Le Livre des Merveilles

Le Livre des Merveilles est l’un des plus célèbres récits de voyage du Moyen Âge. Illustré de 265 peintures, il réunit l’essentiel des connaissances dont on disposait à la fin du XIVe siècle à propos des contrées lointaines traversées par Marco Polo durant son périple de 24 ans à travers toute l’Asie.

Vous pouvez découvrir quelques unes de ces remarquables illustrations en cliquant ici ou bien feuilleter l’ouvrage numérisé en cliquant ici.

Bonne visite !10660377_10152344987578193_254380803954851266_n

Visite de la chapelle de Magrigne par les CE1 de Saint-André-de-Cubzac

Mardi 31 janvier, nous sommes allés visiter une chapelle du Moyen Âge à Magrigne (St Laurent d’Arce). Cette chapelle a été construite vers 1180 par les moines Templiers.

Elle se trouve sur le chemin de St Jacques de Compostelle.

Les moines soignaient les voyageurs avec des plantes qu’ils cultivaient. Ils accueillaient aussi les voyageurs et leur donnaient à manger. En échange, les pèlerins donnaient de l’argent ou travaillaient dans les champs.

Les corbeaux servaient à poser des poutres en bois. Ces poutres en bois maintenaient les bâtiments construits à côté de la chapelle. C’est là que les voyageurs étaient (sans doute) hébergés et soignés.

 

Et pour compléter ce travail voici un dessin réalisé par Léo Drouyn le 15 mai 1859. 

Les Antonins et « le mal des Ardents »

Au moyen-âge, les épidémies étaient courantes et souvent dévastatrices : on se soignait mal et on ne savait pas toujours comment les éviter. De nombreux textes anciens évoquent, dès le Xème siècle, une maladie aussi mystérieuse qu’incurable : le mal des ardents, aussi appelée  feu de Saint Antoine. Hallucinations, gangrènes et sensations de « brûler » sont autant de symptômes que des moines, les Antonins, vont s’employer à guérir dés le XIème siècle. En effet, depuis une guérison attribuée à Saint Antoine, une communauté religieuse placée sous la protection de celui-ci va se consacrer aux soins des malades. L’ordre des Antonins va connaître un important développement, et comptera jusqu’à trois cents abbayes et commanderies à son apogée, au XVème siècle. Utilisant les vertus des plantes, les moines parviennent à guérir le mal, et créent des hospices dans toute l’Europe occidentale. Ce n’est qu’au XVIIème siècle que l’on découvre l’origine de la maladie : l’épidémie est en fait un empoisonnement de la population par la farine de seigle, lorsque celle-ci est infestée par un champignon : l’ergot.

Le champignon a aujourd’hui disparu dans nos régions, grâce à l’utilisation de pesticides. On l’utilise néanmoins à des fins thérapeutiques dans certains médicaments.

Les jardins médiévaux

Les jardins médiévaux sont un moyen privilégié pour comprendre les liens forts noués entre la société médiévale et le monde végétal. Nécessairement présents dans les abbayes sous la forme de jardin de cloître pour la prière, de jardin de simples pour l’infirmerie, de jardin potager pour l’alimentation, de jardin de fleurs pour les offices religieux, de verger, ils sont également fréquents dans le monde laïc, tant en milieu rural qu’en milieu urbain.

L’Europe médiévale est composée à 90% de paysans. Dans cette société, les jardins sont très importants à tel point qu’on pense aujourd’hui que chaque ferme possédait son jardin afin de subvenir aux besoins des familles. Ce jardin est l’objet de tous les soins car lorsque les prix des céréales (la nourriture de base) augmentent, il assure une certaine quantité de nourriture avec la porée.

Au IXe siècle, Charlemagne comprend très vite l’importance des jardins. Il dicte donc un document officiel : le Capitullaire de villis imperialibus, qui impose la culture de 70 plantes dans les jardins de son Empire. Sur le modèle de son propre jardin, Charlemagne donne la trame d’un jardin idéal qui doit comprendre des plantes médicinales, potagères, aromatiques et ornementales. Il souhaite par ce document que sur le territoire de l’Empire ces plantes ne manquent pas.

