Correction de l’explication linéaire du texte 4 sur la condition des hommes de couleur

L’extrait commence par une forme impersonnelle « il était bien nécessaire » qui souligne l’obligation que ressent Olympe de Gouges d’évoquer un sujet d’actualité qui lui tient à cœur.

Elle évoque le décret voté en mai 1791 qui donne des droits à certains hommes de couleur mais qui ne plait pas du tout aux colons. Dès la première ligne, elle suggère que de fausses informations circulent. L’expression « dit-on » montre que l’autrice remet en question la cause des troubles.

Grâce au complément de lieu « dans nos îles » et l’emploi du déterminant possessif « nos », Gouges incite le lecteur à se sentir plus proche et concerné par ce qu’elle va évoquer, à savoir les colonies françaises. L’anaphore de « c’est là » insiste sur ce lieu, habituellement associé à une image paradisiaque d’un état de nature.

Mais la personnification « la nature frémit d’horreur » suggère plutôt les violences qui y sont perpétrées et joue sur la sensibilité du lecteur.

En associant « la raison et l’humanité » à une forme verbale négative « n’ont pas encore touché », Gouges suggère déjà les actes inhumains et violents qu’elle va évoquer plus loin.

Le rythme binaire de l’expression « la division et la discorde » souligne le désaccord qui existe entre les colons et les habitants des îles.

Par l’expression impersonnelle « il n’est pas difficile de deviner », elle suggère que les Français ne sont pas dupes et qu’ils connaissent la vérité cachée derrière les mensonges.

Par le terme « les instigateurs », elle désigne les véritables coupables des troubles qui ont lieu dans les îles, ce sont les colons, évoqués dans la phrase suivante.

En utilisant le champ lexical du feu « incendiaires, allument, feu, embraser », Gouges marque l’esprit du lecteur et montre le danger que ces troubles représentent. C’est une violence qui risque de s’étendre.

L’autrice fait preuve d’audace en accusant certains députés. En employant l’expression « il y en a » au présent de l’indicatif, elle présente comme une certitude le fait que certains députés servent les intérêts des colons. Certains députés possèdent eux-mêmes des terres dans les colonies.

A partir de la phrase « les colons prétendent… », Olympe de Gouges met en avant un paradoxe : les colons assujettissent des hommes de leur propre famille. Pour cela, elle fait apparaitre dans la même phrase l’expression « régner en despotes sur » qui souligne une position hiérarchique et tyrannique, et les mots « frères » et « pères » pour désigner leur lien de parenté.

L’autrice va évoquer ici le lien du sang qui existe entre les colons et de nombreux « hommes de couleur » issus de viols de Blancs. Sur plusieurs lignes, elle multiplie les références à l’hérédité « frères, pères, droits de la nature, leur sang, notre sang, leurs veines ». Elle marque encore une fois l’esprit du lecteur et lui fait prendre conscience de la proximité héréditaire entre colons et « hommes de couleur ». Elle souligne ainsi l’horreur de la situation.

A ce moment, la qualification des colons en êtres « inhumains » convient bien, et les paroles rapportées au discours direct ne font que confirmer ce que chaque lecteur aura compris : la soif d’argent et de pouvoir des colons « notre cupidité et notre aveugle ambition » les rend prêts à tous les crimes « nous le répandrons tout, s’il le faut ».

L’autrice rappelle ensuite une nouvelle fois l’opposition entre un lieu de nature (selon les représentations des colonies à l’époque) et le refus des colons de reconnaitre leurs enfants naturels[1], ce que suggère l’emploi du verbe « méconnait » et de l’adjectif « sourd ».

Par l’interrogation rhétorique « que peut-on espérer… », Olympe de Gouges incite à s’interroger sur les conséquences des troubles liés au décret. Sa réponse construite sur un parallélisme « la contraindre… c’est… » « la laisser… c’est… » avec l’emploi du vocabulaire de la violence lui permet de mettre en valeur le danger d’une telle discorde.

Dans la fin du texte, l’autrice parle de la loi, qu’elle place au-dessus de la liberté. En employant des présents de l’indicatif, ses propos apparaissent comme des vérités générales, incontestables. Elle emploie le champ lexical du droit avec les termes « loi, Assemblée nationale, décret, justice » montrant ainsi que pour elle la loi doit s’imposer, à partir du moment où elle est juste et égalitaire.

Cet extrait se termine sur une exclamation dans laquelle Olympe de Gouges évoque son souhait « Puisse-t-elle » de voir les lois améliorer la situation sociale « l’état de la France » et empêcher les inégalités « les abus, … chaque jour plus effroyables ». L’utilisation de l’hyperbole incite le lecteur à porter un regard sans concession sur toutes les inégalités qui ont existé et que les lois doivent faire disparaitre.


[1] On appelle « enfant naturel » un enfant né hors mariage. Le père naturel désigne le père biologique.

