C’est Beyrouth !

L’expression « C’est Beyrouth » est assez connue. On l’utilise souvent pour désigner un gros désordre. Elle est directement tirée de l’histoire de Beyrouth et les libanais n’aiment pas beaucoup cette expression car elle leur rappelle des événements tragiques qui ont eu lieu.

En effet, la célèbre capitale du Liban a été en proie à de nombreux conflits…

Beyrouth en 1978. Wikipédia – Domaine Public.

            Parmi ces conflits, on retrouve la guerre civile de 1975 à 1990. C’est 15 ans de guerres, de massacres et de destructions qui ont réduit en ruines la capitale.

Cette première guerre est tout d’abord une lutte entre les communautés qui habitaient dans Beyrouth. La ville est alors divisée en deux parties par une ligne de démarcation : « la ligne verte » en 1976.

À l’Ouest, on retrouve des partis de gauche : les musulmans soit l’ OLP (Organisation de Libération de la Palestine), c’est-à-dire la résistance qui est dirigée par Kamal Joumblatt (leader Druze), créateur du PSP (Parti socialiste progressiste).

À l’Est, on retrouve les partis de la droite et l’extrême droite chrétiennes. Elle réunit les grandes familles maronites ainsi que le parti Gemayel, Frangié, et Chamoun. Soit les Phalangistes.

L’origine de cet affrontement est une conséquence de la guerre des Six Jours en 1967 qui opposait Israël à l’Égypte, la Jordanie et la Syrie, provoquant ainsi un exode massif de Palestiniens dans les camps de réfugiés au Liban. Cet exode perturbe dès lors l’équilibre démographique entre les communautés libanaises, notamment la communauté chrétienne qui y était majoritaire.

Enfin, une autre raison renforce les tensions entre les communautés. C’est l’accord secret du Caire de novembre 1969 passé entre l’OLP et le gouvernement Libanais. Il garantit à l’OLP le droit d’être sur les terres libanaises, d’y vivre et de conserver son autonomie et ses armes. Malheureusement, la communauté chrétienne n’est pas d’accord et s’y oppose…

Cependant, ce qui déclenche réellement cette guerre civile, c’est la tentative d’assassinat de Pierre Gemayel par l’OLP. En représailles, la réponse des phalangistes est de tuer des militants palestiniens dans un bus qui passait à Aïn El-Remmanech. Ainsi, le 13 avril 1975, débute la guerre civile du Liban.

S’ensuit alors une guerre en plusieurs phases, c’est-à-dire tantôt des trêves comme par exemple grâce à l’accord du 17 mai 1983 ; puis la reprise des bombardements sur la ville ainsi que des massacres comme celui du camp de Tell Al-Zaatar en 1976 et celui de Sabra et Chatila en 1982.

Un enjeu géopolitique

Ce n’est pas seulement une guerre confessionnelle. C’est aussi une lutte pour le pouvoir politique. En effet, chacun souhaite sa domination aussi bien sur un plan économique que social ou politique.

De plus, l’intervention des armées étrangères pour obtenir un cessez-le-feu n’arrange pas le conflit. On compte l’armée Syrienne, dirigée par Hafez Al-Assad qui occupe le Nord de Beyrouth, puis l’armée Israélienne qui occupe le Sud de Beyrouth à partir de 1982 grâce à l’opération Galilée.

Ce n’est qu’avec l’accord de Taëf en 1989 que la guerre civile s’achève petit à petit avant de se finir définitivement en 1990.

Au total, on compte environ 100 à 150 000 morts dont 100 000 autres Libanais blessés. Certains sont forcés à s’exiler. L’Israël et la Syrie retirent leurs troupes en 2000.

Beyrouth entre alors dans une longue phase de reconstruction.

Le début d’une nouvelle guerre

Bien que sa reconstruction soit fragile, la capitale se remet petit à petit de ses cicatrices.

Cependant une autre guerre est déclarée. Elle oppose cette fois-ci principalement Israël et la guérilla menée par le Hezbollah, dirigée par Hassan Nasrallah.

La raison de ce nouveau conflit porte sur les fermes Chebaa dans les montagnes qu’Israël occupent depuis 1967 suite à la guerre des Six Jours. Hassan Nasrallah les revendique comme un territoire libanais et essaie de le récupérer.

Enfin, d’autres événements s’ajoutent au déclenchement de ce nouveau conflit comme l’assassinat du premier ministre libanais Rafic Hariri le 14 février 2005, puis celui du journaliste Samir Kassir le 2 juin 2006. Israël est désigné coupable de ces assassinats.

Ainsi débute la guerre israélo-libanaise dite aussi la guerre des 33 jours qui se déroule du 12 juillet au 14 août 2006. On compte plus de 50 000 morts et Beyrouth se retrouve à nouveau en ruines sous les bombardements et les fusillades. À la fin de cette courte guerre, la capitale entre à nouveau dans une autre longue phase de reconstruction. Elle est et devient un centre culturel important et un point d’échanges mondiaux.

Le port de Beyrouth après l’explosion – 09/08/2020 CC Wikipédia

La ville phénix    

Détruite puis reconstruite. C’est ce qui définit Beyrouth et qui lui vaut l’attribut du phénix. Un animal légendaire qui renaît toujours de ses cendres, faisant de lui un être immortel.

Cela correspond bien à Beyrouth surtout lors du dernier drame. En effet, le 4 août 2020 une double explosion de 2750 tonnes de nitrate d’ammonium détruit le port de Beyrouth sur un rayon de 2 km. Des centaines de milliers de personnes se retrouvent sans domicile et de nombreuses infrastructures sont endommagées. L’explosion a causé environ 113 morts et 4 000 blessés ainsi qu’un nombre inconnu de disparus. Beyrouth, ville portuaire importante dans laquelle les produits sont importés et exportés est à nouveau en ruine. Sans le moteur de l’économie et des échanges maritimes, le Liban se retrouve plongé dans une crise économique. De plus, la crise sanitaire lié au Covid renforce encore plus cette crise. Depuis un certain temps déjà, une grande partie de la population est pauvre et l’État libanais a bien du mal à garder pied…

Aujourd’hui, malgré sa situation économique, politique et sociale, Beyrouth devra encore se relever et se reconstruire. Cela se fera encore lentement mais peut-être sûrement…

Lisa

Sources :

https://www.herodote.net/13_avril_1975-evenement-19750413.php

https://www.youtube.com/watch?v=hWl8oqzJeh0 ( vidéo)

https://www.youtube.com/watch?v=f2Uwi4cjjtk (vidéo)

https://www.nationalgeographic.fr/histoire/2020/09/beyrouth-a-deja-ete-detruite-et-reconstruite-comment-se-reconstruira-t-elle-cette

https://metropolitiques.eu/La-reconstruction-de-Beyrouth-vers.html

1920-2020, Liban : un siècle de tumulte, Manière de voir, n°174.

https://www.monde-diplomatique.fr/2007/09/DA_SILVA/15143

https://www.humanite.fr/liban-1975-1990-guerre-civile-ou-guerres-etrangeres-570883

https://www.lemonde.fr/international/article/2020/08/05/double-explosion-a-beyrouth-des-habitants-desempares-face-a-leur-ville-devastee_6048167_3210.html