Les formes de jardins

Avant toute autre considération, il faut que le jardin soit enclos afin d’assurer sa protection contre les animaux domestiques ou sauvages. L’enceinte peut être faite : de buissons épais, d’arbres fruitiers palissés, de branchages entrelacés, creusée d’un fossé, d’une palissade de planches cloutées, d’un muret de pierres ou tout simplement d’une levée de terre. Un petit portillon en facilitait l’accès.

Voici la description faite par Pierre de Crescent d’une haie dans le Nord :

« Lon faict defense de pieux et de hayes quant on les peult avoir et les garnist on despines car lon aguise les pieux et les boute lon en terre demy pied ou plus et puis les lye lon ensemble de espines ou de oziers ou aultres lyens et tant plus y aura de pieux tant mieulx vauldra et peuvent estre mis loing de laultre deux piedz ou troys et y atacher au travers quatre perches fort lyees ausdit pieux et puis y mettre et lyer aulcunes defenses despines ou daultre chose »

Traduction : «  des pieux aiguisés plantés tous les cinquantes centimètres et reliés par des perches horizontales solidement arrimées, le tout tressé d’épines et fiché en terre à 15 cm environ de profondeur, voilà qui constitue une bonne défense, pour le jardin, la vigne ou le champ ».

Sources : Pietro de Crescenzi Le livre des prouffiz champestres et ruraux. Traduction, Lyon, Pierre de Ste Lucie, dit Le Prince, 1539.

A l’intérieur, l’espace est cloisonné en petits rectangles de terre cultivée autour desquels sont les allées. Un arbre fruitier peut en occuper un espace ; en ville un espace du jardin est réservé pour entreposer le bois de chauffage.

Dans les milieux pauvres, l’entretient du jardin est le plus souvent confié aux femmes : ce travail fait partie de leurs tâches ménagères (participation aux travaux des champs, puisage de l’eau, préparation des repas, soins aux enfants, lessives, filage, tissage, vente des légumes…).

Pierre de Crescent, source BNF
Pierre de Crescent, source BNF

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Le roman de la rose, source BNF

Le roman de la rose, source BNF

Albucasis, Tacuinum Sanitatis, BNF

Albucasis, Tacuinum Sanitatis, BNF

Chanson de Garin de Monglenne, BNF

Chanson de Garin de Monglenne, BNF

Renaud de Montauban, Source BNF

Renaud de Montauban, Source BNF

Livre d'heure de Louis de Laval, BNF

Livre d’heure de Louis de Laval, BNF

Pierre de Crescent, BNF

Pierre de Crescent, BNF

Le jardin potager

On trouve dans le jardin potager : arbre (en petite quantité), des « racines », des légumes, des herbes et des fleurs.

On cultive principalement le chou sous ses différentes formes, les bettes, les betteraves, les cardons, l’oseille, les laitues et les chicorées. Le chou est le constituant majeur du potage d’herbes, le plat quasi quotidien des vilains. Dans le jardin potager, on trouve aussi des plantes dont on consomme les racines : navet, chou rave, carotte blanche, panais, carotte rouge, maceron, céleri rave, chervis, campanule-raiponce, radis, betterave, et poireaux en très grande quantité. Navet, chou rave et carottes entrent dans la préparation du potage d’herbes dans lequel on ajoute aussi une poignée de légumes et de grains : fèves, pois, pois chiches, lentilles, doliques (qui ont précédé les haricots originaires du Nouveau-Monde), jarousses (gesses et vesces) ou de mongettes, autres ressources du jardin potager.

Généralement un carré est réservé aux herbes ; elles sont semées en petite quantité. Les principales herbes cultivées sont : menthe, sauge, persil, coriandre, mélisse, romarin, hysope, sarriette, marube, origan, rue, carvi. Les plus fragiles sont alors plantées en pot, telles la marjolaine, la sauge, le basilic, la violette, afin de la rentrer pendant l’hiver.

Dans ces jardins la part florale est réduite même si les fleurs ne sont pas seulement décoratives puisqu’au Moyen Age certaines fleurs sont mangées (violettes, fleurs de fèves et d’aubépine…).