Texte 4 d’Explication linéaire sur la condition des hommes de couleur

Olympe de Gouges

« Forme du contrat social de l’homme et de la femme », dans Déclaration des droits de la femme et de la citoyenne (1791)

Il était bien nécessaire que je dise quelques mots sur les troubles que cause, dit?on, le décret en faveur des hommes de couleur, dans nos îles[1]. C’est là où la nature frémit d’horreur ; c’est là où la raison et l’humanité n’ont pas encore touché les âmes endurcies ; c’est là surtout où la division et la discorde agitent leurs habitants. Il n’est pas difficile de deviner les instigateurs[2] de ces fermentations incendiaires : il y en a dans le sein même de l’Assemblée nationale[3]. Ils allument en Europe le feu qui doit embraser l’Amérique. Les colons prétendent régner en despotes sur des hommes dont ils sont les pères et les frères ; et méconnaissant les droits de la nature, ils en poursuivent la source jusque dans la plus petite teinte de leur sang[4]. Ces colons inhumains disent : « Notre sang circule dans leurs veines, mais nous le répandrons tout, s’il le faut, pour assouvir notre cupidité ou notre aveugle ambition. » C’est dans ces lieux les plus près de la nature[5] que le père méconnait le fils ; sourd aux cris du sang[6], il en étouffe tous les charmes. Que peut?on espérer de la résistance qu’on lui oppose ? La contraindre avec violence, c’est la rendre terrible, la laisser encore dans les fers, c’est acheminer toutes les calamités vers l’Amérique. Une main divine semble répandre partout l’apanage[7] de l’homme, la liberté ; la loi seule a le droit de réprimer cette liberté, si elle dégénère en licence ; mais elle doit être égale pour tous, c’est elle surtout qui doit renfermer[8] l’Assemblée nationale dans son décret, dicté par la prudence et par la justice. Puisse?t?elle agir de même pour l’état de la France, et se rendre aussi attentive sur les nouveaux abus, comme elle l’a été sur les anciens qui deviennent chaque jour plus effroyables !


[1] Le décret du 15 mai 1791 accorde aux « gens de couleur nés de père et de mère libres », l’égalité avec les citoyens blancs en ce qui concerne les droits énoncés dans la Déclaration de 1789. Au XVIIIe siècle, l’expression gens de couleur désigne les personnes noires dans les colonies françaises.

[2] Ceux qui sont à l’origine de, qui ont causé…

[3] Les députés favorables à l’intérêt des colons étaient nombreux à l’Assemblée nationale.

[4]  Référence aux discriminations complexes qui ont cours dans les colonies entre les types d’ »hommes de couleur », en fonction de leur part de sang noir.

[5] Conformément aux représentations de l’époque, les colonies sont vues comme le lieu de vie de peuples primitifs, censés être plus proches de la nature.

[6] La reconnaissance soudaine et dramatique d’un enfant naturel par un parent qui ignorait son existence est un thème récurrent en littérature au XVIII° siècle.

[7] Le privilège

[8] Au sens de « raffermir ». Il s’agit sans doute d’une faute d’emploi de la part d’Olympe de Gouges.

Correction du devoir de commentaire sur Annie Ernaux

Pour chaque titre de paragraphe (1 à 6), propose deux citations, chacune analysée et expliquée.                                                 /12

I Une prise de conscience de l’inégalité homme-femme

1 Un couple harmonieux

– L’emploi des pronoms « on » et « nous » dans « on travaille », « nous sommes » > le pronom indéfini « on » tout comme le pronom de la première personne du pluriel « nous » insistent sur l’aspect uni et harmonieux du couple, ce que conforte l’emploi de l’adverbe « ensemble ».

– l’adverbe « ensemble » est repris par la formule « dans la même pièce que lui », ce qui souligne l’idée d’un couple harmonieux, qui travaille de la même manière.

– « l’image attendrissante du jeune couple moderno-intellectuel » adjectifs mélioratifs > l’écrivaine se souvient de l’image d’elle et son mari et en parle avec un vocabulaire mélioratif pour évoquer leur bonne entente.

– « unis, pareils » > phrase non verbale, avec deux expressions sémantiquement proches (= de sens proche) > l’autrice souligne l’égalité qui semble régner entre elle et son mari : ils s’entendent bien et travaillent de la même manière.

2 L’attitude du mari

– « Il se marre » > voc familier > souligne la réaction moqueuse du mari, qui se moque de son beau-père qui lui cuisinait. Cela va blesser la narratrice.

– « si disert , cultivé » et « cocasse, délirant »> l’opposition de deux séries d’adjectifs permet de souligner l’attitude hautaine du mari. Lui, l’intellectuel ne se rabaissera pas à balayer. Pourtant sa femme a le même statut que lui, mais en plus elle fait le ménage !

– À toi d’apprendre ma vieille. Discours indirect libre. > l’autrice rapporte à l’intérieur du récit des propos certainement tenus à l’époque par son mari. Des petites phrases percutantes et rabaissantes, notamment avec l’apostrophe péjorative et familière « ma vieille ».

– « Tu sais, je préfère manger à la maison plutôt qu’au restau U, c’est bien meilleur ! » Sincère, et il croyait me faire un plaisir fou. > paroles rapportées au discours direct + comparatifs > le mari pense faire plaisir à sa femme en lui faisant des compliments sur sa cuisine. Mais pour elle c’est pire. L’hyperbole « faire un plaisir fou » met d’autant plus en valeur la désillusion de la femme le manque de bon sens du mari totalement aveugle à ce que ressent sa femme « il croyait » !

