À mon bel amour, dans un miroir

A mon bel amour, dans un miroir est une oeuvre existentielle. Elle est existentielle de par la forme et la substance.

La forme tout d’abord est composite. Danse moderne, musique, image filmique, interprétation théâtrale s’y mélangent, fusionnent et forment une sorte d’unité qui se désunit à loisir.

Le fil conducteur, l’épine dorsale de l’oeuvre est le texte interprété par les différents acteurs qui se succèdent au gré des huit capsules réalisées.  Les huit voix narratives homodiégétiques forment le monologue d’un miroir, un actant qui se personnifie, qui se transcende, qui s’humanise. Il s’humanise grâce à la pensée, à la réflexion, au cogito.

En effet, c’est un miroir qui a commencé par observer son environnement, sorte de caverne planoticienne, pour ensuite amorcer un questionnement sur l’identité, sur le regard de l’autre et in fine sur le regard sur soi.

Ce cheminement réflexif est vivifié, intensifié par la musique « cardiaque » qui tapisse l’arrière fond sonore des capsules.

Le miroir existe non seulement grâce à sa pensée propre, mais aussi grâce à l’autre, au regard de l’autre, à l’intention de l’autre. Au début, le regard de l’autre était bienveillant et admiratif.  L’ego du miroir s’en trouvait flatté et son existence était pérenne. Mais bientôt, « à l’adolescence » du miroir, les regards devinrent plus ternes et finirent par être inexistants.

Ce désintérêt l’affecta jusqu’à ce qu’il se rendit compte, grâce à l’intercession d’un semblable, d’un autre miroir,  de sa vraie nature, de son identité propre.

Ainsi, cette oeuvre allégorique dont l’actant est un miroir, démontre qu’exister nécessite d’abord de chercher sa « vraie » nature qui ne peut en aucun cas trouver sa source dans le regard de l’autre. L’enfer étant l’autre, la source de la quiétude, de  l’apaisement, de l’existence ne peut être que soi.

 

 

À mon bel amour : dans un miroir.

Cette performance d’Anne Nguyen intitulée « À mon belle amour : dans un miroir » est une série de huit vidéos dans lesquelles huit danseuses et danseurs nous racontent la vie d’un miroir qui ignore sa nature et cherche à comprendre le sens de son existence.

Les capsules sont organisées chronologiquement et évoquent les étapes de la vie du miroir : l’ignorance, la découverte du monde qui l’entoure, l’apogée, l’accident, la décadence, la dépression, la vieillesse et la découverte de soi-même. Sa vraie nature n’est mentionnée que dans la première et dernière vidéo.

Il existe et vit au travers du regard des gens qui le regarde et observent leur reflet à travers lui. Il ne connaît pas la solitude, se plait tel qu’on le voit. À la fin de sa vie, il n’a plus l’admiration des autres, il est entouré d’objets qui lui inspirent la tranquillité et la sagesse. Ses réflexions sont centrées sur lui-même et s’éteint peu à peu, jusqu’à la découverte de sa propre nature lui permettant de voir l’infini.

Cette performance fait directement référence à l’allégorie de la caverne de Platon, mais surtout, nous amène à réfléchir sur notre propre existence, le regard que l’on porte sur les autres et qu’ils portent sur nous. Le reflet qu’ils nous renvoient, l’acceptation de la différence et la construction de soi-même.

À mon bel amour : dans un miroir

Cette série de vidéos représente pour moi le cycle de la vie, où l’on peut se projeter très facilement.

En effet, la vie d’un miroir y est mise en scène grâce à différents types de danses et de musiques qui rythment l’histoire de la vie.

On y retrouve les 3 grands principaux axes de la vie à savoir l’enfance, l’adolescence et la vieillesse qui sont des périodes très importante dans la construction de l’identité.

Au début, le miroir ne sait pas qui il Est, ni ce qu’il représente par rapport au monde extérieur, il est spectateur du monde qui l’entoure (comme une naissance). Il règne une atmosphère de naïveté et d’innocence ; le miroir vit et se questionne par rapport à sa propre perception des choses qui évoluent autour de lui. Il n’a pas encore conscience de sa fonction qui est celle de refléter les choses/gens.

Puis, vint l' »adolescence » où le miroir découvre ses capacités d’attraction et d’interaction avec ce qui l’entoure. Il prend conscience qu’il Est, qu’il suscite de l’intérêt, de l’admiration et parfois de la jalousie. Il vient de rentrer dans une aire de paraître où pour être socialement accepté, il faut, très souvent, faire semblant d’être quelqu’un que l’on n’est pas, adopter des attitudes et des valeurs qui ne nous corresponde pas forcément. C’est le moment où le miroir développe sa personnalité et sa sociabilité au maximum.

