Travaux en cours

Contes, dessins et pédagogie. Ou l'inverse.

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Ceci est un complément à la page 23 de Anne-Marie Sanchez & Annie Di Martino, « Faire progresser tous les élèves », publié chez L’Harmattan .

Déconstruire une représentation

Cité par Jacques Nimier[1], Edgar Morin nous précise : « Un enseignant qui s’efforce de déconstruire les représentations erronées des élèves avant de faire un cours tient compte du fait que l’élève n’est pas une page blanche sur laquelle il suffirait d’inscrire des savoirs nouveaux, mais qu’il a des « représentations » sur toutes choses dans ce monde psychique interne à l’élève. L’éducation doit donc se vouer à la détection des sources d’erreur, d’illusion et d’aveuglements. ».

Une recherche[2] portant sur dix mille élèves et 181 professeurs de sciences physiques, menée par Philip Sadler, chercheur à Havard en 2013, donne une piste de réponse. Lorsque les professeurs connaissent les croyances erronées des élèves, les réponses de ceux-ci ont tendance à s’améliorer au fil du temps.

En France, l’expérimentation PACEM (Projet pour l’acquisition de compétences par les élèves en mathématiques)[3] est menée par la DEEP entre 2010 et 2012. Elle a concerné des classes de CM1, CM2, 6e et 5e dans plusieurs académies. Là aussi, il s’agissait pour les enseignants de connaitre les difficultés de leurs élèves par un test de début d’année. S’ensuivait une formation spécifique pour les professeurs. Des tests collectés jusqu’en 2012 montrent une nette progression des élèves bénéficiant du dispositif.

A une moindre échelle, le dispositif mis en place par l’une des auteures dans ses classes permet également les progrès des élèves. En début de séquence, les élèves font un test portant non seulement sur les prérequis mais aussi sur les représentations qui peuvent poser problème dans cette séquence. Par exemple en début d’année de 6e, beaucoup d’élèves ont des représentations erronées des nombres décimaux. Le QCM leur propose des réponses connues pour être des erreurs type, extraites des évaluations diagnostiques de début d’année de 6e des années 90.

Par exemple : Parmi ces quatre nombres, deux sont égaux. Entourer-les.

0,25                       0,4                         1,4           1/4             

L’erreur la plus fréquente, montrant une représentation fausse des décimaux, est d’entourer les deux derniers nombres.

Ou bien : Entourer la fraction égale à 80,4.

                                                                                          

Ici, les différentes possibilités sont entourées comme autant d’erreurs possibles.

Chacun doit également proposer une définition du nombre décimal. « Et là, c’est le drame ! » comme dit une phrase célèbre. Puisque tous les élèves répondent « C’est un nombre à virgule » confondant ainsi le nombre et son écriture.

Il s’agit donc de déconstruire ces représentations. Une possibilité est de reprendre l’introduction des nombres décimaux mais, nonobstant le fait que les élèves qui ont acquis le sens cherché vont s’ennuyer, rien ne dit qu’une deuxième couche donnera de meilleurs résultats. C’est ce qui fait que les séances de révisions sont généralement une perte de temps pour tous les élèves. Cherchons une autre piste.

Comme l’explique Claire Hébert-Suffren[4], les faux savoirs nécessitent confrontation et échanges pour évoluer vers des savoirs plus pertinents. Le professeur propose donc à ses élèves de se placer rapidement en groupes de quatre en retournant les chaises. Ils doivent mettre leurs réponses en commun, en discuter puis aboutir à un accord sur UNE réponse du groupe. Dans un deuxième temps, à la lumière de ce qu’ils viennent de comprendre, chaque groupe propose une définition du nombre décimal. L’expérience montre que la plupart des groupes fonctionne de manière autonome. Le professeur, en passant, remarque les quelques-uns ayant besoin d’accompagnement et par un questionnement subtil, il les amène réfléchir et avancer. La définition de chaque groupe est écrite au tableau et discutée en plénière pour aboutir à la définition acceptée par le professeur, par exemple : « C’est un nombre qui a une écriture décimale finie (ne comportant plus que des zéros à partir d’un rang). » Elle est écrite dans le cahier de leçon. Les élèves se remettent alors en groupe pour proposer quatre exemples d’écritures différentes d’un nombre décimal. Ce qui peut donner :

45 ; 5,2 ;  ;

Des exemples de chaque groupe sont écrits dans le cahier de leçon. Parallèlement, le travail mental permet de travailler les passages entre les différentes écritures. Les résultats sont bluffants : dès qu’un élève commet une erreur concernant la nature du nombre décimal, il suffit de lui rappeler ce travail, les camarades s’en chargent volontiers.

Ce dispositif peut être mis en fonctionnement de la 6e à la 3e dès que la séquence doit réinvestir des savoirs appris précédemment, c’est-à-dire quasiment tout le temps en mathématiques. Son efficacité dépend des questions du test. L’idéal est de les concevoir en équipe de professeurs.

[1] http://www.pedagopsy.eu/edgar_morin.htm

[2] http://rire.ctreq.qc.ca/2013/05/comprendre-les-faiblesses-des-etudiants-pour-les-aider-a-eviter-les-erreurs/

[3] http://cache.media.education.gouv.fr/file/2012/85/3/DEPP-NI-2012-23-pacem-experimentation-formation-enseignants-sixieme_237853.pdf

[4] Voir la présentation de son ouvrage Les Réseaux d’échanges réciproques de savoirs (Ovadia, 2012) sur le site : http://www.ecolechangerdecap.net/spip.php?article344

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