J’ai lu : Week-end mortel de jean-Paul Nozière

9 06 2021

Week-end mortel

Jean-Paul Nozière

Résumé : Irma Cole est invitée par sa meilleure amie, Angéline Cosma, à passer un week-end au Moulin du Bief, la maison de campagne d’un ami d’Angéline. Si au début Irma se montre très enthousiaste à cette idée, elle déchante rapidement : pour partir en week-end, elle doit mentir à ses parents, elle leur  dit qu’il n’y aura qu’elle et Angéline au moulin, alors qu’en réalité, trois autres garçons seront présents. De plus, tous les autres sont des gosses de riches, ce qui n’est pas le cas d’Irma… Mais, tout est déjà décidé et voilà qu’elle prend le train, direction le Moulin du Bief. Ce week-end, qui s’annonçait radieux ne se déroule pas comme prévu. En effet, Irma, quoique très impressionnée par le luxe environnant, perçoit très vite une atmosphère tendue entre les autres adolescents. Jean-Alain Ménétrier, le fils des propriétaires de la maison, passe son temps à l’humilier et semble avoir une emprise très forte sur les trois autres. L’ambiance malsaine qui pèse dans le Moulin du Bief laisse à penser qu’un secret lie les adolescents, un secret peu reluisant. Irma ne se sent pas à l’aise. Elle veut rentrer chez elle. Mais n’est-il pas déjà trop tard ?

Mon avis : ça fait un moment que ce livre est au CDI et j’avoue que la première de couverture ne m’attirait pas énormément. Mais bon, c’est la fin de l’année et je me suis dit, pourquoi ne pas tenter la lecture. Je n’ai pas été déçue du tout, bien au contraire. Franchement, l’écriture est fluide, limpide et l’auteur a su avec brio créer une atmosphère angoissante dans son roman de seulement 146 pages ! Le personnage d’Irma dénote totalement avec les autres. Il s’agit d’une fille réfléchie et responsable (quand elle ne ment pas à ses parents pour aller se détendre pendant un week-end), qui ne se laisse pas facilement impressionner par l’argent des autres. Elle connaît la valeur des choses. Sa meilleure amie, Angéline, paraissait être une fille intéressante au début du roman : garçon manqué qui s’habille toujours en noir, elle donnait l’impression d’être un peu rebelle sur les bords. Mais on final, on découvre au fil de l’histoire que c’est juste une façade, c’est une nunuche prête à tout pour plaire à Jean-Alan Ménétrier. ce dernier, que peut-on en dire, à part qu’il s’agit d’un fils à papa gâté pourri, auquel on passe tous les caprices. Il a une emprise malsaine sur Angéline, Alphonse et Luc, les deux autres personnages. Luc est du genre anxieux, il semble vouloir se rebeller, mais ne le fait jamais vraiment. Irma est attiré par lui, mais en même temps, la violence sous-jacente qu’elle perçoit en lui l’effraie un peu. Franchement, je ne pourrai vous dire qu’une chose : LISEZ-LE !

Extrait : « Alphonse se colla au grillage du court. Jean-Alain apparut dans l’allée. il tenait un radiocassette sur l’épaule et marchait du pas chaloupé des frimeurs. C’est du moins ce qu’estima Irma, mais son envie de rire s’étrangla quand elle découvrit la tension des autres. Ils suivaient l’approche du garçon sans prononcer un mot. Jean-Alain s’arrêta assez loin de la clôture.

_Tu joues avec moi ? Luc est fatigué. Irma le remplacera, annonça Angéline.

Elle ne manquait pas de culot. Luc ne contesta pas cette décision prise sans son accord. Jean-Alain sourit.

_Je vous entends brailler depuis la maison.

« Pas un vrai sourire, pensa Irma, une gesticulation des lèvres dissimulant sa colère ».

Alphonse s’empressa.

_Excuse-nous, on ne se rendait pas compte. Si tu remplaces Luc, le jeu sera plus équilibré et on criera moins.

Jean-Alain montra le tuyau d’arrosage.

_Et vous mettrez moins de flotte sur le court ? Je ne joue pas. Je vous regarderai, comme ça je comprendrai pourquoi vous beuglez comme des veaux à l’abattoir.

Les mots humiliants s’accompagnaient du sourire.

_Allez, joue avec moi ! insista Alphonse.

_Non, avec moi ! s’écria Angéline.

Le regarde de Jean-Alain passa de l’un à l’autre. Le sourire disparut. un soupir.

_Vous êtes sourds ? J’écoute de la musique, on verra après !

J’ai une cassette super, mets-là ! proposa Angéline.

Elle courut vers la chaise d’arbitre, fourragea dans son sac. Pendant ce temps, Luc ramassait les balles. Jean-Alain l’interpella.

_Eh Luc, il y en a trois dans l’herbe, dehors. c’est toi le pro qui confond tennis et badminton ?

Luc continua tranquillement à rassembler  les balles. Il attendit qu’Angéline revienne vers le groupe pour dire :

_J’en ai marre du tennis? Je ne joue plus.

_Du rap, annonça Angéline.

