Art et pouvoir politique en France dans la première moitié du XVIIe siècle

Art et pouvoir politique en France dans la première moitié du XVIIe siècle

Le XVIIe siècle a été appelé par Voltaire le « Grand Siècle » ou même « siècle de Louis XIV ».


Prise de notes avec le concours d’Hélène Bernardoff (K-Lyon).

I. Contexte politique et religieux.

Entre 1547  et 1594 la France est dévastée par les guerres de religion, les programmes artistiques sont ralentis ou arrêtés. Henri IV, protestant est obligé de se convertir au catholicisme. Jacques Androuet du Cerceau (créateur du château de Saint Germain en Laye où Louis – Dieudonné, le futur roi Louis XIV, est né le 5 septembre 1638 et où Louis XIII est mort le 14 mai 1643), protestant et architecte le plus doué, s’enfuit et ne réalise plus rien en France.

Malgré les conflits politiques jusqu’en 1661 (début du « règne personnel » de Louis XIV) un effort de reconstruction est entrepris après des décennies de troubles. Par l’Édit de Nantes de 1598, Henri IV tente de pacifier le royaume.

Henri IV, né Henri de Bourbon (1533 – 1610), roi de Navarre (Henri III de Navarre, 1572-1610) puis roi de France (1589-1610).

Premier souverain français de la branche dite de Bourbon de la dynastie capétienne.
Il était le fils de Jeanne III, dite Jeanne d’Albret, reine de Navarre et d’Antoine de Bourbon, chef de la maison de Bourbon, descendant du roi Louis IX et premier prince de sang. En vertu de la « loi salique » cette filiation fera d’Henri le successeur naturel du roi de France à la mort de François, duc d’Anjou (frère et héritier du roi Henri III), en 1584.

1594 : Henri IV (1589-1610) entre dans Paris, brise le pouvoir de la Ligue et expulse les Espagnols. Il devient le maître de Paris (Henri IV est le seul roi de France à avoir été sacré à Chartres et non à Reims). Henri IV est donc à la tête d’un pays essoufflé au plan économique et divisé par les querelles religieuses. Il doit en outre s’assurer de la sécurité du pays face aux entreprises de l’Espagne.

– Edit de Nantes  1598.

– Assassiné par Ravaillac en 1610.

Louis XIII (1601-1643), roi de France et de Navarre (1610-1643). Il est le fils d’Henri IV et de Marie de Médicis et le père de Louis XIV.
Son règne est marqué par l’abaissement des Grands et des protestants (prise de La Rochelle), ainsi que par la lutte contre la maison de Habsbourg.
L’image de ce roi est inséparable de celle de son principal ministre, le cardinal de Richelieu (ministre de 1624 à 1642), dont la vie politique a été consacrée au redressement de la monarchie française.
Au lendemain de la mort de Richelieu, Mazarin fut nommé Principal Ministre de l’État, comme l’avait recommandé Richelieu qui voyait en lui son digne successeur.

Régence d’Anne d’Autriche et de Mazarin de 1648 à 1653.
Ainsi, à partir de 1643, à la mort de Louis XIII et comme Louis XIV n’est encore qu’un enfant, la régente Anne d’Autriche nomme Mazarin Premier Ministre. En mars 1646, il devient également « surintendant au gouvernement et à la conduite de la personne du roi ».
Fronde : parlementaire en 1648 puis de la grande noblesse 1650-52.

Louis XIV : Né en 1638, roi de France de 1643 à 1715. Régence Mazarin – Anne d’Autriche de 1643 à 1653. Règne avec Mazarin comme Premier ministre de 1653  à 1661 (mort de Mazarin). puis « règne personnel » de 1661 à 1715.

Louis XIV, qui a régné pendant 72 ans, est le chef d’État qui a gouverné la France le plus longtemps, et le souverain qui est parvenu à l’âge le plus avancé. Il est aussi le monarque qui a régné le plus longtemps en Europe.

Contexte européen.

