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Une vie sans examen ne vaut pas la peine d'être vécue

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Une langue bien faite mettrait-elle fin à toute discussion ?

« S’il n’y avait ces imperfections du langage comme instrument de connaissance, un grand nombre de controverses qui font tant de bruit dans le monde cesseraient d’elles-mêmes; et le chemin de la connaissance s’ouvrirait plus largement, ainsi que peut-être le chemin de la paix. » Locke Essai sur l’entendement humain III chap IX para 21

I  Les imperfections des langues naturelles sont causes de discussions (querelle, conflits), une langue bien faire mettrait donc fin à toute discussion.

1- La multiplicité des langues naturelles : Tour de Babel Genèse 11:1-9 ; La Vérité Littéraire Marthe Robert

2-la pauvreté (généralité du concept) des mots / singularité du vécu : Bergson Le Rire , Essai sur les données immédiates de la conscience.

3- L’ambiguité des mots: -le lien conventionnel et arbitraire des mots aux choses Platon, Cratyle, XLI

                          -polysémie : Hobbes Léviathan I « De l’homme » chapitre VI 4 ;Essai sur les données immédiates de la conscience; Orphée noir, Situations I, Sartre // Tristan et Iseut Beroul 

Transition =  sophisme et propagande : LTI la langue du troisième Reich Klemperer ; Arendt Eichman à Jérusalem; Claude Hagège L’homme de paroles 

II Une langue bien faite mettrait fin à toute discussion, c’est-à-dire à toute querelle mais aussi à tout échange ! 

1- l’esperanto, langue construite universelle : Langue Internationale  Ludwik Lejzer Zamenhof

2- l’univocité, l’objectivité, clarté inspirées des mathématiques, La « caractéristique universelle » : Lettre à Jean Berthet de 1677,lettre à Jean Frédéric de 1679. Leibniz

3- Limites d’une langue bien faite :  construite à partir d’une langue naturelle, auto-référentielle, pas euristique ni créatrice, disparition du locuteur et de l’émetteur (langue qui supprimerait l’échange), K V Frisch Vie et moeurs des abeilles

Transition =

-en gagnant en précision, ne perd-on pas en richesse ?

-une langue bien faite suppose un accord préalable donc plus de discussion !!! une langue bien faite serait inutile à ceux qui la possèderaient.

-suffit-il de se comprendre pour se mettre d’accord ? toute discussion a-t-elle une fin ? (querelles de mots seraient querelles de choses)

-Toute imperfection suppose la référence à une norme par rapport à laquelle on juge. L’imperfection se réfère forcément à un idéal, à une certaine idée de la perfection. bien faite pour qui, selon quel critère ? langue bien faite serait gouvernée par idéal de maîtrise sur autrui et le monde (technico scientifique) « bien faite pour »=> sophiste et propagande totalitaire (monologue, discours qui n’admet aucune contestation, discussion) Le déclin de la parole Breton, L’essai sur l’origine des langues Rousseau, Bourdieu Ce que parler veut dire , Dom Juan Molière

III Les désaccords (discussion) produits par les langues naturelles sont préférables à l’absence de conflit (car absence d’échange, mutisme…) d’une langue bien faite. 

1- les langues ne sont pas de simples répertoires, une baisse de la diversité linguistique traduirait une uniformisation et un appauvrissement de la pensée : Sapir Le langage, Introduction à l’étude la parole; 1984 Orwell

2-communication/ expression Les fleurs du mal Spleen Baudelaire

3-Valeur de la polysémie = une puissance créatrice.

4- Certaines discussion n’admettent pas de fin : le langage politique, l’art Langage politique et rhétorique Ricoeur, Critique de la faculté de juger Kant

Conclusion 

Les défauts de la langue sont des maux inévitables, dont on ne peut pas faire l’économie sans priver la langue de ses propriétés essentielles.

On peut donc dire qu’une langue parfaite mettrait fin à tout différend mais aussi à tout échange et rendrait la notion de langue caduque la vidant de sa raison d’être. Ce serait une communication sans parole, sans sujet parlant.

Pour aller plus loin :

Nous ne voyons pas les choses mêmes ; nous nous bornons, le plus souvent, à lire des étiquettes collées sur elles. Cette tendance, issue du besoin, s’est encore accentuée sous l’influence du langage. Car les mots (à l’exception des noms propres) désignent des genres. Le mot, qui ne note de la chose que sa fonction la plus commune et son aspect banal, s’insinue entre elle et nous […]. Et ce ne sont pas seulement les objets extérieurs, ce sont aussi nos propres états d’âme qui se dérobent à nous dans ce qu’ils ont d’intime, de personnel, d’originalement vécu. Quand nous éprouvons de l’amour ou de la haine, quand nous nous sentons joyeux ou tristes, est-ce bien notre sentiment lui-même qui arrive à notre conscience avec les mille nuances fugitives et les mille résonances profondes qui en font quelque chose d’absolument nôtre ? Nous serions alors tous romanciers, tous poètes, tous musiciens. Mais, le plus souvent, nous n’apercevons de notre état d’âme que son déploiement extérieur. Nous ne saisissons de nos sentiments que leur aspect impersonnel, celui que le langage a pu noter une fois pour toutes parce qu’il est à peu près le même dans les mêmes conditions, pour tous les hommes. Ainsi, jusque dans notre propre individu, l’individualité nous échappe. Nous nous mouvons parmi des généralités et des symboles, comme en un champ clos où notre force se mesure utilement avec d’autres forces ; et, fascinés par l’action, attirés par elle, pour notre plus grand bien, sur le terrain qu’elle s’est choisi, nous vivons dans une zone mitoyenne entre les choses et nous, extérieurement aux choses, extérieurement aussi à nous-mêmes.

Bergson Le Rire (1899), PUF, 1993

Telle saveur, tel parfum m’ont plu quand j’étais enfant, et me répugnent aujourd’hui. Pourtant je donne encore le même nom à la sensation éprouvée, et je parle comme si, le parfum et la saveur étant demeurés identiques, mes goûts seuls avaient changé. Je solidifie donc encore cette sensation ; et lorsque sa mobilité acquiert une telle évidence qu’il me devient impossible de la méconnaître, j’extrais cette mobilité pour lui donner un nom à part et la solidifier à son tour sous forme de goût. Mais en réalité il n’y a ni sensations identiques, ni goûts multiples ; car sensations et goûts m’apparaissent comme des choses dès que je les isole et que je les nomme, et il n’y a guère dans l’âme humaine que des progrès. Ce qu’il faut dire, c’est que toute sensation se modifie en se répétant, et que si elle ne me paraît pas changer du jour au lendemain, c’est parce que je l’aperçois maintenant à travers l’objet qui en est cause, à travers le mot qui la traduit. Cette influence du langage sur la sensation est plus profonde qu’on ne le pense généralement. Non seulement le langage nous fait croire à l’invariabilité de nos sensations, mais il nous trompera parfois sur le caractère de la sensation éprouvée. Ainsi, quand je mange d’un mets réputé exquis, le nom qu’il porte, gros de l’approbation qu’on lui donne, s’interpose entre ma sensation et ma conscience ; je pourrai croire que la saveur me plaît, alors qu’un léger effort d’attention me prouverait le contraire. Bref, le mot aux contours bien arrêtés, le mot brutal, qui emmagasine ce qu’il y a de stable, de commun et par conséquent d’impersonnel dans les impressions de l’humanité, écrase ou tout au moins recouvre les impressions délicates et fugitives de notre conscience individuelle. Pour lutter à armes égales, celles-ci devraient s’exprimer par des mots précis ; mais ces mots, à peine formés, se retourneraient contre la sensation qui leur donna naissance, et inventés pour témoigner que la sensation est instable, ils lui imposeraient leur propre stabilité.

Bergson, Essai sur les données immédiates de la conscience.

« Les mots boivent notre pensée avant que nous ayons eu le temps de la reconnaître. Nous avons une vague intention, nous la précisons par des mots, et nous voilà en train de dire tout autre chose que ce que nous voulions » (Sartre).

Jean-Paul Sartre, Situations I, p. 201.

L’imperfection des mots c’est l’ambiguïté de leurs significations. La principale fin du Langage dans la communication que les hommes font de leurs pensées les uns aux autres, étant d’être entendu, les mots ne sauraient bien servir à cette fin dans le discours civil ou philosophique, lorsqu’un mot n’excite pas dans l’esprit de celui qui écoute, la même idée qu’il signifie dans l’esprit de celui qui parle. Or puisque les sons n’ont aucune liaison naturelle avec nos Idées, mais qu’ils tirent tous leur signification de l’imposition arbitraire des hommes, ce qu’il y a de douteux et d’incertain dans leur signification (en quoi consiste l’imperfection dont nous parlons présentement), vient plutôt des idées qu’ils signifient que d’aucune incapacité qu’un son ait plutôt qu’un autre, de signifier aucune idée, car à cet égard ils sont tous également parfaits.

Par conséquent, ce qui fait que certains mots ont une signification plus douteuse et plus incertaine que d’autres, c’est la différence des idées qu’ils signifient. »

 

John Locke, Essai philosophique concernant l’entendement humain, 1689, Livre III, chapitre 9, § 1-4, tr. fr. Pierre Coste, Le Livre de Poche, 2009, p. 710-712.

