Travaux en cours

Contes, dessins et pédagogie. Ou l'inverse.

Archive for novembre, 2018

Blog 27

Ceci est un complément à la page 100 de Anne-Marie Sanchez & Annie Di Martino, « Faire progresser tous les élèves », publié chez L’Harmattan.

Un exemple : tâches complexe et arts plastiques

Ou comment la résolution d’une tâche complexe mène à une infinité de solutions, toutes valables.

Tâche complexe

Commençons par rappeler ce que l’on nomme tâche complexe. Il s’agit d’une production (la tâche) appartenant à une famille de situations (par exemple faire un croquis géographique). Il est conseillé de la placer après l’enseignement de plusieurs unités du programme. L’élève est alors en capacité de « mobiliser ses ressources » pour résoudre ce qui lui est demandé. C’est-à-dire choisir parmi tout ce qu’il a appris et expérimenté et sélectionner dans sa « boîte à outils » ce dont il pense qu’il aura besoin pour mener à bien cette tâche. C’est dans le choix et surtout dans la combinaison de plusieurs ressources que réside la complexité et non dans le degré de difficulté. Gérer une seule ressource définit une tâche simple –qui n’est pas nécessairement facile-, en « tricoter » plusieurs, est la caractéristique d’une tâche complexe. Il serait peut-être d’ailleurs temps d’abandonner ces termes de simple et complexe pour d’autres prêtant moins à confusion, par exemple tâche unique et tâche multiple. Ou encore tâche mono-ressource et tâche multi-ressources. La complexité évoquée ici est celle chère à Edgar Morin mais l’acception du langage courant nous trouble.

Tâche simple Tâche complexe
Gérer une seule ressource Gérer plusieurs ressources
Tâche unique Tâche multiple
Tâche mono-ressource Tâche multi-ressources

Continuons en rappelant à nos souvenirs qu’une ressource est ce dont dispose l’élève. Les ressources internes sont ce qu’il a appris, ce dont il dispose « les mains dans les poches », comme souvent en situation d’examen : ses savoirs, ses connaissances (14 Juillet 1789, prise de la Bastille ; la règle de l’accord du participe passé employé avec l’auxiliaire avoir), ses habiletés (analyser un énoncé, réaliser une eurécarte (appellation maison pour une carte heuristique) pour faire l’inventaire de tout ce qu’il sait, faire un plan au brouillon pour organiser ses idées, les couleurs et les figurés du langage cartographique…), ses attitudes (la volonté d’aller au bout d’une tâche sans se décourager, rechercher une certaine élégance de rédaction, soigner son travail…). Tout le nécessaire est dans la tête.

Ressources internes Ressources externes
Ses savoirs, ses connaissances

14 Juillet 1789, prise de la Bastille

La règle de l’accord du participe passé employé avec l’auxiliaire avoir

Ses outils

Feutre fin noir et crayons de couleur pour le croquis

Fiche méthode « Présenter un document »

Tutoriel « Images actives »

Recette « Pour faire les tartelettes amandine »

Son T.N.R. –tableau de réussites et progrès dit aussi N.R.P. –niveaux de réussite et progrès-

Ses habiletés

Analyser un énoncé

Réaliser une eurécarte pour faire l’inventaire de tout ce qu’il sait

Faire un plan au brouillon pour organiser ses idées

Les couleurs et les figurés du langage cartographique

Ses pairs

Son voisin de table

Ses camarades de classe

Ses coéquipiers

Ses attitudes

La volonté d’aller au bout d’une tâche sans se décourager

Rechercher une certaine élégance de rédaction

Soigner son travail

Les adultes autour de lui

Son professeur tout disposé à répondre à ses questions

Un autre de ses professeurs en cas de co-animation

Le professeur-documentaliste en particulier

Un assistant d’éducation

  Le monde !

Et ses outils numériques interactifs

Smartphone

Tweetlist et les réseaux sociaux

Internet

Les ressources externes sont, par conséquent, tout le reste, ce dont il peut disposer à sa convenance : ses outils (feutre fin noir et crayons de couleur pour le croquis ; fiche méthode « Présenter un document », tutoriel « Images actives », recette « Pour faire les tartelettes amandine », son T.N.R. –tableau de réussites et progrès[1]– dit aussi N.R.P. niveaux de réussite et progrès,  ses pairs comme son voisin de table sur le travail duquel il pourra jeter un œil pour se rassurer, ses camarades de classe auxquels il pourra demander des éclaircissements, ses coéquipiers, mais aussi les adultes autour de lui par exemple son professeur tout disposé à répondre à ses questions, un autre de ses professeurs en cas de co-animation, le professeur-documentaliste en particulier, un assistant d’éducation : le monde ! et ses outils numériques interactifs comme les Smartphone, tweetlist et les réseaux sociaux, Internet et sa merveilleuse encyclopédie en ligne à laquelle les élèves ne comprennent pas toujours grand-chose….

 

Nature morte à dessiner

Ces rappels faits, passons à l’objet éponyme de cette partie, tâche complexe et Arts Plastiques.

Il était une fois trois amies qui allaient au cours de dessin ensemble, Céline, Sophie et Annie. Un jour, le professeur installe une nature morte et leur propose de la dessiner. Voilà une belle tâche complexe, non ?

Chacune des trois va s’atteler à la tâche à sa manière, Sophie en fouillant dans ses affaires, Céline en attendant un café et Annie en tournant en rond. Ce sont trois élèves bien différentes : Sophie ne voit pas en 3D, Annie ne voit pas les couleurs et Céline est d’une créativité sans borne. Quelles sont leurs ressources internes ? Annie dessine depuis dix ans (merci la prof d’arts plastiques qui l’a traînée à Florence et obligée à dessiner les monuments comme les 50 élèves embarqués dans l’aventure : « on ne regarde bien une œuvre qu’en la dessinant, tu verras ». Vu.) et aime travailler sur du petit format pendant des heures. Sophie vient à l’atelier depuis quelques années, adore les couleurs et rend une des auteures malade de jalousie par sa maîtrise des proportions. Céline les a rejointes depuis l’année dernière, travaille très vite, sur du très grand format et sait détourner les compositions pour créer des fresques multicolores. Toutes les trois gèrent leurs ressources externes très différemment.

Sophie avant de commencer explore sa mallette et sort ses pastels tous neufs avec la ferme intention de les étrenner. La prof lui donne un papier tramé du plus bel effet. Sophie aime interpeler ses petites camarades pour leur demander ce qu’elles pensent de ceci ou de cela. Elle accepte voire recherche les remarques sur le rendu des couleurs, les volumes. Elle appelle régulièrement la professeure pour avoir un avis ou une aide. En quatre séances, de deux heures trente chacune, elle obtient ce qu’elle voulait, son premier pastel : ressemblant à la composition ET interprété.

Céline dessine une première fois la composition puis la réinterprète comme elle le fait à chaque fois. Il lui faut bien s’occuper étant donné que ses copines n’avancent pas et ont besoin que la composition reste exposée pendant de nombreuses séances. La professeure lui a donc proposé dès la première activité de septembre de reprendre le travail avec des lignes, des figures géométriques et des couleurs, beaucoup de couleurs. Au fil de l’année, Céline a donc développé un univers artistique bien à elle. En quatre séances, elle a produit une première production, grand format, au crayon puis cette seconde aux crayons de couleurs.

Annie, à force de tourner-virer une tasse à la main, s’est mise au travail, au crayon à papier, son outil de prédilection. Avantage puisqu’elle l’aime et inconvénient puisqu’elle peut gommer le moindre trait jusqu’à ce qu’elle obtienne l‘effet le plus proche de ce qu’elle cherche. Ce qui n’accélère pas sa vitesse d’exécution. Elle pose peu de questions à la prof, a du mal avec les proportions, puisqu’elle ne prend des mesures qu’une fois sur trois, et avec les perspectives qu’elle interprète à la chinoise quasiment tout le temps c’est-à-dire avec des lignes de fuite inversées. Elle reste une heure puis une heure et encore deux heures entières sur le sac en papier déformé sans être satisfaite. Ensuite, 1 h pour une pomme de terre, celle qui touche la bouilloire. Elle voudrait bien continuer mais la professeure n’en peut plus de manger des artichauts, des choux-fleurs de semaine en semaine. Au bout de quatre séances, ce n’est toujours pas terminé mais on siffle la fin de la partie.

Evaluation des trois productions

Si on était à l’école, le moment serait venu d’évaluer ces trois productions, de leur donner une valeur, pas une note. Ces dessins sont-ils réussis ? La tâche complexe a-t-elle été résolue ? Les dessinatrices ont-elles bien géré leurs ressources pour obtenir un résultat dont elles sont satisfaites ?

Pour répondre à cela, on pourrait utiliser les critères indiqués par François-Marie Gérard[2] : la pertinence, la correction, la cohérence et la complétude. Concernant la pertinence, c’est oui dans les trois cas malgré des différences flagrantes. On a bien un dessin et/ou une interprétation de la composition. Quant à la correction, c’est positif également. Pastels, crayons, gommes ont suivi les règles du genre, couleurs complémentaires pour placer les volumes, ombres. Ce qui ne signifie pas que ce soit parfait. On n’est pas aux Beaux-arts, non plus. La démarche des trois élèves est logique à chaque fois, suivant pourtant des itinéraires divergents selon l’expérience, le « métier », la sensibilité et les envies de chacune. Enfin la complétude. Une seule des trois a terminé son projet. Sophie a mené à bien sa première utilisation des pastels. Céline a terminé elle aussi son dessin mais s’est lancé dans une interprétation géométrique et colorée qu’elle n’a pas eu le temps de finir. Annie est la seule qui n’a pas accompli la mission fixée par la professeure, le dessin n’est pas terminé. Même s’il est fréquent en atelier de ne pas traiter l’ensemble de la composition et de laisser des « silences », des blancs, que l’œil se chargera de compléter. Dans ce dernier cas, trois des quatre critères sont évalués positivement. Le professeur peut donc estimer que c’est bon et qu’on peut passer à autre chose.

Tâche à accomplir : dessiner et interpréter la composition
  Sophie Céline Annie
Gestion des ressources internes Patience

Concentration

Rapidité

Créativité

Acharnement graphique

Démarrage façon diesel…

Gestion des ressources externes Aucune expérience du pastel

Nombreuses demandes à ses amies et à la prof

Crayons de couleurs Crayons à papier, gommes

Interactions avec ses pairs (peu..)

Peu de questions à la professeure

Qui a dit qu’évaluer les productions des élèves était long et difficile ? Dans la plupart des cas, évaluer une tâche complexe consiste à porter son regard sur quelques aspects de la production et de déterminer si « oui ou non ça passe ». Après, il n’y a plus qu’à renseigner son « carnet de bord de l’enseignant ».

La pertinence Est-ce que l’élève fait bien ce qu’il doit faire (et pas autre chose) ? Bref, a-t-il évité le hors-sujet ? Oui / non
 La correction Est-ce que l’élève fait BIEN ce qu’il doit faire, le fait-il correctement ? Utilise-t-il les outils comme on lui a montré ?  

