Et les masques tombèrent…

Décryptage d’un empire renaissant.

Le 24 juillet dernier, retentissait le prêche de l’imam, au sein de la basilique Sainte-Sophie, à Istanbul (Constantinople). Cette basilique, fondée par l’empereur Constantin au IVème siècle, devient une mosquée à la prise de Constantinople par les Ottomans en 1453, et elle est transformée en musée durant la présidence de Mustapha Kemal (1923-1936).

Le 24 juillet donc, le président de la Turquie, Recep Tayyip Erdogan suit les pas de son illustre prédécesseur, Soliman le Magnifique (sultan du XVème siècle) et marque, symboliquement, la renaissance de l’Empire Ottoman. Ce jour-là, le masque tombe, l’ère ottomane est à l’ordre du jour.

Cet acte emblématique reflète en réalité les ambitions impériales du « nouveau sultan » qui a d’ores et déjà placé ses pions.

Le 21 juillet 2020, des navires d’exploration gazière turcs pénètrent en territoire maritime grec dans le but d’y trouver des gisements. Très vite, les tensions s’intensifient, de sorte que face aux bâtiments de guerre turcs, la France déploie quelques-un de ses Rafales et navires, afin de secourir son allié, la Grèce.

Malgré un navire français visé par des bâtiments turcs, l’affrontement n’a pas lieu. Hormis la France, aucun pays de l’Union Européenne n’a apporté de soutien à la Grèce.

Erdogan convoite en effet les gisements d’hydrocarbures qui se situent dans la ZEE (Zone Economique Exclusive) de la Grèce. Ce contentieux n’est pas nouveau, et est le reflet d’une volonté d’hégémonie de la Grèce et de la Turquie sur la mer Egée.

A cela, nous pouvons noter que la Turquie exerce régulièrement des pressions sur l’UE (alors qu’elle souhaite la rejoindre) avec notamment son contrôle sur le flux migratoire, entre la Grèce et la Turquie (principalement des réfugiés provenant de Syrie, un pays dévasté par la guerre depuis 2011).

Aujourd’hui, la Turquie est présente sur de nombreux fronts, en Libye, en Syrie, en Irak et dans l’Artsakh, où son armée est renforcée par des mercenaires, djihadistes notamment.

Plus récemment, le 27 septembre, la guerre entre l’Arménie et l’Azerbaïdjan reprend. L’Arménie défend la République d’Artsakh, une enclave en territoire Azérie, peuplée majoritairement d’Arméniens, contre l’offensive azerbaïdjanaise.

Cette invasion est appuyée par la Turquie, avec l’envoi de djihadistes de Syrie ainsi que de drones kamikazes (des drones provenant également d’Israël). Erdogan convoite le corridor du Nakhitchevan, qui lui donnerait l’accès à l’ensemble des pays turcophones comme par exemple le Turkménistan, le Kazakhstan ou encore l’Azerbaïdjan.

L’Arménie est alors le seul obstacle à son projet.

Ce corridor obtenu – au prix de milliers de morts, d’innombrables blessés et de familles brisées- suite aux accords de Moscou, Erdogan se sent pousser des ailes.

Le projet impérial du « nouveau sultan » croît petit à petit. Désormais, qui sait jusqu’où Erdogan ira ? Le silence de l’Europe arrêtera-t-il l’avancée des troupes néo-ottomanes devant Vienne ?

Thomas

Sources : 

  • Le Figaro Magazine, numéro du Vendredi 20 et Samedi 21 novembre 2020, « Arméniens un peuple abandonné » par Sylvain Tesson et Antoine Agoudjian.
  • Le Figaro Histoire, numéro 52, Octobre-Novembre 2020, « La guerre de mille ans », par Tancrède Josseran.