J’ai lu : Ippon, de Jean-Hugues Oppel

5 01 2021

Ippon

Jean-Hugues Oppel

Résumé : Sébastien espère passer une bonne soirée, il a tout prévu : de sortie chez des amis, ses parents l’ont laissé avec Justine, une étudiante qui l’aide à faire ses devoirs. Ah Justine, si belle… Sébastien aimerait bien lui plaire, mais il n’a que treize ans… La soirée se déroulait bien, il s’était arrangé avec la jeune fille pour ne pas faire ses devoirs et lui permettre à elle, de travailler de son côté. Tout était prévu pour qu’après le match de foot à la télé, elle vienne le border dans son lit. Mais, rien ne se passe comme prévu. Alors que Justine doit lui ramener un verre d’eau pour qu’il prenne ses médicaments, elle ne vient pas. Que se passe-t-il ? Sébastien s’inquiète. Et s’ils n’étaient pas seuls dans la maison…

Mon avis : En commençant ma lecture, je n’ai pas du tout accroché avec le style d’écriture de l’auteur. Une écriture hachée, comme coupée au couteau, dure, brute de décoffrage. Il a planté un décor glauque, sale, dans lequel on n’a vraiment pas envie de traîner les pieds. Mais, au fur et à mesure de ma progression dans l’histoire, ce style haché est devenu approprié parce qu’il a donné une cadence, un rythme haletant à l’intrigue. Sébastien se retrouve nez à nez avec un intrus dans sa maison et il doit se débrouiller pour rester en vie. L’histoire rappelle un peu celle de « Un tueur à ma porte » d’Irina Drozd, mais elle est plus noire, plus intense. C’est un petit roman de 83 pages, pour les petits lecteurs. Je vous invite à le lire, il n’est pas mal.

Extrait : « A 23 : 34, il n’en peut plus et se lève. Sort de son lit et s’habille sommairement, pantalon et polo. Il enfile ses chaussons, des mules en velours côtelé à semelle élastomère, modèle économique en vente dans les supermarchés. il en use une demi-douzaine de paires durant l’année. Ne peut pas souffrir les pantoufles, ça tient trop chaud et ça conserve les odeurs.

Il quitte sa chambre. S’arrête un instant dans le couloir et écoute.

Rien.

Pas même un murmure de voix étouffée, ou les roucoulades que pousse Justine chaque fois qu’elle parle à son chéri au téléphone. Sébastien descend l’escalier, un peu alarmé. il lui est arrivé quelque chose, un malaise, elle est tombée dans les pommes, ce n’est pas possible autrement. Ou elle se cache pour le taquine. Hypothèse saugrenue, l’étudiante a passé l’âge de se livrer à ces jeux puérils. Sébastien atteint le niveau du salon. De l’autre côté, un peu de lumière se reflète dans les carreaux dépolis de la porte vitrée entrouverte. Elle vient de la cuisine, située en retrait. Silence total dans la maison. Sébastien n’ose pas appeler, les mots restent bloqués dans sa bouche. il se sent stupide. Très enfant tout à coup. Trop. C’est ridicule. La semaine dernière encore, au club, il ratatinait son copain Fernand qui est pourtant plus vieux que lui, et ceinture marron. Bientôt ceinture noire, même. Le salon est éclairé, touts les appliques halogènes accrochées aux murs sont allumées. Les affaires de Justine n’ont pas bougé du canapé, devant la télévision éteinte ; il peut les apercevoir d’où il se tient. Sa veste en jean et son sac à main sont pendus au dossier d’un gros fauteuil occupant un coin de la vaste pièce.

Difficile d’imaginer décor moins effrayant. Mis à part le silence anormal. »




J’ai lu : Alice, de David Moitet

13 10 2020

Alice

David Moitet

Résumé : Samantha O’Donnel a un problème. Son ami Arnaud — en fait, son seul et unique ami — a changé d’école. Il a intégré le prestigieux institut Alice, qui recrute les meilleurs élèves, les surdoués. Samantha, surdouée elle aussi, a été très heureuse pour Arnaud, mais sa joie a été de courte durée : depuis qu’il a intégré l’institut, Arnaud ne lui donne plus signe de vie. il reste sourd à tous les messages qu’elle lui envie. Pour Sam, il y a forcément un problème… Elle décide à son tour d’intégrer cet institut pour savoir ce qui s’y passe. Elle est loin d’imaginer tout ce qu’elle va découvrir !