Oui / non

La cohérence Est-ce que la démarche est logique ? Oui / non
La complétude Est-ce que la production est complète ? Oui / non

 

Métacognition

Toujours si on était à l’école, et si on suivait le processus « compétences- EPS » (voir partie 2, chapitre 2, p 73), on devrait arriver à la phase 4, les étirements c’est-à-dire celle du débriefing, de la métacognition/contrôle exécutif, de la régulation et de l’auto-évaluation.  « Evaluer, c’est s’évaluer » dit André de Peretti[3], il faudrait donc que chacune des trois élèves se livre à un petit temps de retour sur production. Par exemple à l’aide de ces trois questions simples :

Estimes-tu que ta production soit réussie ? Qu’est-ce qui te le fait penser ?

Ta production correspond-t-elle à ce que tu voulais faire ? Qu’est-ce qui ne te satisfait pas ? Comment l’expliques-tu ?

La prochaine fois, …

 

Apprendre, c’est semble-t-il prendre conscience de ce que l’on a fait, de ce que l’on sait, de la manière dont on s’y est pris en repérant les démarches efficaces et efficientes et les travers à améliorer[4]. En prendre conscience et les garder en mémoire ou du moins d’en avoir une trace afin de relire puis repartir du bon pied lors de la prochaine résolution de tâche complexe.

Céline s’est livrée gracieusement livrée à cette petite introspection :

Ma production est réussie, c’est joli. Je n’avais pas de projet à la base. J’ai recherché une harmonie de formes et de couleurs. Je suis satisfaite du résultat. La prochaine fois, j’essaierai de faire un effet de matière.

Sophie a également accepté l’exercice d’autoévaluation :

J’aime assez ma production car c’est la première fois que je travaillais sur un support granuleux. Je pense avoir réussi à reproduire ce que je voulais. Je suis assez satisfaite même si la pose de matière ne correspond pas à ce que je voulais. Ma production n’est pas suffisamment réaliste. La prochaine fois, je voudrais mieux travailler les effets de matière sur des supports différents.

Au tour d’Annie :

J’estime que ma production est réussie bien qu’inachevée. Les objets de la composition sont tous placés, relativement bien proportionnés les uns par rapport aux autres. Plusieurs sont en volume. La texture des oranges est rendue, celle des pommes de terre aussi.

Je voulais tout dessiner et surtout montrer les volumes de tous ces fruits et légumes. Je voulais travailler la surface du chou-fleur et essayer de rendre le côté floconneux des fleurettes. Je n’ai pas eu le temps). Je n’ai pas eu le temps -nonobstant le peu de temps dont je disposais ce mois-là- car je démarre trop lentement et je passe trop de temps sur un seul objet.

La prochaine fois, je pourrais démarrer plus vite (sauf que non, c’est une activité de loisirs, je ne passe pas un concours). Il faudrait que je ne passe pas plusieurs séances sur un même objet car la prof m’a fait remarquer que les lumières changent et marquent les ombres autrement, cela m’égare ensuite. Je pourrais aussi admettre que la perfection n’est pas de ce monde, que le dessin n’est pas une « photo d’identité » de la composition. Il va aussi falloir quand même que je me mette à prendre des mesures, c’est facile, je sais le faire en théorie… Il suffit de tendre le bras en tenant son crayon.

Et c’est exactement ce qu‘elle a fait la séance suivante sur un autre sujet !

Ainsi, face à une même tâche complexe, avec la même consigne, les trois élèves ont produit trois productions qui n’ont rien à voir l’une avec l’autre. Que l’on peut considérer toutes comme évaluables positivement. La démarche a permis la mise en œuvre des ressources internes et externes de chacune des trois puis à la mise en projet sur un axe choisi par chacune d’elle pour une production future. Quoi de meilleur pour les apprentissages et l’implication que l’auto-détermination d’un futur objectif de travail ?

[1] Voir Partie 3, chapitre 2 : Utilisation des CED : niveaux de réussite et de progrès

[2] François-Marie GERARD, Evaluer des compétences, guide pratique, de Boeck, 2008, 1ère édition

[3] Cf. la vidéo tournée par Thierry Foulkes sur une idée de François Müller « Dix mots pour le changement en éducation … évaluer » https://www.youtube.com/watch?v=EujlJTT8kHQ&list=PL98D64821BE92DE36

[4] Nous n’écrivons pas « corriger ». Nous essayons de rester dans une démarche positive et d’envisager la suite des apprentissages comme une longue liste de progrès faisables. En classe, nous ne faisons pas de « remédiation », nous essayons de faire en sorte que les élèves fassent des progrès.

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Blog 26

Ceci est un complément à la page 93 de Anne-Marie Sanchez & Annie Di Martino, « Faire progresser tous les élèves », publié chez L’Harmattan.

Des idées à utiliser en équipes pluridisciplinaires

Au gré des formations, quelques idées ont émergé, en particulier avec l’équipe de Neo Alta des Clayes-sous-bois :

20 propositions pour travailler l’écriture au collège
Faire rédiger des réponses élaborées à nos consignes lorsque c’est nécessaire (et savoir aussi répondre rapidement à des consignes, sur un brouillon)

Faire aussi rédiger sur le brouillon des « écrits intermédiaires » (narrations de recherche, notation rapide d’idées…)

Utiliser la narration, notamment en interdisciplinarité (réinvestissement de connaissances historiques ou scientifiques dans des récits)

Elaborer avec les élèves des critères de réussite d’écrits « académiques » tels que des comptes-rendus scientifiques, des résumés, des démonstrations géométriques, des synthèses…

Utiliser un métalangage grammatical dans toutes les matières en insistant par exemple sur :

–       Les temps des verbes (importance du présent à valeur générale)

–       Les connecteurs logiques (cause/ conséquence/but)

–        Les adjectifs appropriés (voir leur place par rapport au nom)

–       La valeur des déterminants (valeur générale/ particulière)

–       La ponctuation (et ses usages particuliers en mathématiques), insister sur les parenthèses, les guillemets…

 

Sur tous ces points, faire écrire des phrases en rapport avec d’autres disciplines (cause en histoire, déterminants importants en maths, adjectifs techniques en SVT…)

Insister en orthographe sur :

·      La nécessité de bien orthographier les mots spécifiques de la discipline

·      L’orthographe grammaticale, en se concentrant sur quelques points essentiels : accord sujet-verbe, terminaisons en [é], principaux homophones grammaticaux, ce qui signifie laisser tomber le secondaire

 

Travailler sur les transcodages : passer du texte linéaire au texte contenant un tableau ou un schéma et réciproquement : moyen de travailler la « mise en espace du texte » et de mettre l’accent sur les outils « paratextuels »

Faire écrire des consignes pour mieux lire les consignes (y compris en langues vivantes)

 

Trouver des formes originales de mise en texte : abécédaires, devinettes, questionnaires vrai/ faux, QCM, bullogrammes, affiches, style articles de journaux…

Pratiquer la réécriture, dans plusieurs matières, en donnant de bonnes consignes de réécriture

Faire écrire à partir d’un enregistrement de l’oral et faire prendre conscience des différences.

Faire écrire des bibliographies, des index, des lexiques, des légendes de cartes ..

Faire faire des mini-bandes dessinées, par exemple sur des thèmes scientifiques, en langues…

Faire retravailler en classe de français sur des textes écrits dans d’autres matières en vue d’une réélaboration plus correcte

Faire écrire parallèlement des textes scientifiques et des textes de fiction (science-fiction écologique, textes d’explications du monde, insertion d’une description scientifique dans un roman à la manière de Jules Verne…)

Faire écrire en langues vivantes à propos de phénomènes scientifiques ou historiques

Travailler sur l’histoire de l’écriture dans sa dimension technologique notamment (collaboration français-Histoire ; français-technologie)

Faire réfléchir sur l’importance d’écrire, sur les fonctions de l’écriture dans notre société. On écrit pour… Montrer la variété des fonctions de l’écriture. Liens écriture/lecture/oral.

Travailler sur les outils de traitement de texte, pas seulement sous un angle technique. Comment utiliser le correcteur orthographique, le dictionnaire des synonymes, le couper-coller pour déplacer le texte…

Utiliser la poésie dans différentes matières (poèmes géométriques, poèmes à thèmes scientifiques comme les parties du corps humain ou des éléments de la nature …)

 

 

Voici un autre document[1] produit en stage d’établissement qui pourrait être fabriqué avec les élèves :

 

Le français me sert dans toutes les disciplines

 

À l’écrit :

1-       Je réponds sans faire de hors sujet.

Pour m’aider :

–          J’entoure les mots interrogatifs de la question,

–          Je souligne le mot-clé de la question et le mot-clé de ma réponse,

–          Et je vérifie que c’est cohérent, que ça a du sens.

2-       Je reprends les mots de la question et je construis une phrase complète et correcte.

3-       J’utilise « mais », « car », « donc » pour lier mes idées.

4-       Je donne l’indice qui m’a permis de trouver la réponse.

5-       Je me relis attentivement et corrige mes erreurs orthographiques.

 

À l’oral :

6-       Quand je prends la parole, je fais des phrases complètes et correctes.

7-       Je suis capable de m’exprimer clairement sur un sujet.

8-       J’utilise un niveau de langage courant.

 

Accompagner la mobilisation des ressources ne demande pas nécessairement un dispositif lourd ou compliqué. En revanche, permettre à nos élèves d’utiliser et de réutiliser leurs connaissances dans d’autres contextes, c’est indispensable. Cela rend « vivant » les savoirs qui ne resteront pas alors « lettres mortes ». S’y mettre à plusieurs, dans l’idéal toute une équipe d’enseignants, par exemple sur une période restreinte, pourrait amener les élèves à comprendre que les exigences sont identiques quelques soient les disciplines. C’est particulièrement vrai pour la langue française.

[1] Au collège Anatole France des Clayes sous Bois, « Gérer en équipe l’hétérogénéité des élèves »

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Blog 25

Ceci est un complément à la page 91 de Anne-Marie Sanchez & Annie Di Martino, « Faire progresser tous les élèves », publié chez L’Harmattan.

De l‘écrit à lire

La langue française scolaire se trouve présente dans différents types d’écrits qui ne font pas appel aux mêmes connaissances et compétences du « lire » :

  • Les écrits didactiques comme le manuel et le cours ; l’élève va devoir identifier les différentes étapes du discours et les associer, tout en maitrisant les outils de la langue.
  • Les écrits documentaires comme les textes historiques, les articles de presse, les images ou les tableaux, les modes d’emploi, etc. ; l’élève met en fonctionnement les outils de la langue mais aussi les autres langages.