– « m’encourage, souhaite que je réussisse, que je me « réalise » » : champ lexical de l’encouragement > le mari tient un discours égalitaire et souhaite que sa femme réussisse socialement tout autant que lui. Il ne se rend pas compte du décalage entre ses propos « il me dit et me répète qu’il a horreur des femmes popotes. » et ses actes (il refuse de balayer ou faire la cuisine).

3 La comparaison à des modèles

– « Le genre de ton père, pas le mien ! » opposition des déterminants possessifs > qui souligne l’opposition entre leurs parents respectifs et le regard dégradant du mari sur son beau-père

– « Mes parents, l’aberration, le couple bouffon. » > phrase non verbale au rythme ternaire > en peu de mots l’autrice montre le regard dénigrant porté sur sa famille, une famille hors du commun puisque son père et sa mère se partageaient les tâches du quotidien. Elle choisit des termes forts « aberration » « bouffon » pour souligner l’image négative portée par son mari.

– « monsieur père laisse son épouse s’occuper de tout dans la maison » L’apposition « monsieur père » souligne le respect du fils pour son père

– « comment elles font les filles mariées » > formulation orale emphatique avec reprise du sujet > l’autrice nous plonge dans les réflexions de la jeune femme débordée qu’elle a été, qui cherchait des réponses à ses doutes

II L’évolution de la narratrice

4 Son ressentiment

– « Je suis humiliée. » > verbe d’état et adj exprimant un sentiment > l’autrice exprime clairement ce qu’elle a ressenti lorsque son mari se moquait de sa famille.

– « Seulement des allusions, des remarques acides, l’écume d’un ressentiment mal éclairci » phrase non verbale, rythme ternaire, métaphore de l’écume, énumérations d’actions de la jeune femme pour montrer à son mari ce qu’elle ressent.

5 Sa remise en question

– « est-ce que c’est vraiment important » et « relèvent-elles » interrogations au discours indirect libre > l’autrice note les questions qu’elle s’est posée à cette période de sa vie, pendant laquelle elle doute de ses droits.

– opposition entre « le rire, l’entente » et « des histoires de patate à éplucher » > cette opposition souligne l’hésitation de la jeune femme.

– « je me suis mise à en douter » première personne + passé composé pour exprimer ce qu’elle a ressenti, ses doutes.

6 Son effacement progressif

– « avec peine et sans goût » opposé à « avec enthousiasme » : cela montre l’évolution du personnage qui perd sa motivation pour les études

-« mes buts d’avant », « l’année d’avant » répétition d’une indication temporelle > la narratrice oppose deux périodes, celle avant d’être en couple et celle actuelle d’une vie à deux.

– « moi, je me sentais couler » puis vers la fin du texte « je me dilue, je m’engourdis » > métaphores avec images d’un liquide (couler, diluer) > Ernaux montre comment peu à peu elle s’efface face à son mari. Fatiguée par les tâches ménagères, elle a perdu la motivation de finir ses études et se laisse enfermer dans le rôle qu’on lui assigne de la maitresse de maison. D’où le titre de femme gelée.

Idées de problématiques :

Comment Annie Ernaux met-elle en évidence l’inégalité qui existait dans son couple ?

Comment l’autrice montre-t-elle l’évolution de son personnage féminin ?

Puis rédige une introduction du commentaire de ce texte. /4

Enfin rédige un paragraphe au choix (1 à 6) bien développé.      /4

Commentaire devoir en 2h

Un mois, trois mois que nous sommes mariés, nous retournons à la fac, je donne des cours de latin. Le soir descend plus tôt, on travaille ensemble dans la grande salle. Comme nous sommes sérieux et fragiles, l’image attendrissante du jeune couple moderno-intellectuel. Qui pourrait encore m’attendrir si je me laissais faire, si je ne voulais pas chercher comment on s’enlise, doucettement. En y consentant lâchement. D’accord je travaille La Bruyère ou Verlaine dans la même pièce que lui, à deux mètres l’un de l’autre. La cocotte-minute, cadeau de mariage si utile vous verrez, chantonne sur le gaz. Unis, pareils. Sonnerie stridente du compte-minutes, autre cadeau. Finie la ressemblance. L’un des deux se lève, arrête la flamme sous la cocotte, attend que la toupie folle ralentisse, ouvre la cocotte, passe le potage et revient à ses bouquins en se demandant où il en était resté. Moi. Elle avait démarré, la différence.