Jean-Alain s’approcha de la clôture et tendit la main à travers un trou du grillage.

Du rap ? La musique des banlieues ! Tu écoutes ces connards ? Tu trouves qu’ils ne nous font pas assez chier comme ça !

Les mâchoires du garçon se soudèrent l’une à l’autre. Les fossettes s’ouvrirent aussi profondément que s’il riait.

_Voilà ce que j’en fais de ta musique de singe !

Son bras décrivit une courbe. La cassette monta haut, passa par-dessus la haie de résineux et disparut de leur vue.

Plus un bruit, à part le roucoulement d’un pigeon qu’ils ne voyaient pas. le sourire de Jean-Alain était revenu. Son regard se posa sur leurs visages. L’un après l’autre. Longtemps. Il les défiait. Leur disait : « Râlez, je vous écoute. » Irma attendit son tour.

_Tu n’es qu’un sale con, dit-elle, sans hausser la voix. Je vais jusqu’à la ferme, ça me donnera l’occasion de respirer l’air pur.

_Je t’accompagne, annonça Luc.

Jean-Alain éclata de rire.

_Bonne idée ! Rapportez donc une douzaine d’œufs, au moins vous rendrez service. Irma, surveille Luc : il a un air de chien battu, mais ne t’y fie pas, c’est un dragueur ! »




J’ai lu : Le petit seigneur, d’Antonio Ferrara

8 06 2021

Le petit seigneur

Antonio Ferrara

Résumé : L’histoire se situe à Naples. Tonino est un jeune garçon de 13 ans qui vit avec ses parents et ses deux petites sœurs, Assunta et Titina. Il aurait pu être un adolescent comme les autres et mener une vie normale, s’il n’était pas un dealer confirmé. Chez Tonino, la drogue, c’est une affaire de famille. Ses petites sœurs remplissent les sachets et lui, il les vents toutes les nuits, aux habitants du quartier. Tonino a un rêve dont il n’a jamais osé parler à sa famille : il veut devenir journaliste. Pourtant, le chemin qu’il a emprunté l’éloigne de plus en plus de son rêve. A cause de ses nuits blanches, il ne peut pas aller à l’école. Son professeur d’italien tente tous les jours de le faire revenir en classe. C’est le seul à avoir les bons mots, le seul à croire vraiment en lui c’est un personnage extraordinaire qui a une si bonne influence sur Tonino. Le jeune garçon reprend espoir en son rêve, il retourne sur les bancs de l’école, il est si désireux d’apprendre. Cependant, un jour, le professeur d’italien est très en retard en cours. Il a visiblement eu un grave accident…

Mon avis : J’ai beaucoup aimé ce roman que j’ai lu en heure environ. Les chapitres sont très cours et s’enchaînent de façon très fluide, si bien qu’on en arrive au bout sans bien même s’en rendre compte. Le sujet n’est pas banal, je trouve. Alors, oui, beaucoup d’auteurs ont déjà abordé le thème de la drogue chez les adolescents, mais je n’avais pas encore lu de roman qui traite d’ados qui dealent pour sa famille. L’auteur, avec son style assez haché, voire sec par moment, décrit très bien les émotions de son protagoniste. Il aborde ce thème avec une certaine pudeur, sans toutefois omettre la violence que peut engendrer ce genre de milieu. Je ne vous en dis pas plus et je vous invite vraiment à vous plonger dans cette histoire, sans aucune retenue.

Extrait : « Dans certains quartiers de certaines villes, il est plus difficile d’être un enfant, plus difficile de grandir, plus facile de faire des erreurs. Dans certains quartiers de Naples, des enfants vivent la nuit, vendent de la drogue et ne vont jamais à l’école. Mais grâce à des hommes et à des femmes qui devinent ce que ces enfants et ces ados pourront devenir, la nuit n’est pas faite que pour ça. La nuit est faite aussi pour montrer son courage, son sens du sacrifice, sa détermination. La nuit est aussi faite de métiers honnêtes et courageux. »




J’ai lu : Deux roues de travers, de Jean-Christophe Tixier

6 01 2021

Deux roues de travers

Jean-Christophe Tixier

Résumé : Eva rêve d’être comme toutes les autres adolescentes ; malheureusement pour elle, elle n’a jamais pu marcher et passe sa vie dans un fauteuil. A cause de cela, sa mère la surprotège et l’étouffe. C’est pourquoi, quand Mika, son grand-frère de 20 ans, l’emmène en vacances à Hendaye, elle est heureuse comme jamais. C’est enfin la liberté ! En plus, elle adore son grand-frère, car il est le seul à ne pas la regarder comme une handicapée et à comprendre son besoin d’autonomie et d’indépendance. Eva se fait une joie de ce voyage. Pourtant, quand Mika vient la chercher, elle se rend bien compte qu’il y a un problème. Il paraît plus soucieux et secret que d’habitude. D’où vient cette décapotable qu’il conduit ? Comment se l’est-il procurée ? Et puis, c’est quoi cette obstination à vouloir exhiber le fauteuil roulant de sa sœur sur le siège arrière, alors qu’il pourrait très bien le ranger dans le coffre ? Eva se pose mille et une questions auxquelles Mika n’est pas enclin à répondre. Elle se rendra vite compte que ce voyage synonyme de liberté qu’elle attendait tant se transformera en un cauchemar angoissant.