Une deuxième difficulté est le niveau de compréhension d’un texte. Lors d’un exposé dans une formation en 2009, Jean-François Rouet[1] a présenté les quatre niveaux suivants de compréhension suivants :

  1. Mémorisation littérale
  2. Thématisation : compréhension de l’idée principale
  3. Inférence : construction de liens entre les informations puis raisonnement à partir du texte
  4. Évaluation de l’information

En ce qui concerne la lecture documentaire, il a expliqué que devant un document complexe, du type page de magazine, la lecture n’est pas linéaire mais consiste en un balayage couplé avec la sélection des informations. Le lecteur ajuste sa lecture en fonction de ses connaissances méta textuelles, organisateurs, genres, sources : en fonction de ce qu’il sait repérer pour faire du tri ; en fonction de ses capacités d’attention et selon le besoin qu’il en a. C’est donc une activité complexe qui s’acquière au fur et à mesure de la scolarité.

 

Il est sans doute également très utile de comprendre à quoi un élève est confronté quand il lit des textes de natures profondément différentes. En prenant appui sur les recherches menées par Yvette Ginsburger-Vogel[2], on peut résumer dans le tableau suivant la comparaison entre les écrits ordinaires ou littéraires et les écrits scientifiques :

 

  Texte ordinaire Texte scientifique
Tendance générale du discours Dans un même texte ou chapitre, un seul type textuel (narratif, descriptif, argumentatif, injonctif, prédictif ou conversationnel) Coexistence fréquente de plusieurs types textuels : explicatif, argumentatif, injonctif, prédictif.

Interaction constante entre les écrits et les images.

Rôle des images Les illustrations sont simples et ne sont, en principe, pas nécessaire à la compréhension du texte Les photos, images, figures font partie de l’information, elles sont indissociables du texte qui, sans elles, n’est pas compréhensif.
Présentation, aides à la lecture Typographie sage (structure uniforme) ne nécessitant comme seul apprentissage celui de savoir lire. Tout ce qui doit être expliqué l’est par et dans le texte lui-même. Typographie fortement hiérarchisée, avec de gros titres sous forme de questions, sous titres explicatifs. Nécessité d’aides telles qu’un sommaire, lexique et parfois … mode d’emploi.
Langage Langue naturelle Langue naturelle + langage scientifiques ou technique + codes (formules mathématiques par ex) + images symboliques (dans certains schémas) .
Style Le bon texte est aéré.  Les redondances aident à la compréhension des mots ou des concepts nouveaux Chaque phrase a son importance et le texte est donc très dense.

 

Les textes scientifiques ont donc des caractéristiques qui font leur spécificité :

  • La décontextualisation, la généralisation
    • Pas de trace de l’énonciateur
    • Pas de spécification de lieu ou de temps
  • Les temps verbaux
    • Le présent de l’indicatif à valeur de vérité générale, et non de présent d’énonciation.
    • Le passif
  • Le code linguistique ; on utilise 3 codes simultanément
    • La langue naturelle
    • Le langage mathématique
    • Les symboles
  • Le contenu des parenthèses a une valeur variée.
    • Exemples qui illustrent un terme générique : « Une graine placée dans des conditions favorables (température, humidité) … »
    • Reformulations ou synonymes pour expliciter un terme savant : « Le dioxyde de carbone (gaz carbonique) … »
  • Les articles définis : valeur générique
  • La polysémie des mots : dans les matières scientifiques, des mots très usuels ont une acception précise : appareil respiratoire, le milieu, un vaisseau sanguin, le règne animal, etc.

Pour aider les élèves à s’y retrouver, on trouve beaucoup d’exercices dans l’ouvrage de Rémy Duvert et Jean-Michel Zakhartchouk[3] mais aussi sur les sites disciplinaires des associations de professeurs.

[1] Du Laboratoire Langage et Cognition ; CNRS et Université de Poitiers

[2] Yvette GINSBURGER-VOGEL, 1987, Apprentissages scientifiques au collège et pratiques DOCUMENTAIRES, INRP et Lire en classe de sciences :  quels problèmes ? ASSOCIATION FRANÇAISE POUR LA LECTURE ; LES ACTES DE LECTURE n°25 (mars 1989) : http://www.lecture.org/revues_livres/actes_lectures/AL/AL25/AL25P45.pdf

[3] JM. Zakhartchouk, R. Duvert, 1999, « 52 outils pour un travail commun au collège » français/mathématiques, CRDP d’Amiens

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Blog 24

Ceci est un complément à la page 91 de Anne-Marie Sanchez & Annie Di Martino, « Faire progresser tous les élèves », publié chez L’Harmattan.

Place de la langue française dans la construction des apprentissages

Le socle commun de 2015 a associé dans le domaine 1 quatre types de langages qui sont à la fois des objets de savoir et des outils. « Ce domaine permet l’accès à d’autres savoirs et à une culture rendant possible l’exercice de l’esprit critique ; il implique la maîtrise de codes, de règles, de systèmes de signes et de représentations. Il met en jeu des connaissances et des compétences qui sont sollicitées comme outils de pensée, de communication, d’expression et de travail et qui sont utilisées dans tous les champs du savoir et dans la plupart des activités. »

Pour la plupart des disciplines, il semble que les difficultés liées au français tiennent au vocabulaire, la polysémie des mots par exemple, à la syntaxe, à la construction du texte : expliquer, exposer chronologiquement, aller du concret à l’abstrait et à la compréhension des consignes, tâches, activités et attentes. Des pistes pour travailler la maîtrise de la langue sont d’ores et déjà exploitées par certains professeurs. On y trouve par exemple des pistes :

  • D’ordre méthodologique : comment lire un texte spécifique ? Comment écrire un texte spécifique ? Comment se représenter une tâche donnée ?
  • Langagières et cognitives :
    • L’orthographe et la correction syntaxique
    • Le lexique disciplinaire
    • Les outils linguistiques (outils de reformulation, connecteurs logiques, balisage du discours)

Essayons de préciser en détaillant ce que l’on retrouve dans toutes les disciplines : de l’oral, de l’écrit à lire, de l’écrit à produire.

 

De l’oral

Dans la classe, s’entrecroisent deux situations d’oral distinctes. D’une part, l’oral est celui de la communication ordinaire, de la vie courante entre tous les présents, professeur et élèves. Et d’autre part, l’oral est celui de la discipline enseignée, savoirs spécifiques et langue de scolarisation.

De la part du professeur, cet oral exige la clarté du langage, la rigueur du code et la stabilisation des consignes et méthodes de travail que l’on donne.

Dans la classe, chacun a son rôle :

L’élève Le professeur
–          Prend la parole

–          S’adresse à un public

–          Place sa voix

–          Pose une question

–          Répond à une question

–          Vérifie

–          Reformule

–          Refuse

–          Parle d’autre chose

 

–          Sollicite

–          Questionne

–          Donne une consigne

–          Distribue la parole

–          Régule la parole

–          Recentre

–          Relance

–          Encourage

–          Reprend

–          Réprimande

 

Dans un premier temps, l’oral permet de faire émerger les idées des élèves, d’amorcer une réflexion, de recueillir les résultats des groupes après leur démarche et d’engager des débats et si besoin, de rappeler des règles de vie en collectivité.

Toutes ces occasions permettent de travailler la maitrise de la langue. En particulier les temps d’exposition de production. Une évaluation informante et en cours de formation, si possible construite avec les élèves, leur permet de connaitre et d’intégrer les attendus puis de voir leurs progrès. (Cf. Utilisation des CED, niveaux de réussites et de progrès partie 3, chapitre 2)

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Blog 12 bis EASy’R

Il n’y a pas de « blog 12 bis » dans Anne-Marie Sanchez & Annie Di Martino, « Faire progresser tous les élèves », publié chez L’Harmattan.

Mais cette partie-là n’est pas inintéressante.

1.     EASy’R ; un processus d’apprentissage ”idéal”

 

Dans son ouvrage Evaluer des compétences, guide pratique[1], François-Marie Gérard présente un processus d’apprentissage idéal[2] que l’auteure résume dans un jeu de mots E.A.Sy’R. Il s’agit de séquencer les apprentissages en quatre moments successifs : l’exploration, l’analyse, la synthèse et le réinvestissement. Attention, ces trois derniers termes n’ont pas la hiérarchie évaluative de la taxonomie des objectifs de Bloom, on est là plus proche de la valeur sémantique de ces verbes.

La phase d’exploration a pour objectif de faire découvrir ce qui va être étudié. On parlait naguère de « document d’accroche » en didactique de l’histoire-géographie. Mais ce peut être plus large que cela. Nous le verrons un peu plus loin. La phase d’analyse correspond à une étude approfondie, par exemple de documents qui permettent de « faire un tour » de la question. La phase de synthèse peut être la trace écrite, le résumé de ce que les élèves devront garder en mémoire, une fiche-méthode réutilisable. Enfin, la phase de réinvestissement est un moment de réutilisation des connaissances qui viennent d’être travaillées. Il ne s’agit pas là du fameux contrôle ou bilan ou évaluation. Quel que soit le nom qu’on lui donne, il n’est pas question ici de sommatif mais d’ancrage des connaissances.

Donnons quelques exemples. En géographie, en histoire et en mathématiques. Commençons par la géographie, en 6e pour le chapitre « Habiter un espace à forte contrainte ».

 

EASy’R en géographie, en 6e

Explorer

On pourrait commencer par le visionnage d’un court documentaire sur la vie d’une communauté humaine dans les Andes. Le professeur alors par quelque moyen que ce soit, magistral, cours dialogué ou autre, mais, attention, il s’agit d’une phase assez rapide, amène la classe à se demander ce qui va être étudié ? Quel type d’espace sera au programme ? Comment les hommes y vivent ? Ont-ils aménagé quelque chose de particulier ? Pourquoi constate-on tel fait ici et pas ailleurs ?

 

Analyser

Cette deuxième phase plus longue consiste à faire une « étude de cas », en fait l’étude d’un lieu. Par exemple, le Mato Grosso au Brésil. Localisons, situons puis essayons de caractériser ce lieu en utilisant, tout ou partie, au choix, une carte de la répartition de la population au Brésil, une photographie (mécanisation, défrichement, habitat de fortune, manifestations…), un graphique (production de lait, de soja, croissance de la population, superficies des défrichements…), un texte. La classe étudie les trois ou quatre documents sélectionnés par le professeur « à fond » sans perdre de vue les questions posées dans la phase d’exploration. Il ne s’agit pas d’étudier ce lieu pour lui-même. On pourrait même commencer à chercher des ressemblances avec les Andes et des différences.

L’idéal serait de pouvoir faire, d’avoir le temps, une seconde étude de cas peut-être plus rapide, sur une station de ski dans les Alpes ou dans les Rocheuses. Là encore chercher tout d’abord des caractéristiques, après avoir localisé et situé bien entendu puis des ressemblances et des différences avec les deux premiers lieux étudiés.

 

Synthétiser

Cette phase pourrait commencer par le rassemblement de tout ce qui a été collecté dans les deux premières sur un planisphère, dans un tableau à double entrée. Localiser certes mais aussi placer les informations type « pays riche/pays émergent/ pays en voie de développement », données bioclimatiques, répartition de la population.