Le jardin des simples ou des plantes médicinales

L’herbularius médiéval ne comprenait qu’un nombre restreint de plantes médicinales, par exemple 5 dans le Capitulaire de Villis et 16 dans le jardin de l’infirmerie de l’abbaye de Saint-Gall. En général, seules les espèces rares ou étrangères à la contrée étaient cultivées. Quant aux autres plantes, elles étaient ramassées dans la campagne environnante.

Chaque partie des plantes dont les propriétés médicinales étaient reconnues étaient administrées par voie orale sous forme soit d’infusions, soit de décoctions dans l’eau ou le vin, soit de poudres incorporées dans la nourriture ou bien par voie cutanée (cataplasmes et onguents, bains).

Les plantes dans les textes médiévaux

Savants et Botanistes

Les jardins médiévaux nous sont connus par plusieurs sources : iconographie, textes et traités médiévaux. Au Moyen Age, les ouvrages qui traitent des plantes sont à la fois des ouvrages de botanique, de philosophie, de mathématique, de religion. Ils sont écrits en latin jusqu’au XIVe siècle. Ces ouvrages découlent pour beaucoup des connaissances de l’Antiquité, principalement léguées par des auteurs grecs (Hippocrate et Dioscoride). Les textes des auteurs de l’antiquité ont été partiellement conservés dans les abbayes à travers le travail des moines copistes qui œuvraient dans les scriptoria, mais aussi par le biais des traductions arabes des textes grecs entre le VIIe et le Xe siècle. Ces textes ont en effet été traduits en latin au XIIe siècle à Tolède par Gérard de Crémone et dans l’Italie du Sud par Constantin l’Africain.

Cardère et Daphné

Cardère et Daphné (source BNF)

Tous les ouvrages de botanique se présentent tous sous la forme d’herbier. Chaque herbe est nommée, classée dans un ordre alphabétique et représenté peinte en vis-à-vis. Dans ces ouvrages, on décrit l’aspect de la plante, son parfum, son milieu naturel, la période de floraison de la plante et enfin ses caractéristiques particulières comme ses vertus médicinales.

Certains savants du Moyen Age nous ont laissé de très beaux traités de botanique :

Au VIIIe siècle : le De Villis, Capitulaire de Charlemagne, le plan de l’abbaye de Saint-Gall et le Liber de cultura hortorum de Strabon.

Au IXe siècle : le polyptique d’Irminon.

Au XIIe siècle :

  • De medicinis simplicibus (livre des simples médecines) de Mattheus Platearius. Il s’agit d’un recueil basé sur une observation des plantes et des maladies. Il apporte aussi beaucoup de solutions pour soigner les maladies.
Platearius Livre des simples

Therebentineplatearius

  • le Liber subtilitatum de divinis creaturis (livre des subtilités de créatures divines) d’Hildegarde de Bingen. Hildegarde était une femme abesse savante (ce n’est pas fréquent au Moyen Age) qui donne des recettes de soins et de remèdes.

Au XIIIe siècle: les grandes encyclopédies

  • dominicaine : le De vegetalibus d’Albert le Grand, premier auteur médiéval qui donne une description du jardin d’agrément ou utilitaire.
  • franciscaine : le De proprietatibus rerum (livre des propriétés des choses de Barthélémy l’Anglais), écrite vers 1230. Cet ouvrage aborde tous les aspects du savoir et de la description du monde animal et végétal. Cette encyclopédie a connu un très grand succès au Moyen Age et il en existe de nombreux manuscrits.

Au XIVe siècle :

  • le traité des Livre des Ruraulx Prouffitz de Pierre de Crescens. C’est véritablement le premier traité sur l’agriculture et le jardin. Dans cet ouvrage, Pierre de Crescens traite de nombreux sujets : l’agriculture, la nature des plantes et la fertilité des sols, la culture de la vigne, les arbres, l’horticulture, les prés et les bois, les jardins, les animaux d’élevage ou chassés et pêchés,  un récapitulatif des travaux des jours.

DeCrescent

  • Le Mesnagier de Paris, ouvrage écrit vers 1393 par un bourgeois de Paris afin de donner à sa jeune épouse des éléments variés d’instruction dans tous les domaines.

