Votre soi-disant cyber, une nouvelle écrite par Shirel

Votre soi-disant cyber

Les personnes que nous fréquentons, parfois, nous cachent de lourdes choses sur elles-mêmes et leur passé et ce même si nous nous connaissons depuis longtemps et que l’on se confie beaucoup de secrets, alors attention.

Jessica en fait partie, et pourtant rien ne portai à croire cela. Nous étions de très proches amies depuis la plus petite enfance puisque nos parents étaient de même. Nous sommes nées le même jour, la même année, nous avions tout en commun, nous étions voisines, mais elle dormait plus chez moi que chez elle car entre elle et ses parents ce n’était pas la joie, ce qui la mettait dans des situations pas très agréables, surtout à l’adolescence. C’était quand même une jeune fille lambda, assez bonne élève, pas de soucis dans la vie quotidienne. Des fois, on se racontait notre vie amoureuse, comme toutes les adolescentes du vingt-et-unième siècle :

«-Tu sais, hier, je me suis disputé avec mon copain, encore…

-Encore ! Dis-je, ça fait combien de fois ce mois-ci déjà ? Je ne compte même plus. Pourquoi     cette fois ?

-Pour rien, comme d’habitude, il sort avec sa soi-disant meilleure amie sans moi et il sait que je n’aime pas ça. Mais bon, bref, toi, tu racontes quoi avec les gars, Leïla ?

-Oh moi, comme d’habitude, rien du tout, tu sais, personne à l’horizon. »

On continuait notre vie, les réseaux sociaux, le lycée, les devoirs et tout le reste. Ce qui m’étonnait et qui m’étonnera toujours, c’est lorsqu’elle venait chez moi je lui donnais plein de vêtements que je ne portais plus, je lui prêtais du maquillage qu’elle ne me rendait jamais d’ailleurs mais bon j’ignorais un peu, je me disais : « c’est rien, elle en a besoin, prête lui, fais pas ton égoïste ». En plus de cela, je lui achetais des cadeaux souvent qui coûtaient cher puisque j’avais les moyens, je disais que ce n’était « qu’un petit quelque chose ». A côté de ces choses, les abonnés commençaient à monter en masse, les likes aussi et donc son influence en général et je pense qu’à partir de ce moment, elle a changé du tout au tout. Toutes ses fréquentations ont elles aussi changé, des personnes qu’elle côtoyait ne sont devenues que d’illustres inconnues et inversement. Elle commençait à ne plus travailler en cours, répondre au professeur et avoir des mauvaises notes Elle sortait tard le soir avec des garçons de deux fois son âge. Elle fumait, buvait jusqu’à ne plus pouvoir tenir debout, elle se dégradait de jour en jour. Mais ce n’est le pire dans tout cela. Un jour, on ne sait pas comment, ni d’où, ni pourquoi sont sorties des vidéos. Des vidéos d’elle. On la voyait avec des garçons faisant des choses que l’on n’aurait jamais cru qu’elle avait faites.

Ces vidéos tournaient de plus en plus, dans toute la ville et celles des alentours, en même temps que son influence sur les réseaux grandissait toujours. Au début seuls les gens du lycée le savaient, quand on lui demandait si c’était elle sur les vidéos, elle niait les faits jusqu’à l’os. Même lorsque moi je le lui demandais, elle me répondait d’un « Non ! » catégorique, elle me mentait à moi, sa meilleure amie, les yeux dans les yeux, de peur que je porte un jugement sur ses actes. Par la suite, les marques la contactaient plus souvent pour faire des partenariats car les abonnés montaient ainsi que les likes et donc son influence aussi et de plus en plus. Elle commençait à se sentir supérieure aux autres, à avoir les chevilles qui gonflent, à prendre la grosse tête, quoi. Je pense qu’elle commençait un peu trop à oublier qui l’a lancé dans ces choses qui sont malsaines mais qui révèlent le vrai visage des gens quand l’argent commence à rentrer. Elle oubliait un peu trop souvent, que je lui donnais des habits quand je les portais plus, aussi elle oubliait que je lui servais d’entrepôt pour les produits de partenariat, en plus et je crois que c’est la chose qu’elle a le plus oublié, c’est quand je suis allé lui acheter son Iphone avec mon propre argent et après ça, elle ose me laisser sur le pas de sa porte. Après cela, on ne se parlait plus jusqu’à ce que l’on se croise à la fête foraine de la ville. C’est à cet endroit que j’ai appris la vérité, elle ne pouvait plus la nier puisque l’on voyait précisément sa tête sur ces vidéos. Je lui demandais pour la énième fois si c’était elle, puis un grand silence, et d’un coup Jessica commence à crier :

