TEST THE REST

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L’artiste (Die Künstlerin) : Birgit Kinder

Birgit Kinder est née en 1962, c’est à dire un an après la construction du mur, en Thuringe, un Land qui se trouvait alors sur le territoire de l’Ex-RDA (die ehemalige DDR). En 1982, elle s’ installe à Berlin où elle débute sa carrière artistique en tant que peintre muraliste (die Wandmalerin) mais où elle est  aussi confrontée avec la réalité du mur qui encercle la partie ouest de la ville.

« Sie war Wandmalerin, es war ihr Job, perfekte Illusionen zu erzeugen, um die Menschen mit dem Leben innerhalb dieser Mauern zu versöhnen. Und so flieste sie Bäder mit dem Pinsel, wenn es gerade keine Fliesen gab. Sie ließ Bäume aus dem Beton brechen, wo weit und breit kein Grün wuchs. Sie ließ Wellen über Mauern schwappen, um den Menschen das Warten auf den nächsten Urlaub an der Ostsee zu verkürzen. »

http://www.morgenpost.de/berlin/mauerfall/article1182986/Wie-die-Kunst-der-Mauer-die-Macht-nahm.html

Lorsqu’elle apprend la nouvelle de la chute du Mur, Birgit Kinder a une conviction : «C’est l’heure d’un nouveau départ pour moi. Toutes les pages sont blanches, à moi de les remplir».  Et c’est au volant de son Trabi qu’elle va le prendre car c’est grâce à cette fresque, qui a fait le tour du monde que sa carrière artistique a pour ainsi dire décollé.

Elle continue encore aujourd’hui à peindre sur les murs mais ses sujets sont, disons plus classiques. Visitez son site :

http://www.wandmalerei-berlin.de/

 

La East Side Gallery

Les peintures et les graffitis étaient, avant 1989, déjà une des attractions de Berlin, mais uniquement du coté ouest. En effet le « mur de la honte » n’était pas accessible à la population de Berlin-est qui ne pouvait même pas l’approcher. Aux abords du mur, coté est, c’était en effet un « No man’s land », une zone vidée de ses habitants.

Il faut bien donc bien avoir à l’esprit que ce n’était pas un simple mur qui encerclait la ville de Berlin ouest sur 160 km de long, c’était une double enceinte, deux murs entre lesquels se trouvait ce qu’on a appelé la bande de la mort (der Todesstreifen) car cette partie du dispositif recelait tous les moyens imaginables pour empêcher les évasions à l’ouest.

Lire  les détails sur le mur dans mon article : 

http://lewebpedagogique.com/deutschintrevoux/2013/11/09/16868/

Du mur, appelé « Schandmauer » (mur de la honte) à l’ouest et « antifaschistischer Schutzwall » (mur de protection antifasciste) par la propagande du régime est-allemand, on n’ a gardé, après sa chute, que quelques portions et la East Side Gallery qui mesure 1.3 km de long est la plus longue portion qui a été épargnée par la démolition.    

Elle se situe dans la Mühlenstraße entre la gare de l’est (Ostbahnhof) et le  Oberbaumbrücke.

Agrandir le plan

En 1990, cette portion du mur est devenue la plus grande galerie d’art en plein air du monde lorsque des artistes du monde entier (118 venus de 21 pays différents), enthousiasmés par les changements extraordinaires qui étaient en train de bouleverser la planète, se sont appropriés ce support chargé d’histoire.  En investissant ces pans de mur de leurs oeuvres, ces surfaces de béton gris, qui pendant des années n’avaient pu être ne serait-ce que touchées par les habitants de Berlin-est, ils voulaient  laisser un témoignage visuel de la joie et de l’esprit de liberté qui avaient émergés à la suite de la chute du mur.

