Être au rendez-vous

Mercredi 8 mai. 9 h 30 du matin devant la mairie de la ville du collège. Lorsque nous arrivons, le principal et moi, une poignée d’élèves nous attendent déjà !

Leurs regards sont chargés de reproches. Ils ont vraiment craint que nous ne venions pas, que nous les laissions seuls à une cérémonie qui n’a de sens que parce que nous sommes là et parce que nous tenions à ce qu’ils soient là eux aussi. La promesse d’un moment privilégié qui se distinguerait de leur routine et d’un petit-déjeuner ont emporté leur adhésion sans plus de réserve.

En ce matin de jour férié, ils sont presque vingt élèves à nous attendre près du monument aux morts. Ne sachant pas très bien ce qui les attend, se fiant simplement à nous… Ils ont eu envie de répondre à l’invitation de leur CPE, acquise à l’idée qu’une partie de leur éducation se joue dans ces moments solennels. C’est aussi une marque de confiance en mon autorité, celle qui permettra la tenue parfaite des élèves lors de ces moments réglés par un strict protocole.

Vivre un moment suspendu

Je les confie au responsable du protocole et leurs yeux cherchent mon signe de tête, le geste qui leur indique que je les surveille. Au moment le plus silencieux de la cérémonie, l’élève la plus agitée de la troupe se retourne pour me demander si je l’ai appelée. Trois fois. Serrés les uns contre les autres sous mon parapluie, des élèves de sixième qui parlent toujours très fort me demandent quoi penser d’une remarque les invitant à « fermer leur bouche » prononcée par des vieilles dames pour qui l’instant est important.

Par ce moment hors du collège, je mesure ce que permet l’autorité dans ma fonction : un respect sans récrimination, un respect absolu de la consigne « ne pas toucher à l’étincelant buffet de mignardises » pendant le dernier discours du maire. Ce sont les élèves les plus disciplinés, les mieux rangés de la cérémonie, alors que leurs manières sont plutôt tapageuses et extraverties en temps normal.

La dialectique éducative

Les élèves sont accrochés à mon regard pendant cette cérémonie, comme dans l’établissement. Les élèves s’accrochent aux regards des adultes en général. Ils le cherchent dans la foule ce matin ; dans la cour, dans la salle de classe, dans mon bureau les autres jours. Il est bienveillant, toujours, mais il peut aussi se teinter de sévérité. Parfois, un murmure précède mon arrivée dans un couloir, dans les toilettes de la cour de récréation ou bien retentit lorsqu’un fauteur de troubles a le dos tourné. Souvent, je surprends l’utilisation illicite d’un téléphone portable, et je sévis.

Pourtant, ce n’est pas la capacité à punir qui fonde cette autorité du quotidien. C’est tenir mes promesses et regarder les élèves comme un potentiel. C’est faire signifier le monde autour d’eux, les aider à se déchiffrer, à déchiffrer ce qui les entoure. C’est être la personne à qui ils estiment pouvoir poser toutes les questions épineuses avec la conviction d’obtenir une réponse ou un éclaircissement. Alors, quand je leur demande de participer à un événement, leur curiosité, leur désir d’adhérer à un projet commun, leur confiance, leur envie d’être regardés et guidés conduisent des volontaires, et non une classe, à se présenter sous la pluie un 8 mai.

 

Une chronique de Maude

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