Ensuite viennent les premières déceptions, les premiers échecs, les premières chutes. Le miroir semble s’être brisé et se trouve mis à l’écart petit à petit. Viennent alors des remises en question et une déchéance sociale car il ne correspond plus aux critères de son entourage social. Il se retrouve mis à l’écart et se renferme sur lui-même.

La « vieillesse » ou « maturité » où après avoir fait le point sur lui-même pendant un lapse de temps, le miroir se réveille au milieu d’objet qui lui correspondent, qu’il respecte sans avoir à camoufler ses blessures. Il est accepté par les autres objets qui, eux aussi, ont une histoire, un vécu, un passé fait d’échecs et de remise en question. Il vit donc une vie plus calme et apaisée, loin des paraîtres et des faux semblants.

Il finit face à un nouveau miroir (naissance), le reflet infini de la vie.

Cette série de vidéos résume tout à fait le cycle de la vie où tout au long de celle-ci se mêlent interrogations, affirmations, doutes, échecs et renaissance. Le miroir a fini par comprendre et accepter qui il Est et à trouver son bonheur dans les choses simples. Il ne se soucie plus du regard des autres, qui de toute façon, n’est plus important et n’influencent plus ses décisions et sa perception de lui-même.

A mon bel amour : Dans un miroir

« À mon bel amour : dans un miroir »

À travers les huit capsules vidéos de « À mon bel amour », Anne Nguyen et sa compagnie tentent de nous faire ressentir l’évolution du regard porté sur soi et sur l’autre, que ce soit de notre point de vue, mais aussi de celui de l’autre. Cette évolution peut se produire en fonction de différentes étapes d’une vie ou d’une journée, comme le moment du jour, notre humeur, notre état général, etc….Ici, elle se fait par rapport à la maturité que nous acquérons avec l’âge, et nous sentons bien le détachement par rapport au regard des autres qui s’opère lorsque nous vieillissons. Plus, nous avançons dans le temps, plus nous prenons consciente que ce qui est important, c’est le regard que nous posons sur nous même. De même, nous devenons de plus en plus tolérants, et acceptons l’autre avec ses différences.

La musique et la lumière, évoquent pour moi, l’angoisse du regard des autres sur soi. En revanche, je pense que la progression des différents danseurs, mais surtout leur expression corporelle, traduit bien ce détachement, mais aussi l’espoir de faire évoluer le regard des gens sur l’autre, sur soi.

Les huit danseurs, si différents, de par leur physique, leur genre, leur âge, leur tenue, leur danse, nous montrent que malgré tout, ils forment un groupe pouvant s’adapter à l’autre pour créer une unité.

A mon bel amour: dans un miroir 

 

Ces vidéos sont pour moi révélatrices de la lutte contre le regard de l’autre.

La musique au tempo très cadencé, ainsi que l’utilisation d’un champ lexical dépréciatif  créent une ambiance pesante. A laquelle s’opposent la liberté de mouvement des danseurs ainsi que le champ lexical du beau et du (re)nouveau.

Je les vois comme  une mise en abyme de la célèbre phrase de Platon  « comme dans un miroir celui qui y regarde voit son image », où la pupille de l’Autre est un miroir, on y aperçoit son reflet.

En effet, à travers le prisme de l’autre nous pouvons voir notre propre image, mais parfois altérée. Le miroir est l’autre.

Ces videos sont un « cri libérateur » contre le conformisme et une puissante ode à l’ouverture à l’altérité.

Des vidéos qui invitent chacun à faire une introspection sur son regard sur les autres et à réfléchir sur ceux que l’on a pu poser sur nous. Les effets qu’ils ont pu avoir sur ceux en quête  de leur identité.
Les mots utilisés , les témoignages, la mixité des danses et  la réalisation en elle même sont poignants , lourds de sens et amènent  à une réflexion qui est je pense le but final d’une telle  représentation.

A mon bel Amour : dans un miroir

Ces vidéos intitulés « A mon bel Amour : dans un miroir » de Anne Nguyen et sa compagnie sont le reflet d’une recherche d’identité et de son rapport au regard de l’autre au cours de sa vie.

Les différents styles de danses associés à un texte apportent cette pluralité de regard, de perception et de confrontation à l’autre. Elles nous invitent à nous questionner sur notre identité et comment elle se construit. Elles nous montrent comment notre vision du monde évolue.

Ces différentes vidéos représentent le développement de notre identité et notre façon de comprendre le regard de l’autre. Chaque vidéo semble marquer une étape de vie et une évolution de notre identité.

La compagnie incarne le regard que l’on peut porter sur soi à travers celui des autres mais aussi se besoin de se détacher du regard de l’autre pour enfin s’accepter soi.