«-Si c’est moi maintenant, tu vas faire quoi ?! Sale…, hein tu vas faire quoi ?

-D’abord calme toi et me crie pas dessus, ok. Je ne suis pas ton chien ou un moins que rien sinon j’vais t’frapper tellement mal que tu vas regretter d’agir comme ça ! Dis-je en élevant la voix.

-Bah viens m’frapper t’attends quoi, hein ? Que je t’arrache tes mèches, hein, sale… ?

-Hein, tu me prends pour qui, je suis pas ton chien, j’t’ai dit ! Hurlais-je en lui donnant une énorme gifle. »

Après cela, la baston entre les deux clans commençait, puis à un moment je lui arracha une poignée de cheveux que je laissa tomber par terre avec irrespect que moi-même je n’ai pas habituellement. Ensuite je rentrais chez moi tranquillement comme si de rien n’était. A la suite de cela, lorsque l’on se voyait quelque part,  au lycée par exemple, l’atmosphère devenait comme glacée autour de nous.

Après cet épisode qui était plus ridicule qu’autre chose, j’ai pris la décision d’aller voir Jessica pour lui parler en tant que personne mature, la confronter à ses problèmes et lui faire part de mes sentiments. Je sonnais donc chez elle, elle ouvrait la porte juste assez afin de pouvoir me voir entièrement et me mépriser du regard comme elle le faisait à chaque fois qu’elle était énervée contre quelqu’un. Elle m’a lâché un petit «Tu veux quoi encore ?» avec de la rancœur qui emplissait son corps entier. Je lui ai donc demandé de sortir s’asseoir, que l’on puisse mettre les choses au clair. On a donc parlé pendant un long moment, elle m’expliquait tout ce qu’elle avait sur le cœur, ses ressentis et surtout le quiproquo de toute cette histoire qui nous a mené jusqu’ici. J’essayais tant bien que mal d’entendre, de comprendre ce qui l’avait poussé à faire tout cela mais je n’y arrivais pas, c’était plus fort que moi, au fur et à mesure qu’elle me racontait l’histoire, je devenais de plus en plus colérique et en même temps désolée de ne pas avoir remarqué plus tôt sa détresse. Cette discussion nous a conduites ensuite à se revoir de plus en plus souvent pour trouver une solution à ce problème de vidéos. On était donc de nouveau amies, du moins c’est ce que je pensais, parce que malgré tout elle était comme ma sœur d’autres parents, j’avais beaucoup d’affection pour elle. Plusieurs semaines s’étaient écoulées jusqu’au jour où j’ai reçu  un message disant que les vidéos de Jessica étaient bel et bien effacées d’internet et de tous réseaux sociaux. Je courais donc chez elle pour lui annoncer la bonne nouvelle. Je sonnais une fois : rien ; deux fois : rien. Je retournais chez moi, le lendemain, au lycée je la cherchais partout et quand je la trouvais enfin, je lui annonce la nouvelle, elle me répond d’une petite voix : «Merci, mais je ne préfère pas que l’on reste amies». Voilà comment j’étais remercié de tout ce que j’avais fait pour elle pendant toutes ces années.

par Shirel Koukpaki, seconde 4