Tous au spectacle!

La semaine dernière Colette me proposait un crible de questions pour vous expliquer l’intérêt de la sortie au cinéma. Cette semaine, on inverse les rôles pour évoquer les avantages d’amener nos élèves au contact du spectacle vivant!

 Comment s’organise une sortie culturelle en soirée? je veux tout savoir, je n’en ai jamais fait.

Pour tout te dire, c’est très simple : en équipe nous épluchons les programmations des différentes salles de spectacle de Bordeaux, de la CUB et de la Haute-Gironde dès le mois de Juin. Nous sélectionnons les spectacles qui correspondent à des entrées du programme de Français des différents niveaux, nous choisissons bien entendu les salles où les scolaires, notamment le collégiens, sont les bienvenus, puis nous regardons les dates pour qu’elles coïncident avec le calendrier scolaire. Nous contactons ensuite les salles de spectacle retenues et nous réservons 48 places pour chaque niveau. Ensuite c’est la foire d’empoigne car comme nous ne pouvons amener que des volontaires puisque ces sorties sont hors temps scolaires, nous sommes obligées d’inventer des stratagèmes tous plus alambiqués les uns que les autres pour sélectionner les heureux élus, ceux qui pourront s’offrir le luxe de prendre le bus scolaire de nuit pour traverser la moitié du département pour aller voir du THEATRE !!!

Peux tu nous raconter comment tu sélectionnes les spectacles à aller voir avec les élèves?

Nous le faisons en équipe en fonction des entrées du programme. C’est vraiment très aléatoire puisque cela dépend beaucoup de l’offre culturelle. Mais mes collègues sont vraiment très volontaires et nous sommes souvent prêtes à faire des kilomètres pour voir une pièce qui collera parfaitement à une entrée du programme ou dont nous sommes sûres que la troupe va époustoufler nos apprentis spectateurs.

Existe-t-il des freins à la mise en place de genre de projet?

L’argent bien entendu ! En effet, comme notre collège se situe en zone rurale, nous sommes loin des lieux culturels qui proposent du spectacle vivant. La réservation d’un bus nous coûte toute de suite près de 400 €, ce qui explique  pourquoi nous amenons si peu d’élèves : nous ne louons qu’un seul bus pour ses sorties. Personnellement, je préfèrerai amener des classes entières mais les subventions qui nous sont allouées pour mettre en place le projet « Théâtre en soirée » ne couvrent pas le transport. En ville, il est bien plus facile d’amener les élèves au spectacle puisque les lieux culturels peuvent être rejoints à pieds ou en transport en commun ce qui réduit considérablement le coût des sorties scolaires. Un nouveau frein a vu le jour depuis deux ans : certaines salles de spectacle n’ouvrent plus aux scolaires l’ensemble de leur programmation… Seuls certains spectacles ciblés sont accessibles aux collégiens, ce qui a été vécu par l’équipe comme une forme de censure.

Quel est l’intérêt pédagogique d’amener les élèves voir du spectacle vivant?

Pour beaucoup de nos élèves de REP rural, aller voir du spectacle vivant n’est pas une habitude familiale pour de multiples raisons géographiques et économiques. C’est donc tout d’abord l’occasion de se confronter à de nouvelles pratiques culturelles. C’est surtout l’occasion de travailler un genre littéraire très particulier, le théâtre, que l’on ne peut aborder sans le VIVRE en tant que spectateur. La question des choix scénographiques, l’expérience de la voix, des corps, des lumières, de la musique, tout ce qui fait l’essence même du théâtre a surtout lieu sur scène, les lectures ne suffisent pas à le comprendre. C’est pourquoi le théâtre est avant tout une expérience plutôt qu’une somme de connaissances. Et puis, comme toujours avec les sorties scolaires, elles permettent de vivre un moment suspendu ensemble qui nourrit une certaine complicité entre enfants et adultes, complicité qui sera essentielle pour poursuivre les apprentissages pour certains d’entre eux.