Par la dînette. Le restau universitaire fermait l’été. Midi et soir je suis seule devant les casseroles. Je ne savais pas plus que lui préparer un repas, juste les escalopes panées, la mousse au chocolat, de l’extra, pas du courant. Aucun passé d’aide-culinaire dans les jupes de maman ni l’un ni l’autre. Pourquoi de nous deux suis-je la seule à me plonger dans un livre de cuisine, à éplucher des carottes, laver la vaisselle en récompense du dîner, pendant qu’il bossera son droit constitutionnel. Au nom de quelle supériorité. Je revoyais mon père dans la cuisine. Il se marre, « non mais tu m’imagines avec un tablier peut-être ! Le genre de ton père, pas le mien ! ». Je suis humiliée. Mes parents, l’aberration, le couple bouffon. Non je n’en ai pas vu beaucoup d’hommes peler des patates. Mon modèle à moi n’est pas le bon, il me le fait sentir. Le sien commence à monter à l’horizon, monsieur père laisse son épouse s’occuper de tout dans la maison, lui si disert[1], cultivé, en train de balayer, ça serait cocasse, délirant, un point c’est tout. À toi d’apprendre ma vieille. […]

Je n’ai pas regimbé, hurlé ou annoncé froidement, aujourd’hui c’est ton tour, je travaille La Bruyère. Seulement des allusions, des remarques acides, l’écume d’un ressentiment mal éclairci. Et plus rien, je ne veux pas être une emmerdeuse, est-ce que c’est vraiment important, tout faire capoter, le rire, l’entente, pour des histoires de patates à éplucher, ces bagatelles relèvent-elles du problème de la liberté, je me suis mise à en douter. Pire, j’ai pensé que j’étais plus malhabile qu’une autre, une flemmarde en plus, qui regrettait le temps où elle se fourrait les pieds sous la table, une intellectuelle paumée incapable de casser un œuf proprement. Il fallait changer. À la fac, en octobre, j’essaie de savoir comment elles font les filles mariées, celles qui, même, ont un enfant. Quelle pudeur, quel mystère, « pas commode » elles disent seulement, mais avec un air de fierté, comme si c’était glorieux d’être submergée d’occupations. La plénitude des femmes mariées. Plus le temps de s’interroger, couper stupidement les cheveux en quatre, le réel c’est ça, un homme, et qui bouffe, pas deux yaourts et un thé, il ne s’agit pas d’être une braque[2]. Alors, jour après jour, de petits pois cramés en quiche trop salée, sans joie, je me suis efforcée d’être la nourricière, sans me plaindre.

« Tu sais, je préfère manger à la maison plutôt qu’au restau U, c’est bien meilleur ! » Sincère, et il croyait me faire un plaisir fou. Moi je me sentais couler. Version anglaise, purée, philosophie de l’histoire, vite le supermarché va fermer, les études par petits bouts c’est distrayant mais ça tourne peu à peu aux arts d’agrément. J’ai terminé avec peine et sans goût un mémoire sur le surréalisme que j’avais choisi l’année d’avant avec enthousiasme. Pas eu le temps de rendre un seul devoir au premier trimestre, je n’aurai certainement pas le capes, trop difficile. Mes buts d’avant se perdent dans un flou étrange. Moins de volonté. Pour la première fois, j’envisage un échec avec indifférence, je table sur sa réussite à lui, qui, au contraire, s’accroche plus qu’avant, tient à finir sa licence et sciences po en juin, bout de projets. Il se ramasse sur lui-même et moi je me dilue, je m’engourdis.

Quelque part dans l’armoire dorment des nouvelles, il les a lues, pas mal, tu devrais continuer. Mais oui, il m’encourage, il souhaite que je réussisse au concours de prof, que je me « réalise » comme lui. Dans la conversation, c’est toujours le discours de l’égalité. Quand nous nous sommes rencontrés dans les Alpes, on a parlé ensemble de Dostoïevski et de la révolution algérienne. Il n’a pas la naïveté de croire que le lavage de ses chaussettes me comble de bonheur, il me dit et me répète qu’il a horreur des femmes popotes.

Annie Ernaux, La Femme gelée. Éditions GALLIMARD. 1981

Voici une proposition de plan :

I Une prise de conscience de l’inégalité homme-femme

1 Un couple harmonieux

2 L’attitude du mari

3 La comparaison à des modèles

II L’évolution de la narratrice

4 Son ressentiment

5 Sa remise en question

6 Son effacement progressif

Pour chaque titre de paragraphe (1 à 6), propose deux citations, chacune analysée et expliquée. /12

Propose une problématique d’étude                        /1 (bonus)

Puis rédige une introduction du commentaire de ce texte.   /4

Enfin rédige un paragraphe au choix (1 à 6) bien développé.       /4


[1] Disert : qui parle facilement

[2] Une écervelée

Correction de l’exercice d’analyse du Postambule

Olympe de Gouges, Déclaration des droits de la femme et de la citoyenne (1791), Début du « Postambule » (adresse aux femmes)