Déplacement du centre de gravité vers le N-O de l’Europe, l’Espagne a perdu sa prééminence, l’Allemagne est ravagée par la Guerre de Trente Ans (1618-1648) (- 2/3 de sa population) conflit post- Augsbourg qui dégénère en guerre généralisée mettant en jeu l’influence des Habsbourg et de la France en Europe centrale.
Le Traité de Westphalie (1648) consacre la puissance de la France mais les Habsbourg s’affirment aussi en repoussant le danger turc vers 1680. La monarchie françaises est forte de l’homogénéisation de son territoire, la densité de population, l’organisation centralisée de l’Etat (Richelieu et Louis XIII, Mazarin et Anne d’Autriche, Louis XIV et Colbert) Paris est la 2e ville d’Europe à la fin du siècle avec 400 000 à 500 000 habitants.
Voici le diaporama du cours sur la France du XVIIe avant le règne personnel de Louis XIV.

Dossier sur l’Exposition Philippe de Champaigne entre politique et dévotion.

dossier-de-presse_champaigne
La période de la mort de Richelieu (1643) à 1661 est marquée par les révoltes récurrentes de groupes sociaux qui menacent le pouvoir politique.

  • La bourgeoisie marchande et surtout la bourgeoise de robes (les « robins » : avocats, huissiers), qui a acheté ses charges (« vénalité des offices ») lutte contre un développement du pouvoir royal qui risque d’entamer ces privilèges. Alors qu’ils aspirent à jouer un rôle politique comme en Angleterre, le développement du pouvoir royal implique la nomination de fonctionnaires royaux, alors qu’eux ont acheté leurs charges à vie.

Ils tentent de profiter de la situation de faiblesse du pouvoir à l’occasion des régences pour s’imposer dans le domaine politique.

  • La noblesse redoute un pouvoir royal fort, qui va réduire ses privilèges dans l’État. Ainsi, entre 1648 et 1653, le pouvoir politique en France est violemment contesté -> la Fronde (1648-1653).

En janvier 1649 : Louis XIV et sa mère doivent s’enfuir à Saint-Germain-en-Laye.  En 1651, Mazarin doit s’exiler en Allemagne (il est détesté par la haute noblesse).Dans un climat de révolte et d’affrontement civil, il y a une vacance du pouvoir politique. Louis XIV se souviendra de ces années toute sa vie.
Les structures de l’État sont menacées par des forces différentes qui tirent dans tous les sens.
Ce sont les succès militaires et diplomatiques (Richelieu et Mazarin) qui vont permettre une stabilisation politique et en particulier la paix des Pyrénées (1659 : fin de la Guerre de Trente Ans avec l’Espagne), qui est la conclusion de la grande politique inaugurée par Richelieu en Europe.

Le pouvoir, lors des périodes d’accalmie, tente d’établir durablement par l’architecture  le pouvoir par la pierre. Que ce soit une réponse aux besoins nouveaux des villes (programmes d’habitations, hôpital Saint-Louis, la Salpêtrière) ou pour célébrer le pouvoir avec des édifices de prestige (statues, portes…).
L’architecture et les arts sont mobilisés pour exprimer la politique. Les édifices expriment la volonté politique. Les conflits politiques très graves n’ont pas empêché la réalisation de ces édifices.

Contexte religieux

En France, le premier tiers du XVIIe siècle est marqué par une forte spiritualité et par le mysticisme, avec de nombreuses congrégations dont certaines sont vouées à l’enseignement, d’autres à la charité.
Une congrégation s’inscrit dans un courant ascétique, les Jansénistes de Port-Royal, qui ont un écho très important dans l’élite intellectuelle du pays (Pascal, Racine, Philippe de Champaigne). Ces intellectuelles vont faire des retraites à Port-Royal.
Mais cette influence intellectuelle et spirituelle du Jansénisme est très forte dans la bourgeoisie et peut engendrer un risque politique à 2 niveaux :
–    au niveau national : risque pour la religion officielle du roi.
–    au niveau extérieur : ce sont les ennemis redoutables et redoutés des Jésuites : ils refusent la tutelle de Rome. Dans ce contexte, on retrouve l’opposition ancienne entre gallicanisme ( : partisans d’une Église nationale et refusent l’ingérence de Rome) et ultramontanisme qui signifie « au-delà des monts », donc de l’autre côté des Alpes, en Italie (soutiennent le pape).