« Rien n’est plus ordinaire que de trouver quantité de mots dans une langue auxquels il n’y en a aucun dans une autre langue qui leur réponde. Ce qui montre évidemment, que ceux d’un même pays ont eu besoin en conséquence de leurs coutumes et de leur manière de vivre, de former plusieurs Idées complexes et de leur donner des noms, que d’autres n’ont jamais réuni en idées spécifiques. Ce qui n’aurait pu arriver de la sorte, si ces espèces étaient un constant ouvrage de la nature, et non des combinaisons formées et abstraites par l’esprit pour la commodité de l’entretien, après qu’on les a désignées par des noms distincts. Ainsi l’on aurait bien de la peine à trouver en Italien ou en Espagnol qui sont deux langues fort abondantes, des mots qui répondissent aux termes de notre jurisprudence qui ne sont pas de vains sons : moins encore pourrait-on, à mon avis, traduire ces termes en Langue Caribe ou dans les langues qu’on parle parmi les Iroquois et les Kiristinous. Il n’y a point de mots dans d’autres langues qui répondent au mot versura[1] usité parmi les Romains, ni à celui de corban[2], dont se servaient les Juifs. Il est aisé d’en voir la raison par ce que nous venons de dire. Bien plus ; si nous voulons examiner la chose d’un peu plus près, et comparer exactement diverses langues, nous trouverons que quoi qu’elles aient des mots qu’on suppose dans les traductions et dans les dictionnaires se répondre l’un à l’autre, à peine y en a-t-il un entre dix, parmi les noms des idées complexes, et surtout, des modes mixtes, qui signifie précisément la même idée que le mot par lequel il est traduit dans les dictionnaires. Il n’y a point d’idées plus communes et moins composées que celles des mesures du temps, de l’étendue et du poids. On rend hardiment en Français les mots Latins, hora, pes, et libra par ceux d’heure, de pied et de livre : cependant il est évident que les idées qu’un Romain attachait à ces mots Latins étaient fort différentes de celles qu’un Français exprime par ces mots Français. Et qui que ce fût des deux qui viendrait à se servir des mesures que l’autre désigne par des noms usités dans sa langue, se méprendrait infailliblement dans son calcul, s’il les regardait comme les mêmes que celles qu’il exprime dans la sienne. Les preuves en sont trop sensibles pour qu’on puisse le révoquer en doute ; et c’est ce que nous verrons beaucoup mieux dans les noms des idées plus abstraites et plus composées, telles que sont la plus grande partie de celles qui composent les discours de morale : car si l’on vient à comparer exactement les noms de ces idées avec ceux par lesquels ils sont rendus dans d’autres langues, on en trouvera fort peu qui correspondent exactement dans toute l’étendue de leurs significations. »

 

John Locke, Essai philosophique concernant l’entendement humain, Livre III, chapitre 5, § 8, Le Livre de Poche, 2009, p. 652-653.

« En voulant aller d’Angleterre en Hollande j’ai été retenu quelque temps dans la Tamise par les vents contraires. En ce temps-là, ne sachant que faire et n’ayant personne dans le vaisseau des mari­niers, je méditais sur ces choses-là et surtout je songeais à mon vieux dessein d’une langue en écriture rationnelle dont le moindre effet serait l’universalité et la communication des différentes notions. Son véritable usage serait de peindre, non pas la parole, comme dit M. de Brébœuf, mais les pensées, et de parler à l’entendement plutôt qu’aux yeux. Car si nous l’avions telle que je la conçois, nous pourrions raisonner en métaphysique et en morale à peu près comme en géométrie et en analyse, parce que les caractères fixeraient, nos pensées trop vagues et trop volatiles en ces matières, où l’imagination ne nous aide point si ce ne serait, par le moyen de caractères. Ceux qui nous ont donné des méthodes, donnent sans doute de fort beaux préceptes, mais non pas le moyen de les observer. Il faut, disent-ils, comprendre toute chose clairement et distinctement, il faut pro­céder des choses simples aux composées, il faut diviser nos pensées, etc. Mais cela ne sert pas beaucoup, si on ne nous dit rien davantage. Car, lorsque la division de nos pensées n’est pas bien faite, elle brouille plus qu’elle n’éclaire. Il faut qu’un écuyer tranchant sache les jointures, sans cela il déchirera les viandes au lieu de les couper. M. Descartes a été grand homme sans doute, mais je crois que ce qu’il nous a donné de cela est plutôt un effet de son génie que de sa méthode, parce que je ne sais pas que ses sectateurs fassent des découvertes. La véri­table méthode nous doit fournir un filum Ariadnes, c’est-à-dire un certain moyen sensible et grossier, qui conduit l’esprit, comme sont les lignes tracées en géométrie, et les formes des opérations qu’on prescrit aux apprentis en arithmétique. Sans cela notre esprit ne saurait faire un long chemin sans s’égarer. Nous le voyons clairement dans l’analyse, et si nous avions des caractères tels que je les conçois en métaphysique et en morale, et ce qui en dépend, nous pourrions mettre les avantages et désavantages en ligne de compte, lorsqu’il s’agit d’une délibération, et nous pourrions estimer les degrés de probabilité, à peu près comme les angles d’un triangle. Mais il est presque impossible d’en venir à bout sans cette caractéristique[1]. »

 

Leibniz, Lettre à Gallois, septembre 1677

« L’impossibilité de la traduction parfaite tient à l’irréductibilité des langues entre elles et, corrélativement, aux innombrables ambiguïtés induites par la matérialité du son ainsi que l’environnement culturel qui accompagne chaque langue. Comme une réponse à la malédiction de Babel, le projet de pallier cette imperfection de la langue naturelle, source d’incompréhension, a occupé au cours des siècles les esprits les plus brillants.

Parmi les multiples tentatives pour remédier aux lacunes de cet outil aussi nécessaire qu’imparfait qu’est la langue, le projet que Leibniz élabore dans sa dissertation sur l’art combinatoire est certainement le plus radical et le plus impressionnant. Il a en effet imaginé une langue qui, d’une part, permettrait de résoudre toutes sortes de problèmes tant juridiques, que politiques et même théologiques, parce qu’elle serait exempte de toute ambiguïté, et qui, d’autre part, forcerait la concorde par son degré d’évidence et de nécessité ; son universalité réglerait en outre tout problème de traduction.

Partant du principe que toute proposition, vraie ou fausse, consiste toujours en l’attribution d’un prédicat à un sujet, Leibniz pensait, après avoir déterminé précisément l’ensemble des concepts et leurs possibles relations entre eux, réduire tout problème formulé habituellement dans une langue particulière et floue à une formule calculable, faite de nombres premiers, pour la résolution de laquelle il existerait toujours un algorithme permettant de décider si cette formule est soit vraie, soit fausse : un tel formalisme algébrique binaire aurait rendu impossible l’erreur et la divergence des points de vue dans l’utilisation de cette Lingua characteristica universalis. Ce projet n’est pas mort avec Leibniz puisque la logique formelle du vingtième siècle n’a cessé de chercher des formalisations possibles d’un maximum de propositions de la langue naturelle (des tentatives intuitionnistes aux contextes d’attitude propositionnelle par exemple). Toutes ces tentatives se sont heurtées au même problème: la langue universelle, désincarnée, n’appartenant à aucun individu ou groupe, n’est justement pas une langue. »

 

Philippe Descamps, Science et vie, Hors série : Du langage aux langues, Trimestriel N°227. Juin 2004, p. 159.

« Les êtres humains ne vivent pas uniquement dans le monde objectif ni dans le monde des activités sociales tel qu’on se le représente habituellement, mais ils sont en grande partie conditionnés par la langue particulière qui est devenue le moyen d’expression de leur société. Il est tout à fait erroné de croire qu’on s’adapte à la réalité pratiquement sans l’intermédiaire de la langue, et que celle-ci n’est qu’un moyen accessoire pour résoudre des problèmes spécifiques de communication ou de réflexion. La vérité est que le « monde réel » est dans une large mesure édifié inconsciemment sur les habitudes de langage du groupe. Il n’existe pas deux langages suffisamment similaires pour qu’on puisse les considérer comme représentant la même réalité sociale. Les mondes dans lesquels vivent les différentes sociétés sont des mondes distincts, et non pas simplement un seul et même monde auquel on aurait collé différentes étiquettes.

La compréhension d’un simple poème, par exemple, suppose non seulement la compréhension de ses différents mots dans leur signification ordinaire, mais aussi la pleine compréhension de la vie entière de la collectivité qui est reflété dans ces mots ou qui est suggérée par ses réticences. Si par exemple l’on dessine une dizaine de lignes, de formes différentes, on les perçoit comme divisibles en catégories telles que « droites », « tordues », « courbées », « en zigzag » en raison de la suggestion classificatoire des termes linguistiques eux-mêmes. Pour une bonne part, la manière dont nous accueillons le témoignage de nos sens (vue, ouïe, etc.) est déterminée par les habitudes linguistiques de notre milieu, lequel nous prédispose à un certain type d’interprétation. »

 

Edward Sapir, « The Status of Linguistics as a Science », Language, Vol. 5, No. 4 (Dec., 1929), p. 207-214.

« Lorsque des linguistes devinrent capables d’analyser d’une façon critique et scientifique un grand nombre de langues dont les structures présentent des différences considérables, leur base de référence s’en trouva agrandie. Ils constatèrent une solution de continuité dans les phénomènes considérés jusque-là comme universels, et prirent conscience du même coup de tout un nouvel ordre de significations. On s’aperçut que l’infrastructure linguistique (autrement dit, la grammaire) de chaque langue ne constituait pas seulement « l’instrument » permettant d’exprimer des idées, mais qu’elle en déterminait bien plutôt la forme, qu’elle orientait et guidait l’activité mentale de l’individu, traçait le cadre dans lequel s’inscrivaient ses analyses, ses impressions, sa synthèse de tout ce que son esprit avait enregistré. La formulation des idées n’est pas un processus indépendant, strictement rationnel dans l’ancienne acception du terme, mais elle est liée à une structure grammaticale déterminée et diffère de façon très variable d’une grammaire à l’autre. Nous découpons la nature suivant les voies tracées par notre langue maternelle. Les catégories et les types que nous isolons du monde des phénomènes ne s’y trouvent pas tels quels, s’offrant d’emblée à la perception de l’observateur. Au contraire, le monde se présente à nous comme un flux kaléidoscopique d’impressions que notre esprit doit d’abord organiser, et cela en grande partie grâce au système linguistique que nous avons assimilé. Nous procédons à une sorte de découpage méthodique de la nature, nous l’organisons en concepts, et nous lui attribuons telles significations en vertu d’une convention qui détermine notre vision du monde, – convention reconnue par la communauté linguistique à laquelle nous appartenons et codifiée dans les modèles de notre langue. Il s’agit bien entendu d’une convention non formulée, de caractère implicite, mais ELLE CONSTITUE UNE OBLIGATION ABSOLUE. Nous ne sommes à même de parler qu’à la condition expresse de souscrire à l’organisation et à la classification des données, telles qu’elles ont été élaborées par convention tacite.

