Le co-enseignement, quésaco ?

Conséquence des dédoublements de CP et de CE1 en Rep+, on oublie souvent que le co-enseignement se développe lui aussi. En effet, les communes, a fortiori urbaines, n’ont pas forcément les espaces nécessaires pour permettre d’aménager d’autres classes… Il en résulte du co-enseignement. Quésaco ?

co-enseignement

Deux enseignants interviennent dans la même classe qui n’est alors pas dédoublée, soit 24 à 28 élèves. Ils travaillent en même temps, dans la même classe en mutualisant les élèves et leurs moyens dans l’objectif de les faire progresser tous. En d’autres termes être au plus proche de tous les élèves – à besoins particuliers, en difficultés, à haut potentiel -. pour les faire tous évoluer avec un travail adapté et différencié.

Concrètement les modalités de mise en œuvre sont plurielles :

Les configurations sont plurielles. L’intérêt pédagogique paraît alléchant, toutefois co-enseigner ne va pas de soi. Enseigner est un métier solitaire : on a sa classe, ses élèves, ses pratiques, ses rapports aux élèves, aux familles et… ses habitudes ! (Si si ) Alors comment faire pour que le co-enseignement fonctionne ?

Cet écrit est seulement le fruit de mon expérience, à l’heure de mon troisième binôme en tant que co-enseignante. Voici les points que j’ai identifé.

  1. D’abord il faut savoir que cette nouvelle modalité n’est pas toujours choisie par l’enseignant, elle résulte d’une organisation d’école et peut-être imposée.
  2. Ensuite enseigner en binôme n’est pas forcément travailler moins : certes on peut avoir moins de matières à préparer (si l’on partage la préparation de certains domaines) mais il faut introduire dans notre métier un temps de concertation. En effet, pour que le co enseignement fonctionne, il faut se mettre d’accord sur tout ou presque : de l’aménagement de l’espace, au placement des élèves, du fonctionnement pédagogique à l’évaluation, de la communication envers les élèves et les parents. Bref, la concertation est primordiale, quotidienne et… chronophage !
  3. Travailler en binôme, c’est choisir une organisation pédagogique qui convienne aux deux enseignants : quelles modalités de travail à quels moments ? Suivre une méthode ? Laquelle ? Qui enseigne quoi ? Quand l’un est face aux élèves que fait le binôme en parallèle ? Comment aide-t-il ? Quel discours tient-on pour la cohérence pédagogique. Par exemple; pour introduire la notion de verbe en CP : l’identifier avec la forme négative (ne pas) ou l’identifier en cherchant l’action dans la phrase ? Enseigner sous forme d’ateliers, pourquoi pas… Mais pour quelles matières ? Quels rôle avons-nous alors à jouer ? Bref, co-enseigner c’est repenser toute sa pratique pédagogique.
  4. Le co-enseignement est aussi nouveau pour les parents : ils ont désormais deux interlocuteurs. Faut-il recevoir les parents à deux au risque de faire « bloc » ce qui n’est pas toujours pertinent ou plutôt en solo pour plus de proximité. Mais alors avec lequel des enseignants ?
  5. Co-enseigner c’est aussi se confronter à d’autres valeurs. On enseigne selon notre caractère, notre rapport aux autres, notre tolérance – aux bruits par exemple – selon notre perception des règles, des transgressions, du respect et des punitions. La valeur travail est aussi sous-jacente : est-on plutôt du genre à se satisfaire d’une méthode qui a fait ses preuves ou à chercher de nouvelles pédagogies, de nouvelles pratiques, à tester des choses… ?
  6. Co-enseigner c’est accepter d’être observé dans sa pratique. C’est une rupture avec le modèle de la « classe » et avec le modèle de « l’enseignant » qui détient le savoir (dépassé selon moi… mais pas pour tous !).

Pour conclure co-enseigner c’est accepter beaucoup de tâtonnements, cela nécessite de la bonne volonté, dans un contexte où les formations sur le co-enseignement en soi sont denrées rares – pour ne pas dire inexistantes. Il faut dire que l’institution aussi est confrontée à cette nouvelle pratique… Co-intervenir, c’est aussi accepter l’échec, comme les belles découvertes… la réussite de la classe ne dépend plus que de soi !

 

Une chronique de Sophie Dupré

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