Mon avis : Petit ouvrage certes, mais intrigue bien menée. L’histoire se déroule à travers les yeux d’Eva. L’auteur dépeint bien ses émotions, ses peurs, son besoin d’émancipation. Eva est en fauteuil roulant oui, mais elle a surtout beaucoup de caractère. Elle ne veut pas de la pitié des autres, elle ne veut pas obtenir de privilège à cause de son handicap, elle veut vivre comme tout le monde. Même si elle est consciente de tout ce qu’elle doit à sa mère, elle ne supporte plus que cette dernière décide de tout à sa place et la considère comme une petite fille fragile. L’aventure haletante qu’elle vivra avec son frère à Hendaye lui montrera que même si elle est forte, elle a aussi besoin des autres et que l’aide qu’ils peuvent lui apporter n’est pas toujours synonyme de pitié. Je vous invite vraiment à lire cette ouvrage qui traite du thème du handicap d’une façon assez originale et qui propose une intrigue prenante. Je l’ai lu en un pu moins de deux heures, tant je me suis laissée prendre par le flot du suspense. je voulais à tout prix savoir ce qui allait arriver aux personnages. Pour ceux qui ont peur des gros livres, ce petit roman d’une centaine de pages est fait pour vous !

Extrait : « _ça va ? interrogea Eva alors que son frère vidait un des sacs pour en vérifier le contenu. A ces mots, Michael suspendit son geste.

_Pourquoi tu me demandes ça ? s’étonna-t-il en la fixant dans les yeux.

Eva sentit une légère pointe d’agacement dans sa question.

_Je voulais m’assurer que tu tiendrais mon rythme, plaisanta-t-elle pour se redonner un peu de contenance. Le visage de son frère aussitôt se détendit et s’illumina d’un sourire.

_Plus endurant que moi, tu meurs, plaisanta-t-il à son tour. En fin de semaine prochaine, tu imploreras ma pitié et tu ne rêveras que d’une seule chose, retrouver ta mère.

_Il n’y a pas de risque, grogna Eva en accompagnant sa remarque d’une grimace.

_Tu es dure avec elle, tempéra son frère. Elle ne le mérite pas.2

_Et si on s’occupait de mes affaires ? se déroba Eva, qui refusait d’entrer dans un débat sans fin. J’ai décidé que cette semaine à Hendaye serait la plus belle de ma vie, lança-t-elle dans une effusion de joie.

_Ce ne sont que des vacances, rétorqua Michael en évitant son regard.

Elle sentit que quelque chose le préoccupait. Quelque chose d’intense, de grave, qui fit glisser une ombre dans ses yeux. Elle se remémora ses paroles sur la terrasse, juste avant le repas. « Si je vous dis que dans huit jours tout sera réglé, vous pouvez me croire. » Ce n’était pas tant les mots qui avaient surpris Eva, que le ton employé. Un mélange d’impatience et d’anxiété. Comme si son frère appréhendait un péril imminent. Alors que Michael sortait un à un les vêtements du premier sac, Eva détailla les traits de son visage. Que lui cachait-il ? »




J’ai lu : Ippon, de Jean-Hugues Oppel

5 01 2021

Ippon

Jean-Hugues Oppel

Résumé : Sébastien espère passer une bonne soirée, il a tout prévu : de sortie chez des amis, ses parents l’ont laissé avec Justine, une étudiante qui l’aide à faire ses devoirs. Ah Justine, si belle… Sébastien aimerait bien lui plaire, mais il n’a que treize ans… La soirée se déroulait bien, il s’était arrangé avec la jeune fille pour ne pas faire ses devoirs et lui permettre à elle, de travailler de son côté. Tout était prévu pour qu’après le match de foot à la télé, elle vienne le border dans son lit. Mais, rien ne se passe comme prévu. Alors que Justine doit lui ramener un verre d’eau pour qu’il prenne ses médicaments, elle ne vient pas. Que se passe-t-il ? Sébastien s’inquiète. Et s’ils n’étaient pas seuls dans la maison…

Mon avis : En commençant ma lecture, je n’ai pas du tout accroché avec le style d’écriture de l’auteur. Une écriture hachée, comme coupée au couteau, dure, brute de décoffrage. Il a planté un décor glauque, sale, dans lequel on n’a vraiment pas envie de traîner les pieds. Mais, au fur et à mesure de ma progression dans l’histoire, ce style haché est devenu approprié parce qu’il a donné une cadence, un rythme haletant à l’intrigue. Sébastien se retrouve nez à nez avec un intrus dans sa maison et il doit se débrouiller pour rester en vie. L’histoire rappelle un peu celle de « Un tueur à ma porte » d’Irina Drozd, mais elle est plus noire, plus intense. C’est un petit roman de 83 pages, pour les petits lecteurs. Je vous invite à le lire, il n’est pas mal.