À partir de 1598, Henri IV bénéficie d’une relative accalmie en Europe, et grâce à l’Edit de Nantes il s’assure la paix religieuse qui impose la tolérance dans tout le pays.
Il se lance dans un grand programme pour rétablir l’autorité royale dans tous les domaines et surtout il initie un programme artistique et architectural important (places royales).
Dès lors, au XVIIe, le pouvoir royal prend en main toute la politique culturelle et artistique que ce soit le souverain ou les Premiers ministres (= le ministériat = Richelieu à partir de 1616 et jusqu’en 1624, puis relayé par Mazarin après sa mort en 1642 -> 1641).
Entre 1630 et 1661 les deux cardinaux vont lancer une politique culturelle et artistique malgré le retour à la guerre civile entre 1648 et 1653 avec la Fronde.
En 1661, à la mort de Mazarin, Louis XIV décide d’assumer seul tous les pouvoirs. Il poursuivra l’œuvre culturelle pour devenir le plus grand mécène de son temps.

II. Les principales réalisations artistiques de la première moitié du XVIIe

(voir aussi diaporama ci-dessous)

1.    La Sorbonne (1622-1648)

La Sorbonne (université médiévale berceau de la scolastique) est en perte de vitesse parce qu’elle est concurrencée par le Collège de France et par le Collège de Clermont, tenu par les Jésuites, champions de la Contre-Réforme (actuel lycée Louis-le-Grand). La Sorbonne semble dépassée sur le plan théologique, face au grand débat entre Jésuites et Jansénistes.
Le pouvoir prend la situation en main en 1622 : Richelieu se charge de la tutelle de la Sorbonne, devient proviseur du collège et théologien, et commande la rénovation des bâtiments dont la Chapelle, réalisée sur Jacques Lemercier, qui doit abriter à terme le tombeau de son protecteur.
La Sorbonne est une architecture qui associe :
–    la composante romaine : dôme, décors extérieurs
–    la composante française : représente aussi la manière française : sobriété et équilibre
Les travaux s’achèvent en 1648 avec la Chapelle et la rénovation de la « salle des disputes », destinée au soutenance de thèses.
Richelieu matérialise par la pierre le pouvoir sur la théologie, sur le pouvoir spirituel.
Sculpteur tombeau de Richelieu : Girardon

2. Le Val-de-Grâce

Le Val-de-Grâce comprend à la fois un couvent, une église et un palais. Il est un symbole politique qu’on peut comparer à l’Escorial ou Escurial (cf. cours sur l’Espagne du XVIe)

– C’est un manifeste architectural et artistique au carrefour de plusieurs influences :
L’ensemble du Val-de-Grâce constitue une application des leçons romaines baroques associées à la Renaissance française et à l’influence de l’Antiquité du XVIIe siècle :

Les concepteurs et les réalisateurs de cet ensemble sont les pères fondateurs de l’architecture française. Dessins : François Hardouin-Mansart, réalisation : Jacques Lemercier. Fresque de la coupole : Pierre Mignard

A l’extérieur le parvis rappelle les avant-cours de château = influences françaises, mais le dôme en ardoise et en plomb doré a des références  romaines (Saint Pierre). Il sera repris au Collège des Quatre-Nations et aux Invalides sous Louis XIV.

–    Le pavage de marbre polychrome est inspiré par le pavage de Philibert Delorme (ou De l’Orme, 1510-1570, architecte français de la Renaissance) au château d’Anet (qu’on retrouvera à Versailles).
–    L’autel à baldaquin  cf. Saint-Pierre de Rome (annonce celui des Invalides).
Juxtaposition contradictoire : croisement entre la tradition romaine et la récente tradition française.
Mais la grande innovation du Val-de-Grâce est la fresque de Mignard pour la coupole : application de la leçon italienne.  Mignard s’est formé dans l’atelier de Simon Vouet, puis il a essayé la fresque à Rome où il a étudié le décor peint du plafond du Palais Farnèse réalisé par Hannibal Carrache. Il subit l’influence du Corrège. Sa fresque a été appréciée sur place par le Bernin lors de sa visite en France avis appréciatif à partir d’une étude (montée sur échafaudages).