Souvent ce sont des soirées et c’est payant, tous les élèves n’y vont pas, du coup comment l’exploites tu dans ta pratique pédagogique?

C’est le point faible de notre projet, point faible lié aux contraintes géographiques et économiques déjà évoquées. Il est très difficile de l’exploiter en classe puisque c’est un projet qui n’inclut pas tout le monde. Par conséquent, en général, j’invite les élèves qui sont sortis, à rendre compte du spectacle sous forme d’article pour le site du collège ou en leur confiant la responsabilité d’une partie de la séquence sur le théâtre, notamment concernant le questionnement lié à la mise en scène.

Peux tu nous raconter l’une de tes plus belles sorties en soirée avec tes élèves?

Je raconterai notre dernière sortie au théâtre : après deux ans de disette culturelle, nous avons pu renouer cette année avec le spectacle vivant ! Le 14 décembre, nous nous sommes rendus avec les 6e volontaires dans un théâtre de la CUB pour assister à un one woman show particulièrement touchant : « Cartable » de Gloria da Queija. Pendant 1h30, nous avons suivi les déboires et les enchantements d’une enseignante en primaire. Seule en scène, la comédienne, qui a enseigné pendant 10 ans, nous brosse le portrait de toutes celles et tous ceux qui font vivre l’école républicaine : de l’enseignante dévouée à l’inspecteur déconnecté des réalités du métier, de l’élève brillant à la petite fille endeuillée, complètement noyée par sa tristesse, des collègues péremptoires au père d’élève dépassé, la comédienne joue tous les rôles avec une énergie incroyable. C’était drôle et vrai. Sincère. Les élèves ont été impressionnés par la qualité et la générosité du jeu de la comédienne. C’était un spectacle qui permettait d’aborder l’essence même du théâtre : une humaine sur scène qui incarnait toute une palette de personnages. Sans décor, sans costumes. Juste une humaine. Qui jouait avec nos émotions. Sans oublier de nous faire réfléchir !

En quoi est-ce selon toi un moment privilégié?

Le spectacle vivant est une expérience totale, à la fois intellectuelle et physique. Tous nos sens sont requis pour profiter pleinement de ce qui se joue devant nos yeux. A tout moment, tu peux être « contaminée » par ce qui se passe sur scène. Il y a une sorte de mise en danger de ton univers, de ton intégrité, de ton identité. Certes il y a le fameux « quatrième mur » qui te protège de ce qui se passe sur scène, mais ce quatrième mur semble souvent prêt à s’effondrer ( nombreux sont les spectacles contemporains où les comédien.ne.s franchissent allégrement ce fameux mur). D’ailleurs c’était assez édifiant, lors de la sortie avec les 6e dont j’ai parlée précédemment, certains n’avaient pas les codes propres au théâtre et quand la comédienne interpellait les élèves imaginaires de sa classe, certains élèves répondaient à voix haute, ils n’avaient pas compris que c’était la particularité du jeu théâtral. Ces sorties sont essentielles aussi pour ça : elles apprennent à nos élèves à appréhender les règles du jeu. Du jeu de la vie en société, cette société qui s’est construite avant eux sur des traditions, des codes que nous nous devons de leur transmettre pour mieux qu’ils les transgressent, ou les transforment à l’avenir.

On espère qu’on vous donnera envie d’amener vos élèves au théâtre, à l’opéra, dans des salles de concert, dans des festivals, partout où le spectacle doit avoir lieu!

on vous laisse avec les salles préférées de Colette

Le Champ de Foire à Saint André de Cubzac

Le TNBA

L’espace culturel du Bois Fleuri

 

De l’intérêt d’amener ses élèves au cinéma – Le témoignage d’Aude.

Dans le cadre de notre mois thématique consacré à l’intérêt d’organiser des sorties culturelles pour nos élèves, nous vous livrons aujourd’hui les réponses d’Aude concernant les séances dédiées au cinéma.

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Colette. – Dans quel(s) cadre(s) amènes tu tes élèves au cinéma ?