Dans cette phase, en géographie, on change d’échelle. On passe de l’échelle locale à l’échelle mondiale. On se demande si tous les espaces à fortes contraintes ont les mêmes caractéristiques ? S’ils sont situés aux mêmes endroits ? Comment les Hommes y valorisent ou pas leurs contraintes ?

Une trace écrite élaborée avec les élèves ou par le professeur à partir de leurs idées permet de conclure par la définition d’un espace à forte contrainte, la typologie de ces espaces avec quelques exemples d’aménagements. Là encore, cette trace écrite peut être un texte, un tableau, une fiche-méthode, une liste des questions à se poser pour caractériser un espace.

Ici, le professeur de géographie devrait faire son contrôle-bilan, son évaluation finale, corriger, noter et apprécier si l’élève a appris/compris/travaillé et hop, il pourrait alors le sentiment du devoir accompli passer à un autre chapitre, d’une autre matière.

Et c’est ici que François-Marie Gérard préconise de différer encore le temps de l’évaluation (enfin, il ne le dit pas, c’est l’auteure qui le fait), FMG n’évoque même pas l’évaluation dans cette partie, en tout cas, pas la sommative.

 

Réinvestir

L’objectif de ce moment est la manipulation des connaissances acquises précédemment par les élèves afin qu’ils se les approprient. La question n’est pas de savoir s’ils ont appris leurs leçons mais plutôt de leur proposer d’utiliser celles-ci pour mieux les apprendre. Ce moment se passe encore en classe. Le professeur est donc là pour observer chacun, guider, relancer, étayer et désétayer. Avec ce chapitre on arrive à la fin de l’année, il va être temps que les élèves deviennent un peu plus autonomes dans leurs apprentissages et dans leur travail personnel en classe. Ceci-dit, mieux vaut étayer que regarder dormir.

Cette phase de réinvestissement est aussi une phase de mobilisation des ressources, à très court terme certes. Les savoirs engrangés dans la séquence sont utilisés, vivants et non lettres mortes.

Une troisième étude de cas est donc possible. Soit la même pour tout le monde, pourquoi pas en zone arctique ? Soit au choix des élèves, on ne reviendra pas sur l’efficacité de l’auto-détermination dans la motivation des élèves, soit au choix du professeur parmi un panel représentatif. On peut mixer les deux propositions.

 

Les collègues qui ont enseigné la géographie avant la réforme du collège ont reconnu ici la démarche inductive imposée par les programmes de 2008, sauf que ces programmes n’imposaient pas la phase de réinvestissement qui en fait toute l’efficacité pour les apprentissages. Les programmes de 2016 nous ont « délivré » de la démarche inductive. Pourquoi délivrer ? Dans le chapitre précédent[3] , nous nous sommes penchés sur la différenciation et la diversification pédagogiques.  Diversifier c’est aussi cela, ne pas se cantonner dans une procédure intellectuelle. L’inductif c’est bien. Le déductif aussi. L’hypothético- déductif c’est encore mieux.

 

 

EASy’R en histoire en 3ème

Cette séquence trouve sa place après l’étude de l’URSS de Staline qui a déjà permis, d’une manière ou d’une autre, de caractériser un régime totalitaire.  Elle a donc un double objectif : la réactivation des connaissances du précédent chapitre, de découvrir une autre dictature, et même un troisième puisqu’il s’agit d’apprendre à réfléchir et organiser des informations.

 

Pendant la phase d’exploration, les élèves reçoivent une vingtaine de petits textes numérotés sur une feuille recto-verso, à lire en travail personnel hors de la classe et ils doivent à réfléchir à un premier classement de ces textes. Les textes proposés sont la plupart du temps extraits de manuels, parfois très anciens, par exemple un article de l’Humanité du 4 novembre 1922 « Et Valenti fut tué » ou encore un extrait du règlement de Dachau ou bien une chronologie du Japon de 1927 à 1936[4]. Mais aussi « Pour rendre à notre peuple sa grandeur, il faut exalter la personnalité du chef et donner à celui-ci tous les droits »[5].

En classe, les idées de classement sont listées au tableau et les élèves les justifient. La plupart repère des origines géographiques et propose un classement en colonne, une par pays. Rare sont ceux qui vont au-delà. Une année, quelqu’un proposa un tri par nature des textes : témoignage, article de journaux, mémoires, chronologie, texte législatif. Aucun n’alla jusqu’à croiser ces deux idées pour élaborer un tableau à double entrée.

Pendant la phase d’analyse, les petits extraits sont étudiés un par un, en commençant par ceux illustrant le stalinisme (réitérer les connaissances par un apprentissage multi épisodique), en continuant par ceux issus du nazisme. On cherche à retrouver toutes les caractéristiques (les attributs, dans la démarche de Britt-Mari Barth[6]) avec les textes soviétiques puis à chercher quel texte de l’Allemagne nazie correspond à cette caractéristique.

S’il reste du temps, si la classe percute, on peut approfondir avec le fascisme et le Japon de Hiro-Hito[7] ou encore proposer un travail facultatif pour les plus curieux, continuer à classer les textes selon les attributs des dictatures.

La phase de synthèse est collective et consiste à créer un tableau comparatif des dictatures.

Le réinvestissement peut consister à fournir aux élèves un petit corpus pour répondre à la question suivante, « La France de Vichy est-elle un régime totalitaire ? ». Avant d’avoir étudié ce chapitre, bien sûr.

 

EASy’R en mathématiques

Un autre exemple concerne ici les mathématiques et plus précisément l’apprentissage de la programmation. La toute première séance se passe en salle multimédia, les élèves sont en binôme sur un ordinateur et se connectent au site « Une heure de code »[8]. Les élèves ont à écrire un programme, sous forme d’ordres en blocs, pour que leur personnage atteigne le but proposé avec plus ou moins de contraintes.  Ils peuvent faire autant d’essais qu’ils en ont besoin, sachant qu’un thème terminé leur permet d’en faire un autre dont le chalenge sera plus intéressant. Après la présentation de la progression à suivre, les quatre temps d’EASy’R se font au rythme de chacun, pratiquement sans intervention du professeur. Les élèves doivent proposer des agencements des blocs de consigne pour faire bouger leur personnage. Ils commencent donc par explorer les différentes commandes et ensuite analysent les effets de celles-ci. Les contraintes imposées, le nombre maximal de blocs à utiliser par exemple, les obligent à pousser leur analyse, à en discuter la pertinence et à adopter la procédure qui va permettre d’atteindre l’objectif.

A chaque fin de partie, le professeur demande aux binômes un retour sur les commandes utilisées et ce qu’elles ont permis de faire, on est dans la phase synthèse. Le réinvestissement est immédiat et se fait à plusieurs reprises car les parties suivantes intègrent les commandes qui viennent d’être découvertes. Il sera temps ensuite de passer au logiciel qui permet de travailler plus spécifiquement les points de programmes attendus. Mais les bases de la programmation sont atteintes pour chacun.

 

EASy’R pour permettre aux élèves de développer leurs compétences

La même démarche est utilisable pour le travail autour des compétences que le socle et les nouveaux programmes nous demandent de développer chez les élèves. Nous ne pouvons pas développer les compétences des élèves à leur place mais nous pouvons faire en sorte d’organiser notre enseignement en proposant des situations dans lesquelles les élèves vont pouvoir s’entraîner, conscientiser, auto évaluer et développer eux-mêmes leurs compétences.

Regardons ce que cela donnerait pour une compétence de plus en plus demandée par l’institution qui reste un sujet d’interrogation pour de nombreux collègues, l’oral en classe. Depuis l’année scolaire 2016-2017, l’oral fait même l’objet d’une épreuve du brevet. Comment pourrait-on utiliser EASy’R pour permettre aux élèves de monter en compétences et d’arriver sereins à l’examen ?

  1. Explorer : quelques élèves volontaires prennent la parole, par exemple pour un petit exposé, sans conséquence c’est-à-dire pas de notes.
  2. Analyser : qu’est-ce qu’une prestation orale réussie ? Qu’est-ce qu’il ne faut pas faire ? Laisser la parole aux élèves. Noter ce qu’ils disent. En commentant le moins possible si on veut qu’ils s’approprient ces informations, ni même reformuler.
  3. Synthétiser : organiser les informations dégagées par les élèves dans une petite fiche, un tableau, un petit outil consultable A CHAQUE FOIS QU’IL Y A UN ORAL A FAIRE. Jusqu’à ce que l’élève n’en ait plus besoin. Il est plus efficace que ce soit le professeur qui fasse cette fiche à condition de rester très près des formulations des élèves. Il n’est pas impensable qu’un élève s’en charge.
  4. Réinvestir : s’essayer à la prise de parole en public, par exemple pour rendre compte d’un texte lu. Si possible, là encore, sans notation, avec une évaluation orale, collective, bienveillante, c’est-à-dire à la recherche de tout ce qui a été réussi, appuyée sur la fiche élaborée en phase de synthèse.

 

Quatre exemples de cette démarche d’apprentissage conçus par des collègues en stage interdisciplinaire sont consultables sur un des blogs de l’auteure[9].

Une proposition de l’auteure :

Pour la phase d’exploration, il est possible de visionner de « vrais » élèves de 3ème lors d’une prestation orale en classe[10].

Regardez Ziyad entre 2’59 et 3’25, Pauline (5’40-6’12) et Gwénaëlle (5’09- 5’27). N’oubliez de dire à vos élèves de ne pas se moquer car il a fallu beaucoup de courage pour prendre la parole devant une caméra, tous n’ont pas accepté de le faire.

 

En 2012-2013, cette démarche a été essayée, la classe de 3e qui a visionné les extraits a proposé comme critères d’un oral réussi « la langue (phrases correctes, langage soutenu), la voix (être audible, articuler, ton vivant, rythme adapté), la durée (5 minutes), le contenu (qui ait du sens, complet, intéressant, du vocabulaire, dans le sujet (pertinent, exact), et l’attitude (aucun geste parasite, on regarde le public, on connaît son texte sans réciter, sans lire, être convaincant). Ce sont ces critères qui ont été réutilisés tout au long de l’année en histoire-géo, en français, avec la professeure documentaliste lors de chaque moment d’histoire des arts. Lors de l’épreuve en mai 2013, selon les collègues, les prestations ont été plutôt meilleures que d’habitude. Pour qu’elles soient encore meilleures, il faudrait réfléchir à « élaborer un diaporama qui ne fera mourir d’ennui votre public ». Grâce à François-Marie Gérard, it could be easyer !

 

Les trois « R »

La lecture de ce qui précède montre des exemples des années antérieures. Depuis 2016-2017, l’auteure a modifié en EASY’RRR. En effet, développer une compétence, progresser, c’est long et difficile. Il faut à certains élèves plusieurs essais. C’est donc au(x) professeur(s)[11] là encore de faire en sorte d’organiser leur enseignement pour que les élèves y parviennent. En histoire-géographie-EMC, il est souhaitable que chaque chapitre soit l’occasion non seulement d’apprendre les ressources du programme, la prise de la Bastille mais aussi de développer les compétences au programme. L’auteure propose donc aux collègues en stage d’associer « un chapitre, une compétence », toute l’année. Grosso modo, à la trente-sixième semaine, chaque élève aura eu l’occasion de s’entraîner au moins trois fois (les trois R de EASY’RRR) pour chaque compétence. Il n’y aura plus qu’à évaluer les progrès et en prendre note. Nous y reviendrons dans la quatrième partie de cet ouvrage.

