Je vous invite à lire !

Ah la fameuse et dépréciée critique de livre… Pourtant, bien mené, cet exercice peut s’avérer un plaisant travail d’investigation au cœur même des plus grands ouvrages qui aient jamais échu entre nos mains. Encore faut-il savoir s’y prendre. C’est pourquoi, nous allons faire quelque chose de légèrement différent aujourd’hui : en lieu et place de la fastidieuse étude de texte, je vous propose plutôt un avis condensé sur l’objet de ma lecture du moment : les « Lettres à un jeune Poète » de Rainer Maria Rilke.

Ce livre, outre l’immense bagage poétique qu’il recèle, m’a profondément touché et continue encore de le faire après trois ans, raison pour laquelle je le relis et vous en parle aujourd’hui. Si vous avez suivi mes quelques articles sur ce webzine, vous avez sans doute aperçu quelque part, perdu au milieu d’un océan de mots agencés en phrases, un poème. Or je pense qu’il est essentiel que je vous dise que ce poème, c’est Rilke qui me l’a fait découvrir en moi-même.

J’ai reçu ce livre de la part d’une personne extraordinaire : mon professeur de Culture Humaine et Religieuse (la matière n’a jamais aussi bien porté son nom que lorsque cette femme enseignait) elle m’avait d’ailleurs également offert un autre ouvrage profondément beau et marquant que je vous conseille vivement : « le Prophète » de Khalil Gibran. Nul besoin de vous dire qu’à l’époque où elle m’a offert ce livre, la poésie ne m’intéressait guère; comme chacun d’entre vous qui avez été forcés d’en étudier les grands classiques en cours, je la trouvais inintéressante et pathétique. Mon avis a changé quand j’ai lu la première lettre de Rilke.

Car voyez-vous cette lettre, et tout ce livre d’ailleurs possède la force magique que seuls possèdent les grands chefs d’œuvre littéraires, cette force qui traverse le temps et les époques pour venir s’adresser directement à quelque chose qui dort au fond de votre esprit (je n’ose encore parler de l’âme) et qui attendait patiemment que vous trouviez la clé pour y accéder. Cette clé était pour moi le livre. Rilke y montre toute la gloire de l’artiste dont le travail ne consiste pas à simplement créer ou « faire de l’art » au sens esthétique de l’expression mais à « rechercher en lui par la voie de la solitude et de l’introspection le secret de choses et du monde ». C’est de ce travail de recherche que nait toute forme d’art et c’est cette solitude de l’artiste que nous enseigne le poète.

Quel lien avec vous aujourd’hui seraient tentés de me dire les plus têtus d’entre les condisciples et avec raison. Le livre ne s’adresse en fait pas simplement au futur artiste qu’est Franz Kappus ou même moi qui vous en parle. Non la vraie force de ce livre c’est qu’il invite tout un chacun à faire l’expérience de cette bienfaisante solitude qui permet d’entendre tout l’univers chanter au fond de son âme. C’est un livre universel et éternel, un enseignement unique même si Rilke n’en est pas le seul détenteur et j’espère sincèrement que, si vous le lisez un jour, vous saurez apprécier à sa juste valeur le cadeau qui vous sera fait (ou que vous vous serez fait) en recevant cette merveille.

Au plaisir de partager la joie de lire avec vous !

Arnaud