Mon avis : Un petit roman de SF assez sympa, quoique assez prévisible sur la fin. L’histoire est tout de même prenante. Toutefois, je suis restée sur ma fin. J’ai trouvé que l’idée de départ était très intéressante, mais pas assez fouillée. Tout va très vite et en deux temps trois mouvements, tout est plié. Le dénouement est trop vite expédié et c’est dommage. Ce qui m’ aussi un peu dérangée, c’est que les personnages, qui sont des ados, réussissent là où des adultes, experts dans leur domaine, ont lamentablement échoué. je veux bien qu’ils soient surdoués, mais tout de même, je n’ai pas trouvé ça très crédible. N’empêche que l’histoire reste sympathique.

Extrait : « Ma messagerie est ouverte sur un mail que j’ai envoyé à Arnaud. Le premier d’une longue série restée sans réponse. C’était la veille dans on entrée dans sa nouvelle école, l’institut Alice, un établissement pour surdoués, sans aucune limite d’âge, spécialisé dans l’informatique de pointe et le codage d’algorithmes complexes. Pour y être admis, une seule solution : passer leur test et obtenir cent pour cent de bonnes réponses. Arnaud avait réussi. j’étais si heureuse pour lui… J’étais alors loin d’imaginer que notre amitié n’y survivrait pas. Ma sœur émerge enfin de la salle de bains.Le reste de sa chevelure est lissé. J’en déduis qu’il est l’heure de partir.

_Te bile pas Samantha, dit-elle pour me réconforter. Y a des tas de garçons qui seront à tes pieds, quand tu décideras de mettre un peu d’ordre dans cette tignasse et quand tu accepteras de troquer tes pulls informes contre un petit top bien classe.

Encore une fois, je préfère me taire. Comment lui dire que ma relation avec >Arnaud est différente de ce qu’elle peut connaître avec ses mecs ? Que nous avons tellement parlé que je le connais mieux que personne ? Que son silence est tout sauf normal ? et qu’il est vital que je comprenne pourquoi il ne me répond pas…« 




J’ai lu : Vango, un prince sans royaume, de Timothée de Fombelle

19 11 2019

Vango : Un prince sans royaume

Timothée de Fombelle

Résumé : Vango est toujours à la recherche de son passé. Voloï Viktor, son ennemi invisible ne cesse de le traquer et pour cela, tous les moyens sont bons. Il s’attaque à ceux qui sont chers à Vango : Mademoiselle, Ethel, Zefiro. Mademoiselle est enlevée, Zefiro, poursuivi lui aussi par Viktor, doit sortir de sa cachette et cherche à se venger. Ethel, qui essaie de retrouver Vango, est utilisée comme appât. l’étau se resserre de plus en plus autour du jeune homme, tandis que gronde la fureur de la Seconde Guerre Mondiale. Dans une Europe occupée, Vango est en plein dilemme : abandonner tout espoir de découvrir la vérité sur son identité, protéger ses proches en restant caché ou chercher à savoir, au risque de faire couler plus de sang… Que va-t-il choisir ? Connaîtrons-nous enfin le fin mot de l’histoire ?

Mon avis : Tout simplement MA-GIS-TRAL ! L’auteur mêle suspense, humour et poésie avec brio. On suit les pérégrinations des personnages, on respire avec eux, on sursaute avec eux, on pleure avec eux, on s’énerve avec eux ! On a envie que ça avance, mais l’auteur, par la magie de sa plume, nous freine, nous frustre, limite nous agace, tant il arrive à retourner les situations, à déjouer les plans, à échafauder des rebondissements… Cette histoire est haletante et elle fait frissonner jusqu’au bout. Qui est vraiment Vango et pourquoi veut-on le tuer ? Ethel arrivera-t-elle enfin à le retrouver ? Zefiro pourra-t-il finalement se venger de l’odieux Voloï Viktor ? Vous n’aurez toutes ces réponses qu’en lisant ce deuxième tome de la saga Vango ! Moi, j’en frissonne encore…

Extrait : « Vango ferma brièvement les yeux et les rouvrit. Son regard caressa ce mystérieux avion blanc. Et là, sous l’appareil, blotti contre la roue, il vit quelqu’un.

Il la vit mais son esprit refusa de la reconnaître.

Pourtant, Ethel le regardait de ses yeux verts qui le transperçaient.

L’homme à la mitraillette tendit l’oreille. il espérait entendre approcher l’automobile du lieutenant. Ses bras se fatiguaient sous le poids de l’arme. Il n’avait jamais demandé à être là, à mille kilomètres de chez lui, avec ce costume et cette ferraille. Dans sa ville, il était cordonnier (…)

Ethel laissa la terreur la quitter lentement. Elle était entrée dans la grange, avant d’aller détacher un cheval sous les arbres, pour vérifier que son avion était toujours là. Elle ne savait pas qu’en passant la tête entre ces planches, elle franchissait une ligne sacrée. Vango était mort depuis six ans mais il était assis dans la paille devant elle. Vango était mort mais il tenait ses genoux dans le creux de ses coudes.En passant la tête dans le trou de cette palissade, elle retrouvait la vie. Elle avait donc rampé jusqu’à l’avion et, là, il l’avait vue, lui aussi.

