partout (il faut accepter cette réalité et ne pas polémiquer sur les moyens si on veut survivre dans ce métier et surtout aider les élèves qui n’ont rien à voir avec les conflits des adultes). De plus, la parole de l’enseignant se démonétise vite. J’ai beau effectuer des schémas flanqués de phrases, expliquer les gestes mentaux pour apprendre, me creuser la tête pour solliciter les Intelligences Multiples, je dois accepter mes propres limites. Il arrive un moment où le professeur peut expliquer vingt, trente fois la même chose, en vain. Un élève expliquera avec des mots d’élève à un autre élève, et fera mouche.
Pour les élèves en perdition, ceux qui rendent une copie blanche, le tuteur (souvent aidé du groupe) exerce une pression bienveillante et un élève décrocheur sur deux accepte de se mettre au travail (ce que j’ai constaté l’année dernière, à Poya).
Pour les tuteurs, il s’agit de développer l’intelligence interpersonnelle et donc de prendre une place intéressante dans la communauté de la classe. Ils prennent confiance en eux. De plus, ils bénéficient de mon aide directe : j’accélère leur apprentissage pour leur permettre d’aider les autres. Je peux leur donner tellement de choses car ils sont comme des éponges. Par exemple, au bout de quatre semaines de cours, je vais donner à mes deux ou trois premiers tuteurs, dans mes deux Sixièmes, mes fiches de vocabulaire pour la Cinquième (pour décrire un personnage). Eux qui auraient progressé doucement (peut-être qu’inconsciemment on n’aurait pas envie qu’ils avancent trop vite, les autres étant si lents) peuvent maintenant suivre leur propre rythme. Ils ne s’ennuient plus !
Pour le(s) professeur(s), la joie de voir un groupe avancer plus vite. Je ne sais plus combien de mois mettaient mes élèves de Sixième pour effectuer une rédaction d’un paragraphe de dix lignes auparavant mais, je peux dire aujourd’hui, qu’au bout de quatre semaines, la majorité réussit à rendre un travail de qualité.
Les objectifs sont de mettre au travail un maximum d’élèves quel que soit leur niveau, de créer une émulation et un esprit d’équipe dans la classe, de donner confiance à chacun, bref de mettre en place une pédagogie différenciée.
Comment mettre en place ce dispositif ?
J’ai présenté d’emblée (dès le premier cours) les Intelligences Multiples à mes élèves. Nous en parlons de temps en temps au détour d’un texte étudié en classe (c’est eux qui y font allusion).
Je leur vends le tutorat par les pairs et ils se montrent très enthousiastes. Je propose à un ou deux qui finissent très vite leurs travaux. Je n’ai encore jamais essuyé de refus. Je leur donne des conseils, des outils, voire des fiches supplémentaires. Je les encourage à travailler par deux sur ces fiches. Je commence à aider les autres élèves avec mon ou mes tuteurs à mes côtés en les aidant à observer les difficultés (que souvent ils ont eues eux-mêmes brièvement !) et en précisant qu’il faut aider le tutoré et non pas faire (il ne pourrait jamais devenir autonome).
J’attends d’avoir un petit groupe de cinq ou six tuteurs qui finissent par émerger. Je les forme (voir sur ce blog).
Je constitue une liste de tuteurs et je vais voir les surveillants, la CPE, la documentaliste, mes collègues des autres matières. J’informe le Principal et c’est parti ! Je précise que seules les personnes (adultes ou enfants) volontaires font partie du dispositif. Ceux qui refusent d’aider ou d’être aidés sont respectés.
Le dispositif devrait débuter, en principe cinq, à six semaines après la Rentrée des grandes vacances. En Nouvelle Calédonie, nous en sommes à la cinquième semaine.
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