 

[1] François-Marie Gérard,  2008, Evaluer des compétences, guide pratique[1], De Boeck, 1ère édition

[2] page 25. Ceci est une invitation à lire ou relire ce chapitre de François-Marie Gérard, avec des exemples et des définitions, un exercice d’application et un de mise en œuvre personnelle.

[3] Partie 1, chapitre2, différencier/différencier

[4] L’auteure est au courant que ces dictatures ne sont pas au programme de 2016 ni même de celui d’avant.

[5] Ecrit dans la forteresse de Landsberg en 1923. L’auteur y fut détenu neuf mois.

[6] cf. dans ce chapitre, le texte précédent

[7] Qui ne sont pas au programme de 3ème.

[8] https://hourofcode.com/fr

[9] http://lewebpedagogique.com/anniedimartino/2012/11/22/permettre-a-nos-eleves-de-devenir-plus-competents-a-loral/

[10] Un film tourné par Thierry Foulques, « Compétences in vivo 2 », http://www.youtube.com/watch?v=d_9mDQ9qtuU

Séquence détaillée : http://lewebpedagogique.com/anniedimartino/2011/11/30/752/, « différenciation pédagogique en classe entière ». (Ce film a été tourné à d’autres fins, il n’a pas d’intérêt d’être visionné en entier avec votre classe).

[11] cf. partie 2, chapitre 2, Enseigner les tâches complexes : Piano à plusieurs mains

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La petite tortue et le grand incendie

Il était une fois, au royaume des Chênes verts,  une petite tortue. Plus précisément une tortue d’Hermann, de ces tortues en voie d’extinction que l’on trouve encore dans deux lieux dans le monde et en particulier dans le maquis du royaume des Chênes verts. Cette petite tortue vivait sa vie de petite tortue dans les fourrés de la forêt de chênes verts, de pins parasol, de pins d’Alep et de chênes lièges. Elle se délectait de jeunes pousses mais aussi de cistes cotonneux, de lentisques odorants et autres plantes du sous-bois. Elle trouvait parfois de la marjolaine ou du romarin pour donner d’autres goûts. Elle était encore jeune, une trentaine d’années ; sa carapace s’ornait de petites tâches jaunes du plus bel effet, caractéristiques de cette espèce et elle était courtisée par les mâles des environs.

Elle vivait en bonne intelligence avec les autres animaux du maquis, les lièvres et les sangliers, les serpents de toutes sortes et les oiseaux bien sûr, sans parler des insectes et des gastéropodes ; même si elle trouvait que les cochons sauvages étaient de plus en plus nombreux et envahissants. Un jour, l’un d’eux, un chenapan, l’avait retournée en passant à toute vitesse et elle n’arrivait pas à se retrouver les quatre pattes sur terre. Cela l’avait occupée une bonne journée et elle avait bien cru sa dernière heure arrivée cette fois-là. C’est un autre sanglier qui l’avait aidée en fouissant la terre de son groin à côté d’elle. Elle s’était sentie propulsée à quelques pas mais cette fois-ci dans le bon sens. Comme elle était très polie et surtout très soulagée, elle avait tout de même remercié sans grommeler ce deuxième olibrius.

Mais bon, en général, tout ce monde était de bonne fréquentation et s’entendait correctement. Jusqu’aux hommes dont elle voyait les pattes de temps en temps. Elle connaissait chaque pouce de son territoire et pratiquement tous les animaux résidents ou de passage. Il faut bien reconnaitre que les terres explorées par la petite tortue étaient bien limitées, c’est qu’une tortue ne se déplace pas aussi vite que vous et moi …

Et voilà qu’un jour d’été, elle dégustait sans se presser de délicieuses feuilles de ciste ; a-t-on déjà vu d’ailleurs une tortue se presser ? Et voilà donc qu’un jour d’été, elle entendit le bruit d’une galopade effrénée. Elle avait beau tourner sa tête en tous sens, elle ne voyait rien de spécial pourtant ce bruit continuait et semblait faire trembler la terre. Elle percevait également une sorte de mugissement terrible dont elle ne comprenait pas la provenance. Il lui semblait également sentir une odeur inconnue, très désagréable. Mais que se passait-il donc ?

La galopade s’approchait, elle se tourna lentement vers d’où elle provenait. Le ciel s’était obscurci d’oiseaux s’enfuyant à tire d’ailes. Tout à coup, débouchèrent plusieurs hardes de sangliers, dont elle ne reconnaissait aucun membre. Des lièvres couraient aussi en sautant, évitant ainsi assez gracieusement de se retrouver au milieu des impressionnants fonceurs. Elle rentra précipitamment la tête et les pattes sous sa carapace pour écarter le danger d’être écrasée. Elle sentit quand même que certains lui marchaient dessus, l’enfonçant un peu dans la terre dure. Quand elle fut sûre que tous étaient passés, elle sortit la tête précautionneusement. Les serpents rampaient maintenant dans la même direction accompagnés par des insectes bruissants de panique. Mais que se passait-il donc ?

La petite tortue n’y comprenait rien. D’ailleurs, eût-elle voulu s’enfuir avec les autres animaux qu’elle ne l’aurait pas pu. Et elle commença à percevoir ce qu’il se passait tandis que les retardataires continuaient à passer autour d’elle, la contournant sans s’arrêter. Ses sens étaient sollicités à la fois  par une odeur effrayante et qui devenait suffocante, par un bruit de ronflement terrifiant accompagné des soupirs des arbres qui s’effondraient tordus dans des flammes jaunes et rouges, le tout dégageant une fumée épaisse et âcre. Le feu, c’était donc le feu que tous ces animaux fuyaient.

Dans un sentiment de panique, la petite tortue se rendit compte qu’elle ne pouvait rien faire. A part se réfugier dans sa carapace, car elle savait qu’elle ne pouvait pas déguerpir comme les autres animaux. Deux escargots étaient arrivés à côté d’elle, ils n’en pouvaient plus. Elle leur proposa de partager son abri relatif. Elle se recroquevilla autant que possible dans sa carapace et sentit que les deux petites bêtes se faufilaient à côté de ses pattes. Le bruit devenait assourdissant, l’odeur irrespirable et une chaleur sans nom commença à les entourer de ses tentacules, leur faisant sentir que leur mort était proche. Ils l’attendaient, acceptant leur sort funeste.

Tout à coup, alors qu’elle s’attendait à se faire lécher par les flammes dans une chaleur létale, la petite tortue ressentit un grand choc sur sa coque de protection. Les flammes cessèrent instantanément et elle se retrouvait flottant dans une mare de boue mêlant terre et cendres. L’eau fut vite avalée par le sol. Les deux escargots furent éjectés quand elle sortit la tête et les pattes. Prudemment, ils restèrent enfouis dans leurs coquilles tandis que la petite tortue regardait autour d’elle. Le feu avait été neutralisé par une brusque averse localisée à ses alentours. Mais il poursuivait sa course folle plus loin, dans un grondement qui s’éloignait.

La petite tortue n’en croyait pas sa chance. Parmi les ruines fumantes de ce qui avait été un maquis superbe, elle survivait. Elle n’osait pas trop bouger, toujours traumatisée par ce qui s’était passé. Les vapeurs l’aveuglaient encore, l’empêchant de respirer correctement mais elle vivait ! Plus tard, des pattes d’hommes passèrent près d’elle. Cuirassés dans des habits protecteurs, ils jetaient de l’eau par des sortes de serpents cracheurs sur les débris fumants. Ils continuèrent en s’avançant vers l’incendie qui continuait à faire rage.

Un long moment passa, sans aucun autre signe de vie sur cette terre dévastée. Jusqu’à ce qu’elle se sentit soulevée par des mains d’homme. Elle se retrouva dans un lieu totalement inconnu où d’autres tortues d’Hermann l’accueillir comme une héroïne en lui faisant fête.

Dans ce centre de protection des tortues d’Hermann, elle devint une attraction. Elle fut prise en photo d’innombrables fois et devint la référence de toutes les campagnes de lutte contre les incendies. Des gens vinrent de tout le royaume des Chênes verts pour admirer la rescapée d’un des plus grands feux de forêt. Ils prirent conscience de la disparition de milliers d’animaux dans ces catastrophes et commencèrent à prendre soin des alentours de leurs maisons.

C’est ainsi qu’au royaume des Chênes verts, les sous-bois sont dégagés, de grands pare-feux sont aménagés dans le maquis et par temps de grands vents, après une période de sécheresse, de nombreux guetteurs scrutent les forêts en prévenant du moindre départ de feu. La flotte d’avions Canadair, comme celui qui avait sauvé la vie de la petite tortue, a été renouvelée et agrandie. Moyennant quoi, il arrive que quelques départs de feu aient encore lieu au royaume de Chênes verts mais plus aucun grand incendie n’a décimé une population de tortues d’Hermann.

 

Anne-Marie, Sainte Maxime, le 28 juillet 2017

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L’arbre ni trop grand ni trop petit

Il était une fois un arbre, ni grand, ni petit, ni large, ni fluet. Juste un arbre. Il vivait avec ses congénères dans une forêt pas trop épaisse. De bonnes conditions de vie pour un arbre ni trop grand ni trop petit. Il avait de la place pour étendre ses branches et faire profiter ses feuilles de la moindre source de lumière. Son voisinage immédiat était de bonne compagnie ; on ne peut pas dire qu’il ne s’entendait pas avec les chênes majestueux et les châtaigniers un peu dédaigneux mais sans malice. Même avec les bouleaux, il entretenait des relations cordiales.  Mais cet arbre avait un souci. Il voyait bien toute la journée, et même la nuit, des animaux voler dans le ciel, courir ou ramper sur le sol. Il y en avait même qui grimpaient sur son tronc et dans ses branches. Certains lui frôlaient les racines. Il avait envie de leur demander : « C’est comment ailleurs ? » … mais que peut-on faire quand on est un arbre ni trop grand ni trop petit ?

Alors, il regardait les nuages en essayant de deviner ce qu’ils avaient vu. Il tentait de comprendre ce que la pluie racontait. Il se réchauffait les feuilles au soleil en se disant que ses rayons en connaissaient plus d’un sur les alentours et même plus loin encore. Il aurait bien voulu se rendre compte de lui-même mais ses racines, profondément enfoncées dans la terre ne lui permettaient pas de se déplacer. Les jours de grands vents, il se tordait en tous sens pour les libérer mais il n’était ni trop grand, ni trop petit et cela ne pouvait pas se faire. Il était comme cloué au sol, sans espoir de voyage comme dit la chanson.

