La vie d’Henri à Champagne s/s

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Histoire d’une famille à Champagne sur Seine au début du XX° siècle

Je vais vous dépeindre avec simplicité la vie dans mon village de Champagne sur Seine, au travers d’une famille comme il y en avait tant d’autres dans le début des années 1900. Celle-ci était rude mais souvent basée sur l’entraide et le modèle des aînés dont le courage nous aidait à faire face à tous les aléas de ce temps d’un monde industriel et économique en pleine mutation. A l’époque, je travaillais à l’usine « Schneider » avec mon ami Momo.

Le matin, nous venions à l’usine en même temps (à 4 heures du matin) pour une dure journée de 12 heures. Nous faisions notre petite pause de 15 minutes au même moment, au réfectoire. Pour y aller, il fallait emprunter une ruelle sombre et étroite. Quand nous étions arrivés, nous mangions. Notre repas se composait d’un croûton de pain avec une portion maigre d’avoine que nous engloutissions rapidement. Après cela, nous retournions au travail jusqu’à la tombée de la nuit. Nous avions fait 12 heures de travail avec comme seule pause celle du repas. Au moment de partir, une personne nous donnait nos 1,50 francs. Nous n’avions qu’un jour de repos par semaine et pas de vacances.

Notre vie de famille  était rythmée par une usine toujours plus gourmande en main d’œuvre et en volume. Elle s’occupait de tout : notre logement, les écoles,les activités des enfants et des adultes. Nous vivions en quasi autarcie sans nous en rendre compte.

En 1914, j’aidai à construire des canons et des mortiers pour la guerre. L’usine eut un problème, celui du stockage,  il n’y avait plus assez de place pour contenir l’ensemble de la production. On dut combler les espaces entre les bâtiments en construisant des espaces de stockage supplémentaires, pour tous les matériaux.

En 1918, la guerre venait de se terminer. J’avais 29 ans et Momo 30 ans, nous avions changé de poste. Nous étions devenus des soudeurs. Ma mère venait d’avoir son quatrième enfant, Pierre. La vie à la maison n’était pas facile tous les jours et je préfère dire cela avec beaucoup de retenue. La bonne nouvelle était que nous avions eu un appartement en face du marché. Il était un petit peu plus grand. Six ans plus tard, mon père mourut d’un cancer des poumons car il travaillait dans le fer. Je le connaissais à peine, le temps passé à l’usine pour tous les deux m’en avait empêché.  Quelques années plus tard, l’usine n’avait plus de commande et elle dut fusionner avec d’autres entreprises , une période difficile commença. Plusieurs postes furent supprimés dont le mien.  Ma mère avait perdu le sien, six mois auparavant. Mais par chance, un employé partit à la retraite. Le lendemain, j’étais embauché dans le travail du fer à chaud. Le bon coté de ce temps de prospérité économique nous permettait de trouver du travail rapidement et de le garder, à condition  d’être courageux et vaillant.

Depuis le décès de mon père, j’étais devenu le nouveau pilier de la famille. Je prenais cette responsabilisé avec honneur. Quand je voyais leur sourire en rentrant, cela me suffisait et me redonnait du courage pour le lendemain. La nouvelle usine florissante m’avait permis de monter en grade et de  faire rentrer mon frère à qui j’apprenais sa nouvelle vie.

Quand je pense à cette période de mon existence rude et riche dans tous les domaines, beaucoup de sentiments se mêlent et ce avec un brin de nostalgie. En effet,  j’étais acteur et spectateur d’un village qui devenait une ville dynamique en pleine effervescente avec une industrie de pointe qui rayonnait dans tout le pays.

Luiggi   Milano,  Alexandre   Chevallier 4°A

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