Extrait : « A 23 : 34, il n’en peut plus et se lève. Sort de son lit et s’habille sommairement, pantalon et polo. Il enfile ses chaussons, des mules en velours côtelé à semelle élastomère, modèle économique en vente dans les supermarchés. il en use une demi-douzaine de paires durant l’année. Ne peut pas souffrir les pantoufles, ça tient trop chaud et ça conserve les odeurs.

Il quitte sa chambre. S’arrête un instant dans le couloir et écoute.

Rien.

Pas même un murmure de voix étouffée, ou les roucoulades que pousse Justine chaque fois qu’elle parle à son chéri au téléphone. Sébastien descend l’escalier, un peu alarmé. il lui est arrivé quelque chose, un malaise, elle est tombée dans les pommes, ce n’est pas possible autrement. Ou elle se cache pour le taquine. Hypothèse saugrenue, l’étudiante a passé l’âge de se livrer à ces jeux puérils. Sébastien atteint le niveau du salon. De l’autre côté, un peu de lumière se reflète dans les carreaux dépolis de la porte vitrée entrouverte. Elle vient de la cuisine, située en retrait. Silence total dans la maison. Sébastien n’ose pas appeler, les mots restent bloqués dans sa bouche. il se sent stupide. Très enfant tout à coup. Trop. C’est ridicule. La semaine dernière encore, au club, il ratatinait son copain Fernand qui est pourtant plus vieux que lui, et ceinture marron. Bientôt ceinture noire, même. Le salon est éclairé, touts les appliques halogènes accrochées aux murs sont allumées. Les affaires de Justine n’ont pas bougé du canapé, devant la télévision éteinte ; il peut les apercevoir d’où il se tient. Sa veste en jean et son sac à main sont pendus au dossier d’un gros fauteuil occupant un coin de la vaste pièce.

Difficile d’imaginer décor moins effrayant. Mis à part le silence anormal. »




J’ai lu : Cherub Mission 01 : 100 jours en enfer, de Robert Muchamore

23 11 2020

Cherub Mission 01 : 100 jours en enfer

Robert Muchamore

Résumé : James Choke est un garçon un peu mal dans sa peau. Sa mère, obèse et alcoolique, vit de revente d’objets volés. Elle a eu un autre enfant avec Ron, une fille, Lauren, que James adore. Mais Ron est un moins que rien, qui passe son temps à soutirer de l’argent à sa mère. Concernant la scolarité de James, ce n’est guère brillant : l’école l’ennuie. Suite à un accrochage avec une peste de sa classe, il se fait exclure. Voilà sa vie, une vie médiocre dont il ne sait que faire. A la mort de sa mère, il se retrouve dans un orphelinat minable, le Centre Nebraska, dans lequel il ne tarde pas à se lier d’amitié avec les mauvaises personnes. Il tombe dans la délinquance. Heureusement, il est recruté par CHERUB, une organisation qui vise à former des espions. Mais pas n’importe lesquels : ce sont tous des enfants et des adolescents. Afin de devenir un espion de premier ordre et rejoindre les rangs de CHERUB, il va devoir suivre un entraînement infernal de 100 jours, entrainement durant lequel ses nerfs et son corps seront mis à rude épreuve. James parviendra-t-il à le suivre jusqu’au bout ? Et Lauren qui a été vivre chez son père Ron, pourra-t-il la retrouver ?

Mon avis : J’ai eu un peu de mal à entrer dans l’histoire, parce que franchement, bien que le récit soit fluide et l’intrigue haletante, ça reste un peu tiré par les cheveux pour moi. James a 11 ans et la plupart de ses « collègues » aussi. Pourtant, quand on lit le récit de l’entraînement qu’ils doivent subir, leurs aptitudes et même certaines de leurs réactions, on a l’impression de faire face à des adultes. C’est déconcertant et peu crédible parfois. Si James avait eu 15 ans, ça serait mieux passé. Mis à part ça, c’est un roman qui se lit facilement, l’histoire est prenante et on a envie de lire les autres tomes, évidemment. Alors, n’hésitez pas à l’emprunter, il vous attend au CDI !

Extrait : « James pénétra dans une pièce dont les murs, à l’exception de deux hautes fenêtres et d’une cheminée, étaient entièrement recouverts de livres reliés de cuir. Un homme au crâne dégarni, grand et mince, d’une soixantaine d’années, se leva de son bureau pour lui serrer la main avec énergie.

_Bienvenue au campus de CHERUB, James. Je suis le docteur McAfferty, directeur de cet établissement. Mais tout le monde m’appelle Mac. Assieds-toi, s’il te plaît.

James tira l’une des chaises placées devant le bureau.

_Non, pas ici. installons-nous près de la cheminée. Nous avons beaucoup de choses à nous dire. Ils s’installèrent dans de profonds fauteuils de cuir. James ne s’attendait pas à un tel traitement. Il se demandait si son hôte n’allait pas lui poser une couverture sur les genoux et lui offrir une tasse de thé.