La fresque de Mignard : composition en 3 registres principaux :
La Sainte Trinité au centre avec la colombe du Saint Esprit.
La Rédemption : présence de la Vierge et de Saint Jean-Baptiste.
L’Apocalypse.
Cette fresque, composée de 200 figures, développe un ambitieux poème théologique dans lequel on retrouve le paradis, la Sainte Trinité, l’agneau sacrifié et le Christ rédempteur.
Évocation de l’Eglise militante et de l’Eglise triomphante à une époque de débats théologiques importants (Contre-réforme, jansénisme, jésuites).
La réception (1666) est plutôt mitigée : la fresque de Mignard est admirée, mais aussi très critiquée en particulier en ce qui concerne la technique de peinture, d’où une réaction de Molière qui rédige un texte de soutien à Mignard aux allures de pamphlet, reçu comme tel dans la querelle qui oppose Mignard à Le Brun.

À l’époque, la convocation et la présentation d’allégories est parlante par tout un public lettré. Les hommes de l’époque reconnaissent les personnages présentés grâces aux attributs. Cette connaissance est codifiée par Cesare Ripa dans son Traité d’iconologie de (1593). Il inspirera aussi l’iconographie de Versailles.
Le monument porte les chiffres : « AL » = Anne et Louis (Père (Louis XIII) et fils (Louis XIV) / Vierge) (cf. F dans la galerie de Fontainebleau). Dès l’entrée, sur le portail on voit une renaissance miraculeuse du roi par allusion avec le Christ et la Vierge (allusion à la naissance inespérée du petit Louis Dieudonné, futur Louis XIV.
L’église du Val-de-Grâce est donc le symbole d’un moment dynastique et politique très important : la succession assurée après plus de 20 ans d’attente et un vœu national prononcé par Louis XIII, matérialisé dans Notre-Dame de Paris. Anne d’Autriche avait la volonté de créer un lieu de commémoration et de fondation d’un établissement destiné à être aussi une nécropole royale qui reçoit les cœurs de la famille des Bourbons. C’est un modèle d’architecture éloquente (ou parlante).

3.    Le Collège des Quatre-Nations (1662-1688)

Le Collège des Quatre-Nations est une opération de politique, décidée trois jours avant sa mort par Mazarin, en 1661. Elle symbolise le triomphe de Mazarin à la paix des Pyrénées (1659).
Double fonction :
Fonction politique : il s’agit de financer gratuitement l’éducation de 60 jeunes gens issus des 4 nations (provinces) réuni à la couronne par la paix des Pyrénées : Alsace, Flandre, Cerdagne Roussillon, Pignerol (maintenant en Italie).
Ce plan vise à éduquer des élèves choisis dans les élites locales, dans les familles les plus influentes du royaume et par là même, dans certains cas, de convertir les protestants, le principe étant de s’attacher les nouvelles provinces (« Ils comprendraient combien il est avantageux d’être soumis à un si grand roi. », Mazarin).
En outre, le legs de Mazarin comprend aussi une bibliothèque (actuelle bibliothèque Mazarine).

Deuxième fonction dévotionnelle et mémorielle : il s’agit d’abriter le tombeau de Mazarin (même schéma que pour Richelieu). Ce projet vise à pérenniser la grandeur et la réussite de Mazarin.
L’architecte chargé du projet est Le Vau, assisté de François d’Orbay.
Il s’agit d’une architecture qui présente les traits d’une architecture baroque romaine mais qui garde des caractéristiques de l’architecture de l’Île-de-France et des Flandres.

Ce qui est romain : le dôme, le portique et surtout les deux ailes qui décrivent un arc de cercle. (cf. Saint-Pierre de Rome de Bernin). À l’intérieur, le plan de la coupole est elliptique et à l’extérieur, les pilastres et les colonnes sont de l’ordre corinthien.  On reconnaît l’nfluence de Borromini et de Pierre de Cortone.
En revanche, le style français est marqué par de grands toits d’ardoises (pavillons), par la sobriété du décor et l’édifice présente des proportions qui s’intègrent complètement au paysage urbain -> refus de la théâtralité baroque.