CitationAnalyseInterprétation
« Femme, réveille-toi ; le tocsin de la raison se fait entendre dans tout l’univers ; reconnais tes droits. Le puissant empire de la nature n’est plus environné de préjugés, de fanatisme, de superstition et de mensonges. » (l 1-3)  Apostrophe Impératifs Métaphore Négation + Enumération d’1 champ lexical de l’ignorance> adresse directe aux femmes pour les rallier à sa cause : discours oratoire, même si écrit > évocation du siècle des Lumières et de la Révolution > espoir de changement et recul de l’obscurantisme
« Le flambeau de la vérité a dissipé tous les nuages de la sottise et de l’usurpation. L’homme (esclave) a multiplié ses forces, a eu besoin de recourir aux tiennes pour briser ses fers. Devenu (libre), il est devenu injuste envers sa compagne. » (l 3-6)  Métaphores et opposition Métonymie (Adjectifs opposés) Polyptote  > oppose Lumières et raison apportées par révolution à l’ancien régime qui gardait les hommes dans une sombre ignorance. > souligne rôle des femmes dans révolution, puis oubli des femmes juste après
« Ô femmes ! Femmes, quand cesserez-vous d’être aveugles ? Quels sont les avantages que vous avez recueillis dans la révolution ? Un mépris plus marqué, un dédain plus signalé. » (l 6 à 8)Passage du singulier (ligne 1) au pluriel ligne 6 Répétition de l’apostrophe Exclamation et double interrogation Phrase non verbale avec comparatif et mots péjoratifs  > nécessité de s’unir pour défendre ses droits – Aveugles = nuit de l’ignorance > écho au « réveille-toi » du début : de Gouges veut faire prendre conscience aux femmes de l’ignorance dans laquelle on les garde > révolution = aucun apport pour les femmes voire pire !  
« Dans les siècles de corruption vous n’avez régné que sur la faiblesse des hommes. Votre empire est détruit ; que vous reste-t-il donc ? La conviction des injustices de l’homme. La réclamation de votre patrimoine, fondée sur les sages décrets de la nature ; qu’auriez-vous à redouter pour une si belle entreprise ? (l 8-12)  Périphrase Restriction Interrogations Phrase non verbale Argument d’autorité     Patrimoine = ensemble de biens ou de valeurs hérités du passé> évocation de l’Ancien Régime et insistance sur le peu de pouvoir des femmes > incite les femmes à s’interroger sur leur situation actuelle > démontre la légitimité de défendre ses droits > incite les femmes à agir, à réclamer leur dû
Le bon mot du Législateur des noces de Cana ? Craignez-vous que nos Législateurs français, correcteurs de cette morale, longtemps accrochée aux branches de la politique, mais qui n’est plus de saison, ne vous répètent : femmes, qu’y a-t-il de commun entre vous et nous ? Tout, auriez-vous à répondre. » (lignes 12 à 16)  Champ lexical de la peur (redouter, craignez-vous) Référence biblique ; relecture moqueuse de la bible (bon mot)> pousse les femmes à dépasser leurs peurs > suggère qu’il est temps que les femmes répondent aux hommes et avec une réponse opposée de celle attendue : H et F ont tout en commun, donc sont égaux !
« S’ils s’obstinent, dans leur faiblesse, à mettre cette inconséquence en contradiction avec leurs principes ; opposez courageusement la force de la raison aux vaines prétentions de supériorité ; réunissez-vous sous les étendards de la philosophie ; déployez toute l’énergie de votre caractère, » (lignes 16 à 19)  Sub de condition 3 Impératifs Oppositions Voc de la force> nouvelle évocation de la faiblesse des hommes > de Gouges veut convaincre les femmes d’agir > fait appel au courage des femmes et à leur force > c’est un combat de l’esprit (raison, philosophie) : insister pour changer les mentalités > suggère un combat difficile (il faudra du courage) mais qui peut être gagné (faiblesse des hommes)  
« et vous verrez bientôt ces orgueilleux, non serviles adorateurs rampants à vos pieds, mais fiers de partager avec vous les trésors de l’Etre Suprême. Quelles que soient les barrières que l’on vous oppose, il est en votre pouvoir de les affranchir ; vous n’avez qu‘à le vouloir. » (lignes 20 à 23)  Futur simple > certitude Adv de temps Opposition (non … mais / serviles…fiers) Restriction> certitude d’un combat gagné et note d’espoir > vision de femmes qui ont la capacité de défendre leurs droits et d’obtenir l’égalité > vision d’une société plus juste de partage et d’égalité

Exercice d’analyse sur l’explication du début du Postambule

Complétez le tableau ci-dessous en trouvant les éléments d’analyse qui pourront servir à souligner l’interprétation proposée.

Olympe de Gouges, Déclaration des droits de la femme et de la citoyenne (1791), Début du « Postambule » (adresse aux femmes)