_Je sais que ça peut paraître dingue, mais je vous avoue que je n’ai pas la moindre idée de la façon dont je suis arrivé ici.

Mac sourit.

_La personne qui t’a conduit jusqu’à nous t’a administré une piqûre sédative pour t’aider à dormir. C’était plutôt agréable, non ? Je suppose que tu ne ressens aucun effet secondaire.« 




J’ai lu : Je suis un Hikikomori, de Florence Aubry

15 09 2020

Je suis un Hikikomori

Florence Aubry

Résumé : Hugo, un ado de 16 ans et sa mère, ont déménagé. Ils habitent maintenant à Paris. Le jeune garçon souffre de ce changement, car il perd ses repères et tous ses amis. Dans son nouveau collège, il n’arrive pas à nouer de liens avec ses camarades. Il se sent seul et abandonné. Sa mère, elle-même assez instable, ne lui est pas d’un grand secours. Son père, il ne le voit plus depuis des années, depuis que ses parents se sont séparés. Hugo se sent désemparé par la solitude, rejeté par tout le monde, abandonné par la société. Pourtant, tout change quand Jules, un nouvel élève, arrive dans sa classe. Ils se rapprochent, deviennent amis. Mais, Hugo, épris de reconnaissance commet l’irréparable et perd l’amitié de Jules. Il sombre alors dans une profonde dépression et se cloître dans sa chambre. il se coupe de toute relation sociale, même avec sa mère. Sa vie est rythmée par son ordinateur, son lit, sa télévision et la fenêtre de sa chambre qu’il n’ouvre même pas. Comment va-t-il se sortir du gouffre dans lequel il s’est jeté ?

Mon avis : Ce roman se lit très rapidement, il ne possède que 155 pages. Il traite d’un sujet de société, les hikikomori, qu’on retrouve souvent au Japon et traduit le mal-être des adolescents, qui se coupent d’une société dans laquelle ils ne se retrouvent plus et qui les opprime. Le ton employé par l’auteure est sec, détaché et l’histoire s’articule entre des flashbacks qui relatent comment Hugo en est arrivé à se couper du monde et des passages au présent, qui traduisent le mal-être profond que vit le personnage. J’ai apprécié ce livre parce qu’on y entre tout de suite, on veut comprendre, savoir pourquoi le personnage agit de la sorte. On veut savoir ce qu’il s’est réellement passé, on veut savoir s’il réussira à s’en sortir. On se rend compte, au fil de la lecture, que la mère d’Hugo, qui devrait le soutenir, ne l’aide pas vraiment. Oui, elle s’inquiète pour lui quand elle se rend compte qu’il y a un problème, mais elle agit comme une adolescente, elle ne prend rien au sérieux, elle s’enflamme pour des projets qu’elle ne mène pas à terme et au final, c’est Hugo qui s’inquiète pour elle, qui s’inquiète pour eux et pour leur avenir. C’est un roman bien mené, sans fioritures et qui vaut la peine d’être lu. Je vous le recommande.

Extrait : « Il s’était très vite trouvé dans l’obligation de revoir à la baisse ses ambitions en matière de vie sociale. Il s’était bientôt contenté de ce qu’il avait : des camarades, auquel il se joignait quand ils étaient en groupe, qui ignoraient la plupart du temps sa présence mais qui ne le repoussaient pas, dont il arrivait, avec beaucoup d’effort à capter ponctuellement l’attention par une histoire cochonne bien sentie qu’il avait dénichée sur internet ou entendue à la radio.Il aurait pu s’en contenter, il y en a tellement qui s’en contentent ! Des isolés. Des qui marchent dans la cour seuls, à chaque récré. Il y en a parmi eux qui s’étaient fait une raison, en attendant de plus jolis jours !

Lui, non.

Lui souffrait. Lui perdait ses repères tout doucement. Lui ne cessait de mesurer, de comparer, de se souvenir. Il avait besoin d’être entouré, il avait besoin de partager et de briller un peu, quelquefois. D’être quelqu’un. Que chacun soit capable de prononcer son nom sans l’écorcher, comme à l’école primaire. De quoi ça pouvait bien venir, ça n’était quand même pas l’histoire d’avoir grandi à la ville et d’avoir grandi à la campagne ? ça devait venir d’autre chose ? Un handicap qu’il aurait en lui, et qui se serait révélé tardivement.

Surtout, il avait peur que ça continue, il était terrorisé de laisser cet état de fait s’installer et de se retrouver le même dans dix ans. Sans amis. A s’épuiser à rechercher des trucs pour se faire aimer. »




J’ai lu : Version Beta, de Rachel Cohn

17 01 2019

Version Beta

Rachel Cohn

Résumé : L’histoire se situe sur l’île de Desmene, une île paradisiaque où tout est fait pour rendre la vie la plus belle possible aux habitants les plus fortunés. Et pour servir ces habitants, les plus grands scientifiques, comme le Dr Lusardi, ont développé le clonage. Elysia, est l’une d’entre eux, mais elle est particulière : elle fait partie des tous premiers clones adolescents. Elle est née à 16 ans, c’est une version BETA, un prototype. Elle est parfaite, comme doit l’être tout ce qui vit sur Desmene. Elle est achetée par Mme Bratton, la femme du Gouverneur de Desmene et est exposée comme un trophée de grand luxe. Elysia a été conçue pour servir, elle ne doit ressentir aucune émotion, rester insensible. Après tout, elle n’a pas d’âme, ce n’est qu’un clone. Mais, petit à petit, elle réalisera qu’il y a un problème : elle est défaillante. Elle ressent des choses qu’elle ne devrait pas ressentir. Pire, elle a des souvenirs de son originale… Si jamais les humains s’en aperçoivent, elle risque sa vie.