À l’intérieur, une chapelle latérale abrite sous sa coupole le tombeau de Mazarin d’Antoine Coysevox avec le sarcophage (marbre noir), la statue du Cardinal avec ses attributs personnels (chapeau de cardinal, angelot qui soutient un faisceau de licteurs (= officier public qui marchait devant les grands magistrats en portant une hache placée dans un faisceau de verges) ? rappelle son origine romaine).

Autour, dans les soubassements (= partie inférieure d’une construction sur laquelle porte l’édifice), des statues représentent les vertus du cardinal. Si on le compare avec des tombeaux romains, on remarque la sobriété du tombeau et le fait que le décor vise à exalter les qualités du défunt (et non pas la gloire…).

 

Le début du XVIIe siècle reçoit dans le cadre de l’embellissement de Paris des édifices marquant le pouvoir tant spirituel que temporel.
Les rares lieux vraiment baroques à Paris datent de cette époque. Paris est marqué par le pouvoir qui  utilise l’architecture et la sculpture pour exprimer sa magnificence.
Dans les deux cas, la Sorbonne et le Collège des Quatre-Nations sont à la frontière de plusieurs styles. Les sites et les monuments de l’époque sont réalisés dans une architecture symbolisant la synthèse entre la tradition italienne et la tradition française. Le pouvoir politique devient mécène et inscrit sa présence dans le paysage urbain parisien (coupoles à l’image des églises de Rome) comme pour mieux affirmer son autonomie par rapport à la papauté et son prestige par rapport à l’Empire. Les conflits religieux peuvent devenir un risque politique et influencent les arts avec les grands débats stylistiques de l’Europe du XVIIe. Les places royales participent du même mouvement.

Les trois oeuvres majeures du premier XVIIe sont des commandes publiques.

–    Richelieu et la Sorbonne
–    Mazarin et l’Institut (Collège des Quatre-Nations)
–    Anne d’Autriche et le Val-de-Grâce cf. La Gloire du dôme du Val-de-Grâce (par Molière en 1669), poème sur la peinture de M. Mignard

On voit bien ici que les arts à ce moment-là sont marqués par une double influence :
–    l’influence venue des Flandres
–    l’influence italienne
Mais Versailles sera une nouvelle référence stylistique et va devenir un modèle pour toute l’Europe. A partir du règne de Louis XIV on assiste l’émergence du classicisme français, avec l’établissement d’un pouvoir politique absolu. Chez les artistes, on voit une hésitation : quel style adopter ? Comment réinterpréter les acquis de la Renaissance ? Dans le sens français, dans le sens romain ?

Les uns optent pour un art national, depuis le Moyen Âge, c’est l’influence des Flandres, qu’on retrouve :

–    dans l’architecture (toits d’ardoises, équilibre, rigueur et sobriété)
–    en peinture : Rubens (commande de Marie de Médicis), Philippe de Champaigne (cf. exposition « Entre politique et dévotion ») deux types de production : une qui célèbre toute la majesté royale, une autre plus portée sur la dévotion religieuse.
–    En sculpture : statue équestre d’Henri IV de Jean de Boulogne sur le Pont Neuf.

Les leçons italiennes (depuis François Ier).

En peinture, l’influence est très forte : pour les peintres, le séjour à Rome est obligé pour se nourrir de références stylistiques. Claude Le Lorrain, Simon Vouet (époque de Louis XIII), Nicolas Poussin, Pierre Mignard (coupole du Val-de-Grâce).  Mais l’Italie hésite aussi entre le colorisme délicat de Véronèse et la violence luministe de Caravage. Bernin qui est venu en France, et qui a été accueilli comme un chef d’État voit son projet pour le Louvre rejeté par les architectes français et Colbert (voir cours suivant sur Louis XIV).

Résultat : La France hésite et adopte prudemment le baroque pour produire des œuvres à l’éloquence maîtrisée, équilibrée. Seul le Val-de-Grâce présente en France les marques du baroque. Il est même admiré et reconnu par le Bernin lors de sa visite en France.  Le baroque va être maîtrisé puis refoulé en France.