Et puis un jour, alors qu’une pluie battante secouait les feuilles, il arriva qu’un oisillon s’échouât sur une branche de l’arbre ni trop grand ni trop petit. Pris de pitié devant ce minuscule être qui piaillait lamentablement, il tordit quelques-unes de ses brindilles pour abriter le petit et lui faire comme un nid. Celui-ci se trouva bien blotti, il avait assez chaud pour s’endormir, bercé par le mouvement des branches et le son des gouttes qui, tombant sur le feuillage, faisaient comme une chanson douce, celle que lui chantait sa maman.

La pluie finit par cesser et la futaie résonna bientôt des cris de détresse d’un grand oiseau blanc. Il appelait son précieux héritier emporté par le déluge qui venait de s’abattre sur ce coin de forêt. L’arbre ni trop grand ni trop petit agita une de ses branches pour attirer son attention. Le grand oiseau blanc se posa alors et ne fut pas long à remarquer son bébé endormi. Il le posa délicatement sur son dos et le ramena vers sa mère, toute heureuse de retrouver sa progéniture.

Mais l’histoire, si elle finit bien pour l’oisillon perdu, ne fait que commencer pour l’arbre ni trop grand ni trop petit. En effet, le grand oiseau blanc se trouvait être un magicien cherchant à renouer avec son lointain passé, qui vivait sa 267e vie sous la forme d’un dinosaure à plume. Il tint absolument à remercier celui qui avait non seulement sauvé la vie de son rejeton mais en avait également pris grand soin. Il revint donc vers l’arbre sauveur et lui offrit d’exaucer trois de ses vœux. Tout le monde sait que pour les fées et les magiciens, voire les génies des lampes parfois, les vœux vont par trois.

L’arbre ni trop grand ni trop petit, habité par son rêve de découvrir le monde, formula ainsi son premier vœu : « Je souhaite visiter le monde en volant comme toi. » Aussitôt dit, aussitôt fait, le grand oiseau blanc libéra les racines de l’arbre et celui-ci commença à s’élever dans les airs, un peu comme une montgolfière, si vous arrivez à l’imaginer. Il se laissa porter par les courants d’air ascendants et eut ainsi le grand bonheur de découvrir des paysages qu’il n’avait jamais imaginés.

Il s’aperçut rapidement qu’il avait oublié de prendre avec lui de quoi se nourrir pendant ce voyage. Son deuxième vœu fut donc de récupérer des sels minéraux indispensables à sa survie à plus ou moins long terme. Rassuré sur sa subsistance, il put enfin profiter de son voyage.

Ce que vous voyez tous les jours et qui est pour vous d’une grande banalité, était pour lui l’objet d’émerveillements sans fin. La terre qu’il découvrait se parait de couleurs infiniment nuancées ; de temps à autre, il voyait l’eau des pluies former des rivières soit calmes et tranquilles soit au contraire agitées et tumultueuses. Il survolait des villages aux clochers pointus et il aperçut même au loin un château qui braquait fièrement ses tourelles vers le ciel. Et puis partout, il remarquait des animaux à deux pattes, dont il finit par comprendre qu’ils étaient ce que les bêtes de la forêt appelaient des hommes. Heureux de comprendre enfin de quoi elles parlaient, il secouait ses branches pour leur manifester des marques d’amitié.

Mais vous savez bien que certains hommes n’aiment pas ce qu’ils ne connaissent ni ne comprennent. Un arbre volant, pensez donc ! Un arbre déraciné ! Que venait-il chercher dans leur contrée ? « Prendre la place de nos arbres fruitiers ! » vitupéraient les plus hostiles qui n’étaient que les plus peureux. « Mais non, faisons connaissance avant de méjuger ! » tentaient de calmer quelques plus raisonnables personnes, prêtes à accueillir l’arbre volant.  « Ce n’est que le premier, l’invasion des arbres ne fait que commencer ! Ils vont voler nos enfants, violenter nos femmes ! Chassons-le pour leur faire passer l’envie de revenir nous envahir ! » reprenaient les plus virulents, jouant sur les peurs sans aucune retenue, cachant leurs idées de pouvoir.

Malheureusement, ce furent ces voix haineuses que la foule entendit. Armés d’arcs, ils lancèrent des flèches enflammées vers l’arbre maintenant en très mauvaise posture. Imaginez l’épouvante de cet arbre ni trop grand ni trop petit : le feu, l’ennemi le plus féroce de son bois. Lui n’avait pas d’ailes pour s’enfuir. Et ces flèches qui le frôlaient de plus en plus près ! Il se résolut à formuler son troisième et dernier vœu : retourner dans sa forêt. L’animosité malveillante avait gagné, une fois de plus, comme souvent au pays de hommes.

Le magicien exauça ce dernier vœu et enracina à nouveau l’arbre ni trop grand ni trop petit à la place qu’il occupait il n’y a pas si longtemps. Celui-ci mit longtemps à se remettre de sa grande frayeur. Petit à petit, la compagnie rassurante de ses congénères et des animaux de la forêt l’aida à reprendre le dessus et il put enfin savourer les souvenirs de son merveilleux voyage. Des regrets, il en avait, bien sûr. Mais à la suite de cette belle aventure, il s’était découvert un talent pour raconter tout ce qu’il avait vu. Les arbrisseaux faisaient cercle à son pied pour l’entendre peindre les couleurs de son périple à peine croyable, chanter les sons inconnus d’eux des rivières et des cloches des églises. Et plus d’un s’endormait en rêvant à son tour … peut-être qu’un jour ?

Anne-Marie, 8/10/16

Fin replacée le 3/2/18 L’histoire ne dit pas si ces hommes firent le lien entre les évènements qu’ils venaient de vivre et les plaies qui s’abattirent dès lors sur eux. En effet, le magicien était extrêmement mécontent de la façon dont ils avaient si mal accueilli, et c’est peu de le dire, son protégé. Il fit tomber sur eux une pluie de grêle qui mit en danger la récolte de fruits puis lança sur eux des sauterelles qui dévorèrent ce qui restait de leurs précieux arbres fruitiers.

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Blog 23

Ceci est un complément à la page 87 de Anne-Marie Sanchez & Annie Di Martino, « Faire progresser tous les élèves », publié chez L’Harmattan.

Mise en place (d’un projet)

Le thème que vous allez proposer aux élèves est trouvé.

Un premier écueil à éviter, on l’a dit, est de tout faire à la place des élèves. Mais vous devez quand même discuter avec les collègues des autres disciplines pour vous mettre d’accord sur ce que chacun peut apporter au projet et définir ensemble un premier cahier des charges, organisation entre les disciplines et planification des tâches : qui fait quoi ? avec qui ? quand ? où ?

Voici par exemple un EPI sur le thème du parfum concernant toutes les classes de 3e. Il est piloté dans chaque classe par le professeur principal et le pilote général est le professeur référent du niveau 3e. Cet EPI est organisé en deux parties sur un semestre, l’une virtuelle et l’autre en Graine d’entreprise :

  • Partie ‘ »virtuelle’’ d’études en classe autour de la problématique de la fabrication d’un parfum (pas de production à vendre) – conception du produit

Septembre-octobre, technologie : le cahier des charges

Octobre-novembre-décembre, SVT : normes de sécurité et d’hygiène

Octobre-novembre-décembre, maths : forme flacon/emballage

Décembre, chimie : odeur-senteur, création d’un parfum

  • Graine d’entreprise : organisation de la vente de « Rolls de parfums » des Parfums de Grasse (Commerce, marketing, gestion, comptabilité, vente) ; 13 senteurs possibles ; 6 groupes de 4 au maximum qui travaillent chacun sur une odeur

Octobre, HDVC : mise en place de la graine d’entreprise et des groupes

Octobre, maths : étude de marché, sondage à réaliser pendant les vacances pour trouver la cible de vente (Commerce) et commande des Rolls (gestion)

Novembre, français : arguments de vente et slogan pour chaque groupe (marketing)

Novembre, arts plastiques : affiche publicitaire de stand pour chaque groupe (marketing)

Décembre, HDVC : discours de vente marketing (vente)

Fin décembre jusqu’à février : début des ventes en stand ou en individuel (vente)

Fin d’année, HDVC : organisation d’une sortie avec les bénéfices réalisés.

Préparation de la soutenance orale du DNB (choix thème, diaporama, oral)

Ce planning a été distribué dès le début aux élèves. Des adaptations ont été réalisées mais chacun savait se situer dans cet EPI.

L’expérience a montré que cet EPI a été pour les élèves une succession de mini-projets puisqu’ils n’avaient pas la main sur la définition de l’EPI ni sur sa planification.

Mais la marge de manœuvre a été laissée dans les réalisations intermédiaires. Par exemple, pour les emballages de flacons, chaque groupe a choisi parmi les bouteilles de marque (vides) apportées par des collègues. Ils ont ensuite déterminé la forme du solide dont ils ont réalisé le patron et rempli une fiche descriptive de ce solide. La mise en commun a été l’occasion de reprendre les connaissances et savoir-faire de ce chapitre.

Pour un EPI aussi dense que celui-là, mettant en jeu tant de disciplines, il semble compliqué de laisser aux élèves la charge de tout le projet. Il faudra sans doute quelques années pour que les équipes de professeurs se connaissent suffisamment et se fasse entièrement confiance. Alors, on pourra se contenter de donner le thème aux élèves et les regarder définir et planifier le projet. François Muller[1] donne sur son site quelques conseils pour « Passer d’une idée de prof à un projet d’élève » ainsi que des réponses à des questions souvent posées en stage.

 

Dévolution aux élèves

Imaginons maintenant que nous sommes arrivés à cette phase : comment apprendre aux élèves la démarche de projet en évitant la tentation du « Je sais mieux qu’eux » ?

Prenons l’exemple d’un projet mené dans le cadre du Parcours avenir. Le détail des étapes a été fourni en formation de formateurs par l’Ingénieure pour l’Ecole du 91, Marie Roz-Guezet en octobre 2015.

Entrons donc dans la première étape : la définition du projet

Les professeurs présentent l’objectif de ce projet : organiser un forum des formations des lycées en faisant venir des élèves des classes de première et de terminale.

Les élèves de cet atelier regroupant plusieurs classes de 3e sur la base du volontariat forment des groupes de trois ou quatre. Ils doivent :

  1. Déterminer le but du projet (ou plutôt se l’approprier, puisqu’imposé par le thème de l’atelier qu’ils ont choisi)
  2. Estimer les ressources, coûts et délais : livrets Onisep, connaissances personnelles d’élèves actuellement en lycée, prévision d’un goûter de remerciement, prévision de la date début février (8 séances d’une heure)
  3. Définir le type d’organisation : chaque groupe propose une organisation, elles sont tellement différentes que l’accord est unanime sur l’une d’entre elles ; chaque classe viendra en demi-groupe rencontrer les intervenants de lycées sur un après-midi
  4. Choisir le chef de projet : nous expliquons son rôle et ses responsabilités, une élève se propose, elle est acceptée comme chef de projet
  5. Estimer les risques : très vagues à ce niveau du projet
  6. Estimer la rentabilité : rentabilité pour eux, en particulier en termes de soutenance orale au DNB et compétences du socle ; rentabilité pour les élèves de 3e, meilleure connaissance des filières du lycée

Est alors défini le cahier des charges.