Mon avis : En voyant la couverture rose bonbon et irisée du livre, j’aurais dû me douter que je ne l’aimerais pas… Mais bon, le résumé était accrocheur, je me suis laissée tenter et bien entendu, j’ai été déçue. Je n’ai pas du tout aimé le personnage d’Elysia. En fait je n’ai aimé aucun personnage… Elysia est décrite comme étant parfaite, physiquement en tout cas. Du coup, toutes les trois pages, l’auteure en rajoute des couches : ses beaux cheveux soyeux, sa peau veloutée, ses yeux merveilleux… au bout d’un moment, ça devient lassant ! Il en est de même pour tous les personnages qui tiennent un rôle important, comme Tahir ou encore Alexander. L’intrigue en elle-même aurait pu être intéressante, avec la révolte des clones, l’insurrection, la quête de liberté, mais malheureusement, je trouve que les personnages ne suivent pas, particulièrement Elysia qui parfois, fait des choix complètement stupides ou incohérents ! Bref… j’ai détesté ! J’ai de loin préféré Félicidad de Jean Molla, ou encore Genesis Alpha de Rune Michaels, qui traitent eux aussi du thème du clonage.

Extrait : « A en croire le Dr Lusardi, je suis la plus réussie des versions BETA, adolescents et adultes confondus. Mon physique personnifie le mode de vie sur Desmene, et c’est ce qu’on attend des clones. Ma brochure holographique indique que j’ai des mensurations de « top model ». Mes membres fuselés laissent penser que mon Originale était athlète ou danseuse. Le Dr Lusardi me trouve « délicieuse ». Je peux me vanter d’avoir une superbe chevelure miel, un teint éclatant et hâlé. La partie la plus délicate de sa création, selon le savant, à savoir mes yeux, est à la hauteur de ses attentes : des pastilles d’un fuchsia éclatant, des paupières en forme d’amande et d’épais cils bruns, conçus pour souligner la docilité — et éviter d’effrayer les futurs propriétaires. De loin les prunelles lumineuses des clones sont censées attirer les humains, tout en leur procurant une sensation de sécurité. De près, elles semblent vides. Pour cette raison, les hommes évitent, le plus souvent, de plonger leurs yeux dans les nôtres : les regards sans âme tendent à effrayer ceux qui en ont une.

_ Tu vas devenir une compagne, alors, remarque Becky. C’est formidable pour toi.

Mon cœur se serre soudain, comme si j’allais regretter cette autre version BETA. Je connais la vraie cause de cette réaction: mon interface a été programmée pour imiter les sentiments humains. Je suis incapable, en réalité, de souffrir de cette séparation. Nous n’éprouvons rien l’une pour l’autre. Nous n’en avons pas besoin. Je ne sais d’ailleurs pas pourquoi j’ai aussi un creux au ventre, à la perspective de cet éloignement. J’ai tant à apprendre sur cette île, sur le fonctionnement de mon corps… Mon existence est si récente !

_Tu viens juste d’arriver sur le marché, ajoute Becky. La vente a été rapide, félicitations.

_ Une fois installée dans mon nouveau foyer, je pourrais me renseigner sur la possibilité d’une place pour toi…

Feignant de m’être reconnaissante d’une promesse que je serai, nous le savons toutes les deux, sans doute incapable de tenir, Becky me répond :

_ Merci. Le poste que j’occupe ici m’apporte pleine satisfaction, de toute façon. »




J’ai lu : La voie de Tina, d’Ada Ruata

17 01 2019

La voie de Tina

Ada Ruata

Résumé : Tina est une jeune collégienne qui vit avec sa mère dans la loge de concierge d’un immeuble. Elles ne roulent pas sur l’or, toutes les deux, mais elles vivent bien tout de même, même si parfois Tina a un peu honte de leur situation. La jeune fille est fascinée par la Dame du sixième étage, une comédienne. Cette femme, la Dame Bleue, Léa, représente tout un univers pour Tina. Elle l’idéalise et voudrait lui plaire, l’impressionner. Elles ont souvent de grandes discussions sur la vie, la liberté, son amitié avec Orianne, et aussi Modibo, ce garçon sans-papier dans sa classe. Modibo qu’elle aime bien… Elle lui parle aussi de sa passion, le chant. Elle lui ouvre totalement son cœur. Une amitié solide et indéfectible naît alors entre elles.

