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Une vie sans examen ne vaut pas la peine d'être vécue

Parole, voix, chant

«Avec les premières voix se formèrent les premières articulations [la parole] ou les premiers sons [le chant], selon le genre de la passion qui dictait les uns ou les autres… ainsi les vers, les chants, la parole ont une origine commune. Autour des fontaines dont j’ai parlé, les premiers discours furent les premières chansons… Il n’y eut point d’abord d’autre musique que la mélodie, ni d’autre mélodie que le son varié de la parole; les accents formaient le chant, les quantités formaient la mesure, et l’on parlait autant par les sons et par le rythme que par les articulations et les voix. Dire et chanter étaient autrefois la même chose…» Rousseau, Essai sur l’origine des langues, Chapitre XII.

«La mélodie, en imitant les inflexions de la voix, exprime les plaintes, les cris de douleur ou de joie, les menaces, les gémissements; tous les signes vocaux des passions sont de son ressort. Elle imite les accents des langues, et les tours affectés dans chaque idiome à certains mouvements de l’âme; elle n’imite pas seulement, elle parle, et son langage inarticulé, mais vif, ardent, passionné, a cent fois plus d’énergie que la parole même. Voilà d’où naît la force des imitations musicales; voilà d’où naît l’empire du chant sur les cœurs sensibles.» Rousseau, Essai sur l’origine des langues, Chapitre XIV.

Rousseau, Dictionnaire de musique (1768), article Mélodie

«Art d’imitation par lequel on peut affecter l’esprit de diverses images, émouvoir le cœur de divers sentiments, exciter et calmer les passions; opérer, en un mot, des effets moraux qui passent l’empire immédiat des sens.»

Confessions, Livre XI, ch. XXVIII.38,
trad. Péronne et Ecalle remaniée par P. Pellerin, Nathan, 1998.

Je veux chanter une chanson que je sais de mémoire ; avant que je commence, mon attente l’embrasse toute entière d’avance. Dès que j’aurai commencé, tout ce que j’en aurai prononcé se perdra dans le passé, et devient l’objet de ma mémoire. Cette action est donc distendue dans deux directions ; l’une est souvenir à l’égard de ce que j’ai dit, l’autre est attente à l’égard de ce que je dois dire encore. Cependant mon attention demeure toujours présente ; c’est elle qui doit traverser ce qui était futur, pour devenir passé. Plus mon action se continue et s’avance, plus aussi l’attente diminue, et le souvenir s’étend jusqu’au moment où l’attente sera toute épuisée, c’est-à-dire quand l’action tout entière, une fois finie, aura passé dans le domaine de la mémoire. Ce que je dis de la chanson entière, peut s’appliquer à chacune de ses parties et à chacune de ses syllabes; on peut le dire d’un chant plus étendu dont cette chanson ne serait qu’une parie ; on peut le dire de la vie entière d’un homme, dont chacune des actions n’est qu’une légère partie ; enfin on peut le dire d’un siècle tout entier de générations humaines, dont chacune des vies ne sont aussi que de véritables fractions.

https://www.franceculture.fr/emissions/les-nouveaux-chemins-de-la-connaissance/penser-la-voix-14-chanter-une-philosophie

Chanter, reprendre la parole Vincent Delecroix

Par Adèle Van Reeth

Réalisation : Olivier Guérin

Lectures : Georges Claisse

Comment penser la voix sans la donner à entendre ? La voix n’est pas un moyen, ni un outil, elle est ce qui advient, un élan qui ne connaît pas l’immobilité, ce souffle par lequel le sens prend corps et âme, dans la parole, dans le chant, dans le cri, jusqu’à cette voix ultime qu’est le silence choisi.

Mais que nous dit la voix ? La voix n’est jamais générale, elle est toujours une, celle du poète qui s’incarne dans la métaphore, celle du citoyen qui existe dans le bulletin de vote, celle de la raison qui commande l’agir, celles, au pluriel, du schizophrène qui ne s’entend même plus. La voix est autant la parole que le chant, le rythme que la mélodie, cette rencontre entre le corps et l’esprit qui peuvent enfin dire « moi » sans lui donner de contour.