On parle souvent de Street art pour qualifier les oeuvres de la East Side Gallery. Il s’agit certes d’une œuvre  visible par tous et non enfermée dans un musée mais son support est chargé de mémoire et porte encore les cicatrices du passé, c’est pourquoi je préfère la qualification d’art commémoratif. Les artistes ne se sont pas seulement appropriés l’espace publique en créant cette galerie ouverte à tous, ils ont aussi utilisé un support chargé d’une histoire douloureuse pour tout un peuple et ils ont certainement voulu ainsi transformer le béton gris en une expression durable de liberté et de réconciliation.

La East Side Gallery a du faire l’objet d’une restauration en 2009 car un bon nombre des peintures murales avaient été endommagées par des graffitis, l’érosion et la pollution de l’air. Malheureusement, comme vous pouvez le voir sur la photo ci-dessus que j’ai prise l’an dernier, les oeuvres de la East Side gallery font régulièrement l’objet de vandalisme et en particulier celle de Birgit Kinder qui fait partie des plus connues avec celle de Dimitri Vrubel (Le baiser fraternel représentant les deux dirigeants communistes, Leonid Brejnev et Erich Honecker).

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Sur la photo que j’ai faite en avril 2013 (en tête d’article), l’inscription rouge  KPD (Kommunistische Partei Deutschlands) sur le capot de la voiture n’ a pas été faite par l’artiste mais par une personne qui a  malheureusement voulu apporter sa petite touche personnelle à l’oeuvre.

Lors de mon dernier séjour à Berlin en octobre 2013, j’ai découvert la « West Side Gallery ». En effet l’autre coté du mur a été, lui, investi par un photographe allemand, Kai Wiedenhöfer, qui  a utilisé ce support emblématique pour exposer ses photos de murs et frontières du monde entier (de la frontière israléo-palestinienne, aux murs de Belfast en passant par la frontière entre les deux Corées). Cette exposition, appelée « Wall on Wall », est composée de 36 photos monumentales qui nous rappellent qu’il reste bien des murs dans le monde. A travers cette exposition, l’artiste veut montrer que les conflits ne peuvent être résolus avec des frontières et des murs :„Ich will zeigen, dass Konflikte nicht durch Mauern und Grenzen zu lösen sind.“

Lien vers le site de l’exposition « Wall on Wall » avec des photos : 

http://www.wallonwall.org/?p=53

Video sur la West Side Gallery :  http://bcove.me/8fc8qfgw

Le contexte de l’oeuvre de Birgit Kinder

Lire mon article

http://lewebpedagogique.com/deutschintrevoux/2013/11/09/16868/

Le Trabant

Car il est plus juste de dire LE Trabant. Non seulement parce que toutes les voitures sont du genre masculin en allemand (der Mercedes, der Volkswagen, der Porsche ….) mais aussi parce qu’ à la base de ce nom, il y a un nom commun masculin qui signifie le satellite.

L’histoire du Trabant commence en 1954. Il fut alors  donné l’ordre à la VEB Automobilwerk de Zwickau de créer une voiture répondant aux critères suivants :

  • une petite voiture avec deux sièges principaux et deux sièges passagers
  • un poids maximal de 600 kg
  • une consommation moyenne de 5,5l/100 km
  • une production annuelle d’environ 12.000 véhicules
  • un prix de 4.000 DM
  • une carrosserie en plastique (Duroplast)

Il est a noté que ce véhicule pour le moins rudimentaire était produit dans l’usine qui avait avant la guerre appartenu à Audi!

Le régime voulait ainsi entamer une motorisation de masse de la population du pays mais quand on sait qu’entre 1955 et 1989, à peine plus de 3.050.000 véhicules sortirent des usines de Zwickau et qu’il fallait un délai d’attente de 10 ans en moyenne pour en avoir un, on comprend bien que cet objectif n’a pas été rempli. Pour résumer, on peut dire que seuls les « bons camarades », les personnes à responsabilités et tous ceux qui soutenaient l’Etat pouvaient espérer un jour tenir le volant de leur Trabant.

Les heureux propriétaires prenaient alors grand soin de leur Trabant pour qu’il tienne la distance et le temps. On partait en vacances avec, enfin là où c’était possible car le véhicule … et le rideau de fer ne permettaient pas d’aller bien loin. Le plus souvent, les vacances consistaient à faire du camping avec son Trabant car c’était une activité culte en RDA .

