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Chroniques du confinement – Partie 1 – Dehors (suite)

Posted by on 13 mai 2020

Vendredi 27 mars. La peur

Dring, Dring.

« Allô, Virginie? »

« Oui, maman a appelé le Samu, elle a du mal à respirer »

« Ok panique pas. Tu me rappelles quand ils sont arrivés pour savoir s’ils doivent l’emmener à l’hôpital ou pas. Si jamais on verra où est-ce que vous pouvez aller. Ok ? Je viendrai s’il le faut. »

Longues minutes. Qu’est-ce qu’on peut faire dans ce cas, des milliers de questions m’assaillent ? Le gouvernement a-t-il prévu ce genre de cas ? Que fait-on des enfants, éventuellement infectés et dont les parents sont hospitalisés ? On peut pas les envoyer chez les grand-parents (personnes à risque) ? On les met en quatorzaine dans un centre quelconque ? L’aide à l’enfance est déjà débordée en temps normal. On les met chez la première personne amie ou famille qui les accepte ?

Et moi, je peux pas. Trop dangereux pour mon mari.

Sinon faut que j’aille dormir là-bas… Mais du coup y’a personne ici ? Dans un hôtel à côté de la maison, des mineurs seuls ? Bof…

Longues minutes d’attente. Pas de nouvelles.

Pas de nouvelles, bonne nouvelle dit le proverbe.

J’envoie un SMS.

Réponse de mon amie. Le Samu n’est pas venu. Des médecins ont rappelé pour faire un bilan par téléphone. Elle reste chez elle. Ils vont la suivre à distance plusieurs fois par jour pour surveiller l’évolution. Au moindre signe inquiétant, une ambulance arrive.

Du coup, branle-bas de combat psychologique. Elle me donne presque ses dernières volontés (c’est un peu flippant) et on parle des enfants.

Elle va les briefer sur toutes les éventualités. Les pauvres. Un traumatisme de plus.

Toux – courbatures – fièvre – fatigue extrême – angoisses – réflexion sur la mort… etc.

Ce putain de virus vous emmène au fond apparemment. Dans vos derniers retranchements physiques et psychologiques.

Mon amie, habituellement si diserte est quasi-muette. Quand elle répond – assez rarement – à mes SMS, c’est un petit « ça va ». Je finis par me demander si je l’ai vexé ou quelque chose. Ou alors elle ne veut pas que je vienne voir de peur de me le refiler.

Apparemment épuisement. L’avenir dira ce que l’on ne dit pas encore beaucoup dans les journaux. Il y a ceux qui en meurent, ceux qu’on « réaniment », ceux qu’on oxygènent et la foule des autres qu’on suit. Ça veut dire qu’on fait rien que les soutenir en leur disant que ça va passer. Prises de sang, tests…

Et après ? Après il y a ceux qui revivent normalement ou presque. Il y a ceux qui sont fatigués. Et ceux qui ont de séquelles.

Un mois plus tard. Re-toux, saignements de nez, douleurs à la poitrine, essoufflement. Pas de scanner de contrôle. Vous rigolez ou quoi, vous croyez que l’hôpital Bicêtre va fonctionner correctement parce qu’il y a une pandémie ? LOL. On lui dit qu’elle l’a eu et qu’elle n’est plus contagieuse. Mais le test sérologique dit qu’elle n’a pas d’anticorps. Trop tôt ? Le test n’est pas assez fiable ? Impossible de savoir.

La peur est passée en mode sourdine. Mais elle couve. Comme les feux ukrainiens autour de Tchernobyl. Sous la terre.

Aurélia Hurtique

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