Mon avis : J’ai lu cet ouvrage en une journée. Quelle bouffée d’air pur. Cette auteure que je ne connaissais pas jusqu’à maintenant, dispose d’une plume émouvante. Elle traduit si bien les émotions, aussi bien la joie que la tristesse, d’une façon si profonde et si juste qu’on se sent bouleversé. Vraiment, c’est de la poésie à l’état pur. Je n’ai pas connu beaucoup d’auteurs qui ont réellement ce talent, d’autant plus qu’il ne s’agit pas du tout d’un roman d’aventure, d’une histoire prenante à rebondissement. Non. Il s’agit simplement de la vie, voilà tout et de ce que l’on peut ressentir lorsqu’on a treize ans et qu’on est soi-même incapable de mettre des mots sur ses émotions. Vraiment, je ne regrette pas d’avoir dévoré cet ouvrage qui nous montre que la vie est belle, malgré les moments parfois douloureux et les incompréhensions. A lire sans modération.

Extrait : « Je décidai de commencer par la fin. Pour le moment, je ne me sentais pas capable de faire résonner ma voix dans cet espace si peu familier. Cela dura. A la fin, j’allai vers le piano, je l’ouvris et je fis résonner quelques notes isolées. La, do, fa. Je sentais un nœud dans ma gorge, puis d’un coup, comme on se jette à l’eau en se pinçant le nez, je fis surgir ma voix. La, do, fa. La, do, fa, sol, si ré. Je travaillai ainsi pendant un long moment avant de me lancer dans le premier morceau. Lorsque je commençai à chanter les premières notes de la mélodie, ma voix n’était pas très ferme et je ne pouvais m’empêcher de jeter des coups d’œil furtifs vers la porte. Mais, dès la seconde répétition, j’oubliai tout ce qui m’entourait, prise entièrement par la musique, les sons que je sentais vibrer dans ma poitrine, monter dans mon larynx. Je retrouvai, seule, les sensations que j’avais connues l’année précédente lorsque je m’étais mise à chanter dans la chorale. Elles étaient même plus fortes, le son allait plus profondément en moi, y dissolvait quelque chose. Lorsque je me tus, j’éprouvai un grand bien-être. Je me sentais à la fois aérienne et dense, comme ces gâteaux que savait si bien faire ma grand-mère. Je restai silencieuse quelques minutes, les yeux clos. Puis je refermai mes cahiers, la porte, et j’allai remettre la clé à la concierge. J’avais dû passer un très long moment dans la salle de musique, car elle n’était plus derrière son comptoir. Je me penchai et je glissai la clé près du téléphone, l’étiquette Musique tournée vers le haut, bien en vue. »

 




J’ai lu : Les regards des autres, d’Ahmed Kalouaz

8 11 2018

Les regards des autres

Ahmed Kalouaz

Résumé : Laure vit des moments difficiles au collège. Elle est victime de harcèlement, victime de la bande d’Emilie, cette fille qui la tourmente depuis son entrée en 6ème. Mais Laure se tait, elle se mure dans le silence. Après tout, elle n’est pas la seule à souffrir. Il y a aussi ce garçon en surpoids que les autres appellent « le sumo », ou encore Kenz, le syrien, qui vient d’arriver en France et ne parle pas très bien le français, ou encore ce petit haïtien adopté, dont la couleur de peau dérange… Laure trouve qu’elle ne devrait pas se plaindre, car eux, souffrent plus qu’elle. Pourtant, elle ne peut se débarrasser de l’angoisse qui la ronge de l’intérieur, elle ne peut nier cette envie de fuir qui la taraude, qui l’empêche de dormir. Elle n’arrive pas à en parler, elle a peur, car elle sait que si elle « balance », elle s’en mordra les doigts.

Mon avis : J’ai déjà lu plusieurs livres qui traitent du harcèlement en milieu scolaire et je dois dire que j’ai été frappée par celui-ci. Vraiment, les mots de l’auteur sonnent si juste. On se met aisément à la place de Laure, le personnage principal. Elle exprime tout en douceur l’horreur qu’elle vit chaque jour, à travers des monologues poignants de vérité. Ce que j’ai apprécié aussi, ce sont les discussions qu’elle a avec Léo, un harceleur d’une bande qui s’est donné le non de « Red Army », dans lesquelles le jeune homme exprime, avec une déconcertante franchise pourquoi il prend part à ce déchaînement de violence. Je dois avouer que ça m’a interpellée. Je me suis souvent demandé pourquoi les harceleurs faisaient ce qu’ils faisaient. Et là, la cruelle vérité m’a éclaté au visage : « J’aime bien cette impression d’être du côté des forts. De régner sur les autres, c’est tout ». Alors, si c’est vraiment le cas, qui est vraiment vulnérable, le harcelé qui subit des brimades tous les jours, ou le harceleur qui a besoin d’être entouré par d’autres pour sentir qu’il existe vraiment ? Laure parle aussi du regard des adultes. Elle ne se sent pas entourée, ni protégée par les enseignants ou la communauté éducative. Elle a l’impression que les adultes détournent le regard, ne savent pas comment faire, ce qui entraîne un sentiment d’impunité pour les harceleurs. Je pense vraiment qu’il faudrait que chacun, enfants comme adultes, ouvrent les yeux pour lutter contre ce fléau qui pullule dans nos établissements scolaires.