Ce fait est d’une importance considérable pour la science moderne, car il signifie qu’aucun individu n’est libre de décrire la nature avec une impartialité absolue, mais qu’il est contraint de tenir compte de certains modes d’interprétation même quand il élabore les concepts les plus originaux. Celui qui serait le moins dépendant à cet égard serait un linguiste familiarisé avec un grand nombre de systèmes linguistiques présentant entre eux de profondes différences. Jusqu’ici aucun linguiste ne s’est trouvé dans une situation aussi privilégiée. Ce qui nous amène à tenir compte d’un nouveau principe de relativité, en vertu duquel les apparences physiques ne sont pas les mêmes pour tous les observateurs, qui de ce fait n’aboutissent pas à la même représentation de l’univers, à moins que leurs infrastructures linguistiques soient analogues ou qu’elles puissent être en quelque sorte normalisées. […]

On aboutit ainsi à ce que j’ai appelé le « principe de relativité linguistique », en vertu duquel les utilisateurs de grammaires notablement différentes sont amenés à des évaluations et à des types d’observations différents de faits extérieurement similaires, et par conséquent ne sont pas équivalents en tant qu’observateurs, mais doivent arriver à des visions du monde quelque peu dissemblables. […] À partir de chacune de ces visions du monde, naïves et informulées, il peut naître une vision scientifique explicite, du fait d’une spécialisation plus poussée des mêmes structures grammaticales qui ont engendré la vision première et implicite. Ainsi l’univers de la science moderne découle d’une rationalisation systématique de la grammaire de base des langues indo-européennes occidentales. Évidemment, la grammaire n’est pas la CAUSE de la science, elle en reçoit seulement une certaine coloration. La science est apparue dans ce groupe de langues à la suite d’une série d’événements historiques qui ont stimulé le commerce, les systèmes de mesure, la fabrication et l’invention technique dans la partie du monde où ces langues étaient dominantes. »

Benjamin Lee Whorf, Linguistique et anthropologie, 1956, trad. Claude Carme, Denoël, 1969, p. 125-126, 139.

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La politesse : ce qu’il faut dire ou ne pas dire (sans interdiction légale ou tabou)

Argot

Parler c’est utiliser une langue (le français, par ex.), et une langue, comme le note Emile Benveniste, reflète une culture donnée avec notamment ses normes et ses interdits. On dira donc que la langue impose un code à ses utilisateurs. “Langue et société ne se conçoivent pas l’une sans l’autre. (…) J’appelle culture le milieu humain, tout ce qui, par-delà l’accomplissement des fonctions biologiques, donne à la vie et à l’activité humaine forme, sens et contenu. La culture est inhérente à la société des hommes, quel que soit le niveau de civilisation. Elle consiste en une foule de notions et de prescriptions, aussi en des interdits spéci­fiques (…)” (Benveniste). De fait, comme la culture, la langue contient des interdits et toute la grammaire est là pour indiquer ce qu’il est possible et ce qu’il n’est pas possible de dire…

Remarquons à l’inverse que si la langue est l’outil par lequel se formule, voire se fabrique les interdits, il n’y aurait pas d’exercice possible du langage sans que n’existe une Loi sous-jacente aux lois, une règle de culture plus fondamentale que les règles juridiques, une loi constituante pour le psychisme de tout homme car elle lui permet normalement accéder au désir via la demande, il s’agit bien sûr de l’interdit de l’inceste… Si cet interdit n’était pas observé, quel besoin auraient les hommes de parler ? Ou plutôt quel désir ? Ne seraient-ils pas dans la réalisation absolument mortelle de leur désir le plus secret, le plus originel, si l’on en croit Freud, à savoir le désir incestueux ?

Un article très intéressant sur les variations culturelles de la politesse :

 

http://www.scienceshumaines.com/les-cultures-de-la-conversation_fr_12008.html

 

 

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Le tabou : ce qu’il ne faut pas dire

« Tabou » est un mot que l’on retrouve dans toutes les langues polynésiennes sous la forme tapu1, kapu2… Il fut popularisé en Europe par James Cook au retour de sa première circumnavigation durant laquelle il séjourna à Tahiti. Il désigne, dans la littérature ethnologique, une prohibition à caractère sacré dont la transgression est susceptible d’entraîner un châtiment surnaturel3. En tahitien entre autres, le contraire de tabou se dit noa : ce qui est ordinaire, accessible à tous.

Par extension, le terme « tabou » désigne, dans son acception la plus générale, un sujet qu’il est préférable de ne pas évoquer si l’on veut respecter les codes de la bienséance d’une société donnée.

Les ethnologues ont fait de ce mot polynésien un terme générique s’appliquant à toutes les interdictions d’ordre magique, religieux ou rituel, quel que soit le peuple qui formule ces interdictions.

Émile Durkheim estime qu’il est fâcheux d’étendre ainsi l’acception d’une expression étroitement locale et dialectale. Il n’y a pas de religion où les interdictions ne jouent pas un rôle considérable. Les termes « interdit » ou « interdiction » seraient préférables. En outre, « tabou » désigne aussi bien l’interdiction que la chose interdite.

  • Le tabou est un phénomène religieux qui peut être vu comme la forme négative du sacré. Il exprime à la fois son caractère contagieux et dangereux. Il comprend trois éléments : une croyance dans le caractère impur ou sacré de telle personne ou de telle chose; une prohibition : l’interdiction de toucher ou d’user de cette personne ou de cette chose; la croyance que la transgression de cet interdit entraîne automatiquement la punition du coupable, qui verra, par exemple, son corps enfler ou dépérir; il aura un accident, perdra ses récoltes ou bien ses parents mourront. La transgression du tabou est punie de mort ou au moins d’ostracisme.
  • Le tabou, toujours en tant que phénomène religieux, peut aussi être vu comme un avertissement : une chose, une personne est chargée de puissance. La violation du tabou n’entraîne pas forcément un châtiment mais une réaction de la puissance. Celle-ci fascine l’être humain mais engendre aussi de la crainte. À tel point que le tabou fait éviter la parole, par peur de la puissance. « Quand elle persiste, la crainte se fixe en une observance […] nous saisissons dès lors comment, à la longue, le frisson devait nécessairement passer à l’état d’observance, et la crainte vivante dégénérer en formalisme. »4.

Le premier tabou de l’humanité est le tabou de l’endogamie : interdiction d’avoir des relations sexuelles avec sa parentèle. Il évoluera ensuite en tabou de l’inceste avec la complexification des sociétés humaines consécutives à son application.

  • La maladie (en particulier le sida ou le cancer) et la mort ;
  • Les odeurs corporelles, les excréments, le manque d’hygiène dans les lieux publics ;
  • La sexualité et le désir, notamment dans leurs formes jugées déviantes, tels l’inceste dans les sociétés traditionnelles, la pédophilie, le viol dans les sociétés modernes;
  • L’argent et la mendicité ;
  • Le lesbianisme, dans certains milieux et à certaines époques ;
  • L’affaire Dreyfus, à la fin du XIXe siècle ;
  • La Commune de Paris, à la fin du XIXe siècle et début du XXe siècle ;
  • Le nazisme et les faits s’y rapportant, par exemple la collaboration durant l’Occupation allemande ;
  • La critique de la religion.
  • Certaines maladies psychiatriques (trouble de la personnalité paranoïaque et états délirants, notamment).

 

http://www.patrickbanon.com/fondsdocumentaire/livres/TabousetInterdits-introduction.pdf

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Peut-on tout dire (à autrui) ?

I- Peut-on tout dire (à autrui) ?

 

Les différentes formes de l’impossibilité de dire : de l’interdiction logique,technique, sociale (tabous), à l’interdiction morale (le respect et le tact), en passant par le problème de la liberté d’expression.

Possibilité technique et logique :

-le contradictoire

-l’irréel : ce qui n’existe pas

-l’insensé, incompréhensible « charabia » : grâce à la structure du langage, phonème/monème pouvoir génératif infini

Pb : en disant tout, on vide la parole de tout contenu, de sa raison d’être et son authenticité.

Impossibilités et interdictions sociales et morales :

  1. A) Le tabou : Ce qui se dit/ce qui ne se dit pas. (Origine et fonction du tabou : d’où viennent les tabous ?) : La  loi du silence  comme instrument de domination et de protection des groupes qui détiennent le pouvoir (cf. : le secret de famille, les villages, petites sociétés) ? Faut-il vivre sans tabous ? Peut-on tout dire (pour autant !) ?

Débat possible : sur Le problème de la liberté d’expression et de ses limites. Films possibles : Chomsky & Cie (Dvd 1, chapitre 5) (ex : propos racistes, Noam Chomsky sur Faurisson). + « C’est dur d’être aimé par des cons » sur le procès de Charlie Hebdo et des caricatures. Se donner la possibilité de différencier le tabou (interdiction silencieuse) et la loi.  

  1. B) Le tact, la délicatesse et la politesse : Différence entre le tabou social et la parole respectueuse : ce qui n’est ni tabou, ni interdit par la loi et qui pourtant ne se dit pas. La politesse comme espace public non contigu. Pour une éthique du tact, de la politesse (2 figures de la délicatesse) comme éthique du langage même (cf. Barthes, Cours sur le Neutre LN3,  4e scintillation de la figure portant sur la « délicatesse » : la politesse 17m30s-22m28s. Ex. du Tao et de la politesse du mort… + La société intégrale, Cédric Lagandré. +Le pathos de la distance chez Nietzsche, 25 Par de-là le Bien et le MalGénéalogie de la Morale 1 §2 lié au problème de la hiérarchie et à la critique de l’égalitarisme et de l’indifférenciation)+ Norbert Elias, La civilisation des moeurs. 
  2. C) L’éthique de la discussion, Jurgen Habermas. Introduit par la chanson « Paroles, paroles… »  Dalida et Alain Delon. Les paroles ne sont-elles que des mots ? Parler c’est « prendre la parole », « donner sa parole », s’engager, « prendre position », se mettre à exister hors de soi, dans l’espace public.  