Tous ces documents révèlent l’étendue des connaissances sur la flore au Moyen-Age. Toutefois, ils ne sont accessibles qu’à la minorité de gens instruits.

Un peu de vocabulaire pour la visite du…

…Château


 

Archère en Croix Pattée

ARCHÈRE EN CROIX PATTÉE : Dans un mur, ouverture longue et étroite entaillée en son milieu d’une rainure pour tirer à l’arc ou à l’arbalète. Ce type d’archères apparait tout d’abord dans les régions sous domination anglaise.

ARC de DÉCHARGE : Élément d’architecture utilisé pour soutenir une construction supérieure en repoussant  son poids sur les côtés.

CONTREFORT : Pilier, saillie, mur massif servant d’appui à un autre mur qui supporte une charge.

COURTINE : Partie d’un mur de fortification comprise entre 2 tours.

DOUVES : Fossé, généralement plein d’eau, entourant un ouvrage fortifié pour en assurer la protection.

ÉCHAUGUETTE : Guérite en pierre, placée en encorbellement aux angles d’une muraille fortifiée ou d’une tour d’un château fort, d’un bastion, pour en surveiller les abords. Voir aussi : bretèche et poivrière.

LOGIS : Lieu d’habitation du seigneur et sa famille de même que les chevaliers les plus fidèles. Le logis est constitué par les cuisines, la grande salle où le seigneur reçoit ses hôtes, les chambres, l’oratoire qui permet d’honorer ses devoirs envers l’Eglise et l’étuve qui est une salle voûtée dans laquelle les châtelains prenaient des bains chauds.

MEURTRIÈRES : Ouverture, fente verticale pratiquée dans un mur de fortification pour jeter des projectiles ou tirer sur des assaillants.

MOTTE : Terre-plein surélevé circulaire, établi artificiellement.

PALISSADE : Barrière, clôture faite d’une rangée de pieux, de perches ou de planches afin de protéger les abords du château fort.

Un peu de vocabulaire pour préparer la visite de …

…L’église


APPAREIL / APPAREILLAGE : assemblage des pierres d’un mur, plus ou moins régulier

ARC BRISÉ : arc formé de deux portions de circonférence formant un angle plus ou moins aigu

ARCATURES : ensemble d’arcades

ARCHIVOLTE : arc supérieur au-dessus des voussures du portail

ASTRAGALE : moulure en forme de cercle située entre le chapiteau et le fût de la colonne

BAIES CAMPANAIRES : ouvertures pour les cloches.

CHAPITEAU : bloc de pierre taillé, souvent sculpté, surmontant le fût d’une colonne, d’un pilier ou d’un pilastre       et recevant la retombée d’un arc

CHEVET : partie extrême de la nef, à l’orient, assimilée à la partie haute de la croix recevant la tête (le chef) du Christ

CLAVEAU : pierre taillée d’une forme spéciale pour former un élément d’un arc

CLOCHER : tour ronde, carrée ou polygonale contenant les cloches

COLONNE : pile cylindrique ayant une base et un fût surmonté souvent d’un chapiteau

 

Colonne

Colonne

CORBEAU : pierre en saillie pouvant supporter une poutre ou une corniche

CORBEILLE : partie centrale du chapiteau, souvent décorée ou historiée

CORNICHE : partie saillante couronnant le sommet d’un édifice ou de l’une de ses parties

ENFEU : (vient de enfouir) niche funéraire creusée dans l’épaisseur d’un mur.

ENTRELACS : lignes courbes qui se croisent – Motif décoratif.

FACADE : face occidentale de l’église, à l’opposé du chevet, où s’ouvre souvent le portail

FONTS BAPTISMAUX : cuve de pierre où l’on pratiquait les baptêmes

FÛT : partie centrale de la colonne, entre sa base et le chapiteau

ICONOGRAPHIE : représentation décorative imagée, peinte ou sculptée

NEF : partie centrale de l’église, accueillant les fidèles, entre la façade et le sanctuaire

PIGNON : mur surmonté d’un triangle

PORTAIL : porte d’entrée de l’église

RINCEAUX : motif d’ornement courbe et gracieux représentant la tige d’un végétal d’où se détachent des rameaux

 

ROMAN : Nom donné à l’architecture chrétienne et à l’art chrétien des XIe et XIIe siècles.