Aude.-  J’amène mes élèves au cinéma parfois dans le cadre de « collège au cinéma », de festivals comme le festival du film d’histoire de Pessac ou le festival des jeunes réalisateurs de Saint jean de Luz et je n’inscris mes classes que si j’y vois une application pédagogique après la séance qui concerne le contenu, l’histoire du film, le contexte évoqué plus que pour l’analyse filmique ou le travail de critique cinématographique. Je laisse cette dimension, avec laquelle je ne suis pas à l’aise, à mes collègues d’arts plastiques, de lettres ou de philosophie. Je manque souvent de vocabulaire et de techniques pour l’analyse à proprement parlé même si je trouve cela passionnant. Je me sens même parfois handicapée dans ce domaine.

Colette. – Quels sont tes objectifs quand tu organises une sortie au cinéma ? Vises-tu seulement des compétences disciplinaires ou mises-tu aussi sur d’autres compétences (psycho-sociales ou émotionnelles par exemple) ?

Aude. – Jusqu’à présent, et comme je l’ai dit dans la question 1, j’ai besoin, parce que je n’étais pas à l’aise avec ça, d’avoir une porte d’entrée historique, géographique, sociale ou civique. J’ai un rapport au cinéma très particulier :  j’aime l’ambiance des salles feutrées où j’allais quasiment une fois par semaine avec mes parents étant enfant, adolescente et même étudiante, j’aime y pleurer, y rire à gorge déployée, découvrir la délicatesse des émotions de mes compagnons de séance. J’aime beaucoup l’idée de pleurer ensemble et l’image m’a toujours permis d’éprouver certaines émotions plus facilement qu’avec un livre. Cette mise à nu qu’offre la salle de cinéma me rend toujours un peu gauche quand les larmes ou la stupeur, ou la peur (les doigts plantés dans le bras de mon mari durant tout le visionnage de Dunkerque...) ou la tristesse m’envahissent. J’espère encore, mais de moins en moins, que les élèves n’ont pas perçu tous les sentiments qui ont pu me traverser d’ailleurs, même si je me laisse de plus en plus aller même en leur présence. Il est donc pour moi très compliqué de travailler les compétences socio-émotionnelles à partir de séance avec mes élèves même si je ne doute pas que les films choisis évoquent chez eux des sentiments, des avis, mais je les leur demande très rarement lors du retour de la séance.

Bref je m’égare ! Donc pour répondre à tes questions, l’objectif reste avant tout disciplinaire même si je reconnais que parfois c’est un peu tiré par les cheveux. je me souviens du visionnage de Phantom boy où j’avais préparé un questionnaire sur les droits des enfants, le traitement de la ville dans le dessin animé, sur l’espace vécu d’un enfant malade (lien avec la ville de l’inclusion des handicapés) alors que les élèves ne voulaient me parler que de cet enfant malade, de la capacité de résilience… Aujourd’hui, je le traiterais proprement bien différemment.

 

 

Colette. – Qu’est-ce que ce genre de support- le film –  apporte à l’enseignement de ta matière ?

Aude. – Du concret. Je pense notamment à des films mémorielles sur le génocide juif ou sur la première guerre mondiale ou encore sur des espaces lointains. Par exemple, j’aime beaucoup travailler Himalaya, l’enfance d’un chef pour les espaces à fortes contraintes. D’abord parce que le film est esthétiquement magnifique puis on voit bien que même aujourd’hui, dans certains lieux l’homme ne peut pas s’affranchir de la contrainte climatique ou de relief.

Ensuite une ouverture sur l’ailleurs, une meilleure compréhension du monde et enfin un regard critique. Là aussi je pense à des films comme Good Morning Vietnam réalisé en 1987 où on évoque les pacifistes américains, la contre culture, la place de cette guerre dans la mémoire américaine, la difficulté d’en parler 15 ans après aux Etats-Unis…

Colette. – Ferais-tu une différence entre ce qu’apporte la fiction et le documentaire ?