Extrait : « Dernièrement, j’ai appris par hasard que Léo, un copain de classe de l’an dernier, se trouve dans un de ces groupes de harceleurs. Quand je lui ai demandé ce qui l’animait, il m’a répondu qu’il était persuadé de ne rien faire de mal.

_J’aime bien cette impression d’être du côté des plus forts. De régner sur les autres, c’est tout.

_Et tu n’as jamais de remords ?

_ Non. Hier on a coincé l’Africain, le con, il a voulu se défendre.

_Quel Africain ?

_ Celui qui s’appelle Kenia, un truc comme ça…

_ Tu parles de Kenz ? C’est un Syrien, pas un Africain.

_ Peut-être. C’est pareil, bon, il est pas d’ici. Et d’abord, pourquoi j’aurais des remords? Mes parents sont sur mos dos et me gonflent à longueur de temps. Moi, ça me fait du bien de brimer les autres. Il dit aussi que persécuter les plus vulnérables décuple sa confiance en lui, et qu’il n’a pas l’impression, le soir, de souffrir seul dans son lit comme avant. Lorsqu’il veut bien parler avec moi, il le fait calmement, sans avoir l’impression de mal agir. »




J’ai lu : Traces, de Florence Hinckel

12 10 2018

Traces

Florence Hinckel

Résumé : Thomas Codislo, 13 ans, vit un véritable cauchemar. Le nouveau logiciel de détection des crimes, Traces, a prédit qu’il commettrait un meurtre, le 13 août, à 15 heures. Thomas tombe des nues, quand la police vient l’interpeller chez lui, devant tout le monde. Heureusement, il peut s’enfuir. Sa cavale commence alors. Entre les détracteurs de Traces qui croient en l’innocence du jeune garçon et le Préfet de police qui ne veut pas perdre la face, Thomas aura fort à faire pour prouver son innocence. Y parviendra-t-il ?

Mon avis : Pour ceux qui ont vu le film Minority Report, ils ne seront pas du tout impressionnés par ce roman. C’est exactement le même principe. Un système prédit les délits avant qu’ils ne se produise et ce, pour faire diminuer la criminalité. Un personnage accusé à tort est traqué à travers toute la ville (connectée de partout, bien évidemment, sinon ce n’est pas drôle) et doit prouver son innocence. Voilà. Du coup, rien d’original. Néanmoins, l’histoire est prenante, le suspense, bien présent. L’auteure fait référence à des organismes français bien connus (CNIL, Médiapart, Anonymous…) et donne un caractère réel à sa fiction. Alors franchement, cet ouvrage ne changera sans doute pas votre vie, mais vous ne vous ennuierez pas en le lisant.

Extrait : « C’est alors qu’une agitation inhabituelle se manifeste dans la cage d’escalier. Est-ce encore le couple du troisième étage qui se dispute ? Lorsque cela arrive, ma mère entrouvre la porte de l’appartement, tout en chuchotant :

_Si ça dégénère, je cours protéger le petit Léo.

Léo est le fils de ces voisins agités. Il a quatre ans, une bouille d’ange, un sourire à tomber raide… sauf quand il pleure, bien sûr, la plupart du temps à cause de ces disputes parentales.

Ma mère est au boulot et je suis seul dans l’appartement. C’est mon devoir de m’assurer que Léo va bien. Mais il ne s’agit pas du tout des parents de Léo. J’entends d’autres voix inconnues, sèches et autoritaires. Puis celle de monsieur Foch, le voisin du premier, le type le plus râleur et le plus avide des commérages de la cité, qui leur répond :

_Thomas Codislo ? Oui, il habite au deuxième. Il a fait une connerie ? Les jeunes, de nos jours, tous des délinquants ! Oui, par là, porte 203.

Mon sang se glace dans mes veines. Thomas Codislo, c’est moi ! Et… des flics me recherchent ? POURQUOI ? Je fouille dans mes souvenirs récents. Avec les copains, quand on s’ennuie dans la cité, il arrive qu’on fasse une bêtise ou deux… mais jamais rien de très grave. Rien qui nécessite qu’on vienne me cueillir chez moi comme ça. Peut-être que c’est juste pour que je témoigne à cause d’un pote qui aurait dérapé ? Si ça se trouve, c’est Steven. Je dois toujours lui conseiller de s’arrête avant qu’il n’aille trop loin. Il se croit parfois dans un jeu sur son ordinateur, où les limites de la vraie vie sont repoussées, parfois même abolies. Pas le temps de réfléchir davantage : les flics reprennent leur ascension dans l’escalier, et monsieur Foch leur crie :

_ Il a fait quoi comme connerie ?

Une demi-seconde de silence, puis une voix grave et sans émotion lui répond :

_Rentrez chez vous, monsieur… Votre jeune voisin va commettre un meurtre. Nous sommes là pour l’en empêcher. »