 

  II-Y a-t-il de l’indicible ? (Ce que le langage ne parvient pas à dire) (soit excès soit pas assez)

  1. A) Le langage et l’indicible : 

 

  1. a) La critique Bergsonienne du langage : Nommer c’est classer (classer c’est « subsumer ») Qu’est-ce que Nommer ? Dieu le Verbe, l’enfant… Les catégories du langage correspondent-elles à la réalité ?

 

  1. b) « Le réel est ce contre quoi je bute », Lacan. Ce qui nous arrive de grand nous prive de parole : être « sans voix », l’impuissance du discours. « Y’a pas de mots !!! » (ex : la mort , la joie, le coup de foudre…). FRAGMENTS D’UN DISCOURS AMOUREUX,Roland Barthes : tentative de description de l’être aimé. Adorable p.   . Nommer c’est réduire (le désir d’être sans noms). Impossibilité de dire ou difficulté à dire ?

 

  1. c) Débat sur les images et l’inimaginable : L’interdiction de la représentation…
  • Shoah, Claude Lanzmann : Dire l’indicible ?

(Transition : à mettre en // avec la polémique autour des films La vie est belle de Roberto Benigni et La liste de Schindler de Steven Spielberg)

  • Images malgré tout,  Georges Didi-Huberman. La shoah est-elle inimaginable ? INIMAGINABLE ET IMPENSABLE. (+ Ce qui reste d’Auschwitz, Giorgio Agamben). Textes : La polémique autour de l’exposition (4e de couverture), l’accusation de Lanzmann de vouloir produire une fascination par l’horreur, la tentative nazie de détruire les images et de produire de l’inimaginable, inimaginable et impensable, l’image comme source de connaissance consciemment lacunaire et comme libération (Naufragé et rescapé, Primo Lévi sur son agacement face au thème de l’incommunicable. Jorge Semprun, L’écriture ou la vie : devant les images de son camp vue aux actualités).
  1. B) L’indicible et l’impensable : Peut-on penser sans les mots ?
  2. a) La critique hégélienne de l’indicible (ineffable) :

intro : On a souvent l’impression qu’on peut avoir compris sans réussir à réexpliquer (cf en cours !). On dit alors « J’ai saisi mais  je ne sais pas comment dire. J’ai pas les mots… ». Qu’ai-je lorsque je n’arrive pas attraper ce que j’ai saisi !?

Texte de Hegel, Phénoménologie de l’Esprit (compléter avec le texte de Merleau-Ponty sur le fait de « penser dans les mots »)

 

  1. b) Si on pense dans et avec les mots : La langue dans laquelle on s’exprime influence-t-elle notre pensée ? + problème linguistique et métaphysique Sans les mots y aurait-il des choses ? Texte de Martinet « La langue n’est pas un calque du monde » Texte de Nietzsche, Le livre du philosophe : « Derrière chaque grammaire se trouve une métaphysique ». Le problème de la création des langues chez Nietzsche : Introduction théorétique sur la vérité et le mensonge du point de vue extra-moral.

+ texte de Benveniste

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Benvéniste, Piaget, Lacan, Levi-Strauss

http://apprendre-la-philosophie.blogspot.fr/2010/03/explication-dun-texte-de-emile.html

http://www.item.ens.fr/index.php?id=64244

http://dcalin.fr/textes/parole_enfant.html

 

un sujet proche de ce que j’ai donné en colle :

http://www.ac-grenoble.fr/PhiloSophie/logphil/notions/langage/methode/sujets/dissert/langhum/langhum.htm

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Rousseau : origine du langage/langue

Essai sur l’origine des langues 

Discours sur l’origine et les fondements de l’inégalité parmi les hommes 

http://m.antoniotti.free.fr/rousseau.htm

https://www.youtube.com/watch?v=O5yta_rafr4

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« Il pleure, que dit-il ? » Le langage universel du nourrisson.

http://www.lepoint.fr/societe/les-dix-mots-du-nouveau-ne-06-10-2016-2074068_23.php

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Génèse de la parole chez l’humain et l’enfant

CF Podcastscience

vidéo de Leroy-Gourhan

L’évolution du larynx et son fonctionnement

une superbe émission sur les origines du langage

enfant = celui qui ne parle pas !!!!!

acquisition du langage par l’enfant

Existence chez l’enfant d’activités langagières et cognitives qui précèdent la production d’un langage articulé et conceptuel (au sens cartésien du terme). ces activités pré linguistiques (combinaison de symboles ou faculté d’attribuer à un autre une croyance que l’on ne possède pas) opposent le jeune enfant au singe supérieur incapable de ce type de performances décisives pour le développement ultérieur de l’intelligence. 

L’apparition de la faculté linguistique est un phénomène long, lié à l’évolution de la boite crânienne et aux techniques de fabrication d’outils de l’Homo habilis (plus de 2 millions d’années) jusqu’à l’Homo sapiens beaucoup plus récent : « outils pour la main et langage pour la face sont deux pôles d’un même dispositif » affirme Leroi-Gourhan.

L’humanité se caractérise par la fonction symbolique car le pouvoir de substitution à des réalités matérielles ou spirituelles. grâce à elle, l’individu parvient à se soustraire à des situations pour profiter d’êtres situations et accéder aussi au plan de la représentation et, de ce fait, il intègre l’apport culturel du groupe social auquel il appartient.

le premier stade de l’activité intellectuelle de l’enfant est concentré dans le geste qui lui permet d’imiter les objets de sa perception d’abord en leur présence, ensuite en leur absence. énorme progrès car l’imitation  retardée engrange la puissance d’évocation de l’individu; l’ouverture à la voie représentative s’est donc manifestée ainsi que la reproduction du monde objectif par les moyens propres. Le progrès décisif provient de ce que ces activités ne sont pas de simples doublets des choses; l’enfant, en jouant sur leur absence puis leur présnece,, opère sur le monde, un peu comme les suites ordonnées de rites de la pensée primitive ont pour fonction de modifier certains rapports de la réalité.

De surcroit, à la capacité d’évocation de l’image, s’ajoute peu à peu l’apport linguistique. l’enfant s’aperçoit que le mot n’est ni le simple signal, ni l’indice des choses, qu’il n’a quasiment aucune correspondance analogique avec l’objet. Parvenue à ce stade, la pensée s’est complètement intériorisée, elle est devenue totalement symbolique. ce qui auparavant appartenait au domaine individuel de l’image s’est généralisé, la pensée conceptuelle a pu naitre. Il y a donc à la fois différence et continuité entre l’image et le concept, par l’osmose des expériences individuelles et des expériences collectives transmises par les mots.

Enfin l’apparition de la pensée catégorielle résulte de l’aptitude de l’esprit qui a mûri à reconnaitre et établir des liens entre les choses. C’est par elle que je suis capable de porter des jugements. le jugement est l’acte de l’entendement par lequel celui-ci met en relation une réalité singulière avec un concept. Par exemple, quand je dis : « Socrate est laid. « , je juge en attribuant le concept de laideur à l’individu unique Socrate. Or c’est par les catégories que notre pensée juge. Si, par exemple, j’affirme : « le baromètre baisse, il va pleuvoir. », j’établis une relation de cause à effet, ainsi mon jugement renvoie à la catégorie de la causalité. or ce que montrent Wallon et Piaget, c’est que les catégories ont une histoire. Ainsi, la catégorie d’abstraction dont on repère une étape essentielle dans la catégorie primitive de l’occulte : ‘Matrice des catégories par l’intermédiaire desquelles l’homme s’est efforcé, pour agir sur l’univers de le penser, de le connaitre, en le tenant pour distinct des simples situations qui appartiennent à l’expérience immédiate et brute. »(De l’acte à la pensée. Wallon 1ère partie chapitre 3

On constate donc que les catégories ne sont jamais définitivement scellées. La pensée catégorielle est en devenir. C’est l’humanité qui a forgé les catégories pour penser le monde, et l’enfant répète ce geste.

correspondance humanité enfant génèse, généalogie.

Cependant il ala chance de réaliser en quelques années ce que l’humanité a mis des millénaires à accomplir, il en est l’héritier.

La pensée enfantine est loin de détenir la spontanéité que généralement on lui octroie. les expériences de l’enfant sont imprégnées de la mémoire collective. C’est pourquoi nos connaissances immédiates ne le sont que prétendument. … opinions (penser par soi-même p 45

Marqué par la pauvreté de ses moyens d’action, sinon de ses besoins, le nourrisson serait bien incapable de survivre sans l’aide d’autrui. l’enfant est alors un flux d’énergie ouvert sur l’autre et la satisfaction de ses besoins élémentaires dépende l’entourage en particulier de sa mère. Ses premiers réactions ont comme effet, d’abord non voulu, de mettre en branle les personnes de son entourage qui donnent sens à ses manifestations les plus physiologiques. Une sociabilité initiale greffe ainsi l’enfant sur autrui, à travers ce que Wallon appelle le langage de l’émotion : c’est par ce dernier que l’enfant se structure et il est bien antérieur aux interactions entre l’individu et les objets matériels dans lesquelles Piaget voit quant à lui un des ressorts principaux de la construction des structures logiques de l’intelligence. Par ce langage de l’émotion, l’enfant fait l’expérience à la fois d’une participation à l’autre dans laquelle ne peut être précisée aucune délimitation nette entre les individus qui communiquent et d’un dédoublement qui entraine peu à peu la formation simultanée d’un pole subjectif et du pole constitué par l’autre.