SARCOPHAGE : réceptacle en pierre du corps du défunt

TAILLOIR : tablette décorée formant la partie supérieure du chapiteau

TORE : moulure ronde et épaisse

TRAVÉE : espace de la nef délimité par quatre piliers

VITRAIL : panneaux de verre sertis de plomb

Le calendrier des travaux agricoles

Le premier traité sur l’agriculture et le jardin est l’œuvre de Pietro Di Crescenzi (1233-1321), dit Pierre de Crescens en France. Né à Bologne, il étudie la médecine et les sciences naturelles et devient un homme de loi. Son Opus ruralium commodorum est le premier traité d’agriculture écrit depuis l’Antiquité. Aujourd’hui, le manuscrit original de cet ouvrage a disparu. Au XIVe siècle, cet ouvrage a connu un très grand succès et toutes les cours européennes voulaient en posséder un exemplaire. Ainsi, aujourd’hui on a 133 manuscrits de cet ouvrage (dans diverses langues).

En France, c’est à la demande de Charles V que le texte sera traduit en français en 1373 et intitulé : Rustican ou Livre des proffiz champestres et ruraulx. Il existe huit exemplaires du Rustican aujourd’hui et celui conservé à Chantilly est certainement le plus beau. Il fut très probablement commandé par le beau-frère du roi Charles VII et enluminé par le Maître du boccace de Genève.

Calendrier du Rustican

Calendrier du Rustican

Son ouvrage est composé de douze livres couvrant tous les sujets : l’agriculture en général et la meilleure localisation pour installer une ferme ou un manoir ; la nature des plantes et la fertilité des sols : les produits des champs, leur utilisation et leur culture ; la culture de la vigne, qui constitue la plus importante partie de l’ouvrage ; les arbres ; l’horticulture, avec la description de plus de cent trente plantes utiles pour la médecine et l’alimentation (Livre VI); les prés et les bois ; les jardins (l’une des parties les plus originales du traité et qui restera la base des ouvrages des XVIIe-XVIIIe siècles ; constitue le livre VIII) ; deux parties sur les animaux d’élevage ou chassés et pêchés ; un sommaire et enfin un récapitulatif des travaux des jours.

Le Calendrier illustre le XIe livre.

 

Janvier : Extraction de l’argile sous la neige.

Janvier

Janvier

Pierre de Crescens consacre plusieurs chapitres aux travaux de préparation des champs : sarclage, émiettement des mottes de terre avec un maillet, mise en valeur par la fumure, les engrais verts et d’autres amendements. Ces scènes agraires sont rarement reprises par les enlumineurs. Cette scène peut aussi représenter l’extraction de l’argile sur la berge d’une rivière, par un paysan à l’aide d’une pioche. L’argile récoltée est mise en tas derrière lui.
Rappelons que l’argile entre dans la composition des tuiles et dans la construction des murs des maisons paysannes et des étables à pans de bois. Les mois d’hiver sont propices à l’entretien des bâtiments.

Février : l’épandage de la fumure animale

Février

Février

La fumure (l’enrichissement d’une terre agricole par épandage de fumier), a toujours été l’un des points faibles de l’agriculture médiévale. Si les traités d’agronomie insistent sur sa nécessité, c’est précisément parce que la pratique en était rare, limitée à quelques grands exploitants agricoles comme les communautés monastiques. La stabulation (période pendant laquelle les animaux restent à l’étable) restait courte, et la litière, insuffisante en raison de la rareté de la paille, ne permettait pas de constituer des quantités importantes de fumier. Par conséquent, le fumier ne pouvait être répandu sur tous les terrains et la plus grande part en était destinée aux cultures à la bêche dans des lieux enclos : jardins, potagers, comme le montre l’enluminure. L’usage de la jachère était donc indispensable pour préparer les terres agricoles.