 Aude. – Dans ma discipline, plus que jamais. On utilise les deux, et j’aime beaucoup d’ailleurs évoquer le traitement de l’évènement ou du lieu à travers le documentaire et leur montrer que même là le réalisateur fait des choix et qu’il faut avoir un esprit critique sur l’image. J’ai tendance à travailler l’esprit critique bien plus sur un documentaire que sur une fiction. Je pense notamment aux documentaires Home de Yann Arthus Bertrand, sublime, qu’on a beaucoup utilisé en géographie mais qui a une empreinte carbone importante. J’aime bien aussi utilisé les documentaires Apocalypses et les comparer aux images de l’I.N.A non recolorisées afin de voir que les mêmes images n’ont pas forcément le même traitement documentaire.

La fiction permet souvent de rentrer dans un sujet de manière moins dramatique parce que justement l’élève espère que ce ne soit pas vrai ou exagéré et ensuite on compare à des témoignages ayant une portée historique.

Colette. – Peux-tu nous raconter ta dernière sortie cinéma ?

Aude. – Je suis allée voir Les meilleures au cinéma. Ce film raconte l’histoire d’une jeune fille qui découvre son homosexualité et sa première histoire d’amour homosexuelle dans une banlieue parisienne. La réalisatrice était présente et j’ai trouvé le débat bien plus intéressant que le film en lui même. Les élèves étaient très touchés parce que le traitement du film était à leur portée, c’était un sujet par lequel ils se sentaient concernés : le coming out, l’influence des réseaux sociaux,… Ils ont aussi étaient très attentifs au traitement artistique du film et je ne m’y attendais pas du tout. J’ai été très émue parce que c’était ma première sortie au cinéma au lycée et j’ai trouvé justement qu’il y avait de la part des élèves une plus grande expression de ce qu’ils avaient ressenti lors de la projection du film.

Colette. – Quelles notions as-tu pu travailler avec tes élèves grâce à cette sortie ?

Le film m’a permis de travailler le repli sur soi et la nécessité de l’interconnaissance dans la consolidation des liens sociaux au sein de la société française, dans le cadre du programme d’E.M.C de première. Lors des deux séances de retour sur le film on a évoqué à la fois la question des LGBT+ mais aussi de la vie dans les quartiers défavorisés des grandes villes qui leur est complètement inconnu depuis la côte basque.

Colette. – As-tu adopté une démarche pédagogique particulière à cette occasion ? Si oui laquelle ?

J’avais demandé aux élève de faire la critique du film avec l’analyse filmique, ce qu’ils avait aimé pas aimé et pourquoi conseilleraient-ils le film à un camarade. Ensuite en classe, ils ont du répondre à des questions sur le fond qui portaient sur le quartier (une description de paysage), les personnages ou les lieux du films qui évoquent l’état, la cohésion sociale à la française (la MJC, l’école, le travail…) des questions sur la place des réseaux sociaux dans leur vie d’adolescents et le rôle que peut avoir leur utilisation dans une démarche de repli sur soi. On a ensuite débattu sur les décisions que le personnage principal avait pu prendre pour ensuite arriver à l’idée de la nécessité de respecter les différences, de développer l’interconnaissance et nous finissons ce cycle par la réalisation de brochures de sensibilisations sur des causes ou des groupes de personnes qui peuvent connaître un repli sur soi ! Des thèmes ont émergés comme les LGBT, mais aussi les personnes âgées, les SDF, les enfants battus…Je récupère d’ailleurs les brochures vendredi !

Les sorties cinéma : se former le regard … et le coeur !

Comme vous l’aurez compris depuis le début de ce blog, on aime bien les mois thématiques alors en ce mois de Janvier, on va explorer le thème de la sortie culturelle au cinéma.

Avec Colette, on adore aller au cinéma avec nos élèves depuis déjà très longtemps. Comme vous vous en doutez, au cinéma, comme dans nos classes, on a vécu de grands moments d’émotions avec nos élèves. Il était donc important pour nous de vous présenter nos top 3 à chacune.

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En ce qui me concerne, la première claque cinématographique en milieu scolaire a eu lieu avec La Vague de Denis Gansel sorti en 2008.