Par là s’exerce une double causalité, à la fois biologique et relationnelle : le corps et les attitudes tonico-posturales de l’enfant vont prendre forme à partir du dialogue corporel avec autrui, et constituer l’étoffe, le matériau dont seront faites les émotions. Le langage de l’émotion repose sur la maturation biologique du diencéphale (thalamus) et des corps striés, mais si l’enfant éprouve les mouvements de la douleur de la joie du chagrin de l’impatience de la gaieté.. et se plait à jouer de leurs variations ce n’st pas sous l’effet d’une maturation simple qui conduirait une fonction potentielle à son actualisation : la fonction ne prend sens qu’à partir de la situation qui l’appelle, le dialogue avec autrui. Aussi l’enfant sauvage Victor de l’Aveyron dont les capacités physiques sont pourtant particulièrement exercées, commence par ne pas communiquer avec les humains qui l’ont recueilli et n’accède à l’échange affectif que très lentement après avoir partagé avec eux des expériences qui peu à peu l’humanisent.

A la double causalité, à la fois biologique et sociale, qui semble présider aux processus de subjectivation, va cependant s’en ajouter une nouvelle, à partir du moment où le sujet prend conscience de soi comme différent des autres, une causalité proprement psychologique : l’individu finit par intérioriser les personnes avec lesquelles, avant même qu’il puisse se saisir comme distinct, il a été lié, et le dialogue moi-autrui peut désormais se dérouler pour une grande part à l’intérieur du sujet lui-même. Le problème du devenir-sujet de l’individu se formule alors d’une manière plus subtile : si le sujet prend une part de plus en plus active à sa propre différenciation et deveniez dans une certaine mesure cause de soi-même il le fait aussi en fonction des influences qu’il a subies de la part de « cet étranger essentiel qu’est l’autre » et qu’il a intégré comme pole constitutif de lui-meme.

L’homme en tant qu »homme ne prend figure que dans une collectivité humaine et ses besoins avant meme d’être naturels sont historiques : l’enfant n’accède meme à la marche debout et à la parole que parce qu’il est elevé par des humains eux memes marchant et parlant ; livré à ses seules potentialités naturelles, jamais ces fonctions ne prendraient sens pour lui, comme en témoignent les enfants sauvages. L’homme est génétiquement social pad que sa genèse reçoit son impulsion de la société, trouve hors de soi à l’extérieur de son propre corps organique « cette somme de forces de production de capitaux de formes de relations sociales que chaque individu et chaque génération trouvent comme des données existantes. » Marx L’idéologie allemande.

et qui sont le point de départ historique de son développement l’essence haine sociale dans s réalité toujours concrète.

Tout langage est d’abord reçu. le petit enfant le reçoit tout fait du milieu, comme il en reçoit sa nourriture. … Les mots sont là avant même l’émergence de la conscience personnelle, à laquelle ils proposent ou imposent des sens cristallisés.

avant la parole il y a toujours eu une langue, avant le langage sujet un langage-objet, réalité en soi, constituée par les autres et dont les autres imposent à l’enfant l’apprentissage. Le langage est ici un monde, ou plutôt il est le monde qu’il faut découvrir mot à mot en passant du babillage « griffonnage articulé » Delacroix à la parole articulée. …il parle de lui à la troisième personne avant d’accéder à la première.

avant de prendre la parole, il faut l’avoir reçue toute faite. …si je parle c’est moins pour moi que pour l’autre; je parle pour m’adresser à l’autre, pour me faire comprendre. La parole est ici comme le trait d’union.

le langage enfantin demeure largement égocentrique : babillage et jeux de mots passe temps articulatoires, se situent en dehors de l’utilité pratique et de la réalité sociale.

seulement après 7 ans, que communication l’emporte sur l’expression.

quand plus besoin de s’exprimer plus envie de vivre

p71 Rien n’est tout à fait vrai pour nous aussi longtemps que nous ne pouvons pas l’annoncer au monde comme à nous-m^mes. la publicité fait partie de nos joies et de nos peines, l’amoureux ne peut s’empêcher de clamer son bonheur, le converti sa foi, le malheureux sa désespérance. l’expression est la prise de conscience : la parole atteste de la distance prise: passer de la passivité du rongement intérieur à l’activité créatrice, l’expression a valeur d’exorcisme

développement du langage chez l’enfant :

http://www.ac-grenoble.fr/savoie/mat/group_de/theorie/dev_lang.htm

 

Piaget : sur le développement mental de l’enfant lié au langage

http://books.openedition.org/pup/754?lang=fr

http://www.fondationjeanpiaget.ch/fjp/site/textes/VE/JP_26_repres_monde_intro.pdf

l’enfant n’était pas considéré dans l’Antiquité comme un sujet de droit, au Moyen Age comme une petit homme (en miniature) et sa parole n’était pas prise en compte.

https://www.cairn.info/revue-recherches-familiales-2012-1-page-131.htm

 

les rapports humains s’appuient sur le langage, la parole ne fait pas que faciliter les rapports elle les constitue. 

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A- Langage-Langue-parole

La parole comme seuil de l’univers humain, privilège de l’humanité ?

A -Langage langue parole , différence homme/animal 

langage 

Au sens large, le langage signifie tout système ou ensemble de signes permettant l’expression ou la communciation. En ce sens, on parle couramment de langage informatique ou langage animal. mais le langage au sens propre est une institution universelle et spécifique de l’humanité qui comporte des caractéristiques propres. 

Le langage est un système de signes permettant la communication entre deux individus dotés d’un code commun. On parle de langue naturelle pour qualifier l’institution proprement humaine, dans laquelle les signes sont constitués de sons et d’écrits.

on opposera le langage en tant que faculté ou aptitude à constituer un système de signes à la langue qui est l’instrument de la communication propre à une communauté humaine. une langue est un ensemble institué et stable de symboles verbaux ou écrits propres à un corps social et susceptible d’être bien ou mal traduit dans une autre langue. Enfin, le langage ne doit pas non plus être confondu avec la parole, qui est l’acte individuel par lequel s’exerce la fonction linguistique. 

En réalité nous avons trois notions bien distinctes et trois séries de problèmes.

1° D’abord la langue : la langue représente un système particulier de mots, un ensemble fixé dans une société donnée (ainsi parle-t-on de la langue française ou anglaise), un pur produit de l’histoire sociale et culturelle. La langue est définie généralement comme un système de signes.

Le langage lui-même se définit comme la principale faculté humaine de communication. Elle est universelle, tous les hommes la possèdent malgré les handicaps ou les pathologies possibles. Le problème est celui de la finalité de cette fonction : d’abord expression de soi, ou d’abord communication avec l’autre ?

La parole désigne l’acte individuel par lequel s’exerce concrètement la fonction du langage, et ceci grâce aux organes de la phonation (glotte, pharynx, etc.). Comme tout acte, cet acte de parole suppose un sujet. Et comme tout acte encore, il peut changer la réalité : la parole n’est pas sans conséquences ! La parole représente un pouvoir, un moyen pour le sujet d’influencer autrui et de transformer le monde ; c’est aussi et avant tout l’occasion de signifier son propre désir. C’est pourquoi il sera intéressant de poser le problème d’une éthique de la parole. Peut-on tout dire ? Quand faut-il prendre la parole ? Qu’est-ce qu’une parole vraie, authentique ? Qu’est-ce que bien se parler les uns les autres ?

Particularité du langage humain : apanage de l’humanité ?

parole comme seuil de l’univers humain ?

 

il ne manque à l’animal que la parole ??

le langage est la condition nécessaire et suffisante pour l’entrée dans la patrie humaine.

les bêtes ne parlent que dans les contes de fées. l’homme est l’animal qui parle. elle recouvre et absorbe les définitions traditionnelles par le rire ou la sociabilité.

L’espèce humaine est la seule à disposer d’un moyen d’expression et de communication dont la complexité et l’efficacité témoignent  d’une capacité elle aussi unique, celle de penser et de raisonner. les mots sont des signes qui renvoient à la fois à la réalité et aux images mentales que nous formons des choses, des êtres, des actions, des valeurs, auxquelles nous croyons. le sens d’un mot, c’est ce que nous voulons dire lorsque nous l’employons et ce qu’il évoque chez celui auquel il s’adresse. le sens n’est donc pas dans les choses elles memes. c’est notre façon d’organiser nos représentations et d’attribuer à chacune une place dans un système qui fait correspondre des signes aux choses et qui nous conduit à conférer à chacun de ce signes un sens particulier. avec l’apparition du langage, « lUnivers entier d’un seul coup, est devenu significatif. » levi Strauss

Il y a une grande différence entre le langage humain et le langage animal. Le cri des animaux exprime un affect, une émotion, parfois il annonce un comportement ou répond à celui d’un congénère. Il y a donc communication. 

Le langage humain est caractérisé par plusieurs faits essentiels :

1-il préexiste tout d’abord aux sujet qui l’utilisent, comme une institution dotée de normes et de règles transmissibles (langue)

2-il peut produire une infinité potentielle d’énoncés différents à partir d’un nombre limité de signes combinés (le langage est dit « génératif »). ;

3- dialogue d’idées :le dialogue est le propre de l’homme. Seul l’homme est capable de communiquer avec autrui, mais aussi d’échanger avec lui de questionner et de répondre. C’est que pour l’homme, le langage n’est pas essentiellement comme chez les animaux un outil de communication un simple relais d’action bien qu’il puisse l’être parfois notamment lorsqu’il sert à donner des ordres mais ce par quoi il accède à la pensée et à la représentation. le dialogue est échange d’idées.

  • 3- enfin il permet un usage métalinguistique c a d qu’il est possible d’en parler.
  • On distingue, outre ces traits essentiels, plusieurs fonctions possibles du langage : fonction de communication; d’expression des sentiments, fonction appellative (quand l’orateur cherche à provoquer chez l’auditeurs certaines émotions sans les partager lui-meme); fonction d’élaboration de la pensée: fonction esthétique; fonction métalinguistique; enfin fonction pratique ( les mots ne servant alors qu’à maintenir une sensation de contact entre les interlocuteurs comme dans le bavardage) mais pouvant également agir sur le monde et les autres.
  • Il semble que la fonction première soit bien celle de communiquer.