Mars : la taille de la vigne

Mars

Mars

Cette activité symbolise souvent la viticulture au Moyen Âge. En fait, ce travail se reproduit plusieurs fois dans l’année : d’après Pietro de’Crescenzi, en février ou mars seulement dans les régions froides, en octobre ou novembre et en février ou mars dans les zones les plus chaudes. L’auteur ne s’étend pas sur les techniques employées, les outils ni les gestes mais il apporte cependant des précisions intéressantes : la taille s’effectue généralement à l’aide d’une serpe à dos tranchant et saillant, avec une lame assez large. Le paysan, penché en avant, saisit de sa main gauche le sarment au-dessus de la serpe, qu’il tient de sa main droite. Au second plan, un autre paysan répète le même geste, mais agenouillé pour pouvoir tailler des branches plus basses.

Avril : la tonte des moutons

Avril

Avril

Recherché avant tout pour sa laine, le mouton était aussi considéré comme une bête à viande et servait accessoirement pour le lait et les fromages. En France septentrionale, l’essentiel du cheptel était constitué d’animaux de très petite taille, semblables aux actuels moutons de pré salé d’Ouessant.
Le parcage des animaux permettait de compléter les apports de fumier pour la fertilisation des terres. Les bergers étaient généralement des hommes mûrs, comme ici. Emmitouflé dans un chaperon bleu, son bonnet sur la tête, il immobilise entre ses jambes de sa main gauche l’animal choisi parmi le troupeau, qu’il se prépare à tondre à l’aide de grands ciseaux appelés forces.

Mai : la chasse au faucon

Mai

Mai

Le thème de la chasse au faucon provient des calendriers liturgiques et n’a pas de rapport avec le texte du Rustican, consacré à l’agronomie. En revanche, il ne peut que plaire aux lecteurs qui sont susceptibles de pratiquer cette chasse, considérée comme la plus noble et la plus distinguée de toutes. Le personnage est vêtu d’un pourpoint à manches fendues, vêtement élégant devenu à la mode depuis le XIIIe siècle, et il est coiffé d’une toque. Un faucon blanc se tient sur son poing gauche ganté.

 

Juin : la fenaison

Juin

Juin

Ici l’auteur évoque la fenaison. Le pré fauché est clos pour être protégé du vagabondage des animaux. La clôture est ici constituée par une palissade de bois dont les planches sont taillées en pointe. L’image nous renseigne sur la faux : sa lame tranchante est longue, légèrement arquée et le manche est pourvu d’une potence en son milieu. Il fait chaud, le faucheur est vêtu d’une simple chemise blanche fendue sur le côté, un chapeau de paille à larges bords le protège du soleil de juin.

Juillet : la moisson

Juillet

Juillet

De sa faucille, tenue de la main droite, le paysan, courbé, coupe une poignée de tiges de blé serrées dans sa main gauche. À son côté une femme se livre à la même besogne. La moisson se fait à la faucille : noter la lame très courbée, qui apparente l’instrument à une serpe. Peut-être est-elle dentelée, mais il est impossible de le distinguer. Il est également difficile d’identifier quelles céréales sont moissonnées : l’auteur conseille de planter un mélange d’orge, de millet, d’épeautre et de froment, mais il semblerait qu’on soit en présence ici d’une seule et même espèce.
La moisson à la faucille ne prélevait que le haut de la tige, laissant une importante quantité de paille après la récolte, et permettant la pousse d’une deuxième herbe, le regain, que l’usage de la vaine pâture livrait aux animaux de la communauté villageoise. Cette pratique disparaît à la fin du XVIIIe siècle, avec la clôture des champs et l’introduction de la moisson à la faux, qui laisse une herbe beaucoup plus rase tout en employant une main-d’œuvre bien moins nombreuse.

Août : le battage du blé

Août

Août

Pietro de’Crescenzi énumère dans son ouvrage différents procédés pour battre les céréales : à la verge, au fléau et par le dépiquage avec des chevaux. L’aire de battage est enclose de murs, qui dépassent 1m20 de hauteur, il est difficile de voir si son sol est recouvert d’argile détrempée, comme le recommande l’auteur. Le battage s’effectue en plein air. Le paysan porte des vêtements adaptés à son travail : il a les jambes et pieds nus, une chemise courte fendue sur le côté, la tête protégée par un chapeau de paille. Il tient à deux mains son fléau rejeté derrière la tête, prêt à être abattu sur les gerbes. Le fléau est muni d’un très long manche, sa partie battante, beaucoup plus courte, mesure environ quarante centimètres. Le batteur est aidé par une femme qui apporte des gerbes sur l’aire, tandis qu’il abat son fléau.