Le film s’appuie sur l’essai de Todd Strasser. L’enseignant Mr Winckel propose de faire comprendre la notion d’autocratie par l’expérience à ses élèves. Il fait le pari qu’au bout d’une semaine tous les élèves auront basculé dans l’autocratie en appliquant les moyens de soumission et de propagande caractéristiques des régimes autoritaires.

Pourquoi  ce film a- t-il été important dans ma carrière ? Parce qu’il a suscité une véritable réaction chez mes élèves : de la curiosité, mais aussi de la colère  et un vrai débat, certes autour de l’autocratie et des chapitres comme le totalitarisme mais aussi sur l’école, la place de l’enseignant, la responsabilité qu’il a dans ses choix pédagogiques. A quel moment est-on démagogique ? A quel point, l’enseignant que nous sommes, fait-il ce métier là parce qu’il est gratifiant, parce qu’on a une certaine reconnaissance, qu’il peut parfois flatter notre égo ?  Je ne peux m’empêcher quand je mène un projet dans lequel je m’éclate clairement d’un point de vue pédagogique d’avoir parfois des moments auto-réflexifs justement pour me demander si tous les élèves s’y retrouvent, en apprennent quelque chose, en tirent une satisfaction, du plaisir… C’était donc extrêmement chouette d’aboutir à ces questionnements qui n’étaient au départ pas l’objet du visionnage. Je me rappelle d’ailleurs qu’il était dans une sélection pour sensibiliser les élèves à la notion de harcèlement. Donc vous l’aurez compris, La Vague a de multiples facettes et il peut être étudié sur le plan historique, mémoriel, civique mais aussi social.

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Pour le deuxième film, il s’agit des Enfants loups de Mamoru Hosoda sorti en 2012, il était il y a maintenant six ou sept ans dans la sélection de « Collège au cinéma » des sixièmes-cinquièmes.

D’abord c’est un film très poétique, dans son utilisation géographique, je l’avais utilisé pour la notion d’habiter un espace de faibles et fortes densités dans l’ancien programme mais moi je garde de ce film un souvenir maternel. La force de cette maman qui a des enfants loups qu’elle ne comprend pas toujours mais qui fait le choix de vivre en forêt pour qu’ils s’épanouissent et choisissent leur vie, leur chemin. J’ai des jumelles et j’essaie toujours d’être cette maman qui guide, qui propose un cadre de vie, des activités, conseille, donne un modèle de façon de vivre mais elles choisiront la voie qui leur convient tant qu’elles seront épanouies, je ferais en sorte d’accepter leurs choix de vie. En tant qu’enseignante, je trouve toujours important d’aiguiller aussi les parents vers cette écoute, cette idée que l’enfant prend à un moment donné une voie dont on ne maîtrise pas tous les obstacles et embûches, parfois on ira le relever et parfois non, il faut savoir accepter de lâcher la main, que l’enfant ose prendre un risque même si il nous fait très peur et nous angoisse, il faut apprendre à écouter son intuition pour qu’il soit heureux. C’est donc un film sur la parentalité et l’un de mes conseils aux parents parfois perdus c’est de leur dire on fait comme on peut et non comme on veut parce que votre enfant, il a son caractère, ses droits, c’est une personne et un adulte en devenir à qui il faudra lâcher la main !

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Mon dernier coup de cœur c’est Tomboy de Céline Sciamma sorti en 2011. C’est l’histoire d’un enfant de 10 ans qui a été élevé sans stéréotype de genre qui joue au foot et a des poupées, aime conduire des camions et danser avec sa sœur.

Les 12 premières minutes sont extraordinaires a utilisé en cycle 3 et même quand ils sont plus grand. Leur étonnement à ce moment là du film, leur réaction, leur colère, leur dégoût, leur empathie, leur pitié,… Toutes leurs émotions, il faut toutes le relever, il faut les déconstruire, quel formidable moment de débat, de discussion et de tolérance. Oui quand vous visionnez Tomboy avec vos élèves, vous œuvrez pour la tolérance, vous enseignez l’amour et le respect, l’ouverture d’esprit et vous invitez les élèves à réfléchir sur l’éducation qu’ils ont reçu parfois même pour la première fois, ils ‘interroge sur les activités qu’ils font, les cadeaux qu’on leur a offert, les réflexions de leur parents et c’est toujours un incroyable moment pédagogique.