Pendant ces instants, quelques secondes à peine, il passa entre eux un flot agité. Un désordre de vie, de peurs, de souvenirs se promena sur cet étroit chemin. On se serait cru sur une route nationale dans la marée humaine de l’exode de juin 1940. Mais cela, sans un bruit, sans un cri, sans un coup de Klaxon, comme dans un film muet.

Ce face à face retourna le cœur de Vango. Sa vie était là à le regarder, sa vie recroquevillée sous une aile blanche d’avion. Il ressentit l’évidence de ce qu’il désirait. Ethel avait frappé à la porte, le 8 août 1929, en entrant dans la cuisine du Graf Zeppelin, suspendue dans le ciel de New York. Des années plus tard, il lui ouvrait enfin. Une force puissante envahit aussi Ethel. Elle avait ressenti le basculement de Vango. »




J’ai lu : Traces, de Florence Hinckel

12 10 2018

Traces

Florence Hinckel

Résumé : Thomas Codislo, 13 ans, vit un véritable cauchemar. Le nouveau logiciel de détection des crimes, Traces, a prédit qu’il commettrait un meurtre, le 13 août, à 15 heures. Thomas tombe des nues, quand la police vient l’interpeller chez lui, devant tout le monde. Heureusement, il peut s’enfuir. Sa cavale commence alors. Entre les détracteurs de Traces qui croient en l’innocence du jeune garçon et le Préfet de police qui ne veut pas perdre la face, Thomas aura fort à faire pour prouver son innocence. Y parviendra-t-il ?

Mon avis : Pour ceux qui ont vu le film Minority Report, ils ne seront pas du tout impressionnés par ce roman. C’est exactement le même principe. Un système prédit les délits avant qu’ils ne se produise et ce, pour faire diminuer la criminalité. Un personnage accusé à tort est traqué à travers toute la ville (connectée de partout, bien évidemment, sinon ce n’est pas drôle) et doit prouver son innocence. Voilà. Du coup, rien d’original. Néanmoins, l’histoire est prenante, le suspense, bien présent. L’auteure fait référence à des organismes français bien connus (CNIL, Médiapart, Anonymous…) et donne un caractère réel à sa fiction. Alors franchement, cet ouvrage ne changera sans doute pas votre vie, mais vous ne vous ennuierez pas en le lisant.

Extrait : « C’est alors qu’une agitation inhabituelle se manifeste dans la cage d’escalier. Est-ce encore le couple du troisième étage qui se dispute ? Lorsque cela arrive, ma mère entrouvre la porte de l’appartement, tout en chuchotant :

_Si ça dégénère, je cours protéger le petit Léo.

Léo est le fils de ces voisins agités. Il a quatre ans, une bouille d’ange, un sourire à tomber raide… sauf quand il pleure, bien sûr, la plupart du temps à cause de ces disputes parentales.

Ma mère est au boulot et je suis seul dans l’appartement. C’est mon devoir de m’assurer que Léo va bien. Mais il ne s’agit pas du tout des parents de Léo. J’entends d’autres voix inconnues, sèches et autoritaires. Puis celle de monsieur Foch, le voisin du premier, le type le plus râleur et le plus avide des commérages de la cité, qui leur répond :

_Thomas Codislo ? Oui, il habite au deuxième. Il a fait une connerie ? Les jeunes, de nos jours, tous des délinquants ! Oui, par là, porte 203.

Mon sang se glace dans mes veines. Thomas Codislo, c’est moi ! Et… des flics me recherchent ? POURQUOI ? Je fouille dans mes souvenirs récents. Avec les copains, quand on s’ennuie dans la cité, il arrive qu’on fasse une bêtise ou deux… mais jamais rien de très grave. Rien qui nécessite qu’on vienne me cueillir chez moi comme ça. Peut-être que c’est juste pour que je témoigne à cause d’un pote qui aurait dérapé ? Si ça se trouve, c’est Steven. Je dois toujours lui conseiller de s’arrête avant qu’il n’aille trop loin. Il se croit parfois dans un jeu sur son ordinateur, où les limites de la vraie vie sont repoussées, parfois même abolies. Pas le temps de réfléchir davantage : les flics reprennent leur ascension dans l’escalier, et monsieur Foch leur crie :

_ Il a fait quoi comme connerie ?

Une demi-seconde de silence, puis une voix grave et sans émotion lui répond :

_Rentrez chez vous, monsieur… Votre jeune voisin va commettre un meurtre. Nous sommes là pour l’en empêcher. »