Septembre : les semailles

Septembre

Septembre

Le labour n’est pas représenté dans le calendrier, contrairement aux Très Riches Heures du duc de Berry. L’image insiste plutôt sur les semailles, auxquelles l’auteur consacre tout un chapitre de son ouvrage. La représentation des champs labourés se réduit à quelques sillons parallèles, dont on constate à l’arrière-plan qu’ils sont disposés perpendiculairement les uns aux autres. Le calendrier situe les semailles en septembre, ce qui correspond à la date préconisée par l’auteur pour les régions froides, tandis qu’il les repousse à la fin octobre ou en novembre pour les endroits ensoleillés. Le paysan marche en serrant la semence de son bras gauche ; il éparpille les grains de sa main droite, le bras écarté et baissé vers le sol. Il porte un tablier de semailles, ce qui correspond à l’usage français, alors que les enluminures des versions italiennes montrent la semence transportée dans un récipient en bois ou en osier que tient le paysan.

Octobre : le foulage du raisin

Octobre

Octobre

La scène se passe dans une petite pièce couverte. Le raisin, avant d’être mis en jarres, devait être foulé deux fois, mais il est impossible de déterminer à laquelle des deux opérations nous assistons. Le paysan est enfoncé jusqu’aux cuisses dans la cuve contenant les raisins, tandis qu’un second vendangeur verse le produit de la récolte contenu dans un panier d’osier. La cuve à fouler, large d’environ un mètre et haute d’à peu près 70cm, est posée sur deux cales en bois. Elle est constituée de lattes de bois parallèles cerclées d’osier. Le jus de raisin en dégouline par plusieurs coulées verticales.

Novembre : la glandée

Novembre copie

Novembre

Le mois de novembre est symbolisé par quatre porcs, en bordure de la forêt, qui se nourrissent des glands que fait tomber du chêne, à l’aide de sa perche, le paysan qui les surveille. Pratique courante que recommande Pietro de’Crescenzi, la glandée consiste à laisser les porcs, animaux peu exigeants, se nourrir de glands, de racines et d’herbes dans les bois. L’auteur conseille au paysan de récolter des glands et des châtaignes en prévision des grands froids. Mieux, il suggère d’emmener les porcins manger dans les vignes après la vendange, pour nettoyer et gratter le sol à la manière du laboureur.

Décembre : l’égorgement du cochon

Décembre

Décembre

Un homme tranche la gorge de l’animal avec un couteau tandis qu’à ses côtés une femme, protégée par un tablier, est prête à recueillir le sang dans une bassine. Le porc constituait une part importante de l’alimentation médiévale. Il servait de base à la nourriture dans toute l’Europe chrétienne. Chaque région avait ses modes de cuisson, de préparation, et de conservation. On pouvait saler le porc et on le conservait en grande partie dans des saloirs ; ou bien on en faisait du confit en cuisant les morceaux dans la graisse. Le jambon était tantôt fumé dans la cheminée, tantôt séché à l’air. Il était conservé pendu aux poutres du plafond ou sous la cendre. Comme dans la scène précédente, l’artiste semble avoir puisé son inspiration dans les calendriers peints de l’époque, alors que le texte de Pietro de’Crescenzi ne s’intéresse pas à la mise à mort du cochon.

Orientation bibliographique :

Le texte présenté ci-dessus s’inspire très largement d’un travail réalisé par Bernard Chambon du Service Educatif du musée de Condé.

MANE (Perrine), “L’iconographie des manuscrits  du traité d’agriculture de Pier’ de Crescenzi”, Mélanges de l’Ecole française de Rome. Moyen Age et Temps modernes, Rome, 97, 2, 1985, p. 727-818

Vous pouvez également consulter le site de la BNF :

http://classes.bnf.fr/ema/feuils/crescens/index.htm

http://classes.bnf.fr/ema/feuils/marguerite/index.htm