Je laisse maintenant Colette vous parler de ces trois films préférés. Quant à moi, je pars à la recherche d’autres films qui pourraient animer mes cours et des moments privilégiés avec mes élèves.

Aude

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A mon tour !

Les sorties culturelles ont très vite fait partie intégrante de ma pédagogie, dès mon année de stage, d’autant plus que j’enseignais dans la ville du Festival de la BD et que ma participation à cet évènement littéraire quelques années plus tôt avait auréolé cette ville d’une lumière particulière en terme de culture. Enseignante en lycée lors de mon année de stage, j’ai inscrit ma classe de seconde à « Lycéens au cinéma ». Un des films les plus marquants parmi ceux visionnés cette année là fut Shining de Stanley Kubrick.  Nous étions allés à pieds (!) au cinéma du C.N.B.D.I, ce qui déjà en soi me paraît être un évènement quand je vois combien il est compliqué de rejoindre un lieu culturel maintenant que j’enseigne en milieu rural. Je ne connaissais pas le film. Comment dire à quel point j’ai été surprise que l’on propose un film d’horreur psychologique à des élèves de 15 ans ! Mais ce fut ma première expérience d’analyse de l’image mobile et je me souviens que j’ai adoré partir de ce film là, si perturbant, aussi bien en terme de narration que d’esthétique, pour débattre avec mes élèves autour du traitement de l’angoisse sur grand écran. Nous avions organisé un débat interprétatif, format que j’ai ensuite gardé à chaque retour du cinéma, que ce soit avec des lycéens ou des collégiens.

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Le film que j’ai le plus étudié en classe depuis sa sortie est le film La Vie scolaire de Grand Corps malade et Mehdi Idir dont j’ai déjà parlé ici. En effet ce fut la première sortie au cinéma que j’organisais de A à Z en dehors du dispositif « Collège au cinéma ». En 2019, nous étions allés le voir au cinéma avec 4 classes de 3e dès septembre car se joue dans ce film une sorte de mise en abyme de la situation de nos élèves : la rentrée en 3e et son angoissante question de l’orientation. C’était aussi l’occasion de travailler la perception de différents territoires et de ce qui s’y joue, entre le collège rural de Haute-Gironde où étudient nos élèves et le collège de la cité des Francs-Moisins à Saint-Denis où évoluent les personnages principaux du film. Pour la première fois, je consacrais toute une séquence à l’analyse d’un film : analyse d’affiches, horizon d’attente, bande-annonce, scène d’ouverture, plan séquence, lecture de paysage et lecture analytique des chansons qui tissent la bande originale du film, le cinéma c’est aussi l’occasion de multiplier les supports d’analyse et d’aiguiser son esprit critique.

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Mais mon chouchou de tous les temps, c’est le film Billy Elliot de Stephen Daldry sortie en 2000 que nous avons vu avec des élèves de 6e dans le cadre de « Collège au cinéma ».

Non seulement pour les débats incroyables que ce film génère sur l’éducation, les préjugés liés au genre, l’amitié, la famille, la fraternité, le travail, le pouvoir de la grève, l’art, le parcours de vie, les relations adultes-enfants, mais surtout parce que ce film est une pure merveille pour faire toucher du doigt cette notion si importante en analyse littéraire et cinématographique : l’implicite ! Car tout est à déchiffrer dans ce film qui met à l’honneur des personnages masculins particulièrement taciturnes ! Sans cesse l’image, le mouvement nous invitent à nous interroger sur les motivations des personnages et les liens qui les unissent sans que jamais ils ne le revendiquent. Car oui, j’ai une tendresse particulière pour ces amours qui nous traversent mais ne se disent jamais. Vous savez cet amour dont il ne faut absolument pas dire le nom mais qui unit, par exemple, chaque enseignant.e à ses élèves.