CitationAnalyseInterprétation
« Femme, réveille-toi ; le tocsin de la raison se fait entendre dans tout l’univers ; reconnais tes droits. Le puissant empire de la nature n’est plus environné de préjugés, de fanatisme, de superstition et de mensonges. » (l 1-3)    > adresse directe aux femmes pour les rallier à sa cause : discours oratoire, même si écrit > évocation du siècle des Lumières et de la Révolution > espoir de changement et recul de l’obscurantisme
« Le flambeau de la vérité a dissipé tous les nuages de la sottise et de l’usurpation. L’homme (esclave) a multiplié ses forces, a eu besoin de recourir aux tiennes pour briser ses fers. Devenu (libre), il est devenu injuste envers sa compagne. » (l 3-6)   > oppose Lumières et raison apportées par révolution à l’ancien régime qui gardait les hommes dans une sombre ignorance. > souligne rôle des femmes dans révolution, puis oubli des femmes juste après
« Ô femmes ! Femmes, quand cesserez-vous d’être aveugles ? Quels sont les avantages que vous avez recueillis dans la révolution ? Un mépris plus marqué, un dédain plus signalé. » (l 6 à 8) > nécessité de s’unir pour défendre ses droits – Aveugles = nuit de l’ignorance > écho au « réveille-toi » du début : de Gouges veut faire prendre conscience aux femmes de l’ignorance dans laquelle on les garde > révolution = aucun apport pour les femmes voire pire !  
« Dans les siècles de corruption vous n’avez régné que sur la faiblesse des hommes. Votre empire est détruit ; que vous reste-t-il donc ? La conviction des injustices de l’homme. La réclamation de votre patrimoine, fondée sur les sages décrets de la nature ; qu’auriez-vous à redouter pour une si belle entreprise ? (l 8-12)   > évocation de l’Ancien Régime et insistance sur le peu de pouvoir des femmes > incite les femmes à s’interroger sur leur situation actuelle > démontre la légitimité de défendre ses droits > incite les femmes à agir, à réclamer leur dû
Le bon mot du Législateur des noces de Cana ? Craignez-vous que nos Législateurs français, correcteurs de cette morale, longtemps accrochée aux branches de la politique, mais qui n’est plus de saison, ne vous répètent : femmes, qu’y a-t-il de commun entre vous et nous ? Tout, auriez-vous à répondre. » (lignes 12 à 16)   > pousse les femmes à dépasser leurs peurs > suggère qu’il est temps que les femmes répondent aux hommes et avec une réponse opposée de celle attendue : H et F ont tout en commun, donc sont égaux !
« S’ils s’obstinent, dans leur faiblesse, à mettre cette inconséquence en contradiction avec leurs principes ; opposez courageusement la force de la raison aux vaines prétentions de supériorité ; réunissez-vous sous les étendards de la philosophie ; déployez toute l’énergie de votre caractère, » (lignes 16 à 19)   > nouvelle évocation de la faiblesse des hommes > de Gouges veut convaincre les femmes d’agir > fait appel au courage des femmes et à leur force > c’est un combat de l’esprit (raison, philosophie) : insister pour changer les mentalités > suggère un combat difficile (il faudra du courage) mais qui peut être gagné (faiblesse des hommes)  
« et vous verrez bientôt ces orgueilleux, non serviles adorateurs rampants à vos pieds, mais fiers de partager avec vous les trésors de l’Etre Suprême. Quelles que soient les barrières que l’on vous oppose, il est en votre pouvoir de les affranchir ; vous n’avez qu‘à le vouloir. » (lignes 20 à 23)   > certitude d’un combat gagné et note d’espoir > vision de femmes qui ont la capacité de défendre leurs droits et d’obtenir l’égalité > vision d’une société plus juste de partage et d’égalité

HLP education : correction exemple d’interprétation

Question d’interprétation : Que dénonce ici Balzac ? Comment ?

Quelques éléments de réponse

Balzac dénonce :

– une éducation liberticide, en comparant le collège à une prison

Cf. dès la première ligne « la privation de l’air pur » ; l.12 « nous n’avons pas eu six jours de liberté » ; « régime pénitentiaire » l.15 (champ lexical)

– une éducation qui interdit l’imagination, en opposant les rêveries aux pensums

Cf. les punitions de Lambert pour ses rêveries l.4 à 7 et les pensums qui se limitent à du recopiage de lignes

– une éducation qui manque de sens, en montrant l’ennui des élèves et l’idiotie des punitions

Cf. les lignes à recopier + l’ennui de Lambert l.4 à 7 + Lambert et le narrateur stimulent leur réflexion par la lecture des « livres … de la bibliothèque » et non par les cours

– une éducation inefficace, en insistant sur le nombre de pensums

Cf. « si accablés de pensums » l11 + exagération l17 « Nous nous attirions le pensum de mille manières » :  malgré les pensums, Lambert et le narrateur ne changent pas leur défaut de paresse (l.19 à fin). Cette éducation ne les incite pas à faire d’efforts.

– une éducation froide, stricte, sans empathie, en montrant l’incompréhension du Régent

Cf. aucune prise en compte de la souffrance de l’élève (avec la métaphore du coup d’épingle et de la blessure l.7)

– les conséquences néfastes d’une éducation stricte, en évoquant le risque encouru

Cf. le vocabulaire négatif pour décrire l’éducation « discipline, pensum, ce système d’existence » est associé à l’expression des conséquences : « tout contrista Lambert » « ce système nous eût menés à un abrutissement complet » (emploi du conditionnel passé : irréel du passé pour évoquer le risque)

Balzac ne fait pas que dénoncer. A travers un récit imaginaire mais basé sur des faits vécus, il cherche même à convaincre les « autorités de l’enseignement public », nommées dans son texte, d’être attentives au problème et de changer les faits.