 

Passons à la deuxième étape : la planification du projet

  1. Communication avec des personnes-clés : Madame la Principale et son adjointe, les professeurs principaux de 3e, la COP, la CPE
  2. Définition des responsabilités ; les élèves font la liste des différentes tâches et s’inscrivent sur un «  qui fait quoi ? » : présenter le forum aux élèves de 3e en passant dans les classes, faire un sondage rapide sur les filières intéressantes pour eux, déterminer les lycées des environs qui forment à ces filières, contacter les lycées et des élèves de ces lycées, organiser le passage des demi-classes, prévenir les professeurs concernés, écrire une lettre de présentation de l’organisation pour les professeurs, les élèves et les familles, faire les chevalets des intervenants et des affiches à coller derrière eux
  3. Détail des coûts et délais : accord de Madame la Principale pour le goûter, les chevalets, des affiches de présentation et les photocopies ; délais précisés pour chaque étape
  4. Planification globale : sous la forme d’une flèche légendée ; il est souvent plus facile de commencer par la fin (rétro-planning), ici la date probable du forum

Est alors défini le programme de réalisation.

 

La troisième étape est la phase d’exécution : pendant les séances suivantes, nous donnons la parole à ceux qui ont avancé et nous demandons à la chef de projet de veiller au respect de la planification.

  1. Mise en place de l’organisation 
  2. Exécution du travail
  3. Pilotage
  4. Suivi coûts – délais – contraintes spécifiques
  5. Résolution de problèmes ; quatre problèmes apparaissent :
    • Pour une première organisation, il est préférable de ne pas se disperser et le forum va se limiter aux filières générales et technologiques. Elles concernent deux lycées des environs.
    • Se pose le problème des élèves concernés par les filières professionnelles. Les organisateurs décident que leur venue peut se faire sur la base du volontariat.
    • Peur d’une trop grande concentration d’élèves de 3e autour des intervenants de filière scientifique au détriment des autres filières. L’organisation est alors ajustée : plutôt que des conversations informelles autour d’une table, les organisateurs proposent que les intervenants fassent face aux élèves de 3e qui seront assis (une douzaine d’élève tous les quarts d’heure) et que ceux-ci leur posent des questions. A charge pour eux d’organiser la prise de parole en veillant à ce que chaque intervenant ait la parole.
    • Pour des raisons d’organisation interne, l’un des lycées ne peut plus envoyer d’élèves à la date prévue, celle-ci est repoussée au retour des vacances.

C’est la livraison du projet.

 

Et enfin la dernière étape, à ne pas oublier : la clôture du projet. C’est le temps du bilan : évaluer, archiver, capitaliser.

  1. Évaluer le projet ; faire un bilan avec l’équipe, les partenaires, les élèves
  2. Analyser les écarts entre planifié et réalisé
  3. Mémoriser les opérations passées ; prendre le temps d’archiver les différentes phases pour en garder une trace
  4. Réaffecter le personnel : veiller à ce que les élèves choisissent un autre atelier
  5. Décharger le chef de projet: ce qui se passe maintenant n’est plus de sa responsabilité
  6. Evaluer les élèves ; utiliser les éléments signifiants du document d’accompagnement du socle et les descripteurs du niveau 3, ici dans les domaines 2 et 3 :
  • Coopérer et réaliser des projets : définir et respecter une organisation et un partage des tâches dans le cadre d’un travail de groupe.
  • Maîtriser l’expression de sa sensibilité et de ses opinions, respecter celles des autres : Formuler une opinion, prendre de la distance avec celle-ci, la confronter à celle d’autrui et en discuter.
  • Faire preuve de responsabi­lité, respecter les règles de la vie collective, s’enga­ger et prendre des initiatives : Assumer des responsabilités et prendre des initiatives dans l’établisse­ment et/ou dans la classe. S’impliquer dans la mise en place d’un événement dans l’établissement.

Les élèves les plus impliqués sont en très bonne maitrise, les autres en maitrise satisfaisante.

  1. Proposer de préparer ensemble la soutenance orale du DNB concernant ce projet; à cette occasion, une carte mentale de tout ce qui a été nécessaire à la conduite de ce projet a été réalisée par et avec les élèves volontaires.

 

Ce projet a permis à des élèves peu motivés par l’apprentissage purement scolaire de montrer des capacités maintenant évaluées dans le cadre du socle commun. Le lâcher-prise dont ont fait preuve les deux professeurs est probablement le fruit d’une expérience que n’ont pas encore les jeunes collègues.

Il faut sans doute un peu de temps pour faire confiance à ce point aux élèves, savoir qu’ils vont apporter des idées, des solutions et que celles-ci seront les bonnes car venant d’eux.

[1] http://francois.muller.free.fr/manuel/projet/cadre.htm

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Blog 22 bis

Ceci est un complément à la page 83 de Anne-Marie Sanchez & Annie Di Martino, « Faire progresser tous les élèves », publié chez L’Harmattan.

Outiller l’élève

Ce texte a été rédigé à la suite de la lecture de Curricula et apprentissages au primaire et au secondaire, la pédagogie de l’intégration comme cadre de pensée et d’action[1]. Ce qui suit est donc du Roegiers dans la première partie et un écrit personnel seulement dans la deuxième.

Là, on rend à Xavier Roegiers ce qui lui appartient :

Il faut évidemment ENTRAINER l’élève, le placer dans des situations qui lui permettent de s’entraîner à la mobilisation de ses ressources.

Il faut aussi OUTILLER l’élève. Il s’agit de lui fournir des outils intellectuels : tout d’abord des outils « physiques » comme guides de ses actions. Puis par un désétayage plus ou moins progressif, l’amener du savoir-faire (imposé, technique, qu’il reproduit) à un savoir-être (c’est-à-dire à une utilisation spontanée et personnalisée de la démarche précédente).

Roegiers évoque un outillage sur trois plans : la compréhension, le choix d’une démarche de résolution, la validation de la production.

  1. La compréhension : vérifier le sens des mots, déterminer l’intérêt, l’enjeu du travail, identifier la tâche, anticiper la production, chercher les implicites comme les données parasites.
  2. Le choix de la démarche de résolution du problème : la balle est dans le camp de l’élève. Le professeur a régulièrement proposé, fait travailler des démarches différentes, rapides, fiables, efficaces, expertes pendant les différentes phases d’apprentissage des ressources. MAIS lors des moments d’intégration, c’est l’élève qui en choisit une, sans intervention du maître. Tant pis si elle n’est pas efficace ou pas rapide ou pas experte. A priori, elle correspond au mode de pensée et d’action de l’élève. A posteriori, elle sera un sujet de réflexion à la fin du travail. La difficulté pour l’enseignant ici, comme d’habitude, est de se taire : les profs parlent toujours trop !
  3. La validation de la production : c’est le moment de l’auto-évaluation. Qui peut se faire elle aussi à l’aide de la liste des critères fournie par l’enseignant mais qui doit devenir une évaluation spontanée et personnalisée.

 

Ceci est à rapprocher des travaux de Yinger[2] et Tochon sur les routines procédurales[3]. On vise l’automatisation de procédures par l’utilisation réitérée d’outils concrets. Ces outils ne sont pas seulement des fiches- méthodes, des rappels de procédures, des listes d’informations à suivre dans l’ordre, des grilles avec moult cases. Ce sont réellement des outils à manipuler, par exemple, pour une dissertation une feuille avec des cadres plus ou moins importants à remplir intitulés « introduction, développement, conclusion » et contenant à l’intérieur du cadre des informations de structure.

 

Vers l’autonomie

On va vers l’autonomie de l’élève, par exemple en déterminant des moments d’intégration pendant lesquels l’élève ne pourra pas utiliser ces outils. Après la production, le retour aux outils pourra être l’occasion d’une observation, d’une auto-évaluation de la qualité de la production et surtout de métacognition, d’un retour réflexif par l’élève qui déterminera s’il a intégré ou non la démarche.

On va vers l’autonomie de l’élève, par exemple en déterminant une date-butoir après laquelle l’élève ne pourra plus du tout utiliser les outils lors des moments d’intégration. Cela paraît indispensable lors des années d’examen, des phases de certification. Ce qui ne signifie pas que l’élève n’a plus à sa disposition les outils ; il peut s’y reporter seul, chez lui lors d’un travail personnel par exemple mais il n’est plus question qu’il s’en serve en classe pendant les phases d’intégration.

 

Exemples d’outils

Il nous semble que l’on peut créer un outil de routine à mettre à disposition des élèves lors des premières phases d’intégration. En voici une version, très inspirée également des travaux de Philippe Meirieu et de Jean- Michel Zakhartchouk sur les consignes :

 

Tâche à accomplir ……………………………………………………………………….

Avant le ………………………………………………. soit …………… heures ou jours.

Comprendre la tâche :

Les mots importants sont :

Les mots qui méritent que je recherche une explication sont :

Le mot Ce que j’ai utilisé pour comprendre le sens du mot (= quel outil ? Où ai-je cherché ?) Sa définition
     
     

En quoi ce travail, cette tâche est-elle intéressante ?

Ce qui n’est pas dit mais qui est important ?

Ce qui est dit et qui ne sert à rien ?

A quoi va ressembler mon travail quand j’aurai terminé ?

Choisir une démarche : (comment vais-je m’y prendre pour réussir ?)

Par quoi vais-je commencer ?

Par quoi vais-je finir ?

Quels outils (fiches, livres, manuels, répertoire, ouvrages documentaires, site internet …) me seraient vraiment utiles ? (Si j’ai le droit d’utiliser autre chose que ma tête)

Qui pourrait m’aider ? (Si j’ai le droit à une aide extérieure)

A quoi verrai-je que j’ai terminé ?

De quels objets ai-je besoin ? (Papier, feutres, post-it, ordinateur, affiche, photocopies …)

Sous quelle forme puis-je réfléchir ? (Brouillon, tableau, carte heuristique, schéma …)

Valider sa production :

Ai-je terminé ?

Ai-je fait ce que j’avais prévu de faire ?

Est-ce bien ce qui m’est demandé ?

Est-ce que je l’ai bien fait ? (Par exemple, c’est propre, complet, esthétique …)

Qu’est-ce qui me plait ?

Qu’est-ce que je regrette ?

Qu’est-ce que je pourrais améliorer si j’avais le temps ?

 

L’outil proposé ci-dessus est extrêmement généraliste et peut plus ou moins s’adapter à toutes les disciplines. Il faudrait probablement le doubler ou le compléter avec la liste des ressources disciplinaires à utiliser. Par exemple, en Histoire, les « acteurs – événements/dates – définitions/vocabulaire – documents » indispensables à réutiliser.