III. Le portrait politique dans la première moitié du XVIIe.

Le XVIIe siècle est un véritable âge d’or du portrait politique. Dans le sillage des grands portraitistes du XVIe (Raphaël, et surtout Titien et Bronzino) et des peintures allégoriques mettant en scène les monarques (Galerie François Ier à Fontainebleau par Rosso et le PrImatice) les grands maîtres du XVIIe mettent en scène les hommes et les femmes de pouvoir. Les préoccupations politiques se reflètent toujours dans ces tableaux quel que soit le style adopté. On pourra opposer les vastes compositions baroques de Rubens dans le cycle de marie de Médicis aux portraits d’apparât de Richelieu empreints de rigorisme par Philippe de Champaigne.

Pierre Paul Rubens : L’Apothéose de Henri IV et la proclamation de la régence de Marie de Médicis, le 14 mai 1610. Musée du Louvre.
Lire analyse sur le site du Louvre. Une autre ici.

Philippe de Champaigne.
Né à Bruxelles, Philippe de Champaigne s’installe à Paris en 1621 et est devenu un des les plus grands artistes, en peignant des portraits et de compositions religieuses de la reine mère, Marie de Médicis, la cour de Louis XIII, de l’administration de la ville, à la mode et les congrégations privées.

Le voeu de Louis XIII, louis XIV offrant sa couronne à la Vierge.

Formé en Flandre et influencé par ses compatriotes, Rubens et Van Dyck, il a peu à peu rejeté la flamboyance de leur style plus sévère pour un idiome et naturalistes. Le changement est particulièrement visible après 1645 quand il devient sensible à la rigueur de la doctrine catholique du théologien hollandais Cornelis Jansen, pratiquée à Paris au couvent de Port-Royal où Champaigne envoyé ses deux filles à l’école.
Il peint plusieurs tableaux
http://tinyurl.com/aep3jl

Portrait de Richelieu par Philippe de Champaigne
Toile H. 2 m 20 x L. 1 m 48
Non signé ; Daté 1634 sur le papier posé sur la table à droite
Historique : Collection anglaise jusqu’aux environs de 1950 ; collection suisse jusque vers 1960 ; galerie Meissner, Zürich. Acheté en 1969 par le Ministère des Affaires étrangères. Paris, M.A.E., Hôtel du Ministre

Ce tableau est mentionné comme « un portrait de Mgr de sa hauteur habillé d’une simarre de couleur tout couvert de broderie » sur le Mémoire, dressé en 1635, des « portrets de Mgr le Cardinal Duc de Richelieu faicts par Philippe de Champaigne peintre par le commandement de mon dit seigneur ».
Selon B. Dorival, il était sans doute destiné au Palais-Cardinal dont l’aile nord-ouest et le jardin apparaissent à l’arrière-plan, devant la butte Montmartre où se remarquent l’église des Martyrs, telle qu’elle avait été reconstruite après 1632, la maison que la confrérie des Orfèvres de Paris avait fait élever après 1628 et quelques bâtiments de la fameuse abbaye des bénédictines. Sans doute Richelieu voulait-il par là manifester son amitié à l’archevêque de Bordeaux, Sourdis, qui s’intéressait fort à l’abbaye de Montmartre.

Le deuxième point souligné par B. Dorival est que Richelieu s’est fait représenter debout, contrairement à la tradition qui, depuis une centaine d’années, voulait que les gens d’Eglise – papes, cardinaux et évêques – fussent montrés assis. C’est de cette règle que relèvent par exemple les portraits de Jules II et de Léon X par Raphaël, son portrait de Cardinal conservé au musée du Prado, le portrait du cardinal Bibienna qu’on lui a donné parfois, les portraits de Beccadelli et de Pallavicini par Titien, celui du cardinal Pompeo Colonna par Lotto, celui d’un prélat peint par Tintoret de la galerie Doria à Rome, etc., et rares sont les portraits qui font exception.

Richelieu, en se faisant « tirer  » debout comme les souverains, les capitaines et les grands seigneurs, affirmait ainsi qu’il se considérait moins comme un prince de l’Eglise que comme un homme d’Etat et un homme d’action.

Louis XIII couronné par la victoire (voir diaporama en bas)

Ce portrait, payé 150 livres le 16 novembre 1655, ornait le mur sud de la Galerie des Hommes illustres au Palais Cardinal (Palais-Royal). Saisie révolutionnaire de la collection du duc d’Orléans au Palais-Royal à Paris. Louvre, Département des Peintures.