Exemple d’introduction

Au cours des siècles, de nombreux philosophes ou écrivains ont débattu au sujet de l’éducation, tels que Condorcet ou Victor Hugo. Dans l’extrait du roman d’inspiration autobiographique d’Honoré de Balzac, intitulé Louis Lambert, paru en 1832, nous y trouvons l’histoire du jeune surdoué rappelant l’auteur. La question faisant l’objet d’une interprétation est la suivante : Que dénonce Balzac ? Comment ? (Cornélia) Dans un premier temps nous allons étudier l’inutilité des pensums. Ensuite nous verrons que Balzac dénonce ici un système pénitentiaire. (Jeny) Nous verrons enfin en quoi le collège est un lieu d’ennui qui manque d’intérêt. (Clémence)

Exemples de paragraphes de développement

Balzac dénonce le fait que les punitions sont abusives et liberticides. A travers la citation « il ne connut pas le loisir des récréations. Il eut des pensums à écrire. » (l.9-10), on peut comprendre que les élèves ne sont pas libres s’ils ont échoué quelque part. Il est également vrai que les punitions sont abusives car elles sont données pour des motifs légers et de plus durent longtemps. Ceci nous est montré par l’emploi de l’expression « un certain nombre de lignes copiées pendant les heures de récréation » (l 10-11). Dans la première citation, Balzac utilise la négation totale afin d’affirmer le manque de choix et l’obligation. Dans la seconde il démontre grâce à l’emploi du groupe nominal « un certain nombre de lignes » la quantité abusive de lignes à copier. Balzac dénonce donc bien les punitions comme outil d’éducation. (Anaïs)

Balzac dénonce les mots durs que le personnel éducatif avait envers son ami Louis. En effet ligne 6 : « le Régent lui criait : Vous ne faites rien, Lambert ! Ce : Vous ne faites rien, était un coup d’épingle qui blessait Louis au cœur ». Ainsi Balzac montre , grâce à cette métaphore du coup d’épingle, que les mots du régent ne faisaient que blesser son ami au lieu de le motiver. Ce que dénonce l’auteur ici est le manque d’écoute et de considération de la part des professeurs envers Louis. (Erwann)

Exemples de conclusion

Pour conclure, Honoré de Balzac dénonce dans cet extrait la dureté de l’éducation qu’ont vécus les deux amis parce qu’ils étaient en avance et donc incompris de leurs enseignants. Il critique la manière de donner des pensums et de priver un élève des moments de partage et de joie que sont les récréations. (Céline)

A travers un récit romancé, Balzac dénonce une éducation stricte et liberticide qu’il a lui-même vécue. Il s’attaque notamment aux punitions inefficaces, au manque d’empathie des enseignants et à un enseignement aliénant et néfaste. Son texte apparait à la fois comme un témoignage et un réquisitoire. (N Guillerm)

Méthode de commentaire à partir du texte « Bêtes » de Voltaire

Pour réussir son commentaire :

– il faut prendre le temps d’étudier le texte !

1 découverte du texte

– Première lecture pour une compréhension globale. Souligner les mots incompris.

– Relecture, tenter de comprendre les mots soulignés en s’aidant du contexte.

2 étude du texte (même méthode que pour l’explication linéaire)

Au choix : par un tableau, ou des marginalia, ou une prise de notes

Dans tous les cas : associer des citations courtes, à une analyse et à une interprétation.

Interpréter, c’est montrer ce que veut dire l’auteur, on va plus loin que ce qu’il dit.

On étudie comment il le dit.

3 recherche d’un plan précis

Contrairement à l’explication linéaire, qui suit l’ordre du texte, le commentaire cherche à organiser les idées.

Il faut prévoir les grands axes et leurs sous-parties !

(2 ou 3 axes, de 2 ou 3 paragraphes chacun > au moins 6 paragraphes de développement)

Il faut aussi choisir une problématique.

4 on rédige

-d’abord l’introduction (en un seul paragraphe !)

Une amorceDe nombreux philosophes des Lumières ont cherché au XVIII° siècle à faire évoluer les mentalités.
Une présentation du texte (auteur, titre, date de parution, contenu)C’est dans ce cadre que Voltaire a écrit son Dictionnaire philosophique, en 1764. Dans son article « bêtes », il réfute la théorie de Descartes selon laquelle les animaux seraient des machines.
Une problématiqueNous nous demanderons comment Voltaire démonte la théorie de Descartes.
L’annonce d’un planPour cela nous verrons d’abord… Nous montrerons ensuite ..

– puis la conclusion au brouillon (réponse à la problématique en reprenant les idées des grands axes + ouverture)

– on rédige le développement en suivant précisément son plan.

Chaque paragraphe commence par présenter l’idée. Puis on s’appuie sur des citations courtes analysées pour développer son interprétation.

On pense à faire des transitions.

On soigne l’écriture pour faciliter la lecture de la copie. On soigne la syntaxe (forme des phrases) et l’orthographe ! C’est un devoir de français, donc il faut montrer sa maîtrise du langage.

Texte entrainement au commentaire : Bêtes de Voltaire

Voltaire s’attaque dans cet article à la théorie élaborée par Descartes selon laquelle les animaux sont des ” machines “.

B Ê T E S

Quelle pitié, quelle pauvreté, d’avoir dit que les bêtes sont des machines privées de connaissance et de sentiment, qui font toujours leurs opérations de la même manière, qui n’apprennent rien, ne perfectionnent rien, etc. !

Quoi ! cet oiseau qui fait son nid en demi-cercle quand il l’attache à un mur, qui le bâtit en quart de cercle quand il est dans un angle, et en cercle sur un arbre ; cet oiseau fait tout de la même façon ? Ce chien de chasse que tu as discipliné pendant trois mois n’en sait-il pas plus au bout de ce temps qu’il n’en savait avant les leçons ? Le serin à qui tu apprends un air le répète-t-il dans l’instant ? n’emploies-tu pas un temps considérable à l’enseigner ? n’as-tu pas vu qu’il se méprend et qu’il se corrige ?