Déterminer les ressources disciplinaires à réutiliser :

Quelle discipline est concernée par la tâche à accomplir ? (Par exemple l’Histoire)

Quels sont les incontournables de cette discipline ? (Il faut situer dans le temps, citer ses sources etc.)

(Réflexion à mener autant de fois qu’il y a de disciplines concernées par la tâche complexe à accomplir)

Qu’est-ce que j’ai appris dans cette discipline que je choisis d’utiliser pour mener à bien mon travail ? (Titre de chapitre, de leçons, notions-clés …)

 

Cet outil amène à formuler quelques remarques.

Tout d’abord, il est long à utiliser, il y a beaucoup de pistes à suivre. L’enseignant doit prévoir une durée suffisante pour son utilisation, peut-être une heure entière la première fois que les élèves le découvrent.

D’autre part, en raison de sa longueur mais pas seulement, il est compliqué ; il faut donc envisager que le professeur guide les élèves dans son remplissage par exemple en lisant les consignes, éventuellement en les explicitant ou en les faisant reformuler. Une fois, peut-être deux fois. La troisième voire la quatrième fois, on pourrait imaginer que les élèves l’utilisent en groupes. En effet, il faut que les élèves intègrent l’outil d’intégration.

Si on utilise régulièrement cet outil d’intégration dès la 6e puis tout au long du collège, il semble que, dès la 4e, il doit être possible de le garder à porter de main, dans le portfolio ou le cahier, pour s’y reporter quand le besoin s’en fait sentir mais sans que ce soit systématique afin que, grâce à ce travail de routine procédurale, en 3e, l’élève n’en ait plus besoin. On peut aménager une phase intermédiaire avec un outil laconique qui ne montre plus que le titre des quatre parties : comprendre, choisir une démarche etc. Dès le milieu de la 5e pour les plus autonomes ? Ou en début de 4e pour les autres ? De toute façon, dès le deuxième semestre, il ne devrait plus avoir le droit de l’utiliser car on entre alors dans la phase de certification.

 

La dernière remarque sur l’outil a valeur de conclusion. Une fois cet outil créé, il faut tout de suite l’oublier, sa seule vertu est le moment de réflexion qu’il a permis. Il n’est pas question de créer une quelconque « méthode d’intégration ». Le lecteur a probablement remarqué que chaque partie de cet outil se termine par trois petits points. Etant donné que la démarche d’intégration est personnelle, l’idéal est que l’élève choisisse le plus souvent possible une option qui n’est pas proposée par l’enseignant !

 

Un exemple de routine

Il a été donné par Muriel Misplon[4] pour la dissertation en Seconde (merci d’imaginer que cet outil occupe la totalité d’une page voire d’une feuille). Cet outil n’est pas seulement un « modèle » de référence pour l’élève, il s’en sert physiquement en remplissant les cadres au fur et à mesure. Ensuite, il n’a plus qu’à recopier !

 

Introduction :

 

Sujet : ………………………………………………………………………. Problématique : ………………………………………………… ……………………………………Parties du plan : .……………………………………… , ……………………………………, …………………………………………………………………… ……………………. …

 

Développement :

 

Tout d’abord (ou autre connecteur), ………………………………………………………………………………. 

………………………………………………………………………………………………. 

Etc.

 

 

 

Ensuite (ou autre ), …………………….. etc.

 

 

 

 

 

Enfin (ou…), ……………………. Etc.

 

 

 

 

 

Conclusion :

Résumé rapide de ce qui précède ………….. Réponse à la problématique …………………..

Ouverture sur un autre aspect du sujet ……………………………………………….

 

[1] Xavier Roegiers, 2011, Curricula et apprentissages au primaire et au secondaire, la pédagogie de l’intégration comme cadre de pensée et d’action[1], De Boeck, pages 248 et suivantes.

[2] Yinger, Robert, (1979), Routines in teacher planning. Theory into practice. Ainsi que : Tochon F. (1993). L’enseignant(e) expert(e). Paris : Nathan. Non lus mais connus par des stages suivis par l’auteure.

[3] N.B. Cet article a été écrit juste avant la lecture de « Quand l’école prétend préparer à la vie : développer des compétences ou enseigner d’autres savoirs ? » de Philippe Perrenoud, ESF, 2011. Page 51, l’auteur évoque « une sorte de routinisation de la mise en synergie des ressources. Un peu plus loin, il estime qu’il faudrait y passer un tiers du temps scolaire.

[4] Collègue formatrice à la DAFPA de Versailles dans l’équipe « Pédagogies et apprentissages » avant de devenir I.E.N.

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Blog 22

Ceci est un complément à la page 56 de Anne-Marie Sanchez & Annie Di Martino, « Faire progresser tous les élèves », publié chez L’Harmattan. (Le 1er « blog 22 »!)

Quand on surveille un Gr.App., on peut être surpris par les remarques des élèves. Afin de les aider, le professeur écrit au tableau les matières au programme du jour ou affiche l’emploi du temps numérisé. En même temps, il demande : « qu’avez-vous appris ? » Souvent, les réponses sont sidérantes mais pas inattendues :

– Rien, on a fait des exercices

– On n’a rien appris car on a passé l’heure à faire une compréhension orale.

– On a corrigé la dictée/les exercices/ un travail/etc.

– on était sur les ordinateurs.

Sans soupir de désespoir, le professeur commente qu’un exercice sert à apprendre ou réviser une notion ; qu’en corrigeant tel ou tel travail, on peut avoir personnellement tout à coup réalisé quelque chose et donc appris ; qu’à propos de la compréhension orale, on pourrait au moins expliquer quel en était le sujet, quelques termes retenus. Pour l’instant, cela relève de l’incantation humaniste sans portée pédagogique. Pour faire bref, les élèves en écrivent à peine plus sur le cahier d’apprentissages.

Et pourtant, en classe, quand le professeur, d’histoire par exemple, demande en début de cours d’ouvrir le cahier des apprentissages et de résumer ce qu’on sait déjà sur tel chapitre, les élèves écrivent assez longuement. Voilà un paradoxe qui mériterait d’être étudié de manière plus approfondie.

Lors d’une séance de Gr.App. encadrée par l’auteure le 4 décembre 2015, avec des élèves de 4e, certains dans Neo Alta pour la deuxième, une « bonne » question a (enfin) été posée.

« Est-ce qu’on doit écrire ce qu’on a fait ou bien ce qu’on a appris ? »

Un petit débat « sauvage » s’est engagé entre quelques élèves duquel il ressort que travailler ou apprendre c’est pareil. Mais pas pour la même raison. Pour les uns il semble qu’ils ne font pas la différence entre les deux activités ; et pour les autres, en faisant, on apprend. L’heure avançant, le professeur a demandé d’écrire « ce qu’on ne savait pas avant ou dont on n’était pas sûr et que maintenant on sait, on en est plus certain. »

Si on se reporte aux extraits des cahiers d’apprentissage de Camille et Arthur, élèves de 5e, donc première année dans Neo Alta, on peut constater une évolution assez nette au cours de l’année entre « j’ai fait » et « j’ai appris ».      Cf les cahiers de Camille et d’Arthur dans le blog 21.

En Septembre, Camille n’a manifestement pas compris à quoi sert ce cahier. Elle l’oublie souvent probablement puisqu’on peut lire bien peu de dates dans la marge alors que la classe dispose d’un Gr.App hebdomadaire. En octobre, elle commence à raconter ce qu’elle a fait dans la journée. C’est en novembre qu’on voit apparaître quelque chose qu’elle a appris mais qui n’a rien de scolaire: sa camarade lui a montré comment dessiner un chien. A partir de fin novembre, enfin, elle commence l’inventaire de ce qu’elle a « retenu » des cours: des éléments de grammaire, le calme indispensable dans les vestiaires[1], le partage de l’empire de Charlemagne.

Arthur, après la même démarche que Camille lors de la première séance, dès la semaine suivante peut commencer à écrire ce qu’il sait. Dès la fin septembre, il repère ses difficultés « je ne sais pas nager avec la planche ». Une page de la deuxième moitié de l’année montre une très forte évolution. le garçon fait la liste des ressources qu’il a mémorisées du cours d’histoire. Pour la géométrie, il reproduit ou réinvente le schéma des angles d’un triangle rectangle.

Dans les deux cas, on constate que le cahier d’apprentissage est devenu un outil, un objet personnel: chaque élève y a mis des dessins, parfois des couleurs. Camille comme Arthur expriment leurs émotions. Ils écrivent avec des abréviations, aucun des deux ne tient vraiment son cahier avec soin. Ce cahier des apprentissages n’est pas destiné à être ramassé, lu, évalué. ainsi, ce que signifie le grand point d’interrogation rouge en regard des nombreuses ressources écrites par Arthur concernant l’art roman ? N’est-il pas certain d’avoir tout retrouvé ? Ne voit-il aucun intérêt à apprendre cette leçon ?

 

A la fin de l’année 2015, les 5e et 4e Neo Alta ont répondu à un sondage sur leurs méthodes de travail, notamment pour apprendre leurs leçons. Hélas, seuls deux élèves de 5e et une seule en 4e font référence au cahier d’apprentissage ! Faut-il en déduire que c’est un outil inefficace ? L’auteure fait deux autres hypothèses. Un Gr.App hebdomadaire, c’est trop peu pour que les élèves se saisissent d’une nouvelle manière de travailler. D’autre part, trop peu de collègues de la structure utilisent ce cahier en début de cours pour réactiver le cours précédent ou pour répondre à la « question du jour » ou encore pour faire relire un petit résumé que chacun aurait écrit en fin de l’heure d’avant. On voudrait faire passer le message qu’un cahier d’apprentissage ne sert à rien qu’on ne s’y prendrait pas autrement. A la décharge des collègues, faisons une troisième hypothèse. L’enquête menée auprès des élèves montre que pour apprendre les leçons ils s’accrochent à cette bonne vieille méthode du « je la lis » y compris les 4e dont la plupart ont déjà une année dans Neo Alta. Si la seule lecture suffisait pour apprendre, cela se saurait. Malgré les efforts en classe et en Gr.App de quelques collègues, il est très difficile apparemment de faire changer les pratiques des élèves. Cela se vérifie également des pratiques pédagogiques. Les collègues de Neo Alta sont volontaires, attentifs à leurs élèves, prêts à travailler en équipe ; cependant tous ne parviennent pas à transformer leurs pratiquer, à essayer autre chose, malgré les trois stages de formation continue qui ont accompagné la mise en place de cette expérimentation.

Est-ce pour autant qu’il faille abandonner les cahiers d’apprentissage ? Non. Voilà un outil peu coûteux, un ancien cahier auquel il reste des pages fait l’affaire, simple à utiliser pour les élèves, peu chronophage pour les enseignants. L’auteure a la certitude d’une réelle plus-value pédagogique, constatée dans ses cours. Pour que les élèves s’en emparent, il faut plus de temps. Sans doute également pour les collègues.

[1] Longue discussion des professeurs avec les classes. Ensuite il n’y avait plus le temps d’aller dans l’eau.

 

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