Le loup et la cigogne

Les loups mangent gloutonnement.
Un loup donc étant de frairie,
Se pressa, dit-on, tellement
Qu’il en pensa perdre la vie.
Un os lui demeura bien avant au gosier.
De bonheur pour ce loup, qui ne pouvait crier,
Près de là passe une cigogne.
Il lui fait signe; elle accourt.
Voilà l’opératrice aussitôt en besogne.
Elle retira l’os; puis, pour un si bon tour,
Elle demanda son salaire.
«Votre salaire? dit le loup:
Vous riez, ma bonne commère!
Quoi! Ce n’est pas encor beaucoup
D’avoir de mon gosier retiré votre cou?
Allez, vous êtes une ingrate;
Ne tombez jamais sous ma patte.»

Le loup et la cigogne

Le lion et le rat

Il faut, autant qu’on peut, obliger tout le monde
On a souvent besoin d’un plus petit que soi.
De cette vérité deux fables feront foi,
Tant la chose en preuves abonde.
Entre les pattes d’un lion
Un rat sortit de terre assez à l’étourdie.
Le roi des animaux, en cette occasion,
Montra ce qu’il était et lui donna la vie .
Ce bienfait ne fut pas perdu.
Quelqu’un aurait-il jamais cru
Qu’un lion d’un rat eût affaire ?
Cependant il avint qu’au sortir des forêts
Ce lion fut pris dans des rets,
Dont ses rugissements ne le purent défaire.
Sire rat accourut, et fit tant par ses dents
Qu’une maille rongée emporta tout l’ouvrage.
Patience et longueur de temps
Font plus que force ni que rage.

Le lion et le rat

La grenouille qui voulait se faire aussi grosse qu’un boeuf

Une grenouille vit un boeuf
Qui lui sembla de belle taille.
Elle, qui n’était pas grosse en tout comme un oeuf,
Envieuse, s’étend, et s’enfle et se travaille,
Pour égaler l’animal en grosseur,
Disant: « Regardez bien, ma soeur;
Est-ce assez? dites-moi: n’y suis-je point encore?
Nenni- M’y voici donc? -Point du tout. M’y voilà?
-Vous n’en approchez point. »La chétive pécore
S’enfla si bien qu’elle creva.

Le monde est plein de gens qui ne sont pas plus sages.
Tout bourgeois veut bâtir comme les grands seigneurs ,
Tout prince a des ambassadeurs,
Tout marquis veut avoir des pages.

La grenouille qui voulait…