La Marseillaise dans tous ses états!

Marche des Marseillois chantée sur diferans theatres, Londres, W. Holland, 1792 (source: wikimedia commons)
Nous avons vu en classe que la République française est représentée par des symboles qui permettent de l’identifier en tant qu’Etat et nation. Le drapeau (emblème national inscrit dans la constitution de 1958), la devise (Liberté, Egalité, Fraternité), l’allégorie (Marianne) et l’hymne (La Marseillaise) sont issus de la Révolution française (qui débute en 1789) et ont été progressivement adoptés, notamment au cours de la IIIème République (1870-1940).
La Marseillaise est peut-être le symbole qui fait encore aujourd’hui le plus débat, notamment à cause de ses paroles que certains considèrent comme trop violentes et ne représentant plus la France.
Revenons un instant sur l’origine de ce chant de guerre devenu symbole révolutionnaire dans le monde et hymne national de la France.
Tout commence à Strasbourg en 1792. Claude-Joseph Rouget de Lisle, compositeur français né en 1760, est officier à Paris où il écrit des opéras. Il est ensuite envoyé dans différentes garnissons et notamment à Strasbourg où le maire de la ville, Frédéric de Dietrich, lui demande en avril de rédiger un chant pour l’armée du Rhin qui va devoir combattre la coalition des armées européennes. Ce chant a alors pour titre « Chant de guerre pour l’armée du Rhin« . Rouget de Lisle n’est pas un des révolutionnaires les plus fervents (il s’oppose à l’arrestation du roi en août 1792 et échappera de peu à la guillotine sous la Terreur) mais les paroles reprennent le mot « citoyen » utilisé par les patriotes. La future Marseillaise est un chant militaire, d’abord destiné à motiver les troupes d’où le « Marchez, Marchez » qui deviendra plus tard « Marchons, Marchons » et la présence du champ lexical militaire (bataillons, soldat, etc…).
D’où vient le nom de Marseillaise ? Le chant de Rouget de Lisle est transmis avec les ordres de mission pour les différentes troupes de France. En juin 1792, François Mineur, chargé de rassembler les troupes dans le sud de la France, entonne pour la première fois le Chant de guerre pour l’armée du Rhin devant les volontaires, à Marseille. Les paroles sont ensuite diffusées par les presse. Le succès est immédiat: les soldats marseillais s’approprient le chant et l’entonnent de ville en ville, tout au long de leur périple vers le front. L’œuvre de Rouget de Lisle devient alors La Marseillaise et est reprise partout en France ; elle est enseignée sur les places publiques.
Le premier hymne de la Ière République. Dès 1793, la Convention impose de chanter La Marseillaise avant toute représentation. Le 14 juillet 1795, elle est déclarée chant national et restera un chant « sacré » jusqu’au coup d’Etat de Napoléon le 18 Brumaire an VIII (9 novembre 1799). En effet l’Empire (1804-1815) et la Restauration (1815-1830) interdiront la Marseillaise qui rappelle trop la Révolution. En 1830, elle est chantée sur les barricades et inspire le peintre Delacroix pour son célèbre tableau La liberté guidant le peuple. Elle est de nouveau interdite sous la Monarchie de Juillet (1830-1848). puis sous le Second Empire (1848-1870). Avec le retour durable de la République, la Marseillaise s’impose comme l’hymne national en 1879. Pendant la Seconde Guerre mondiale, La Marseillaise est encore malmenée sous le régime de Vichy qui lui préfère Maréchal, nous voilà!, mais elle est chantée par les résistants et accompagne la libération de Paris, le 25 août 1944. En 1946 et en 1958, la Marseillaise est inscrite dans la Constitution.
Un hymne à la liberté de dimension internationale. La Marseillaise a très tôt dépassé les frontières du territoire français, son caractère révolutionnaire lui valant d’être reprise par les combattants de la liberté en Italie, en Russie (pendant la Révolution d’Octobre 1917 elle est chantée par les bolcheviques), en Espagne (par les Républicains lors de la Guerre civile entre 1933 et 1936) ou encore dans les camps de concentration nazis. Des versions sont donc réalisées dans différentes langues, les paroles étant adaptées au contexte. L’hymne révolutionnaire par excellence, l’Internationale, a d’ailleurs été écrit sur la musique de la Marseillaise avant d’avoir sa propre musique (on en reparlera ici un peu plus tard).
La Marseillaise en débat en France. Le caractère sanguinaire et révolutionnaire des paroles de l’hymne national a très tôt été remis en question et est encore régulièrement l’objet de tentative de réécriture. De Victor Hugo à Gainsbourg, en passant par Lamartine ou Graeme Alwright, nombreux sont les artistes qui s’y sont essayé sans jamais parvenir à convaincre. La Marseillaise est inscrite dans un contexte historique violent et guerrier, il est donc logique que son texte en porte les stigmates. De plus, la référence au « sang impur », celle qui est considérée comme la plus choquante, n’est pas réellement tranchée: pour les uns il s’agit du sang de l’ennemi, ce qui conduit inévitablement à des excès meurtriers, alors que pour d’autres, ce sang est celui des combattants français qui annonceraient donc leur sacrifice, celui d’un sang impur, contre le sang pur des nobles, incarné par la coalition des monarchies européennes. Mais le débat sur la Marseillaise ne s’arrête pas au texte. Ainsi en 2003, pour répondre aux sifflets qui couvraient l’hymne national lors de matchs de football au stade de France (Saint-Denis), les députés ont voté une loi créant un délit d’outrage au drapeau et à la Marseillaise, pouvant aller jusqu’à 6 mois de prison et 7500 euros d’amende! Un autre débat, peut-être plus futile mais qui revient très régulièrement sur la scène médiatique, consiste à savoir si les joueurs des équipes nationales doivent ou non chanter la Marseillaise. Enfin, il faut rappeler que l’enseignement de l’hymne national est obligatoire à l’école primaire depuis 2005 (c’est peut-être parce qu’ils ne l’ont pas apprise que les joueurs de football, pour ne pas les nommer, ne chantent pas toujours l’hymne!).
Des reprises en tous genres. La playlist ci-dessous rassemble plusieurs versions de la Marseillaise, de la version reggae de Serge Gainsbourg (Aux armes et caetera en 1979) à la version opéra de Jessye Norman (à l’occasion du bicentenaire de la Révolution, en 1989) en passant par la version jazz-manouche de Django Reinhardt et Stéphane Grappelli ou l’hymne de Springfield (la ville des Simpson) qui reprend l’air de notre hymne. Vous y trouverez également des tentatives de réécriture (Charlélie Couture ou Yannick Noah). Il en existe bien d’autres et si vous avez des propositions n’hésitez pas à en faire part en laissant la référence dans un commentaire .
Sources et liens:
- « La Marseillaise » sur wikipédia
- « La Marseillaise » dans l’émission Ces chansons qui font l’histoire, à écouter sur le site de France Info
- « L’hymne national » sur le site elysee.fr
- « La Marseillaise » sur le site de l’Assemblée nationale
Commentaires récents