Un soir d’hiver, nouvelle réaliste par Rémi

 Un soir d’hiver
Toute ressemblance avec des individus ou des situation existante ne saurait être que fortuite.
    
La campagne était calme sous la brise glaciale. L’hiver de cette année deux mille dix-neuf venait seulement de débuter et déjà les premiers flocons tourbillonnaient dans le triste ciel. Les routes, tortueuses et verglacées, étaient bordées par des platanes géants, dépourvus de feuilles, qui grinçaient sous les différents assauts du vent. Les champs blanchis par la neige avaient pour  seule distraction un corbeau isolé qui cherchait des vivres au loin dans le brouillard.
    C’était dans ce morne paysage que se situait Lisle-haute, petit village, hébergeant moins de cent habitants. Lisle-haute était principalement constituées de maisons insalubres qui tombaient en ruine. En cette fin d’après-midi, une seule maison était allumée. Elle était similaire à ses voisines : deux étages qui comportaient  chacun quatre fenêtres, une grande porte au rez de chaussée et pour seul ouverture au grenier une lucarne.
    Cette  maison abritait une famille composée d’un couple et de ses deux enfants. Le père, d’allure forte, travaillait au sein d’une clinique de la ville d’à coté. Il avait des cheveux courts et blonds, le front intelligent, les yeux clairs, de stature plutôt haute il devait avoir un peu moins de trente-cinq ans. La mère petite et élancée, avait des yeux verts et des cheveux châtains, son regard était vif mais rempli de tendresse. L’ainé de la famille se nommait Nathan, il était en quatrième et avait treize ans. Plutôt grand pour son âge, il était svelte et avait, comme sa mère, le regard vif. Le visage radieux et le nez aquilin, il était reconnaissable pour ses yeux verdoyants. Son frangin était en sixième dans le même collège. Il avait le caractère inverse de son grand frère. Son corps était émacié avec une taille ordinaire pour son âge. Dernier de la fratrie, il était réputé d’intellect. Malgré sa renommée Nathan le traitait souvent d’abutyrotomofilogène.
    Ainsi, la routine de cette modeste famille était rythmée par les différents trajets de leur maison à la ville, des aléas climatiques, des joies et des peines du quotidien. Parfois la routine était brisée par la venue impromptue d’un ami ou de la famille mais elle reprenait inlassablement le dessus…
    Pourtant, ce soir là, le père tarda à revenir et les minutes passèrent, les heures s’écoulèrent mais rien ne vint…
    La mère appelait en vain le téléphone de son mari qui était directement sur le répondeur. Les messages vocaux se succédaient, l’angoisse montait, la peur devenait insoutenable mais personne ne répondait au bout du fil et rien ne vint…Déjà vingt-trois heures sonnait à la petite église de Lisle-haute annonçant alors trois heures de longue attente. Mais toujours et encore rien ne vint…
Nathan n’en pouvait plus de cette attente interminable. La neige avait cessé de tomber et tout le monde redoutait un accident inattendu sur les routes entièrement recouvertes de verglas. Nathan, tout à coup, affirma : « Je n’en peux plus maman, s’ il est arrivé quelque chose à papa il faut aller voir et alerter. Je prends mon vélo et  je vais aller voir ». Peu de temps après, Nathan sur son vélo dévalait de toute sa puissance les routes de campagne.
    Pendant ce temps, la mère et le cadet étaient restés, dans l’attente d’une réponse ou d’une confirmation. Soudain le bruit d’une sonnerie surgit. C’était Nathan. De sa voie fébrile on pouvait distinguer : « Allo maman, je suis place du Maréchal d’Anjou, je suis devant la voiture rouge de papa. Il y a eu un accident. Il y a plein de pompiers et plein de gendarmes. J’ai demandé à un pompier où papa a été emmené et il m’a dit qu’il a du être emmené dans l’hôpital d’à côté et je crois que c’est la clinique St Hubert, là où papa travaillait… Je ne sais pas comment il va, j’y vais à vélo. La mère assommée par cette nouvelle bredouilla quelques mots avant de raccrocher.
    La clinique St Hubert était un bâtiment imposant datant d’après guerre. Ses murs, décrépis et d’un blanc passé, étaient massifs.
    Nathan entra dans la clinique et sans perdre de temps alla directement voir l’agent de l’accueil. Il lui expliqua toute son histoire puis il demanda s’il pouvait le voir. L’agent certifia bien que le père était rentré dans la clinique il y a environ trois heures mais que pour lui rendre visite il devait être accompagné d’un majeur. Abasourdi, Nathan se laissa tomber sur l’un des fauteuils métalliques de la salle d’attente ne sachant que faire et où aller, submergé par le désespoir. Une légère odeur de désinfectant régnait dans la vaste salle, devant lui se trouvait une télévision qui passait en boucle une courte vidéo présentant l’enceinte médicale. Il fallut attendre une vingtaine de minutes interminables avant de voir arriver le taxi transportant sa mère et son frère.
    Après la signature de plusieurs formulaires, la famille fut enfin autorisée à aller voir le père accompagné par un médecin du nom de Kuzéquista. Il durent traverser une infinité de longs couloirs d’une blancheur défraîchie, parfois tachés par l’usure du temps, parfois par des taches d’humidité provenant, sans aucun doute, de la vétusté du bâtiment.
Enfin ils s’ arrêtèrent devant une porte blanche, similaire à toutes ses voisines. Kuzéquista poussa doucement la porte qui lâcha un grincement strident avant de faire place à l’infirme.
Les semaines passaient et la vie avait repris son cours. Le père allait seulement ressortir de la clinique. En effet, deux jours après son accident, il avait fait une baisse de tension qui aurait pu s’avérer mortelle. Les médecins furent obligés de le mettre dans un coma artificiel et peu de temps après sa tension redevenait stable. A cause de l’accident, il subissait des lésions au niveau des cuisses, l’obligeant à se servir d’un fauteuil roulant.
    Les causes de l’accident étaient restées indéterminés ou peu claire. Certains témoins affirmaient qu’une voiture avait dérapé, dû aux routes givrées, et ainsi la voiture avait coupé la voie adverse. Tandis que d’autres témoins plaidaient plutôt pour un refus de priorité ayant créé un carambolage dont faisait partie la voiture du père. Cet accident avait fait une douzaine de victimes parmi lesquels quatre personnes grièvement blessées.
Peu de temps après, la mère avait réussi à trouver un travail à ‘office de tourisme où elle faisait agent d’accueil tandis que le père avait perdu son travail à la clinique. Les médecins restaient prudents sur la date où il pourrait de nouveau marcher ; les plus optimistes considéraient que dans un an il pourrait se tenir debout quant aux plus alarmistes annonçaient qu’il allait sûrement rester dans un fauteuil roulant jusqu’à la fin de ses jours.
C’était donc aujourd’hui le samedi 16 février, que le père sortait, pour la première fois depuis l’accident, de la clinique. Le retour à la maison fût difficile. Les semaines passaient et la vie avait repris son cours. Un an s’était déjà écoulé. Cet accident avait laissé des séquelles dans cette modeste famille mais  un avenir meilleur se dessinait et déjà le père recommençait à marcher.
Rémi N, seconde 4