Est-ce parce que je te parle que tu juges que j’ai du sentiment, de la mémoire, des idées ? Eh bien ! je ne te parle pas ; tu me vois entrer chez moi l’air affligé, chercher un papier avec inquiétude, ouvrir le bureau où je me souviens de l’avoir enfermé, le trouver, le lire avec joie. Tu juges que j’ai éprouvé le sentiment de l’affliction et celui du plaisir, que j’ai de la mémoire et de la connaissance.

Porte donc le même jugement sur ce chien qui a perdu son maître, qui l’a cherché dans tous les chemins avec des cris douloureux, qui entre dans la maison, agité, inquiet, qui descend, qui monte, qui va de chambre en chambre, qui trouve enfin dans son cabinet le maître qu’il aime, et qui lui témoigne sa joie par la douceur de ses cris, par ses sauts, par ses caresses.

Des barbares saisissent ce chien, qui l’emporte si prodigieusement sur l’homme en amitié ; ils le clouent sur une table, et ils le dissèquent vivant pour te montrer les veines mésaraïques[1]. Tu découvres dans lui tous les mêmes organes de sentiment qui sont dans toi. Réponds-moi, machiniste, la nature a-t-elle arrangé tous les ressorts du sentiment dans cet animal, afin qu’il ne sente pas ? a-t-il des nerfs pour être impassible ? Ne suppose point cette impertinente contradiction dans la nature.

Dictionnaire philosophique, article ” Bêtes “, Voltaire, 1764


[1] Veine qui recueille le sang du gros intestin

Explication linéaire 3 début du Postambule d’Olympe de Gouges

Olympe de Gouges, Déclaration des droits de la femme et de la citoyenne (1791), Début du « Postambule » (adresse aux femmes)

Femme, réveille-toi ; le tocsin[1] de la raison se fait entendre dans tout l’univers ; reconnais tes droits. Le puissant empire de la nature n’est plus environné de préjugés, de fanatisme[2], de superstition et de mensonges. Le flambeau de la vérité a dissipé tous les nuages de la sottise et de l’usurpation[3]. L’homme esclave a multiplié ses forces, a eu besoin de recourir aux tiennes pour briser ses fers[4]. Devenu libre, il est devenu injuste envers sa compagne. Ô femmes ! Femmes, quand cesserez-vous d’être aveugles ? Quels sont les avantages que vous avez recueillis dans la Révolution ? Un mépris plus marqué, un dédain plus signalé. Dans les siècles de corruption vous n’avez régné que sur la faiblesse des hommes. Votre empire est détruit ; que vous reste-t-il donc ? La conviction des injustices de l’homme. La réclamation de votre patrimoine, fondée sur les sages décrets de la nature ; qu’auriez-vous à redouter pour une si belle entreprise ? Le bon mot du Législateur des noces de Cana[5] ? Craignez-vous que nos législateurs français, correcteurs de cette morale, longtemps accrochée aux branches de la politique, mais qui n’est plus de saison, ne vous répètent : femmes, qu’y a-t-il de commun entre vous et nous ? Tout, auriez-vous à répondre. S’ils s’obstinent, dans leur faiblesse, à mettre cette inconséquence[6] en contradiction avec leurs principes ; opposez courageusement la force de la raison aux vaines prétentions de supériorité ; réunissez-vous sous les étendards[7] de la philosophie ; déployez toute l’énergie de votre caractère, et vous verrez bientôt ces orgueilleux, non serviles[8] adorateurs rampants à vos pieds, mais fiers de partager avec vous les trésors de l’Être Suprême[9]. Quelles que soient les barrières que l’on vous oppose, il est en votre pouvoir de les affranchir ; vous n’avez qu’à le vouloir.


[1] Tocsin : sonnerie de cloche qui sert à donner l’alarme (en cas de guerre notamment).

[2] Fanatisme : attachement passionné à une doctrine (souvent religieuse) ou à une cause qui conduit à l’intolérance et à la violence. La lutte contre le fanatisme est un aspect important de la pensée des Lumières. Elle est très présente en particulier chez Voltaire.

[3] Usurpation : appropriation illégitime, vol.

[4] Les femmes ont en effet participé activement, aux côtés des hommes, aux journées révolutionnaires.

[5] Référence à l’épisode biblique du mariage de Cana, au cours duquel Jésus a transformé l’eau en vin donnant un premier signe de sa nature divine. Lorsque sa mère, Marie, lui signale que les invités des noces n’avaient plus de vin, Jésus lui répond : « Que me veux-tu, femme ? ». Il lui dit aussi : « Il y a de toi à moi une grande différence, je suis le Dieu vivant, tu n’es qu’une créature. »

[6] Inconséquence : manque de logique, incohérence.

[7] Étendard : enseigne servant de signe de ralliement, notamment à des régiments militaires.

[8] Servile : soumis.

[9] L’Être suprême : Dieu, considéré comme le créateur de la nature.

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