Publié dans Année 2011-2012, Aux Champs, Espace 3ème

Bourgeois et paysans…

Lorsque Monsieur et Madame D’Hubière arrivèrent près de la chaumière de la famille Vallin, les deux parents se partageaient un petit bol contenant une pauvre soupe. Les D’Hubière, en constatant l’étrange manière de manger des Vallin, s’échangèrent un regard de dégoût, semblant dire : « Mais que faisons-nous ici ? » Le jeune couple dut s’avancer jusqu’au cœur de la pièce avant que les paysans ne daignent lever les yeux sur eux. Alors Monsieur D’Hubière tenta d’expliquer à nouveau le souhait de sa femme, avec plus de tact et de malice, cette fois :

« Bonjour braves gens ! Nous souhaiterions vous proposer une affaire dans laquelle vous avez tout à gagner. Il s’agit d’argent dont je veux vous parler, voyez-vous ? »

La mère Vallin perdit tous sens de raisonnement lors de l’allusion à la monnaie, cependant, les Vallin n’étant pas habitués à parler finances, tentèrent d’en apprendre plus sur la fameuse affaire dont il était question. Le père Vallin s’empressa de poser une multitude de questions, sans même prendre le temps de respirer entre chaque phrase :

« C’est’i qu’vous m’parliez d’argent ? C’est’i qu’s’agit b’en d’argent ? Et comb’en qu’y’a d’pièces d’or en jeu ? J’devions vous d’nner que’qu’chose ou que’qu’ b’en ‘n échange ? 

–  Effectivement, cher monsieur, confirma Monsieur D’Hubière, il y a, il va sans dire, une condition à mon offre généreuse. »

            Madame Vallin ne voulut pas en savoir davantage et s’empressa de questionner leur visiteur, comme l’avait fait auparavant son mari, que la quantité de francs s’élevait qui leur étaient proposés et, inévitablement, quelle était la condition. Madame D’Hubière, qui n’avait jusqu’alors pas parlé, expliqua la chose ainsi :

« La condition est la suivante : si vous acceptez de bien vouloir confier votre petit Jean à nos soins, nous subsisterons à vos besoins matériels, à raison d’une rente de cent francs par mois. »

            Elle s’aperçut qu’ils étaient sur le point de refuser, qu’ils pensaient trop au manque affectif que cela provoquerait chez leur enfant, et ajouta :

« Ne songez point au mauvais côté de la chose, car il est infime, songez plutôt à l’avenir de votre enfant, au bonheur que nous lui procurerons et à l’argent qu’il vous donnera plus tard, l’affaire, visiblement, est toute à votre avantage, et vous regretteriez d’avoir refusé, si tel était le cas. »

            Madame Vallin protesta, cent francs par jour ne seraient certainement pas suffisants, il leur en faudrait cent-vingt ! Madame D’Hubière trépignait d’impatience, c’est pourquoi, elle leur accorda sans réfléchir leur augmentation aux paysans. Elle leur donna cent francs en gage de cadeau, pendant que son mari faisait l’écrit. Le maire et le voisin, que l’on appela sur-le-champ, servirent de témoins suffisamment dignes de confiance aux yeux des quatre commerçants. Dès que Monsieur D’Hubière eut apposé sa signature, sa femme, aux anges, s’empara de l’enfant comme un voleur l’eût fait d’une pomme sur un étalage, et s’en alla.

 

Adrien 3ème C

Auteur :

Enseignante au collège de l'Epine, à Novalaise, un village de Savoie, j'ai créé ce blog pour permettre un prolongement de mon enseignement à l'extérieur de la classe, permettre aux élèves de s'entraîner, s'ils le désirent, sur des sites que j'ai sélectionnés pour leur créativité, leur auto-correction, leur interactivité.

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