Bac blanc TES, 2014, mineure histoire.

A l’aide de l’étude critique des documents, montrez comment et pourquoi le socialisme allemand se divise en 1918-1919 ?           bac blanc mineur histoire 2 2014 001    bac blanc mineur histoire 2014 001

Aux congrès de Gotha (1875) et d’Erfurt (1891), le parti social-démocrate (SPD) avait réussi à  concilier deux courants divergents : l’un réformiste et l’autre révolutionnaire. Devenu le 1er parti d’Allemagne  à la veille de la 1ère guerre mondiale, le SPD doit de nouveau faire face aux divisions internes : le courant majoritaire réformiste vote les crédits de guerre, rejoint « l’Union sacrée » derrière l’empereur Guillaume II alors que la minorité révolutionnaire dénonce la guerre « impérialiste ». La défaite de l’Allemagne à l’automne 1918, précipite la fracture  comme en témoignent ces deux documents. Le premier est un texte extrait du discours de Karl Liebknecht, un des dirigeants de la Ligue Spartakiste fer de lance du courant révolutionnaire, prononcé le 9 novembre 1918. Devant le Palais royal à Berlin, Liebknecht proclame l’avènement de  » la République socialiste libre d’Allemagne « , le jour de l’abdication de l’Empereur Guillaume II alors que la ville est plongée dans le chaos de l’insurrection. Le second document est un texte extrait du livre de  Philipp Scheidemann,  » L’effondrement » publié en 1921, dans lequel l’auteur rappelle les évènements de la Semaine Sanglante de janvier 1919 alors qu’il est membre du gouvernement d’Ebert. A l’aide de l’étude de ces deux documents, nous montrerons pourquoi et comment le socialisme allemand se divise en 1918-1919.

 Dans le préambule de son discours, Liebknecht rappelle les sacrifices du mouvement ouvrier sous l’empire des Hohenzollern depuis 1871. Dans un registre tout à la fois épique et tragique, il évoque avec une certaine emphase ,  ces  millions de  morts victimes de  » la tyrannie « , ces « crânes brisés, baignant dans leur sang  » ou encore ces  « millions de femmes et d’enfants morts de  chagrin et misère « . Enfin, c’est le sacrifice de « millions et millions de victimes sanglantes  » d’une guerre mondiale voulue par les capitalistes et qu’il n’a eu de cesse d’en dénoncer l’aberration avec Rosa Luxembourg.
Liebknecht veut ensuite convaincre son auditoire,  » cette multitude immenses de prolétaires », ces  » esclaves (…) du capitalisme « , de l’opportunité du moment et poursuivre la révolution mondiale commencée en Russie et déjà relayée par des mouvements d’insurrection à Kiel, Hambourg ,Brême ou encore en Bavière. L’objectif est d’imposer une « République socialiste libre d’Allemagne » sur le modèle communiste :  » le gouvernement des ouvriers et des soldats « ,  » le nouvel ordre étatique du prolétariat  » renvoient aux notions de soviets et de dictature du prolétariat. Ainsi, le leader spartakiste refuse-t-il tout compromis avec le SPD Philipp Scheidemann qui, quelques heures plus tôt, devant le Reichstag,  proclamé la République d’Allemagne, lorsqu’il exalte son auditoire « à ne pas  croire que notre tâche est achevée »

 

 Alors que la rupture entre réformistes, partisans de la voie légale pour accéder au pouvoir  et révolutionnaires,  creusée avec le choix des premiers de soutenir l’ « Union Sacrée » en 1914 contre les seconds viscéralement pacifistes, la participation du SPD à nouvelle République de Weimar proclamée en 1918 constitue pour les Spartakistes qui fondent le KPD (Parti communiste allemand) en décembre 1918, une véritable trahison.

 

 Membre du Conseil (gouvernement) présidé par Hébert, puis premier chancelier de la République à partir de février 1919, Philipp Scheidemann, rend compte de cette rupture entre les deux ailes du socialisme allemand dans ses Mémoires. Pour désigner les Spartakistes qui viennent d’engager depuis le 6 janvier 1919 une véritable insurrection  contre le pouvoir en place en occupant les locaux du journal du SPD (le  » Vorwärts « ), mais aussi la  préfecture de police  » et les  » imprimeries « , Scheidemann  use des termes de : » bandits » et  » fanatiques« . déconsidérant ainsi ses adversaires. N’ont-ils pas selon lui tenté d’enlever Noske, l’un des dirigeant du SPD et entrainé une réprobation générale du parti contre leurs « sanglantes tentatives » pour renverser le gouvernement ? Il s’agit là surtout pour l’auteur de  légitimer l’action du gouvernement. En effet, la répression (la « Semaine Sanglante ») scelle une fracture définitive entre SPD et KPD car c’est un socialiste, Noske, qui « liquide définitivement » les Spartakistes à l’aide des corps francs, ces « troupes disparates «  évoquées par Scheidemann. Enfin, les deux dirigeants spartakistes Karl Liebknecht et Rosa Luxembourg sont assassinés au cours de leur arrestation.

 

Le SPD réformiste d’Ebert et de Scheidemann a donc choisi la légalité pour accéder au pouvoir (Elections à l’Assemblée nationale) et l’appui de l’armée pour maintenir l’ordre et écraser son aile gauche révolutionnaire (KPD). Dans les années 1920, Le SPD devient la principale formation politique de la République de Weimar, mais les évènements de 1918-1919 ont creusé entre les deux tendances du mouvement ouvrier un fossé infranchissable qui les paralyse face à l’ascension du NSDAP. Dix ans plus, en 1928, le KPD adopte la tactique « classe contre classe » et n’hésite pas à dénoncer le « social-fascisme » du SPD.

 

Category(s): 3.ECD HISTOIRE, H2 .Socialisme,communisme et syndicalisme en Allemagne depuis 1875
Tags: , , , , , ,

Laisser un commentaire