Colette.

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Que nous souhaiter en 2022 !

A nous enseignant.e.s, que nous souhaiter en 2022 ?

J’aurais pu réclamer à corps et à cris des postes et moins d’élèves en classe. Des classes mobiles et flexibles. Des moyens supplémentaires !

Pour faire référence au contexte de cette rentrée, j’aurais pu demander des masques FFP2, des auto-tests avec des écouvillons, du gel hydroalcoolique et compagnie !

Mais en fait je vais nous souhaiter de la passion, de l’amour et de la tendresse.

Oui de la passion, pour notre métier, notre mission, notre discipline afin d’avoir des idées, d’avoir la capacité de rebondir, de nous adapter au contexte sanitaire puis à ce monde qui change. Je vous invite d’ailleurs à suivre, à lire, à écouter ce qui concerne l’enseignement en Anthropocène ! La passion nous permettra d’être toujours à la hauteur de la mission qui nous incombe au sein de notre cité, probablement la plus noble, celle de former les citoyennes et les citoyens de demain !

De l’amour pour nos élèves : on a eu beau me répéter qu’il ne fallait pas les aimer trop fort,  je ne sais pas faire autrement ! J’aime mes élèves, j’aime être le témoin de ce qu’ils vont devenir. L’année 2021,  si je devais en faire un bilan, m’a permis de travailler les compétences socio-émotionnelles et l’estime de soi de mes élèves et quel bonheur d’entrapercevoir leur cœur. Alors je vous souhaite de vous ouvrir à ce travail là avec vos élèves ou de continuer à l’explorer si besoin !

De la tendresse pour nous, pour vos collègues. Je vous souhaite de parsemer la salle des profs de douceurs, de petits bonbons dans les casiers, d’affiches pour décorer vos casiers, d’attentions de « Secret Santa », de galettes et de mots doux. Nous en avons plus que besoin !

Meilleurs vœux pédagogiques ! Haut les cœurs et force et courage pour cette année 2022.

Et bien sûr, de la passion, de l’amour et de la tendresse !

Aude.

 

 

Commencer l’année avec des « fortune cookies » !

Commencer cette année 2022 encore au milieu du covid sous nos masques de papiers et les mains empéguées par le gel hydroalcoolique me pousse encore une fois à créer un lien hors programme avec mes élèves et depuis l’an dernier je leur souhaite une bonne année, je leur donne tous mes voeux de bonheur. Alors comme pour les calendriers de l’avant, on vous propose le petit tutoriel si le cœur vous en dit de faire la même chose.

1. D’abord fabriquer des cookies fortune en Origami.

2. Puis glisser à l’intérieur des souhaits. A l’intérieur, personnellement, je glisse les vœux de Jacques Brel mais là on fait comme on veut, on peut personnaliser aussi.

« Je vous souhaite des rêves à n’en plus finir et l’envie furieuse d’en réaliser quelques uns. Je vous souhaite d’aimer ce qu’il faut aimer et d’oublier ce qu’il faut oublier. Je vous souhaite des passions, je vous souhaite des silences. Je vous souhaite des chants d’oiseaux au réveil et des rires d’enfants. Je vous souhaite de respecter les différences des autres, parce que le mérite et la valeur de chacun sont souvent à découvrir. Je vous souhaite de résister à l’enlisement, à l’indifférence et aux vertus négatives de notre époque. Je vous souhaite enfin de ne jamais renoncer à la recherche, à l’aventure, à la vie, à l’amour, car la vie est une magnifique aventure et nul de raisonnable ne doit y renoncer sans livrer une rude bataille. Je vous souhaite surtout d’être vous, fier de l’être et heureux, car le bonheur est notre destin véritable. »

Les vœux de Jacques BREL, 1er janvier 1968 (Europe 1)

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Je vous souhaite de belles retrouvailles avec vos élèves, et de créer des liens indéfectibles avec eux.