1 les animaux communiquent à l’aide de signaux ayant une signification précise et limitée (sinon unique). Tandis que le langage humain, intentionnel, conscient, souvent imprévisible ouvre des usages et des significations multiples, voire infinis.

traits spécifiques du langage humain : double articulation communes à toutes les langues naturelles et donc propre au langage humain : une première articulations découpe la langue en unités de sons en même temps que de sens (les mots ou syllabes dits monômes); une seconde la décompose en quelques dizaines d’unités phoniques élémentaires en nombre fini et fixe (les phonèmes). Ainsi avec une quarantaine de sons (et de signes correspondants), chaque langue peut effectuer des combinaisons (monèmes puis mots puis phrases) en nombre quasiment illimité tout en épargnant la mémoire. ce fonctionnement très particulier rend possible la constitution d’énoncés en nombre potentiellement infini à partir d’un nombre d’éléments extrêmement réduit, d’où la richesse et la flexibilité remarquable du langage humain. la langue est un sytème cas un assemblage d’éléments interdépendants qui se soutiennent mutuellement et qui ne peuvent se comprendre isolément ( dico caractère circulaire de la signification des mots.)

Saussure Cours de linguistique générale pas publiés mais notes d’élèves

la communication animale n’est pas articulée en phrases, elle n’est donc pas intelligente au sens où elle n’exprime pas la pensée logique. 

l’avènement du mot manifeste la souveraineté de l’homme. L’homme interpose entre lui et le monde le réseau de mots et par là le devient le maitre du monde

l’animal ne connait pas le signe mais le signal seulement c’est à dire la réaction conditionnelle à une situation reconnue dans sa forme globale mais non analysée dans son détail.

le mot humain intervient comme un abstrait de la situation. il permet de la décomposer et de la perpétuer cas d’échapper à la contrainte de l’actualité pour prendre position dans la sécurité de la distance et de l’absence.

le monde animal : succession de situations toujours présentes

le monde humain : ensemble d’objets stable

le monde humain n’est plus un monde de sensations et de réactions mais un univers de désignations et d’idées.

 Le signe linguistique

La langue est composée de signes. Le signe, pris en un sens très général, est un outil de représentation : il remplace quelque chose pour quelqu’un.

 Le signe s’adresse à quelqu’un et évoque pour lui un objet ou un fait – passé, présent, ou avenir – en l’absence de ceux-ci.

capacité d’abstraction, de se dédoubler, de se détacher de l’immédiat pour se projet dans le temps, l’espace

cf conscience, humanité singe, leroi gourant,  paléo, enfant

Les signes linguistiques présentent un aspect oral et un aspect écrit. On distingue classiquement trois grands types de notations écrites apparues dans l’histoire (depuis 4000 ans av. J.-C.). 1° Les pictogrammes sont des dessins complexes ou une série de dessins fixant un contenu sans se référer à sa forme linguistique (chez les Indiens d’Amériques, les Esquimaux…). Il n’y a pas de rapport entre le langage oral et le langage écrit. 2° Les idéogrammes (parfois appelés logogrammes) sont des marques des différents mots : contrairement au précédent, ce type d’écriture est déjà ordonné (exemple : les Chinois). 3° Les phonogrammes sont des marques des éléments minimaux de la langue parlée : les phonèmes. Les signes écrits, les lettres, sont des transcriptions plus ou moins fidèles des phonèmes oraux. Ces écritures phonétiques (arabe, hébreu, latin, grec, français, etc.) sont incontestablement les plus récentes et aussi les plus complexes.

2. L’arbitraire du signe

Contrairement aux symboles (donc aussi aux pictogrammes), les signes qui composent la langue ne ressemblent pas aux choses : on dit qu’ils sont conventionnels ou arbitraires. Le symbole au contraire est un signe qui ressemble à l’objet signifié (comme les signaux visuels du code de la route ressemblent aux divers obstacles rencontrés sur la route).

  1. Signe et référent. Le signe ne se caractérise pas d’abord par sa relation avec une chose mais par sa relation avec les autres signes. C’est pour cela que la langue est un système. Rappelons qu’un “système” est, selon l’expression de Condillac, « la disposition des différentes parties d’un art ou d’une science dans un ordre où elles se soutiennent toutes mutuellement et où les dernières s’expliquent par les premières. » Certes le signe (un mot par exemple) possède ce qu’on appelle un référent dans la réalité (une chose ou une classe de choses). Mais il n’est pas lié à ce référent par quelque lien naturel ou nécessaire ; au contraire d’après le linguiste Ferdinand de Saussure, ce lien doit être considéré comme conventionnel et arbitraire. Il n’y a aucun lien magique entre le chat et le mot « chat », aucune ressemblance. Il n’y aucune raison d’appeler un chat « chat », tout simplement parce que si le mot chat n’existait pas à côté, par exemple, du mot « lynx », eh bien on appellerait sans doute les chats « lynx »…
  1. Bien sûr la « magie » ancienne étaient fondée sur la croyance inverse : les mots étaient censés refléter les choses ! Une chose, un mot ; le mot, la chose. D’où la superstition qui entouraient certains mots “magiques” : manier le mot, c’était manier la chose ! Appeler le démon par son nom, c’était le faire sortir de sa boîte.

En revanche les liens qu’entretiennent les signes entre eux dans la langue sont tout à fait essentiels et déterminants. « Dans la langue il n’y a que des différences » écrit Saussure. Cela explique tout simplement le sens des mots !

« Dans la langue il n’y a que des différences. (…) Ce qu’il y a d’idée ou de matière phonique dans un signe importe moins que ce qu’il y a autour de lui dans les autres signes. La preuve en est que la valeur d’un terme peut être modifiée sans qu’on touche ni à son sens ni à ses sons, mais seulement par le fait que tel autre terme voisin aura subi une modification. (…) De même les synonymes « craindre, redouter » n’existent que l’un à côté de l’autre; “craindre” s’enrichira de tout le contenu de “redouter” tant que “redouter” n’existera pas. Même, allons plus loin: “chien” désignera le loup tant que le mot “loup” n’existera pas. Le mot, donc, dépend du système; il n’y a pas de signes isolés. (…) Si vous augmentez d’un signe la langue, vous diminuez d’autant la signification des autres. Réciproquement, si par impossible on n’avait choisi au début que deux signes, toutes les significations se seraient réparties sur ces deux signes. » (Saussure)

b) Signifié et signifiant. Mais la constitution du signe est un peu plus complexe, d’autant que le référent n’en fait pas lui-même partie. Le signe se compose d’un signifié et d’un signifiant, c’est-à-dire d’un contenu et d’une forme. Le signifié est l’ensemble de ses significations et de ses usages, tout ce qui compose le sens du mot. Le signifiant est son aspect matériel, à la fois écrit (avec ses lettres) et oral (sa prononciation). Il n’empêche, selon Saussure, le lien entre le signifié et le signifiant n’est pas moins arbitraire que le lien entre signe et référent : une simple comparaison entre les langues suffit pour nous en convaincre.

Ainsi l’idée de «sœur» n’est liée par aucun rapport intérieur avec la suite de sons s—ö—r qui lui sert de signifiant ; il pourrait être aussi bien représenté par n’importe quelle autre : à preuve les différences entre les langues et l’existence même de langues différentes : le signifié «bœuf» , a pour signifiant b—ö—f d’un côté de la frontière, et o—k—s (Ochs) de l’autre.” (Saussure)

Le fait que certaines onomatopées et exclamations semblent mimer les phénomènes réels ne doit pas nous leurrer : il s’agit en fait de cas assez rares et donc d’importance secondaire. Ce problème de l’arbitraire du signe fut déjà abordé par Platon dans son dialogue Cratyle, où les deux personnages, Cratyle et Hermogène, défendent des thèses contraires : le premier pense que si le nom représente justement l’objet, il doit lui ressembler jusque dans ses éléments derniers (cad que certaines lettres, par exemples, représenteront mieux la douceur, d’autres la dureté, etc.) ; mais le nom “sklêrotês” (dureté) par exemple, contient une lettre (le “l”) qui évoque au contraire la douceur ; or le nom “sklêrotês” est cependant compréhensible ; par conséquent l’on doit se ranger à l’avis d’Hermogène et dire plutôt que le mot représente la chose et son sens grâce à une part de convention (ce que Saussure appelle l’”arbitraire”).

3) La critique du signe

1° Pourtant la théorie du signe, qui a eu l’avantage, pour la première fois, de permettre d’étudier la langue comme un système rigoureux soumis à des lois et des structures ordonnées, est aujourd’hui critiquée. On ne considère plus que la langue est d’abord un système de signes, mais plutôt qu’elle est un support du discours. C’est l’énoncé, c’est-à-dire la phrase, qui est la véritable unité élémentaire du langage.

D’abord la théorie du signe réduit abusivement le langage et ses énoncés à une unité élémentaire qu’elle appelle “signe” mais qui repose en réalité sur le “mot”. Or il est de plus en plus difficile d’admettre que l’unité minimale de la langue soit le mot. En effet, le mot n’obtient sa signification complète que dans une phrase, c’est-à-dire dans un rapport grammatical ou plus précisément syntaxique. D’autre part, ce même mot est décomposable en éléments morphologiques, les morphèmes, plus petits que lui, porteurs eux-mêmes de signification. Par exemple dans les mots donner, don, donneur, on peut isoler le morphème don-, qui implique l’idée d’offre, et les morphèmes –er, -, –eur qui attribuent diverses modalités à la racine don-. Enfin, la signification de ce mot ne sera complète que si on l’étudie dans un discours, en tenant compte des circonstances entourant la prise de parole.