Lorsqu’ils dansent tous ensemble à la fin de la dernière vidéo on ressent cette acception de l’autre et de soi avec chacun leur propre identité.

À mon bel amour : dans un miroir

Qui suis-je ? Comment suis-je perçu ? Qui et comment sont les autres par rapport à moi ?

La Compagnie par Terre, la chorégraphe Anne Nguyen et le Palais de la Porte Dorée présentent une série de huit vidéos intitulée « À mon bel amour dans un miroir » portant sur l’évolution du regard que l’on porte sur soi, grâce ou à cause du regard des autres, mais aussi du regard que l’on a de l’autre.

C’est dans un cadre particulièrement impressionnant et intrigant, que l’on retrouve une parfaite harmonie entre la danse et les mots, soit entre le langage du corps et le langage parlé. Huit vidéos dans laquelle on retrouve huit différents danseurs représentant différents styles de danse (le voguing, le krump, le popping, la danse contemporaine, le waacking). Ils forment ensemble une unité dans laquelle eux même, à eux seuls représentent une entité unique à part entière. Ce spectacle met parfaitement en relief l’importance des diversités culturelles.

A mon bel amour : dans un miroir

             Le projet qui fait du lien entre les capsules vidéos est très bien construit. Dans sa forme visuelle, la superposition des voix et des vidéos de danse nous permet de suivre la pensée de l’individu qui s’exprime en l’observant dans sa pratique. S’agissant de danse contemporaine où les mouvements retranscrivent la pensée, nous pouvons mieux cerner les témoignages et comment ils sont exprimés.

Nous pouvons suivre l’histoire de tous les individus qui dansent sur scène et la transition entre les vidéos nous fait penser à une continuité. Il y a donc un lien fort entre l’ensemble des voix qui nous ramène à une histoire en continue. En tant que spectateur de ces vidéos, il y a déjà une première découverte de l’autre par son expression orale (ce qu’il dit) et  ses manières de s’exprimer (par la danse) qui est une forme d’expression de soi-même.

Le thème mis en avant est l’impact du désintéressement des autres sur nous-mêmes et la réflexion sur soi-même. Le sentiment d’acceptation est perçu comme le point de départ d’une nouvelle vision de la vie et de nous-mêmes. Le miroir représenterai alors la réflexion sur soi et notre perception de nous-mêmes. Nous pourrions contrôler notre reflet si nous nous donnons les moyens de se découvrir et se trouver un but. Cela rentre pleinement dans la découverte de soi qui fait partie de la notion d’altérité.

Le concept pourrait être relié à une sorte de mise en abîme : le spectateur des vidéos qui découvrent la pensée d’autrui et sa pratique artistique (1er stade), les individus qui partagent leurs sentiments autour d’une thématique et qui sont acteurs dans le support visuel (2e stade), et enfin la découverte commune (spectateur et acteurs) d’une forme de réflexion autour d’un même sujet qui nous concernent tous (3e stade).

 

A mon bel Amour

Face au miroir, qui vois-tu ? Arrête-toi quelques instants, prends le temps de t’observer plus précisément, au-delà de cette enveloppe corporelle et de cette première image.

Face au miroir chacun s’affronte ou s’admire.  Comment agir lorsque l’image que les autres portent sur nous change, ne représente plus notre individualité ? A travers cette suite de portraits, déclamés et exprimés à la première personne du singulier, cette chorégraphie en huit tableaux nous captive et nous interpelle. La performance percutante des artistes nous plonge dans un tourbillon de questionnement. Les interprètes, ambivalents, s’intègrent au groupe et s’en détachent par leur caractère unique. Trois types de regards sont incarnés : le nôtre sur les autres, le nôtre sur nous-même et celui des autres sur nous. Comment s’épanouir et se construire au fil de ces changements ? Une personne peut être unique et admirée puis tomber dans l’oubli et être ignorée. Pour exister, faut-il être fondu dans cette foule, identique aux autres ou s’en détacher ? La solution, l’aboutissement serait de percevoir dans le miroir l’infini, la multitude, les singularités.

Mon bel amour dans un miroir

Cette série de vidéos est profondément poignante, il s’agit d’un hymne à l’altérité.

La forme de l’histoire est ravissante avec un mariage gracieux, d’un langage parlé (avec la poésie) et d’un langage du corps (avec la danse).

Selon moi, chaque danseur est à la fois un fragment d’une histoire commune qui s’imbrique avec d’autres fragments, par son individualité, sa conscience de soi et de l’autre, son monde exposé à travers son regard.

Mais paradoxalement, c’est aussi un tout car l’artiste est indissociablement gouverneur de son propre royaume.

En somme, cela m’évoque l’idée d’une mosaïque, où chaque parcelle est la mosaïque à elle seule.