Peut-on alors dissocier la voix de ce qui est dit ? N’est-elle pas en elle-même le sens ultime, ce qui se révèle malgré nous, un fragment intime qui s’échappe dès que l’on ouvre la bouche, un secret mal gardé qui en dit plus long que le discours, tel ce verre qui se brise comme un éclat de rire ?

Le chant est-il l’affaire de parole ?

premier paradoxe du chant : spontanéité et nécessité de la culture d’un raffinement / intimité immédiate de la voix personnelle et le fait qu’on ait à la chercher

(lieux pour chanter, contexte ça peut paraitre impudique de chanter, on se dévoile beaucoup plus; tout le monde chante mais aussi professionnalisé)

Il n’y a rien de plus personnel que la voix c’est individualisant, pas deux pareilles (identité personnelle) mais il faut la conquérir et parfois elle nous échappe, nous trahit, chante faux, parle faux (intonation / voix intérieure), qui déraille, on peut la perdre…

parole peut se passer de chant ? chant de parole ?

Orphée (instructeur de la culture, humanisante), on apprend la culture par le chant (enfant, comptines) mais aussi puissance de fascination du chant humain car enchante les pierres, animaux…  allégorie mais aussi danger de l’incantation (sirènes) (enchainer, asservir l’autre) => méfiance de Platon des poètes lyriques.

propre de l’homme (chant des cigales, oiseau, baleine…) ? Dès les débuts de l’humanité, le choix des cavernes est parfois réalisé pour leurs propriétés acoustiques (proximité avec des rivières souterraines ou des sources, peintures qui seraient concentrées dans les endroits où les échos sont les plus forts).

problème de la musique et de la philosophie => Querelle des Bouffons (mélodie/ harmonie); le chant c’est la parole première ?

était naturellement chantante => vraie => parole est déchantée ?

frustration car les intonations voudraient apparaitre mais on les aplatit pour se faire comprendre. communauté de la signification, communication/ celle de l’expression.

opéra = artificiel ! personne ne parle en chantant !!

dire et chanter était autrefois la même chose => parole dégradation

avant parole pas cri mais chant, en vers (même les lois)

suite de l’histoire humaine est une dégradation, un « désenchantement »

conception de la parole et de la culture = dénaturation , plus la raison progresse moins la parole est passion cad transparente. perd la spontanéité, expressivité, naturelle, bonne

raison neutralise inflexion passionnelle de la parole, déguise,  dissimule l’individu.

on pense et parle de plus en plus, plus efficace mais on se dissimule. La communication est de plus en plus faussée.

C’est la matrice de la conception de notre culture = pureté de l’origine

unité de la première parole = l’individu est tout un dans son chant. Alors que la parole est dispersion, dissimulation. Tout ce qu’on gagne en signification, on le perd en affection et en vérité.

=> paradigme qui hante la culture, nostalgie d’une fusion primitive.

on le ressent, comme notre enfance lieu du chant et de l’innocence.

mais chant premier (spontané) et qui se travaille ??

contexte du texte de Rousseau = querelle des bouffons : primauté de la mélodie mais c’est aussi un choix de civilisation

Rameau : raison, mathématique (harmonie, rapport spatial des sons)

Rousseau : mélodie, continu, affect, expressivité

opéra italien (primauté de la mélodie plus que des paroles / opéra français)

lyrisme = expression du moi, de l’individu isolé solitaire (poète lyrique) et sujet en communion avec la nature, transi par la voix du monde ou Dieu, entre en résonance avec le chant monde.

deuxième fantasme  : Choeur = image idéale de la société, harmonie pure des voix, chacun a sa place, harmonie (présence du différent) polyphonie / dégénérescence voix fusionnelle (chants de guerre, partisans, supporters ;) unisson

(enjeu politique = comment passer du je au nous)

St Augustin : La musique est le lieu même où le chrétien est tendu vers l’accomplissement du moment où Dieu sera tout en tous. Le chant du chrétien est eschatologique. Au temps de St Augustin, le deuil du carême et l’éclatement joyeux de la jubilation pascale étaient là pour l’exprimer.

La musique et le chant sont des services rendus au prochain. Ils donnent l’occasion aux hommes de se retrouver, de se socialiser, de symboliser et d’unifier dans un chant ou une musique leur personne et leur sentiment profond, voire d’être soulagés de quelque souffrance (cf. David soulageant Saül avec sa lyre).