D’autre part, la notion de l’arbitraire du signe a été remise en question. Il s’agit en réalité d’un faux problème. Il n’y a évidemment aucun rapport “naturel” ou “nécessaire” entre un mot et une chose ou même entre un mot et une idée représentée ; mais il y a bien un rapport quand même établi par l’usage et ses évolutions selon des lois qui échappent en grande partie aux usagers de la langue (et parfois même aux linguistes !).

principal fondateur de la linguistique : rapport entre pensée et langage rapports entre langage et réel langue parole et production de sens. mais abordent en linguiste et grammairien donc pas question des sujets parlants.

découverte relative aux langues indo-européennes : reconstituer l’origine commune et les liens de filiation qui unissent la plupart des tagues parlées dans le vaste espace géographique qui va de l’Asie centrale à l’Atlantique (vieilles langues germaniques sanscrit mec latin issus de la meme langue mère

système primitif des voyelles dans les langues indo européennes et l’emploi du génitif absolu en sanscrit.

langue définie comme un produit social de la faculté du langage qui ne se confond ni avec cette faculté ni avec la parole; il analyse les liens entre langue et écriture entre sons et sens dans les signes linguistiques ; il montre comment la langue est de la pensée organisée dans la matière phonique en élaborant les catégories de signifiant et signifié et évolution et diversité des langues.

il compare le fonctionnement de la langue à celui d’un jeu d’échecs « la valeur respective des pièces dépend de leur position sur l’échiquier ». dans la langue comme aux échecs si « les changements ne portent que sur des éléments isolés », chaque changement « a un retentissement sur tout le système »; Cours de linguistique générale ».

interdépendance, système qui unit stabilité des structures et variabilité des éléments

Selon Saussure, il faut distinguer dans la langage, la langue, phénomène collectif, placé en dehors de la volonté de ceux qui parlent, une sorte de « dictionnaire » identique en chaque individu et la parole « la somme de ce que les gens disent » (p3) distinction capitale car selon Saussure seule la langue peut être objet de science. 

Chomsky néanmoins rejette cette distinction qui lui parait restreindre l’aspect créateur du langage à la seule parole, et donc négliger la créativité de la langue elle-même, ce qui rend chaque locuteur capable de former une série infinie de combinaisons différentes. Il importe alors de dégager les règles de la combinaison, les lois structurales profondes permettant d’engendrer l’organisation de la phrase. (Chomsky La linguistique cartésienne).

Peut-on considérer la parole comme une communication ? Tel est un des présupposés de Saussure, très répandu chez les linguistes, et théorisé par jakobson. Pour ce dernier, toute communication est constituée de six facteurs : le message, le destinateur qui l’envoie, le destinataire qui le reçoit, le contexte dont parle le message, le code dans lequel le message est écrit, et le contact permettant d’établir la communication. (J Essai de linguistique générale p 213)

Pour que la définition de la parole comme communication soit générale, les linguistes qui la proposent ont soin de ne faire référence à aucune situation particulière et de considérer les locuteurs de la façon la plus abstraite. On comprend dès lors que Chomsky ait pu dire sa linguistique « cartésienne ». le recours à des locuteurs désincarnés tend à reconduire la définition de l’homme comme simple conscience et porte à négliger la concrétude du dire (la réalité même de la parole). 

C’est pourquoi d’autres linguistes préfèrent s’attacher aux discours concrets : certains étudient les manières de parler propres à un groupe social donné (socio-linguistique), d’autres la manière dont un énoncé prend sens dans un contexte d’énonciation (« hier », par exemple, n’a de sens que par rapport au jour où je parle), d’autres enfin la façon dont un discours peut faire pression sur autrui, le pousser à agir, voire, dans certains cas, (promesses, menaces, serments, injures), être l’action elle-même (pragmatique). 

faut-il étudier la langue en elle-même ou dans ses rapports à la société ? La première position est celle de Saussure puis des structuralistes qui voient dans la langue une structure, cad « une entité autonome de dépendances internes ». Saussure voulait que l’on tienne la langue pour un système de signes dont chacun n’aurait de valeur que par différence avec tous les autres. la relation entre les signes est donc antérieure à la valeur propre à chacun d’eux, si bien que, chaque valeur suppose toute la langue et rien que la langue. Pour Saussure, l’histoire reste externe à ce réseau de relations entre les signes; il faut donc étudier ce réseau de manière synchronique en un instant de son évolution. 

Toute la linguistique d’inspiration marxiste a critiqué cette évacuation de l’histoire, Bakhtine, par exemple, a montré comment chaque signe prend plusieurs indices de valeurs contradictoires, justement parce que toutes les classes sociales utilisent la même langue pur formuler leur intérêt propre. le meme mot « nègre » peut de la sorte être présent aujourd’hui dans les injures racistes et dans la revendication antiraciste des Noirs. le signe devient : « l’arène où se déroule la lutte des classes ». (B Le marxisme et la philo du langage p 44). cf chapitre sur parole et pouvoir.

-Texte sur les abeilles de Karl Von Frish , : danse des abeilles

-points communs et différences entre la communication symbolique des abeilles et le langage humain. cf Notions de philosophie : le langage

-Cas de Sarah et les Premarck (comparaison langage des signes symbolique des chimpanzés et langage humain.)

-Texte de Descartes Discours de la méthode, Lettre à Morus

différence homme singe : la parole apparait comme une fonction sans organe

comparaison apprentissage enfant et chimpanzé

En quel sens le langage est-il le propre de l’homme ?

-on peut entre par là que le langage est dans la nature de l’homme. On insisterait alors sur ce qui oppose le langage humain, où un petit nombre de sons dépourvus de sens peuvent être combinés en un très grand nombre de mots et une infinité de phrases de sens différents, aux cris des animaux qui ne signifient chacun qu’une seule chose, toujours relative au besoin. 

-On peut aussi entendre que la nature de l’homme est dans le langage et étudier comment chaque être humain conquiert dans le langage à la fois son statut d’être humain et sa personnalité propre. 

Plusieurs philosophes l’ont souligné. Quand Aristote définit l’homme comme l’animal discursif (Politique I,2 1253a) cela ne signifie pas que l’homme possède la Raison, cette invention de l’âge moderne mais bien plutôt qu’il est habité par la parole. Certains philosophes actuels considèrent que l’homme n’est qu’un corps et du langage, en réduisant à ce dernier terme tout ce que l’on a pu nommer esprit.

soutenir que le langage est le propre de l’homme n’est donc pas comme on l’admet parfois faire injure au monde animal. C’est seulement faire valoir que parmi tous systèmes de communication celui des êtres humains comporte des caractères particuliers et indissociables des autres caractéristiques humaines. Pour Descartes, le langage témoigne d’une faculté de penser et de raisonner propre à l’homme; et si les animaux ne parlent pas c’est faute de penser et non faute de moyens de communication, comme le prouve le fait qu’ils savent fort bien exprimer leurs passions. sans contredire Descartes, on insistera davantage sur le caractère historique et social du langage qui ne peut se concevoir sans un apprentissage progressif ni hors de tout contexte culturel.  

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Linguistique : Ferdinand de Saussure

La sémiologie a beaucoup apporté à la linguistique par son étude des systèmes de communication. Un des premiers sujets d’étude qui a retenu l’attention des chercheurs est la constitution du CODE servant à communiquer oralement. La définition de ce code et de son usage par les communautés linguistiques constitue une des préoccupations principales de la linguistique.

La transmission de sens d’un individu à un autre repose sur l’existence du signe linguistique. Ferdinand de Saussure a été le premier à définir de façon précise cette notion importante, à l’aide des notions suivantes:

Le signe est formé de deux parties:

a) une partie matérielle: le SIGNIFIANT (image acoustique, image mentale du signe, la représentation mentale sonore)

b) une partie immatérielle: le SIGNIFIÉ (partie conceptuelle du signe –notion).

Prenons un exemple, le mot « oiseau »:

SigneLinguistique1

Le signe linguistique est donc le résultat de l’association d’un signifiant (aspect physique du sens) et d’un signifié (le sens). Il est difficile de concevoir l’un sans l’autre.

Le signifié est en réalité différent de la définition mais on l’utilise ici comme remplacement par souci de simplicité. Le signifié est constitué d’éléments de sens qu’on appelle les « attributs sémantiques » (concept tiré de la sémantique). Les attributs sémantiques d’un signifié se combinent pour créer le sens du signe. Ces attributs sont habituellement représentés par les linguistes sous forme de caractéristiques binaires (qui sont actives ou inactives, notées par « + » ou « -« ). Le signifié de « table » pourrait ainsi comporter les attributs sémantiques qui suivent: [+meuble][+une surface plane horizontale] [+surface servant à manger]. En précisant que la table comporte une seule surface plane, on l’oppose à la bibliothèque qui en possède plusieurs. En précisant que c’est un meuble, on l’oppose au plancher, à la patinoire ou au plafond. (Beaudoin 2002)

À ces deux distinctions signifiant-signifié, il faut en ajouter une troisième. D’un côté, nous avons la réalité sonore (ou écrite mais qui ne fait que traduire la réalité sonore) dont nous parlons ([wazo]), d’un autre côté nous avons la NOTION de l’objet auquel on réfère. Cette notion existe dans l’esprit des locuteurs, et c’est ce qui leur permet de se comprendre. Cependant, nous n’avons pas parlé de l’objet lui-même, celui dont on parle. Il s’agit du référent (l’objet physique, matériel dont les locuteurs parlent).

Le rapport entre le signifié et le signifiant est non arbitraire et nécessaire car il fonde le signe lui-même. Par contre, le rapport entre une réalité elle-même et un signe (la signification) est, elle, arbitraire et elle est le résultat d’une convention entre les individus d’une communauté linguistique particulière. Ce rapport constitue la base de toute communication linguistique, alors que les mots, ou comme nous pouvons les appeler maintenant les signes, prennent vie lorsque le lien entre signifiant et signifié est effectué, ce qui nous donne une signification entre une image acoustique et une notion, une réalité mentale (signifié).