Portrait du Louvre

Philippe de Champaigne, Armand Jean du Plessis de Richelieu, 1635 – 1639,  1.55 m x 2.22 m. Peinture à l’huile sur toile. Saisie révolutionnaire de la collection du duc de Penthièvre à l’hôtel de Toulouse à Paris (1793). Musée du Louvre.

Portrait de la série peinte par Champaigne (voir par exemple celui de Londres)

Il est Armand – Jean du Plessis, duc de Richelieu (1585-1642), cardinal, ministre en chef de l’administration sous le règne de Louis III de 1624 jusqu’à sa mort en 1642. Richelieu a consolidé le pouvoir central de la couronne en réprimant la rébellion des Huguenots. Il a créé la marine marchande française pour lutter contre les flottes britannique et hollandaise  sur l’Atlantique et la Méditerranée.
Sur terre, il a contesté la puissance de l’Empire des Habsbourg. Richelieu se tient dans la pose traditionnellement associée aux monarques français. (Il a été souligné combien il est rare pour un cardinal être montré debout -( «Comme les femmes, ils sont assis».) Il porte l’insigne de l’ordre du Saint-Esprit dont il est chevalier, son ruban moiré bleu contraste avec le lin blanc amidonné de son col et le cramoisi satin du manteau. Au lieu du bâton et de la canne, il tient une écarlate barrette de cardinal à son bras droit de manière légère. Champaigne a soigneusement montré son monde intérieur , la figure dégage une lumière qui attire l’attention en nous plaçant en contre-plongée – un point de vue souligné par la faible profondeur. Nous sommes à regarder vers le haut Richelieu, son visage semble lointain , au sommet de la pyramide et porte sur nous un regard hautain digne d’un roi.

Le buste de Richelieu par Bernin (Louvre) (1641)

Le cardinal de Richelieu, principal ministre de Louis XIII, est représenté en prélat, arborant l’ordre du Saint-Esprit. Ce buste fut commandé au célèbre sculpteur Bernin, alors au faîte de sa gloire et protégé du pape Urbain VIII. Le sculpteur donne au cardinal l’air grave et noble qui sied à sa fonction et rend par un modelé subtil les inflexions du tissu.


Michel Lasne  gravure de 1632 :

À la partie supérieure, le roi Louis XIII, vêtu en héros romain piétine un trophée d’armes symbolisant la rébellion vaincue. Une épée de flamme à la main droite, il se protège d’un bouclier orné du portrait du cardinal de Richelieu. Le roi est debout entre quatre palmiers (les palmes symbolisant la victoire) aux branches desquels des angelots accrochent les attributs de Richelieu : chapeau de cardinal, chiffre, couronne ducale, armoiries, ancre de grand maître de la Navigation.
A gauche, le labyrinthe de Dédale, où l’on peut se diriger grâce à la Sagesse ; à droite, l’hydre de Lerne est vaincue par Hercule et la Foi. Un commentaire explicatif de ces allégories, rédige par le candidat et gravé, accompagne l’estampe. Comme Fa fait observer Jacqueline Sanson (« Limage de Richelieu », Richelieu et le monde de l’esprit, p. 135-147 du catalogue ), la place centrée
qu’occupe le roi n’est qu’une illusion : tout ce qui l’entoure porte la marque du cardinal, et l’ensemble de la composition manifeste la symbiose nécessaire entre le prince et son ministre.

À la partie inférieure, les positions de thèse sont typographiées entre les figures de la Paix et de la Guerre posées sur des piédestaux ornés des armes du cardinal.

Au bas de la partie supérieure, à gauche, le monogramme ML. Au bas de la partie inférieure, à gauche : Abrah. A Diepenbeke delin., et à droite : M. Lasne Sculp. et ex., ce qui signifie que Lasne a gravé cette composition d’après un d’Abraham van Diepenbeeck (1596-1675) de passage à Pau qu’il a conservé les plaques de cuivre dans son propre ton».

– Richelieu, l’art et le pouvoir, catalogue d’exposition,  Montréal, Cologne, 2002, n°110, pp.261-266.

 DIAPORAMA AVES LES IMAGES ICI.

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