Mais la musique peut devenir séductrice, manipulatrice, outils de prise de pouvoir, prétexte à honneurs et gains démesurés. L’Évangile lui donne une éthique : gratuite comme le salut offert, elle est respectueuse et responsabilisante à l’image du Christ.

La musique et le chant sont le lieu privilégié où s’unissent et se concentrent la louange, la prière et l’attente du chrétien. L’unité de la communauté (et de la personne) trouve un écho dans l’harmonie de son chant (cf. le chant des psaumes).

Mais le chant est aussi la pointe de la prédication de l’Église du Christ : c’est ce que l’on retient et qui vous imprègne. Une confession qui atteint au cœur et resurgit du cœur en témoignage partagé, universel.

La musique et le chant rassemblent, expriment et symbolisent tout le non-dit de la personne comme de la communauté. Ce qui est inexprimable dans le langage et les rituels codifiés de la vie et de l’Eglise, se disent dans la musique et le chant, concentrant une forte charge symbolique.

L’important n’est pas alors ce qui s’exprime dans les paroles, ni dans l’organisation rationnelle de la mélodie ou de l’harmonie, mais plutôt la puissance émotive de l’émission sonore et de son audition. Au temps de St Augustin, la jubilation pascale se développait à l’infini dans des alléluias.

Le chant grégorien est un chant sacré anonyme, habituellement interprété par un chœure  ou par un soliste appelé chantre. Il est destiné à soutenir le texte liturgique en latin.

Il doit se chanter a cappella, c’est-à-dire, sans accompagnement harmonisé instrumental, car toute harmonisation, même discrète, modifie la structure de cette musique. S’il n’existe aucun manuscrit ancien et accompagné, de nos jours, l’assistance simple et humble de l’orgue est néanmoins autorisée, soit pour les établissements de petite taille, soit en faveur de la solennité de célébration.

Il s’agit d’un chant homophone, plus précisément chant monodique qui ne peut supporter aucune adjonction de sons étrangers à sa ligne mélodique  : toutes les voix qui l’exécutent chantent donc « à l’unisson ». C’est une musique exclusivement récitative, qui prend son origine dans le texte sacré, et qui favorise l’intériorisation et la conscience des paroles chantées. Ses formes musicales sont très variées, par opposition à la cadence régulière de la musique issue de la Renaissance. Tout comme ceux que le pape Pie X qualifia, le texte est premier. La musique, secondaire, l’orne, l’interprète et en facilite l’assimilation.

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Différents buts du chant : louange, hommage, amour, mélancolie, prière, collectif cérémoniel, rituel, d’église, folklorique, guerre, chanson, d’adieu, victoire, patriotique, révolutionnaire, paillardes

 

https://www.youtube.com/watch?v=sJGbtqUGVnY

 

https://www.youtube.com/watch?v=pmPbyyZwh4s

 

scat et vocalese :  Le scat est une forme de jazz vocal où des onomatopées sont utilisées plutôt que des paroles, s’opposant en cela au vocalese, autre forme de jazz vocal qui, lui, fait des reprises vocales de solos instrumentaux auxquels on adapte des paroles.

Chaplin a choisi de chanter en phonétique, imitant plusieurs langues européennes pour la circonstance. C’est la seule scène où l’on entend la vraie voix de Charlot.

Le rap est une forme d’expression vocale, un des cinq piliers du mouvement culturel et musical hip-hop, ayant émergé au milieu des années 1970 dans les ghettos aux États-Unis. Le mot « rap » provient de l’anglais to rap, un verbe signifiant « bavarder, blâmer, baratiner » en slang (argot anglophone noir américain)Aux États-Unis, on le définit aussi comme le rétroacronyme de « rhythm and poetry ». Les premiers MC se vantaient d’accorder leurs syllabes avec le beat en « rythme » et « poésie » car le rap est avant tout l’expression de ses sentiments ou de ceux des autres, d’une vérité ou d’un « trip », de nos envies ou encore de se vanter et/ou montrer qu’on est supérieur, (« égotrip »). Ils parlaient donc de « rythme et poésie » pour le fait d’assimiler les deux et de partager ses émotions sur une ligne musicale. (pensez aussi au slam)

 

 

 

http://www.afaf.asso.fr/wp-afaf/wp-content/uploads/2014/01/SENSIBILISATION-VOIX-PAROLE.pdf

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