À partir des observations précédentes, nous pouvons affirmer que le signe linguistique se définit par son caractère:

a. arbitraire:
Comme nous l’avons mentionné auparavant, il n’y a pas de relation « naturelle » entre le mot (ou le signifiant) et la réalité physique qui lui est associée (le signifié).

Par exemple, le choix du mot « bureau » ne repose sur aucun critère qui aurait pu favoriser le choix d’un tel mot plutôt qu’un autre.

Une exception cependant: les onomatopées. Dans ce cas, les mots utilisés sont relativement proches du son que l’on veut décrire, et ce, dans toutes les langues. ex.: le chant du coq, le bruit de la vache, le jappement du chien.

le bruit d’un canard:
-français: couin-couin
-anglais: quack-quack
-allemand: pack-pack
-danois: rap-rap
-hongrois: hap-hap

Si ce lien obligé entre la réalité et le signe linguistique existait, tous les humains parleraient probablement la même langue. Ce caractère arbitraire du signe fait que l’on doive apprendre un large vocabulaire lorsqu’on apprend une langue, quelle soit maternelle ou seconde.

É videmment, ce caractère arbitraire du signe linguistique ne s’applique pas aux autres sortes de signes. Par exemple, les signaux routiers doivent se ressembler à cause du fait que l’action est la même dans toutes les langues. Par exemple, un panneau comportant un pain indiquera aux locuteurs de toutes les langues et cultures (ou presque) qu’il y a une boulangerie à proximité.

b. conventionnel:
Pour que les membres d’une communauté se comprennent, il faut qu’ils s’entendent sur les mêmes conventions ou sur les mêmes signes. En conséquence, les signes sont considérés, comme nous avons dit précédemment, comme étant conventionnels, en cela qu’ils résultent d’une convention entre les membres d’une communauté. En fait, partager la même langue, c’est également partager un certain nombre de conventions.

c. linéaire:
Le signifiant se présente de façon linaire dans l’axe du temps. il nous faut du temps pour prononcer un mot, pour le réaliser de façon physique. De même, il y a un ordre qui est suivi lors de sa prononciation. Dans la réalisation du signifiant [wazo], il ne m’est pas permis de prononcer les sons dans un ordre différent de celui que nous avons ci-haut si je veux que les autres locuteurs me comprennent. Les signes forment donc une successivité et non une simultanéité. Par opposition, les signes routiers peuvent se substituer: « obligation de tourner » et « tourner à gauche ».

Il est nécessaire de distinguer un signe d’un indice (signes non intentionnels): selon Prieto, il s’agit d’un fait immédiatement perceptible qui nous fait connaître quelque chose à propos d’un autre fait qui, lui, n’est pas immédiatement perceptible. Un indice est un phénomène naturel ou culturel, perceptible, involontaire ou non intentionnel et qui nous fait connaître quelque chose à propos d’un autre fait qui, lui, n’est pas immédiatement perceptible. 
ex.: symptômes d’une maladie, traces dans la neige, nuages noirs à l’horizon, etc.

Cependant, si je m’entendais avec quelqu’un pour lui dire que s’il voit des traces de pas dans le sable, en route pour mon chalet, il comprendra que je suis arrivé. L’intention de signification est essentielle dans l’identification d’un signal. Il en va de même de la présence d’une canne blanche pour indiquer un aveugle, trois coups cognés à la porte, les numéros de salle dans un édifice public, etc.

L’indice se différencie donc du signe par le fait que sa première fonction n’est pas celle de signifier quelque chose. Il peut très bien avoir une signification, mais ce n’est pas sa fonction première. Les signaux de fumée, s’ils ne sont pas effectués en vue de communiquer avec quelqu’un d’autre, ne constituent pas un signe mais bien un simple indice qui nous indique qu’il y a un feu à quelque part.

Aussi, nous pouvons effectuer une autre distinction entre un signe et un signal: un indice produit spécifiquement en vue de transmettre un message (contient les signes linguistiques, les symboles, et les signes non linguistiques)

Si j’élève la voix, si je me mets à crier, vous pourrez bien relier cet indice à ma condition psychologique et prendre cet indice comme indication que je suis un peu fâché, que je ne suis pas de bonne humeur.

L’indice est donc non conventionnel, involontaire, diversement interprétable mais signifiant (revenir là-dessus plus tard, après l’explication du signe linguistique).

Autre exemple: le voisin qui s’achète une Rolls Royce ou une Ferrari. Au départ, le fait de posséder cette voiture est un indice de sa richesse. Par contre, si le voisin en question a l’intention de lancer un message bien précis à ses propres voisins, celui qu’il est vraiment riche, qu’il a réussit, qu’il est dans une classe à part, alors cette même voiture deviendra un signe. Nous sommes en présence d’un message qui a été transmis avec une intention bien claire de le communiquer.

Comme nous l’explique Charles Peirce, lorsque deux signes sont liés par leur signifiés, on parle alors de symbolisation (ou connotation), et donc de la construction d’un symbole. Le symbole résulte d’une relation conventionelle et arbitraire commune à plusieurs cultures. Le signe linguistique est, en fait, un type particulier de symbole.

Ex. de symboles:

• une colombe symbolise un message de paix;
• un drapeau rouge symbolise une interdiction;
• signaux routiers : cercle rouge avec une ligne transversale symbolise aussi une interdiction.
• les tours du WTC de New York symbolisaient la suprématie financière de cette ville
• la couleur bleu poudre, dans les forces armées, symbolise une force neutre (casques bleus)
• le champagne (marque Dom Pérignon) symbolise la richesse et le luxe extrême

Il est également possible de transmettre du sens en utilisant une icone qui est créée par un lien analogique avec la réalité. Il y a une grande quantité d’icones largement utilisées par nos sociétés modernes et qui sont reconnaissables par un grand nombre d’individus dans les sociétés modernes. Considérez, par exemple, les images suivantes:

 

keybord
martini
computer mouse
printer
restaurant
tool

 

Il est relativement facile d’identifier, d’après les icones présentés ci-dessus, les significations de clavier, de bar, de souris, d’imprimante, de restaurant et de loupe pour modifier la taille d’un objet. Ces significations sont évidentes à cause du lien analogique direct entre l’élément utilisé pour représenter la réalité et son rapport extrêmement étroit avec l’objet qu’il représente.

En résumé, nous faisons les distinctions entre les notions suivantes:

SemiolRes1

Les langues naturelles comme le français et l’anglais par exemple sont des systèmes de communication basés sur l’utilisation de signes plutôt que de symboles et d’indices.

Cette relation entre le signifié et le signifiant nous amène à faire une autre distinction qui nous paraît importante du point de vue linguistique. Il s’agit de la double articulation du langage (deux types d’unités découpées sur deux niveaux distincts). Selon André MARTINET, la langue s’organise sur deux niveaux qui opèrent de façon différente. Pour lui, les unités qui s’enchaînent dans le discours ne s’enchaînent pas de la même façon et au même niveau.

André Martinet propose donc que la langue contient :
a) des unités de première articulation: les morphèmes (unités minimales de signification). Ce sont des noms (arbre, crayon, maison, etc.), verbes (manger, écrire, rêver, etc.), adjectifs (bleu, grand, rapide, etc.), etc. On note aussi que les « parties de mots » (comme le « -ons » dans le verbe « mangerons », ou le « eur » dans « réparateur ») qui ont une valeur grammaticale sont aussi appelées des morphèmes et qu’elles sont aussi porteuses de sens. En effet, à chaque fois qu’un verbe se termine par un « -ons », les locuteurs du français reconnaissent que le sujet est une première personne du pluriel (« nous »), peu importe le verbe.

Ex. 1:
a. « Je viens. » (2 morphèmes)
b. « Je viendrai. » (3 morphèmes)

1-je: pron. pers.
2-vien-: verbe venir
3-drai: futur, 1ere personne du sing.

Ex. 2 (utilisation du morphème « -ons »):
a. Nous viendrons.
b. Isabelle et moi voterons pour Steven Harper. 

Ce qu’il faut comprendre à ce moment et ce en quoi cette notion se rattache avec la sémiologie est que ces morphèmes sont constitués d’un signifiant ET d’un signifié.

L’analyse de la langue en morphèmes, champ d’étude fascinant, sera abordée de façon plus détaillée lorsque vous ferez de la morphologie dans le deuxième cours d’introduction offert au département (Fren 370).

b) des unités de seconde articulation: les phonèmes (unités minimales distinctives). Ce sont des sons distinctifs (ils changent le sens d’un mot (pont-bon, quand-banc) sans qu’ils ne soient porteurs de sens) propres à une langue.

Ces phonèmes ne sont constitués que d’un signifiant, sans signifié.
Autre illustration de la double articulation du langage: Combien de mots d’une seule syllabe pouvez-vous former qui se terminent par le son « -on »? Un étudiant bien inspiré pourrait arriver à cette simple liste qui contient un bon nombre de mots différent seulement par leur première consonne et qui se terminent tous par le son « -on »:

pont
bon
ton / taon
don / dont
con / qu’on
gong
font / fond
vont
son / sont
jonc
mon
non
long
rond

La langue peut donc « optimiser » son système en formant un grand nombre de mots différents avec une seule modification (remplacer un seul son) plutôt que de créer un nouveau mot complètement différent à chaque fois. Ceci est possible seulement par l’existence d’unités sans sens (les sons, ou phonèmes) que l’on peut substituer les unes aux autres pour changer le sens d’un mot. Cette particularité de créer un système productif contenant deux niveaux d’organisation pour communiquer constitue une différence majeure entre les systèmes de communication utilisés entre animaux et ceux utilisés par les humains.

En résumé, lorsque nous parlons de double articulation du langage, nous parlons de deux niveaux d’organisation du langage:

a) première articulation, les morphèmes (qui ont un signifié et un signifiant)

b) deuxième niveau d’organisation: les phonèmes (qui n’ont qu’un signifiant)

 

 

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