C’est à bord d’un Trabant que de nombreux Allemands de l’est se sont rendus en Hongrie durant l’été 1989 et là bas ont demandé refuge dans les ambassades des différents pays de l’ouest et aussi avec un Trabant que certains ont traversé la frontière qui s’est ouverte au soir du 9 novembre 1989.

Le Trabant fait partie de ces voitures qui sont tellement appréciées et comportent une telle charge émotionnelle (la dodoche des Français appelée « die Ente » par les Allemands qui avaient eux mêmes leur coccinnelle – VW Käfer) qu’elle a aussi son surnom : der Trabi et son musée, tout près du Checkpoint Charlie. Elle fait aujourd’hui l’objet d’un véritable culte, en particulier dans la capitale unifiée.

http://www.trabi-museum.com/fr

Analyse de l’oeuvre

La fresque de Birgit Kinder est certainement la plus connue de la East Side Gallery mais d’autres fresques sinon la majorité ont des références historiques telles que « Le Baiser fraternel » de Dmitri Wrubel (Mein Gott hilf mir, diese tödliche Liebe zu überleben) cité plus haut et « Le sauteur du mur » (der Mauerspringer) de Gabriel Heimler.

A l’origine, l’artiste Birgit Kinder avait intitulé son œuvre « Test the best » (teste le meilleur). Il s’agissait de la reprise d’un slogan pour un produit que je ne nommerai pas ici et qui était « Test the West ». « Test the west », « Test the best », elle proclamait ainsi que le meilleur était à l’ouest.  Lors de sa restauration en 2009, le titre de l’œuvre a été changé en « Test the rest » et il peut donner lieu à deux interprétations car « rest » en anglais ne signifie pas seulement le reste mais aussi le repos et la paix. L’artiste n’insiste donc plus sur la fracture entre l’est et ouest car 20 ans se sont écoulés depuis la chute du régime communiste, mais invite maintenant à tester autre chose, la paix. Le jeu de mot valait peut-être la peine d’être relevé !

Cette fresque représente donc la fameuse voiture emblématique du régime de l’Ex-RDA qui traverse le mur, qui passe de l’autre côté. Personnellement, je me demande pourquoi l’artiste ne l’a pas peinte avec une vue arrière du véhicule puisque l’ouest se trouve à l’opposé !

Le Trabant, passe le mur en le défonçant, ce qui est bien évidemment impossible car sa carrosserie était essentiellement composée de plastique et de plus il nous apparaît sans une éraflure après ce terrible choc. Cela évoque certainement le fait que la révolution qui a permis la chute du mur s’est fait sans heurts, ni violences et résistances de la part des soldats de la VoPo (Volkspolizei) qui gardaient la frontière. C’est une révolution pacifique (friedliche Revolution) qui a mené à la chute du « mur de la honte ».

Le Trabant, conduit par un personnage dont on ne voit que les contours et qui symbolise la population de l’Allemagne de l’est, fracasse le mur qui vole en éclat et crée une brèche qui continue à se fissurer. Cette brèche relie désormais par cet acte « kamikaze », deux espaces qui étaient divisés.  La voiture quitte un espace sombre, d’un bleu marine profond où la lumière ne peut pas pénétrer, c’est celui de la RDA. Le second espace, d’un bleu clair et lumineux est celui de la liberté, celui de la RFA. Les fissures autour de la brèche nous indiquent peut-être que l’ouverture du mur de Berlin, le 9 novembre 1989 fut l’événement déclencheur de la fissuration puis de l’effondrement du bloc communiste. Cette date est d’ailleurs inscrite sur la plaque d’immatriculation.

Je vous invite à vous rendre dans ce grand musée à ciel ouvert qu’est la ville de Berlin pour mieux comprendre cet épisode de l’histoire allemande.

Et maintenant un petit quiz facile!

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Ma galerie de photos du mur!