Lever un malentendu – Rousseau Memory Project

Il est souvent reproché à Rousseau d’avoir rédigé un traité d’éducation alors qu’il avait abandonné ses enfants.

L’un des premiers à lui en faire le reproche fut Voltaire par l’intermédiaire d’un libelle anonyme : Le

sentiment des Citoyens. On mesure par là la bonne foi de ce type d’argument.Il repose en fait sur un double malentendu. Le premier, facile à lever, voudrait qu’un théoricien connût la pratique. À ce compte-là, il faudrait être militaire pour penser la guerre ou paysan pour écrire une bucolique.Le second malentendu ressortit au statut même de l’Émile, considéré à tort comme un simple traité d’éducation.

Or voici ce qu’en dit Le Français dans Rousseau juge de Jean-Jacques, “Dialogue troisième” : « l’Émile en particulier, ce livre tant lu, si peu entendu et si mal apprécié n’est qu’un traité de la bonté originelle de l’homme, destiné à montrer comment le vice et l’erreur, étrangers à sa constitution, s’y introduisent du dehors et l’altèrent insensiblement.»

Ajoutons-y cette réflexion que Rousseau livre dans sa première Lettre écrite de la montagne : “Eh ! comment me résoudrais-je à justifier cet ouvrage ? […] moi qui, plein de confiance, espère un jour dire au Juge Suprême : daigne juger dans ta clémence un homme faible ; j’ai fait le mal sur la terre, mais j’ai publié cet Écrit.”

Pascal Vasseur
Photo : Lever un malentendu.Il est souvent reproché à Rousseau d’avoir rédigé un traité d’éducation alors qu’il avait abandonné ses enfants.L’un des premiers à lui en faire le reproche fut Voltaire par l’intermédiaire d’un libelle anonyme : Le sentiment des Citoyens. On mesure par là la bonne foi de ce type d’argument.Il repose en fait sur un double malentendu. Le premier, facile à lever, voudrait qu’un théoricien connût la pratique. À ce compte-là, il faudrait être militaire pour penser la guerre ou paysan pour écrire une bucolique.Le second malentendu ressortit au statut même de l’Émile, considéré à tort comme un simple traité d’éducation.Or voici ce qu’en dit Le Français dans Rousseau juge de Jean-Jacques, “Dialogue troisième” : « l’Émile en particulier, ce livre tant lu, si peu entendu et si mal apprécié n’est qu’un traité de la bonté originelle de l’homme, destiné à montrer comment le vice et l’erreur, étrangers à sa constitution, s’y introduisent du dehors et l’altèrent insensiblement.»Ajoutons-y cette réflexion que Rousseau livre dans sa première Lettre écrite de la montagne : “Eh ! comment me résoudrais-je à justifier cet ouvrage ? […] moi qui, plein de confiance, espère un jour dire au Juge Suprême : daigne juger dans ta clémence un homme faible ; j’ai fait le mal sur la terre, mais j’ai publié cet Écrit.”